« Il s'agissait d'un individu aux traits plutôt lourdauds, pourvu d'un poil châtain trop abondant, touffu, ondulant, plutôt cotonnant, portant favoris, barbu mais point moustachu. Un fin sillon blafard balafrait son pli labial. Un sarrau d'Oxford sans col apparaissait sous un tricot raglan marron à trois boutons fait du plus fin whipcord. Ça lui donnait un air un brin folklorain[1]. »
Son travail, qui a donné lieu à de très nombreuses études, s'organise autour de quatre axes : romanesque, autobiographique, sociologique et ludique. Mais partout transparait le manque originel : celui de son père, tué à la guerre, celui de sa mère, disparue lors de son transport versAuschwitz.
Si Georges Perec est surtout connu pour ses romans et récits, il a également composé des poèmes, des pièces théâtrales ou radiophoniques, et a fait quelques incursions dans le domaine du cinéma.
Sa mère, Cyrla Szulewicz[a], dont le prénom est francisé en Cécile, arrive en France depuisVarsovie avec ses parents au début desannées 1920 à l'âge de 7 ans. Elle tient plus tard un salon de coiffure, puis de 1941 à 1942 est ouvrière dans l'usine d'horlogerieJaz àPuteaux[4]. Son père, Icek Judko (devenu Isie ou André) Perec[b], né en 1909, arrive en France à la fin des années 1920, en provenance deLubartów. Il exerce divers métiers, livreur, tourneur, mouleur, fondeur[5],[3]. Toute la famille vit àBelleville[6],rue Vilin. La grand-mère paternelle y tient un magasin d'alimentation, le grand-père maternel est marchand des quatre-saisons, la mère de Perec y ouvre un salon de coiffure au n° 24[5].
Engagé volontaire dans laLégion étrangère[7], Icek Perec est mortellement blessé par un obus le[8]. Vers le printemps 1942[9],[7], la mère du petit Georges l’envoie enzone libre àVillard-de-Lans, où s'est réfugiée une partie de sa famille paternelle, sa tante Esther et son mari David Bienenfeld. Il est placé dans un home d'enfants, Le Clos Margot, puis dans un pensionnat catholique, où il est baptisé le 30 octobre 1943[c],[10].
Georges retourne àParis pour la rentrée1945[12]. Il est pris en charge par les Bienenfeld jusqu'en 1957. Ils habitent au 18rue de l'Assomption[13], possèdent une bijouterie[14] et ont deux filles, dont l’écrivaineBianca Lamblin.
En octobre 1958, Georges Perec reçoit l'avis officiel de la mort de sa mère« le 11 février 1943 àDrancy ». Le 17 novembre 1959 un décret déclare que« si elle avait été française, elle aurait eu droit à la mentionMort pour la France. » Cela lui vaut d'être libéré de ses obligations militaires[25],[26].
À Paris, en1959, Georges Perec rencontrePaulette Pétras, étudiante à la Sorbonne. Ils se marient le[27]. Paulette étant nommée pour deux ans enseignante àSfax enTunisie, le couple s'y installe mais revient en France l'année suivante[28],[29].
Perec devient en 1961documentaliste enneurophysiologie auCNRS[30]. Il est entièrement libre de ses horaires, à condition de boucler le travail qu'on lui demande. Après un incendie qui a détruit le labo, il est contraint d'aller travailler, à partir de 1976, àGif-sur-Yvette. Il obtient de son nouvel éditeur,Paul-Otchakovsky-Laurens, d'être mensualisé, et peut quitter le CNRS en 1978[31].
Après une liaison tourmentée avecSuzanne Lipinska[e], propriétaire duMoulin d'Andé, où il passe la majeure partie de l'année 1968, Georges Perec se sépare de Paulette en1969, mais ils ne divorcent formellement qu'en 1980[34],[35].
Bernard Magné avoue ressentir un« pessimisme classificatoire » face à un écrivain dont l'ambition avouée était de remplir un tiroir de laBibliothèque nationale, d'utiliser tous les mots de la langue française, d'écrire tout ce qu'il est possible à un homme d'aujourd'hui d'écrire, mais de ne jamais écrire deux livres semblables[41].« Programme tranquillement audacieux, plaisamment mégalomane, avec cette exigence continue de déplacement et de dépassement, avec cette avidité créatrice », commente Claude Burgelin[42].
Aucune des premières œuvres de Perec n'est publiée de son vivant.
Son premier texte connu est une nouvelle de quatre pages intituléeLes Barques et dédiée à son ami Jacques Lederer. Tentative de pratique descriptive dans le style dunouveau roman, c'est un récit circulaire qui fige le détail des objets perçus et des itinéraires entrepris par le narrateur[43].
Manderre, autre nouvelle de jeunesse, datée de décembre 1956 et dédiée à son ami Zoran Petrović, peintre yougoslave, est un pastiche dePaludes, d'André Gide[f].
Les Errants, terminé en 1956,« raconte l'histoire de quatre jazzmen blancs américains qui partent auGuatemala pour se battre avec les insurgés[44] » après lecoup d'état orchestré par laCIA et la compagnieUnited Fruit. Son modèle d'écriture estDos Passos[45].
« Pas très crédible et assez maladroitement ficelé[46] »,L'Attentat de Sarajevo est écrit enYougoslavie lors de l'été 1957 et publié en 2016. Composé en partie double, comme devait l'être par la suiteW, il subit l'influence d'Obaldia, dont laFugue à Waterloo avait beaucoup impressionné Perec. Il croise deux récits, une histoire d'amour, et une description minutieuse de la préparation du meurtre de l'archiduc François-Ferdinand[47].
Le Condottière, publié en 2012, raconte l'histoire deGaspard Winckler, un« faussaire de génie » qui, n'ayant pas réussi à produire un fauxtableau d'Antonello de Messine, tue Madera, son commanditaire. La première partie commence après le meurtre de Madera et décrit l'évasion de Winckler, avec des passages consacrés au meurtre et aux réflexions du héros sur la vie et sur l'art. La deuxième partie, contenant la confession de Winckler, est construite en chapitres alternant dialogues et monologues et inclut un essai surAntonello de Messine. La troisième partie ne fournit ni solution ni conclusion, mais amène le lecteur au seuil de la nouvelle vie de Gaspard Winckler, qui peut soit devenir un vrai peintre, soit abandonner la peinture[49]. Le livre est souvent encombré de moments de piétinement, mais s'allège et se concentre sur l'essentiel au fur et à mesure qu'il avance.« Il devient même, si on le lit comme le combat du jeune Perec contre ses chaînes, poignant[50]. »
Publié en 1965, couronné par leprix Renaudot,Les Choses, une histoire des années soixante met en scène Jérôme et Sylvie, qui gagnent leur vie en faisant desenquêtes d’opinion. Mais cette vie étriquée ne les satisfait pas. Pris dans le tourbillon des objets, meubles, vêtements, bijoux, ils n’ont qu’un rêve : avoir assez d’argent pour se les offrir. Non pasdevenir riches, maisêtre riches, et garder ainsi ce qu’ils croient être leur liberté. Cette obsession devient leur vie et la résume. Ils tentent de la fuir en se faisant enseignants enTunisie, mais n’y trouvent que le vide. À leur retour, ils acceptent de n’obtenir que des miettes, en se faisant salariés.
« J'ai tenté de faire une sorte de description de ce qu'on a appelé « lasociété de consommation ». C'était donc ma propre expérience à laquelle je donnais, simplement, un caractère général. Ma démarche n'était pas celle d'un sociologue parce qu'elle allait vers une description de la société dans laquelle je baignais. C'était une sorte d'étude du monde qui m'environnait[51]. »
Le roman est construit en référence àL'Éducation sentimentale deFlaubert : reprises de scènes, — vente aux enchères, voyage en bateau —, reprise de phrases sans guillemets, rythme ternaire[52]. Le romanesque provient moins des péripéties que vivent les personnages que d'une oscillation entre ironie et connivence[53].
Jean Duvignaud considère que l'immense succès desChoses tient à cet état de prédisposition dans lequel s'est reconnu toute une génération.« Les Choses cristallisent une expérience – l'incoercible difficulté d'exister dans lesannées 60. Sans doute, pour y parvenir fallait-il ce style simple, ces phrases courtes, ce refus de céder à la rhétorique ou même à l'émotion – et pour tout dire cet éloignement de soi[54]. »
Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?
L'écriture semble gratuite, purement ludique, dans un texte saturé dejeux de mots et de fleurs derhétorique[g], torturé, trituré, déformé, crucifié[56]. Perec commet deux infractions majeures aux règles habituelles du roman d'aventures : la non-clôture de la dernière séquence narrative, et la disparition finale du personnage central du récit. Il donne aussi un avant-goût des mécanismes ludiques qu'il exploitera dans le reste de son œuvre[57]. Car« c'est au bout du compte un livre très roué derrière le festival de facilités qui s'y exhibe. Perec met là au point une stratégie qui réapparaîtra : semblant raconter une histoire, il en propose, ce faisant, une autre ou une tout autre manière de la lire[58]. »
DansUn homme qui dort, publié en 1967, Perec tutoie son personnage, un étudiant qui se renferme sur lui-même, dans sa chambre. Tout y est gris, sauf une « bassine de matière plastique rose », dont la couleur tranche avec le reste du roman. Le narrateur décrit les errements d'une « personne qui souffre » tout en éliminant les indices d'une éventuelle identification personnage-auteur[59].
« Les Choses, c'est tout ce que l'on peut dire à propos de la fascination qu'exercent les objets.Un homme qui dort, c'est tout ce que l'on peut dire à propos de l'indifférence[52]. »
La prouesse de Perec est de transformer en roman ce qui est le contraire même du romanesque : une grève de la vie sociale[60]
Paru en 1969, deux ans après l'entrée de Perec à l'Oulipo,La Disparition est unroman enlipogramme[h] qui, sur près de trois cents pages, ne comporte pas une seule fois lalettree, pourtant la plus utilisée dans la langue française. Partant de sa propre contrainte, le roman décrit les événements tragiques qui suivent la disparition d'Anton Voyl (Antoine Voyelle). Les personnages se heurtent sans cesse aux limitations provenant du symbole manquant, et finissent par mourir dès qu'ils s'approchent trop de la vérité.
L'absence due, loin d'être un obstacle à l'invention romanesque, en démultiplie les pouvoirs : c'est grâce au lipogramme et non malgré lui, que le« scriptor, qui n'avait pas un carat d'imagination » se montre« aussi imaginatif qu'unPonson » et que la contrainte devient« un filon fort productif, stimulant au plus haut point l'innovation[61]. »
Maurice Corcos considèreLa Disparition comme un texte musical :« Relire à voix haute le texte, l'on entend ce que l'on avait seulement perçu : qu'il aura suffi d'endeuiller la langue par l'amputation d'une pour atteindre à la vocalité d'un chant. Le langage atteint une autre dimension car il devient incantation[62]. »
Le critique met des années à s'apercevoir que derrière ces jeux de massacre autour de la lettre interdite se dessine une fable autour dugénocide des juifs. Tous les personnages sont marqués d'un signe fatal et meurent au moment de découvrir ce qu'il en est de leur origine[63].
Contrepoint deLa Disparition, le textedesRevenentes n'emploie que la voyellee pour mettre en scène le dérèglement des sens et l'entremêlement des sexes près de l’évêché d'Exeter[64].
Le texte ne fonctionne pas comme d'autresmonovocalismes de Perec, par exempleWhat a man, où la syntaxe est strictement respectée. Perec joue la contradiction ouverte, en multipliant les écarts par rapport à la langue, pour voir jusqu'où le fonctionnement textuel peut aller dans sa remise en cause du linguistique sans que soit compromise la relation pragmatique avec le lecteur[65]. Peu à peu les règles du texte l'emportent sur celles de langue, autorisant des graphies de plus en plus fantaisistes. C'est ainsi une tentative limite dans l'écriture du roman lipogrammatique[66].
Les 99 chapitres deLa Vie mode d'emploi, sous titréeRomans, décrivent les pièces en façade d'un immeuble parisien (décoration, meubles, objets, œuvres picturales) et les personnages s'y trouvant le 23 juin 1975 peu avant 20 heures. Dans la plupart des chapitres sont insérées les histoires des occupants, actuels ou passés, et de personnages qui leur sont liés. Le lecteur découvre alors « une longue cohorte de personnages, avec leur histoire, leur passé, leurs légendes », comédie humaine où les destins entrecroisés se répondent, à l'image de la curieuse création de l'ébéniste Grifalconi, « fantastique arborescence, réseau impalpable de galeries pulvérulentes[67]. »
La construction du roman répond à de multiples contraintes : leproblème du cavalier détermine l'ordre des chapitres ; unbi-carré latin gouverne la distribution des 42 éléments obligatoires pour chaque chapitre ; une quenine[68] régit la répartition des citations et des allusions littéraires et picturales.
Perec n'invente pas les contraintes principales deLa Vie mode d'emploi, il les puise hors de l'héritage littéraire traditionnel. Mais il leur donne une place particulière dans l'écriture de son roman : combinées au sein d'un système complexe, elles ne produisent pas directement le texte — comme c'était le cas dansLa Disparition — mais construisent un échafaudage, discret et dissimulé, que viennent ensuite remplir histoire et personnages[69].
Le lecteur découvre une multiplicité de récits alternés, un kaléidoscope narratif qui nécessite sa coopération interprétative. Il doit glaner dans le texte des informations supplémentaires pour organiser des séquences cohérentes, lui donner sens, l'ordonner, reconstituer les histoires et faire son propre texte[70]. Mais comme le fait remarquerJacques Roubaud, le roman peut être lu à la fois savamment et innocemment, sans préalable, à la vitesse du lecteur, qui ne saurait être celle du critique ou du chercheur[71].« Notre rire vient à la fois du plaisir et d'un grand étonnement. Nous admirons cette profusion mais nous nous interrogeons : nous mène-t-il en bateau ? Ces gens-là ont-ils réellement existé ? Le livre de Perec nous oblige continuellement à mettre en question notre sentiment de ce qui est probable et de ce qui, tout en étant sans doute réel, devient improbable[72]. »
Le roman obtient lePrix Médicis 1978. « Entrez dans cet immeuble et vous ferez le tour du monde en six cent deux pages et quatre-vingt-dix-neuf chapitres plus un épilogue. Un vertige majuscule. Quand on en sort, on se sent léger comme une montgolfière[73]. »
Un cabinet d'amateur, histoire d'un tableau, est moins l'histoire du tableau évoqué en sous-titre que l'histoire d'une mystification dont ce tableau est la pièce maîtresse. Celui-ci représente Hermann Raffke, riche collectionneur de peinture, assis devant les tableaux qu'il préfère. Mis en vente après la mort de leur propriétaire, tous les tableaux reproduits que personne, avant la vente, n'avait pu voir autrement que sous la forme de leurreproduction en abyme, atteignent des prix astronomiques. Quelques années plus tard, le neveu de Raffke informe les acheteurs que les tableaux sont faux et qu'il en est l'auteur[74].
Construction à tiroirs gigognes, à double ou multiples fonds, où l'espace et la perspective prennent le pas sur le déroulement linéaire de la temporalité romanesque, l'ouvrage peut être considéré comme untrompe-l’œil textuel[75]. Ce n'est plus le modèle qui est garant de la fidélité de la toile, mais la toile qui atteste la réalité du modèle[74].
Dans la nouvelleLe Voyage d'hiver, un professeur de Lettres, Vincent Degraël découvre par hasard un livre intituléLe Voyage d'hiver, écrit par un certain Hugo Vernier. C'est« une prodigieuse compilation des poètes de la fin duXIXe siècle, uncenton démesuré, une mosaïque dont chaque pièce était l’œuvre d'un autre[76]. » L'ouvrage ayant été publié en 1864, Degraël en déduit que lesVerlaine,Rimbaud, Mallarmé et autresBaudelaire ne sont que desplagiaires de Vernier. Pour en apporter la preuve, son exemplaire ayant été perdu pendant ladeuxième guerre mondiale, il en cherche un autre pendant 30 ans mais, incapable de le trouver, meurt dans un hôpital psychiatrique.
Cette nouvelle« ramasse en quelques pages l’œuvre de Perec : le plaisir des enquêtes se mêle au désir de savoir ; la fascination du romanesque va de pair avec l'anatomie de la lecture ; et l'ombre de laseconde guerre mondiale continue de battre en brèche l'ambition de totalité à force de lacunes et de pertes[77]. »
Inachevé,« 53 jours » est publié à titre posthume en 1989. Le titre ferait référence àLa Chartreuse de Parme, roman deStendhal écrit en cinquante-trois jours. Le héros, l'écrivain Robert Serval, a laissé un manuscrit inachevé nomméLa Crypte,roman policier en deux parties dont la seconde détruit méticuleusement tout ce que la première s’est efforcée d’établir.
« Écrire : essayer méticuleusement de retenir quelque chose, de faire survivre quelque chose : arracher quelques bribes précises au vide qui se creuse, laisser, quelque part, un sillon, une trace, une marque ou quelques signes[78]. »
Parue en 1973,La Boutique obscure est la transcription de 124 rêves, suivis d'un index de 17 pages intitulé« repères et repaires ». Perec les publie « pour embêter son psychanalyste[79]. Plus tard, il déclare avoir« fini par admettre que ces rêves n'avaient pas été vécus pour être rêves, mais rêvés pour être textes[80]. »
Jean Duvignaud s'interroge :« Est-ce un recueil de rêves ? l'écriture à propos de rêves ? Où commence le fantasme ? où finit la fabulation ? Sérieusement, nul ne peut le dire. Ce constat révèle moins l'inconscient qu'il ne nous place en tête à tête avec le jeu de l'imaginaire[81]. »
Dans la partie autobiographique, un narrateur hypercritique traque l'erreur, l'inexactitude, l'affabulation, dépiaute les souvenirs de tous leurs oripeaux, leur fait passer des interrogatoires sévères, leur braque dans les yeux les projecteurs de la vérité[81].
Claude Burgelin distingue quatre récits : l'enfance (dite longtemps « sans souvenirs ») d'avant la séparation avec la mère ; l'enfance d'après cette séparation, avec l'inégal bourgeonnement des souvenirs, comme s'il y avait là deux enfances disjointes ; l'histoire deGaspard Winckler, abruptement coupée, elle aussi ; l'histoire de l'île de W[82].
La principale particularité de cette autobiographie est l'entrecroisement des souvenirs d'enfance et du récit fictionnel[83]. Leur frontière est bien moins claire qu'on ne l'aurait cru au départ[84]. Perec met en place les éléments forts de son histoire et de safantasmatique sous forme de dérives et d'échouages ou bien de morceaux et de fragments, tenus par le fil de l'écriture[85]. Il se trouve ainsi les points d'attache et de suspension qui l'empêchent de tomber dans le vide[86].
« « Je n'ai pas de souvenirs d'enfance » : je posais cette affirmation avec assurance, avec presque une sorte de défit. L'on n'avait pas à m'interroger sur cette question. Elle n'était pas inscrite à mon programme. J'en étais dispensé : une autre histoire, la Grande, l'Histoire avec sa grande hache, avait déjà répondu à ma place : la guerre, les camps[87]. »
« Lire W est une vraie torture. C'est une autobiographie psychanalytique, un montage de symptômes auquel le lecteur doit collaborer pour accéder à l'insupportable, à cette vérité qui n'est pas dite et qu'il doit prendre en charge[88]. »
19 épisodes de la partie fictionnelle paraissent d'abord dansLa Quinzaine Littéraire d'octobre 1969 à août 1970, puis s'interrompent brutalement[89]. Il faut attendre cinq ans pour que soit rédigée la partie autobiographique et que les deux parties soient liées[i],[81].
Ce recueil publié en 1978, qui se situe« au degré zéro de la nostalgie[90] », rassemble 480 bribes de« souvenirs communs et inessentiels[91] » mêlant cinéma, objets quotidiens, actualités, souvenirs de famille, slogans publicitaires, littérature ou sport, situés entre 1946 et 1961[92]. L'idée en est venue à Perec en lisantI remember deJoe Brainard.
Oscillation entre l'autobiographie discrète et la part d'unanimisme que sous-tend la mémoire collective[92],Je me souviens est un déclencheur de la subtile machine à se souvenir, d'une jouissance de la mémoire[93].
Jean-Denis Bertharion considère l'ouvrage comme un« cryptogramme autobiographique » mêlant des souvenirs personnels et uniques à des souvenirs généraux, parfois moins innocents qu'ils en ont l'air, mais munis d'un système de protection efficace, empêchant lamentation et pathos. Les entrées caractérisées par un marquage autobiographique très fort sont comme dissimulées dans la masse des souvenirs communs en apparence banals[94].
« C'est pour moi le lieu même de l'exil, c'est-à-dire le lieu de l'absence de lieu, le lieu de la dispersion. En ce sens il me concerne, me fascine, m'implique, me questionne, comme si la recherche de mon identité passait par l'appropriation de ce lieu dépotoir où des fonctionnaires harassés baptisaient desAméricains à la pelle, comme s'il était inscrit quelque part dans une histoire qui aurait pu être la mienne, comme s'il faisait partie d'une autobiographie probable, d'une mémoire potentielle[95]. »
Robert Bober filme sur place, en présence de Georges Perec qui réclame parfois quelques plans et qui compose son texte au regard d'un montage image presque finalisé[96]. Ce texte est relativement hétérogène : la première section, prosaïque, est consacrée à l'histoire d'Ellis Island ; la deuxième, versifiée, décrit le chemin emprunté par les émigrants, puis le lieu lui-même ; la troisième partie est occupée par une réflexion sur la judéité[97].
Ce ne sont en rien des repères, des racines ou des traces mais le contraire : quelque chose d'informe, à la limite du dicible, quelque chose que je peux nommer clôture ou scission, ou coupure, et qui est peut-être pour moi très intimement et très confusément lié au fait même d'être juif[98].
Le dialogue avec les images pousse Perec à débrider un peu son écriture et à assumer une vision plus personnelle, à moins se retrancher derrière la neutralité descriptive qui caractérise la plupart de ses autres textes concernant les lieux, à se laisser aller à une forme de lyrisme contenu et à mettre en scène la recherche d'un questionnement[99].
Commencé en 1967 par de longs entretiens avec sa tante Esther,L’Arbre devait être« la description la plus précise possible de l'arbre généalogique de mes familles paternelle, maternelle et adoptive, récit non linéaire difficile à lire à la suite, mais au travers duquel il sera possible de retrouver (en s'aidant d'un index, qui sera non un supplément mais une véritable et même essentielle partie du livre) plusieurs histoires se recoupant sans cesse[100]. » Recentré en 1976 sur la famille paternelle, le texte est brutalement abandonné et n'est jamais repris, même s'il est toujours présent dans les projets que Perec détaille en 1980. SelonRégine Robin, cet abandon s'explique par le transfert de nombreux éléments dansW ou le souvenir d'enfance, par la reprise de la structure avec index dansLa Vie mode d'emploi, et par la fin — fructueuse, semble-t-il — de la psychanalyse avecJ.B. Pontalis et une certaine mise à distance de la famille[101].
Lieux est un projet mi-ethnographique, mi-autobiographique consistant à décrire, pendant douze ans, et suivant des algorithmes particuliers, douze lieux parisiens de manière à disposer de 288 textes conservés dans des enveloppes, que Perec n'ouvrirait qu'à la fin du projet. Celui-ci est abandonné en 1975.
« J'ai choisi 12 lieux dans Paris, ou bien dans lesquels j'ai vécu, ou bien auxquels me rattachaient des souvenirs particuliers. J'ai entrepris de faire, chaque mois, la description de deux de ces lieux. L'une des descriptions se fait sur le lieu même, l'autre dans un endroit différent : je m'efforce alors de décrire le lieu de mémoire. Lorsque ces descriptions sont terminées, je les glisse dans une enveloppe que je scelle[102]. »
Si Perec tente de renouer avec le degré zéro de la description, en deçà du règne de l'image, du récit et du spectacle[103],« ces descriptions harassantes témoignent d'un effort permanent de tenter de relier entre eux des lieux morcelés, comme dans les listes il tente de relier des objets hétérogènes. En décrivant méticuleusement des lieux voués à disparaître, lui pour qui n'existe que le passé dans le présent, il donne à voir au lecteur, sans éblouir ses yeux de trop de spectaculaire, au risque de les rendre aveugles[104]. »
À côté du Perec romancier ou du Perec oulipien apparaît un Perec essayiste et un Perec chercheur en sciences humaines. Mais il se glisse à travers les catégories pour les détourner ou les penser avec d'autres mots. Passant outre aux définitions ou aux projets de ces disciplines, il les aborde par l'expérience concrète, par le lexique du quotidien, les interrogations comme enfantines, par la singularité comme inapparente de sa mise en mots, la simplicité de ses inventaires et de ses classements. Ce faisant, il lance entre les sciences humaines et la littérature toutes sortes de passerelles[105].
« Ce qui se passe chaque jour et revient chaque jour, le banal, le quotidien, l'évident, le commun, l'ordinaire, l'infra-ordinaire, le bruit de fond, l'habituel, comment en rendre compte, comment l'interroger, comment le décrire ?[106]. »
Perec fournit la réponse :
« Décrivez votre rue. Décrivez-en une autre. Comparez. Faites l'inventaire de vos poches, de votre sac. Interrogez-vous sur la provenance, l'usage et le devenir de chacun des objets que vous en retirez. Questionnez vos petites cuillers[107]. »
PourMaxime Decout, cet infra-ordinaire est une zone liminaire imperceptible, précieuse et fragile, qui apparaît comme extra-sensible parce que cachée, oubliée, négligée. Il est toujours surprenant et par conséquent extra-ordinaire, c'est-à-dire hors de ou au-delà de nos habitudes ordinaires[108].
Selon Maryline Heck, le geste primitif et essentiel de l'infra-ordinaire, cette proposition de regarder autrement, de prêter attention au minuscule, au «bruit de fond » de nos existences, s'élaborecontre un autre regard, celui que la société, les médias construisent pour nous. Perec formulerait ainsi un programme d'éducation du regard à contre-courant de nos routines mentales et de ce que peuvent exiger les sociétés occidentales (rapidité, efficacité) ou la littérature (originalité, hauteur de vue ou de style)[109].
Espèces d'espaces, publié en 1974, se présente comme « le journal d’un usager de l’espace[110] », défini comme « ce qui arrête le regard, ce sur quoi la vue butte[111]. »
Par emboîtements successifs, à la manière de poupées russes, Perec décrit d’abord la page sur laquelle il écrit, puis le lit, la chambre, l’appartement, l’immeuble, la rue, le quartier, la ville, la campagne, le pays, l’Europe, le monde, l’ESPACE[j], avant de tenter de définir l’inhabitable, puis de revenir brutalement à la page – et à l’écriture.
L'ouvrage incite à une prise de pouvoir ludique, à une réévaluation à contre-courant du milieu vécu au terme desquelles les espaces « conçus » pour telle ou telle fonction pourront être « habités »[112]. Car seul notre étonnement face au monde peut sortir le quotidien de notre état d'indifférenciation et restituer sa parole[113].
« L'espace fond comme le sable coule entre les doigts. Le temps l'emporte et ne laisse que des lambeaux informes. Écrire : essayer méticuleusement de retenir quelque chose, de faire survivre quelque chose[114]. »
Dès le premier chapitre s'inaugure un vertige, celui d'une autoréflexivité sans fin qui, contenue dans l'acte graphique même, dans la trace du stylet sur la page, se met instantanément à déborder l'écriture. Un vertige qui ne se fixe qu'à peine, qui, surgi de l'écriture comme il peut surgir de l'espace, semble ne plus devoir finir[108].
Perec poursuit sa réflexion dans d'autres textes, commeDe quelques emplois du verbe habiter ouDe la difficulté qu'il y a à imaginer une Cité idéale.
P.A.L.F. (Production Automatisée de Littérature Française), également nommée L.S.D. (Littérature Semi Définitionnelle) est un travail mené de 1967 à 1973 par Georges Perec etMarcel Bénabou, à l'origine de leur cooptation à l'Oulipo[116]. Il s'agit de prouver que lelangage tourne en rond et fonctionne en circuit clos. Le sens des mots, tel qu'il figure dans lesdictionnaires, est chose tellement incertaine qu'unénoncé donné peut être transformé en n'importe quel autre au terme d'une succession donnée d'équivalences. Ainsi chaque mot de chaque phrase est remplacé par une des définitions qu'en donne ledictionnaire Littré. La multiplication des mots porteurs de sens produit un effet de surcharge, de saturation puis de rupture : lasyntaxe de la phrase initiale s'effondre et disparaît. Pour cela, les définitions sont choisies dans lechamp sémantique le plus éloigné possible du champ initial[117].
Soit la phrase : La marquise sortit à cinq heures au mot marquise, nous trouvons : «Toit avancé soutenu par des piliers » au mot sortir : « Être mis en vedette » au mot « cinq heures » : « Heure du thé » ce qui nous donne : Le toit avancé soutenu par des piliers fut mis en vedette à l'heure du thé. Puis : La couche supérieure qui touche à son terme sans familiarité avec les fourches patibulaires est la sentinelle exacte qui croit à la Chine (etc.)[118]
Organigramme deL'Augmentation
En 1967-1968, l'Oulipo travaille sur la littérature en arbre, la littérature combinatoire qui fait appel aux parcours dans un graphe. Les résultats peuvent être totalement différents : dansUn conte à votre façonQueneau laisse au lecteur l'initiative du parcours, alors que dansL'Art et la manière d'aborder son chef de service pour lui demander une augmentation Perec met bout à bout tous les parcours possibles, visant ainsi l'exhaustivité[119].
De la même manière, quandQueneau, dans lesCent mille milliards de poèmes, ne donne à lire que les 10 sonnets de base, Perec, dans ses81 fiches-cuisine à l'usage des débutants[120] et sesDeux cent quarante-trois cartes postales en couleurs véritables, utilise l'épuisement et donne toutes les recettes ou cartes postales qui peuvent être produites par chacune des structures combinatoires[119]. Cependant, l'application de cette combinatoire n'est pas purement mécanique : le classement des structures de base ne répond pas à l'ordre logique, les éléments de liste dépendent d'un algorithme particulier, les phrases subissent des opérations de condensation, de déplacement, d'ellipse ou de variations, dans une stratégie de dissimulation et de masquage. Le résultat est« au mieux un fou rire nerveux de moins en moins contrôlable, au pire un sentiment irrépressible d'exaspération croissante[121]. »
What a man est unmonovocalisme enA qui, sous la drôlerie potache, est particulièrement riche de sens et foisonne de références innombrables[122] :
Longtemps je me suis couché de bonne heure Durant un grand laps l'on m'alita tôt Parfois, je ne m'étendai pas trop tard Comme il faisait une chaleur de 33°[p], je me suis couché tôt.
Perec pastiche tout : titres de romans policiers[q], discours psychanalytique[124], critique littéraire et biographique[125]. Il se pastiche lui-même :La Disparition commence comme une traduction sanse d'Un homme qui dort.
Deux textes pastichent la littérature scientifique.Cantatrix sopranica L., rédigé en anglais, étudie l'effet d'un lancer de tomate bien mûre sur les performances musicales d'unechanteuse d'opéra. Le texte adopte le fonctionnement mental de médecins à ce point fascinés par la science qu'ils n'hésitent pas à entreprendre des expériences biologiques sur des êtres humains chosifiés dont la vie est de peu de poids[126].Distribution spatio-temporelle de Coscinoscera Victoria, Coscinoscera tigrata carpenteri, Coscinoscera punctata Barton & Coscinoscera nigrostriata d'Iputupi décrit les conditions d'une doublehybridation d'espèces voisines depapillons sur une île duPacifique. Les deux textes ne sont pas similaires : lisibilité maximale et pastiche explicite[r] pourCantatrix, lisibilité minimale et pastiche implicite pourDistribution... Mais cette déconstruction d'univers référentiels s'accompagne d'une soigneuse construction textuelle, avec des matériaux puisés aux sources les plus diverses, et un inextricable mélange de vrai et de faux[127].
PourMaxime Decout,« Pasticher, c'est se donner une origine, se faire un corps de mots, fussent-ils ceux des autres. Multiplier les pastiches, c'est autant accepter des pères que refuser de venir après, de n'être que second[128]. »
Après la parution deLa Disparition, Georges Perec écrit avecJacques Roubaud et Pierre Lusson untraité sur le jeu de go, qu'il pratique notamment aumoulin d'Andé[s]. Il est l'un des premiers joueurs de go français, bien que son niveau soit toujours resté faible[129].
« Pourquoi jouer ? [...] Sans doute, aussi, parce que l'enchevêtrement des pierres blanches et des pierres noires dessine des lignes, des réseaux, des zones agréables à regarder ; Sans doute, enfin, parce qu'il s'agit d'un chemin infini. Il n'existe qu'une seule activité à laquelle se puisse raisonnablement comparer le Go. On aura compris que c'est l'écriture[130]. »
Entre 1978 et 1981 paraissent dansLe Point plus de 200 grilles demots croisés. Perec y pratique une stratégie de l'évidence voilée, une distance entre l'énigme et sa solution. L'écart, ou le décalage, se fait jour au sein même des définitions, entre les diverses acceptions des termes qu'elle contient. L'évidence cachée fait du libellé une cachette suggestivement évidente, mystifiante et initiatique. Ainsi« Doit être rouge pour pouvoir être bleue » pourViande. Sont dissimulés desapocopes, desaphérèses, dessyncopes, dans un seul but : amener à voir autrement[131].
Tous ces poèmes sont construits à partir des 10 lettres les plus fréquentes de l'alphabet (E, S, A, R, T, I, N, U, L, O)
Ulcérations comporte 11 poèmes sans lettre supplémentaire ni joker
extrait du poème 1 d'Ulcérations
DansAlphabets, chaque poème est composé à partir des mêmes 10 lettres, plus une (et une seule) des 16 lettres restantes (B, C, D, etc.), avec parfois des contraintes supplémentaires (acrostiches,rimes). Le recueil comporte 176 poèmes de 11 vers chacun (11 poèmes en B, 11 poèmes en C, etc.) Pour Perec,« des poèmes comme ceux d'Alphabets constituent une sorte d'accès direct à l'inconscient, beaucoup plus que toute écriture automatique, beaucoup plus que toute recherche qui partirait, disons dusignifié[134]. »
Premiers vers du poème 91 d'Alphabets
DansLa Clôture[135], les 17 poèmes sont construits avec ces mêmes 10 lettres, plus une lettre joker pour chaque ligne du poème. Perec ne publie que les traductions en prose, en excluant les grilles de composition[136].
Extrait du denier poème de La Clôture de Georges Perec
Cette priorité donnée au texte sur la langue — avec modification de l'orthographe si nécessaire — , cette opacité lexicale, cette relative obscurité, cette approche difficile, rend la lisibilité seulement potentielle[137], générant chez le lecteur« cette indulgence un peu distante qu'on accorde aux prouesses réussies mais gratuites[138]. »
ouvre ces serrures caverneuses avance vers ces œuvres rares une encre ocre creuse son cerne sous sa morsure azur – aucun ressac ne navre encore ces aurores[139].
L'Éternité est une commande d'Emmanuel Hocquard de 1979. Perec met deux ans à l'écrire[u], avouant qu'il n'avait jamais autant peiné, car la contrainte est justement qu'il n'y ait pas de contrainte. Le texte fait 28 lignes, flottant sur cinq grandes pages.« C'est un poème sur une langue sans conditions, un tableau que rien n'organise, un paysage appréhendé avant le regard. Le panorama décrit est tout intérieur : « Il n'y a plus de déchirure/ni dans l'espace, ni dans moi. » Minimal et apaisé, le poème paraît très loin des proliférations oulipiennes et esquisse des potentialités de livres conceptuels et obscurs, des échos fantômes d'une langue sourde, intime et caverneuse[140] ».
Venue de l'imperceptible convexité de l’œil ce par quoi on sait que la terre est ronde l'éternité est circulaire mais plate.
Le volumeThéâtre I[v], paru en 1981 comprend deux pièces :
L'Augmentation est créée le 26 février 1970 auThéâtre de la Gaîté Montparnasse parMarcel Cuvelier et n'a que 25 représentations[141]. Il n'y a aucun décor, six personnages plus un : La proposition ; l'alternative ; l'hypothèse positive ; l'hypothèse négative ; le choix ; la conclusion ; et envoix-off deux interventions de La Rougeole[142]. La pièce est à nouveau mise en scène en 2005 parJacques Nichet[143].
La Poche Parmentier est créée en 1974 àNice par Robert Condamain[144]. Il s'agit d'une« ode auxtubercules » dans laquelle cinq personnes, enfermées depuis longtemps, consacrent leurs journées à peler et à parler de pommes de terre. Pourquoi sont-ils là ? Ils voudraient s'en souvenir.« Multipliant avec un plaisir manifeste les chausse-trappes, la pièce présente le réel comme le lieu du discontinu où tout ce que révèle le langage se dessine dans un horizon lacunaire. Les personnages tentent d'habiter ce vide que représente leur vie[145]. »
Perec traduit deux ouvrages de son amiHarry Mathews,Les Verts Champs de moutarde de l'Afghanistan (Tlooth) etLe Naufrage du stade Odradek (The Sinking of the Odradek Stadium). Ces traductions sont effectuées en« grande collaboration » avec l'auteur[146].
L'Histoire universelle devait être une vaste fresque faisant intervenir alternativement quatre récitants, chacun avec sa manière propre d'envisager les événements du passé. Le but était de brouiller le temps historique, en remplaçant l'ordre chronologique par des recours à l'ordre alphabétique et à l'ordre numérique[116].
Dans leRoman duXIXe siècle, Perec voulait construire un récit cohérent en intégrant, dans l'ordre où ils sont présentés, les fragments romanesques figurant dans leLagarde et Michard[116]. Également en projet, un roman descience-fiction dans lequel travail et argent seraient remplacés par les lettres de l'alphabet : la vie serait une interminable partie descrabble[147].
Après sa mort est publiée une partie de sa correspondance. En France celle avec son ami Jacques Lederer[148], en Allemagne celle avec son traducteurEugen Helmlé[149]. SesEntretiens et conférences sont réunis en plusieurs volumes[150],[151].
LeHörspiel est une forme radiophonique spécifiquement allemande. Nidramatique radio au sens théâtral du terme, ni pièce musicale, c'est une forme hybride dejeu pour l'oreille (hören = entendre ;spiel = jeu), mélangeant voix, musique et sons dans une écriture d'emblée prévue pour la radio[152]. Perec en conçoit plusieurs[153].
« L’art du Hörspiel est pratiquement inconnu en France. Je le découvris au moment où s’imposa pour moi le besoin de nouvelles techniques et de nouveaux cadres d’écriture. Très vite je m’aperçus qu’une partie de mes préoccupations formelles, de mes interrogations sur la valeur, le pouvoir, les fonctions de l’écriture pouvaient y trouver des réponses, des solutions que je ne parvenais pas encore à trouver dans le cadre de mes recherches purement romanesques. L’espace privilégié du Hörspiel – l’échange des voix, le temps mesuré, le déroulement logique d’une situation élémentaire, la réalité de cette relation fragile et vitale que le langage peut entretenir avec la parole sont ainsi devenus pour moi des axes primordiaux de mon travail d’écrivain[154]. »
DansDie Maschine, écrit avecEugen Helmlé, et diffusé par laSaarländischer Rundfunk en novembre 1968, une machine, représentée par cinq voix (celle du "speaker", celle, féminine, du "contrôle", et trois voix représentant trois répertoires textuels), décortique et manipule le célèbre poème deGoethe,Über allen Gipfeln ist Ruh[152]. Cette déconstruction[155] s'appuie sur cinq protocoles. Le premier est statistique et manipule le nombre de lettres, les rimes, les syllabes. Le second est linguistique et s'attaque à la structure du poème pour le réorganiser, en changer la forme en inversant les mots ou en réarrangeant les rimes. Le troisième est sémantique et modifie le sens du poème par différentes opérations comme l'isovocalisme[w]. Le quatrième est critique et met le poème en relation avec d'autres éléments concernant son auteur. Le dernier est poétique et par une explosion des citations insère le poème dans un corpus d’œuvres de la littérature mondiale traitant plus ou moins du même sujet. Parbugs volontaires etclinamens, le traitement est de plus en plus tourné vers l'auto-dérision. L’œuvre, diffusée régulièrement sur les radios allemandes, a beaucoup de succès[153],[156].
Tagstimmen, diffusé en 1971, est« un tissu narratif continu qui, à partir d'un matériau de base très simple, essaye d'explorer au maximum les possibilités phonétiques de la langue et les possibilités musicales de la voix humaine[157]. » C'est un jeu autour de proverbes, de phrases toutes faites, de comptines[158]. L'ensemble, évoquant la journée d'un homme dans une grande ville, est traité de telle façon que l'on a l'impression d'écouter toutes les formes connues de la parole[152],[153].
DansFonctionnement du système nerveux dans la tête (1972) coexistent sur le plan acoustique la conférence d'unneuropsychologue sur le fonctionnement dusystème nerveux, et undiscours ayant pour objet la perception par un enfant de lascène primitive[153].
Koncerstück für Sprecher und Orchester (1974) enregistre les musiques de la vie urbaine de tous les jours (violon de l'aveugle dans la rue, juke-box, autoradio d'un taxi) et les transcrit selon une combinatoire de 17 différentes formes discursives et musicales[153],[159]. Le fil narratif est explicite : le protagoniste est chargé de mener une enquête sur la musique dans la vie. Au long de la journée, le rôle de la musique change progressivement : d'une aura naturelle et idyllique, elle devient une interférence de plus en plus gênante. La structure est très complexe et anticipe celle deLa Vie mode d'emploi. Peut-être à cause de sa durée, la pièce a peu de succès[160].
Épisode
Situation
Genres et interprètes
Mélodies et variations
1
Dans la rue
Thème et variations pour violon seul
Voix seule, psalmodiant
2
Dans une taverne
Contrepoint avec renversement pour un seul orateur au début, puis pour deux orateurs
Chaconne pour deux stars de film et haut-parleurs de basse, brouhaha decinémateurs
Par ailleurs, écrites sur commande de la société des piles électriques du même nom, lesExtraordinaires aventures de Mr Eveready sont diffusées en 165 épisodes d'une dizaine de minutes chacun sur Radio-Abidjan en 1970[161]. Mr Eveready, sorte de super-héros à la fois présent et absent, est recherché par Antoine, jeune homme épris de justice, mais aussi par Morgan, un sinistre bandit. L'inspiration est à chercher du côté deTintin, deMichel Strogoff et deSigné Furax. Ce feuilleton, outre son côté alimentaire, est pour Perec une forme de récréation de l'écriture, en parallèle, deW ou le souvenir d'enfance[152],[162].
En 1971, Perec collabore avec Philippe Drogoz à la mise en musique de sonPetit abécédaire illustré, pourguitare etdarbouka[163]. Les notes correspondent aux voyelles du texte :a donnela oufa ; e donneré ; i donnemi ousi ;o donnesol ;u donneut[164].
Perec compose en 1972 une« partition graphique »,Souvenir d'un voyage àThouars[165]. Cette partition, qui permet une variété d’exécution illimitée en durée, en effectif instrumental et en notes, est jouée par leGroupe de recherches musicales[164].
Diminuendo est un opéra pour harmonium et piano de Bruno Gillet[163] sur un livret de Perec. Il comporte 14« moments » d'une temporalité presque lisse, mettant en scène la conversation anodine de deux anciens amants autour d'une tasse de thé. Leurs silences structurent le discours[166].
L’Art effaré est un projet inachevé d'opéra conçu avec Philippe Drogoz. Celui-ci n'utiliserait que cinq notes de la gamme :do, ré, mi, la, si. Perec, pour le livret, n'utiliserait que ces cinq mêmes syllabes[167],[168].
En 1974, Georges Perec scénarise son romanUn homme qui dort. Lefilm qui en résulte, réalisé parBernard Queysanne, avecJacques Spiesser comme seul acteur et un texte lu envoix off parLudmila Mikaël, obtient leprix Jean-Vigo.« Bernard Queysanne a joué sans concession la carte de la rigueur. L'évolution du personnage est à peine perceptible, et ce qui lui arrive pendant le temps de sa plongée semble dérisoire. On regrettera peut-être cette stagnation, cette uniformité. Mais, entre l'anecdote et l'envoûtement, il fallait choisir. Le réalisateur a parié pour l'envoûtement. Le pari est gagné[169]. »
Le 11 mai 1947, à l'âge de 11 ans, Perec ne se rend pas au lycée. Il relate cette journée dans un texte de 1965,Les Lieux d'une fugue[170], qu'il porte lui-même à l'écran pour l'INA en 1976. Le texte est composé à la troisième personne en 24 paragraphes décousus, sans ordre chronologique. Le film ne comporte aucun personnage, surtout pas l'enfant fugueur qui se met ainsi à distance. Le texte envoix-off lu parMarcel Cuvelier, ne correspond pas toujours à ce qui se voit sur l'écran. Les lieux ne sont pas reconstitués comme en 1947, mais filmés comme ils sont en 1976. La plupart des plans sont utilisés deux ou plusieurs fois, invitant à lire le déroulement comme une boucle. Lemontage parallèle et le cadrage suggèrent la fragmentation[171].
« Dans ces deux cas, il s'est agi pour moi de prolonger un travail d'écriture en l'enrichissant d'un contrepoint d'images et de sons[172]. »
En 1979 Perec participe au tournage et écrit le texte du film deRobert BoberRécits d'Ellis Island, dans lequel ils explorent tous deux leurs racines juives communes.
En1978 il participe à l'écriture et aux dialogues deSérie Noire (1979) d'Alain Corneau. Celui-ci a expliqué son choix de Perec comme co-scénariste et dialoguiste : « C’est un dialogue qui a l’apparence d’être comme dans la vie. Maintenant, si j’ai pris Perec, ce n’est pas par hasard. Le pari était de prendre l’apparence du naturalisme, mais surtout de ne pas y tomber. Il fallait faire quelque chose de totalement irréaliste. Ce que disent les personnages dans le film, c’est sans arrêt à partir d’une base de lieux communs… Toutes les expressions sont retournées, utilisées au deuxième degré. Perec est un génie dans ce sens-là[174]. »
Perec produit le filmLes Jeux de la comtesse Dolingen de Gratz, écrit et réalisé par sa compagneCatherine Binet. C'est un désastre financier qui l'amène, alors qu'il est« toujours un peu ou beaucoup à court d'argent[176] », à devoir gager ses futurs droits d'auteur[177].
Perec se considère comme un homme de lettres, tout en précisant :« Un homme de lettres, c'est un homme dont le métier c'est les lettres de l'alphabet[178]. » Ses conceptions littéraires se forgent au début desannées 1960, à l'occasion de textes qu'il publie dansPartisans, et lors de la préparation d'une revue qui devait s'appelerLa Ligne générale.
Il estime dépassée l'opposition entre lalittérature engagée, incarnée parSartre, et les recherches purement formelles menées par les écrivains duNouveau roman[179], les jugeant toutes deux inaptes à rendre compte de la complexité du monde moderne[180]. Il s'oppose au nihilisme deRobbe-Grillet et garde une foi indéfectible dans la puissance de l'acte créateur, susceptible de réconcilier l'homme avec son époque[181]. Perec a une conception hédoniste du roman : écrire lui a procuré une intense jubilation, à laquelle doit correspondre celle de son lecteur[182]. Il ne définit pas la littérature comme un Absolu, encore moins comme un Engagement, mais comme un Jeu, avec des contraintes formelles, ce qui lui permet de ne pas se laisser submerger par une enfance obscurément terrifiée, une enfance juive,kafkaïenne, forcément kafkaïenne, à laquelle il ne voudra jamais donner lepathos deDuras[175].
Perec définit, non pas quatre axes dans son travail, mais
« quatre interrogations qui posent peut-être en fin de compte la même question. La première peut être qualifiée de « sociologique » : comment regarder le quotidien ; la seconde est d'ordre autobiographique ; la troisième, ludique, revoie à mon goût pour les contraintes ; la quatrième concerne le romanesque, le goût des histoires et des péripéties, l'envie d'écrire des histoires qui se dévorent à plat ventre sur son lit. Mais cette répartition est quelque peu arbitraire : presque aucun de mes livres n'échappe à un certain marquage autobiographique, presque aucun non plus ne se fait sans que j'ai recours à telle ou telle contrainte[183] »
Il considère ces quatre« interrogations » comme déclinables dans tous les champs de la littérature :
« Mon ambition d'écrivain serait de parcourir toute la littérature de mon temps sans jamais avoir le sentiment de revenir sur mes pas ou de remarcher dans mes propres traces, et d'écrire tout ce qui est possible à un homme d'aujourd'hui d'écrire : des livres gros et des livres courts, des romans et des poèmes, des drames, des livrets d'opéra, des romans policiers, des romans d'aventures, des romans de science-fiction, des feuilletons, des livres pour enfants[184]... Je cherche en même temps l'éternel et l'éphémère[185]. »
Georges Perec est coopté à l'Oulipo en 1967. Il y trouve un cadre correspondant à ses préoccupations :
« Je me considère comme un pur produit de l’Oulipo. C’est-à-dire que mon existence d’écrivain dépend à quatre-vingt-dix-sept pour cent du fait que j’ai connu l’Oulipo à une époque tout à fait charnière de ma formation, de mon travail d’écriture[186] »
Pour Claude Burgelin, le mélange d'exigence et d'art de la dérive qu'offre l'Oulipo est exactement ce à quoi aspire Perec. Les outils donnés par cet atelier le libèrent de ce qui l'entrave. Ce qui l'illumine, c'est que l'Oulipo fasse de l'esprit de méthode un guide de la création littéraire. La place tenue par des principes mathématiques et par la rigueur dans les façons de construire, les règles énoncées comme des théorèmes lui donnent une nouvelle respiration. La langue se retrouve ainsi débarrassée de son pathos. Et prend forme une esthétique fondée sur l'élégance et la précision des procédures[187].
L'Oulipo est fondé sur le principe que lacontrainte permet de se libérer des expressions, des formes et des rythmes rebattus, ce qui incite à la recherche de solutions originales. Il faut déjouer les habitudes pour atteindre la nouveauté. Ainsi, les membres fondateurs se plaisent à se décrire comme des « rats qui construisent eux-mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir[188]. » PourMarcel Bénabou,« Le labyrinthe, c’est celui du langage, un labyrinthe fait de mots, de phrases, de paragraphes. La tâche de l’oulipien n’est pas de sortir de ce labyrinthe, mais plutôt de l’explorer sans trêve, d’y repérer des itinéraires nouveaux, des cheminements jusque là insoupçonnés. Et pour cela, il a besoin du fil d’Ariane que constitue pour lui chacune des contraintes qu’il se donne[189]. »
L'interprétation des textes de Georges Perec a donné lieu à une abondante littérature.Marcel Bénabou fait remarquer« qu'en fait de clés on a eu tout un trousseau : la clé sociologique, la clé autobiographique, la clé oulipienne, la clé juive, la clé métatextuelle, tout un cliquetis hétéroclite. Si je reste réservé sur le rôle dévolu à toutes ces clés, c'est qu'elles me paraissent soulever autant de difficultés qu'elles proposent de solutions. Et la principale de ces difficultés tient en fait aux deux constatations suivantes : d'une part chaque « inventeur » de clé se presse d'ériger la sienne en passe-partout, quitte à forcer un peu certaines serrures qui ont le mauvais goût de résister ; d'autre part, les informations que chacun croit trouver dans telle ou telle suggestion perecquienne sont d'un usage délicat : car Perec ne dit que ce qu'il a envie de dire, et il faut toujours beaucoup de prudence avec cet expert en trompe-l’œil, ce spécialiste de la « double couverture »[190]. » Il y a toujours un surplus, un potentiel de significations mettant en échec toute tentative abusive d'inscrire ses textes dans une perspective délimitée[191].
Considérant qu'une lecture naïve, attentive au seul référent, ou une lecture archéologique, attentive au seulsignifiant, sont toutes deux illusoires parce que réductrices, l'un soumettant le texte aux règles de la logique "ordinaire", l'autre le ramenant à l'exécution mécanique d'un programme préétabli[192],Bernard Magné propose une« lecture oblique » des textes de Perec :
« Ce serait d'abord une lecture réjouissante, qui retiendrait des textes, de leur succession chronologique, de leur incessante variation de ton, de taille, de genre, le plaisir du morcellement, le charme du disparate. Ce serait ensuite une lecture vigilante, attentive au détail, au minuscule. Ce serait aussi une lecture convergente. De ces récurrences finirait par surgir une image : celle d'un projet cohérent tendu vers la construction d'une autobiographie qui, reconnaît Perec, « m'apparaît de plus en plus comme la seule écriture possible. » Ce serait enfin une lecture effervescente. Loin de constituer pour le texte une grille unique d'interprétation, une fin ultime, cet encryptage autobiographique en permettrait au contraire la relance, par « un jeu entre le prévisible et l'imprévisible, la connivence et la surprise »[193]. »
Les textes de Perec« n'ont pas pour fonction de communiquer un message, de produire la place pour votre fiction réglée, des machines à fictionner à répétition, des œuvres d'art[194]. » Ce qui, non sans quelque ironie, se dispose sur le blanc de la page après qu'on a fini d'écrire, c'est un texte à (sur)prises multiples, méticuleusement combiné pour que jamais ne s'épuise la sagace lecture de l'amateur[195].
« Le projet d'écrire mon histoire s'est formé presqu'en même temps que mon projet d'écrire[196]. »
Philippe Lejeune qualifie Perec d'autobiographe« qui lucidement, patiemment, non par choix, mais parce qu'il était le dos au mur, a pris exclusivement des voies obliques pour cerner ce qui avait été non oublié, mais oblitéré, pour dire l'indicible[197]. » Il discerne neuf caractéristiques qui différencient Perec de l'autobiographe traditionnelle : la pudeur (celle qui interdit de mettre en scène les sentiments) ; la convivialité (avec des textes qui ne sont pas des images du vécu, mais des machines à faire produire par le lecteur) ; l'intertextualité (l'autobiographie est un texte, engendré par le travail sur d'autres textes ; l'opérabilité (les textes montrent quelque chose en train de se faire, que le lecteur ne peut saisir que s'il accepte de s'associer au mouvement) ; le sabotage (Perec déconstruit les cohérences. Non pas dans la fiction mais dans la réalité de sa propre vie, créant ainsi une écriture autobiographique du manque, de la faille, du malaise) ; le remplissage (pour quadriller le vide, puis le remblayer, boucher le trou du temps, garder des traces de tout, enregistrer, collectionner pour le passé, planifier pour l'avenir) ; l'obliquité (l'oblique, l'indirect, le dévié, lamétonymie à perte de vue) ; le blocage (pas d'interprétation, on avance en sécurité à l'abri du sens) ; le cloisonnement et la dissémination (les projets autobiographiques de Perec évitent le récit, rabattent le temps sur le lieu, substituent à l'histoire la liste, à l'intrigue le montage – tous ceux qui impliquaient une totalisation, même partielle, ont été abandonnés)[198].
Si Perec a plusieurs fois insisté sur les rapports étroits entre son écriture et l'autobiographie, ses romans sont traversés par un conflit entre un acte d'écrire conçu comme« un acte qui se joue à deux » et le désir de faire de la page d'écriture le lieu d'une mémoire individuelle et privée[199].
PourFrançois Bon,« Perec obéit à cette injonction obscure de replier l'écriture sur sa propre nécessité intérieure, sa fonction la plus vitale (voire de survie)[200]. »
PourPhilippe Lejeune,« tous ces éclats d'oubli jalonnent maintenant la carte de la mémoire. Ils forment un réseau absurde. Mais on sent que tout le reste tient par-dessous, sans qu'on sache comment, comme par aimantation. Tout le reste qui est vraiment oublié. Et qui maintenant est là[202]. »
D'un point de vue littéraire,« en matière d'autobiographie individuelle et collective, l'entreprise littéraire de Georges Perec représente peut-être un tournant décisif dans l'histoire du genre, compte tenu de son indissociabilité d'avec la plus exigeante, la plus novatrice, la plusperformante des recherches formelles[203]. »
Les références aujudaïsme dans l’œuvre de Perec sont rares[x]. C'est le prolongement d'un défaut d'éducation juive initiale, suivi par un solide fond d'incuriosité. Perec ne sait rien du judaïsme comme religion ou comme culture, il ne connait ni leyiddisch ni l'hébreu. Son absence de curiosité pour ce qui touche aupassé juif s'accompagne d'une indifférence ostentatoire pour ce qui ressemble à uneactivité communautaire. Étudiantmarxiste, à l'époque deLa Ligne générale, Perec ne peut accepter ni l'héritage religieux — qui contredit son idéal de laïcité —ni lesionisme — qui apparaît comme une impasse au regard des rêvesinternationalistes[204].
Il en est resté au« degré zéro de la judéité », une judéité qu'il définit par une série de négations, comme cela apparaît dansEllis Island :« Je ne sais pas précisément ce que c'est qu'être juif, ce que ça me fait d'être juif. C'est une évidence si l'on veut, mais une évidence médiocre, qui ne se rattache à rien ; ce n'est pas un signe d'appartenance, ce n'est pas lié à une croyance, à une religion, à une pratique, à un folklore, à une langue[205]. »
Cependant, Perec fait le même chemin qu'une partie des intellectuels juifs de l'après guerre : un chemin qui commence dans le confort (tout relatif) de l'ignorance et du refus, et qui aboutit à l'inconfort lié au sentiment d'une rupture, d'une non-appartenance, d'un manque[206],[207]. Il déclare en 1976 avoir commencé à se sentir juif lorsqu'il a entrepris d'écrire l'histoire de son enfance[208].
Le manque n'est pas le manque de quelque chose, mais le manque premier avec lequel il faut bien vivre. Seule l'écriture permet de le combler. D'abord par la rencontre avec les parents disparus :
« J'écris parce qu'ils ont laissé en moi leur manque indélébile et que la trace en est l'écriture. L'écriture est le souvenir de leur mort et l'affirmation de ma vie[209]. »
Ensuite par la rencontre avec soi même :« Le projet d'écrire mon histoire s'est formé presque en même temps que mon projet d'écrire[210] »
Georges Perec passe son enfancerue Vilin, aujourd’hui partiellement disparue[211]. Ses parents et grands-parents y habitent, sa mère tient un salon de coiffure au n° 24. Après l'avoir« oubliée pendant des années[212] », il l'évoque dansW ou le souvenir d'enfance, puis l'inclut en 1969 dans son projetLieux. De ce fait il s'y rend six fois de 1969 à 1975[213] et chronique sa destruction[214]. Au n° 24, il se borne à noter :« (ce fut la maison où je vécus) – Je ne suis pas rentré. »
En lisant la rue, Perec propose une construction de l'imaginaire, une intrication du symbolique, par des rapprochements insolites, par des oublis, des occultations, les pétrifications et les changements du décor[215]. Mais, malgré son caractère de litanie, plus on avance dansLieux, plus le texte s’étiole, se raréfie, s’abandonne au silence et à son impossibilité[216].
« Il n'y a plus de rue Vilin que ce que nous en lègue Perec, constellation éclatée de textes, un secret sous l’œuvre[217]. »
Perec a suivi troispsychanalyses[218]. AvecFrançoise Dolto, après sa fugue à l'âge de 11 ans ; avecMichel de M'Uzan en 1956-1957 ; avecJean-Bertrand Pontalis de 1971 à 1975. Cette dernière est entamée après une période de dépression liée à la rupture avec Suzanne Lipinska[y], et au moment où l'écriture deW se bloque lorsqu'il tente de se lancer dans la partie purement autobiographique du texte. Passant sur l'interdit qui veut qu'un analyste n'évoque pas à chaud le cas d'un patient, Pontalis aborde le cas de Perec dans neuf de ses écrits, sous des pseudonymes transparents. Claude Burgelin interprète cette transgression comme la nécessité de témoigner de ce qui s'est passé de« si prenant » lors de l'analyse[219].
Le point de vue de Perec est d'abord exprimé par la publication de ses rêves deLa Boutique obscure, « pour embêter son psychanalyste[79] ». Puis par son texteLes lieux d'une ruse[220],« remarquable approche de ce qu'est une psychanalyse à partir de considérations sur ce que produisent l'espace et le temps de l'analyse, l'enfermement dans un lieu avec une temporalité répétitive et des rituels quasi immuables, en ne tenant aucun propos d'aveu ou de confession[219]. »
Perec n'oublie cependant pas de moquer le langage employé par les psychanalystes dansRoussel et Venise[221]. Le fait qu'il ait été un usager intermittent de la psychanalyse n'a eu aucun effet sur son écriture, sinon de protection et de mise à distance[222].
Certains nombres jouent un grand rôle dans la structure et le contenu des textes de Perec. Ils sont signifiants. Le plus important d'entre eux est le 11. DansLa Vie mode d'emploi, l'immeuble est situé au 11 de la rue Simon-Crubellier, le fils de Sven Ericsson meurt noyé dans sa baignoire le 11 juin 1953, Salini retrouve la trace d'Elizabeth le 11 septembre 1959, Marguerite Winckler meurt pendant le onzième mois de 1943, il reste 11 aquarelles dans l'atelier deGaspard Winckler, le peintre Hutting construit ses portraits à partir d'une séquence de 11 teintes. Le recueil poétiqueAlphabets regroupe des séquences de onze poèmes, dont chacun comporte onze séries de onze lettres, disposées sur la page selon les permutations réglées d'ungroupe d'ordre onze.Ulcérations rassemble 400anagrammes de onze lettres, organisés en onze parties numérotées. La première partie deW comprend onze chapitres. DansLa Disparition, le terme onze, inutilisable, est remplacé par de nombreuses occurrences de « cinq plus six, cinq ou six . » Dans« 53 jours », l'effondrement d'une tribune tue 11 ouvriers et l'un des lieutenants rassemble les débris de la XIe légion[192],[223].
Ce nombre est loin d'être anodin. C'est l'unique repère, l'unique trace de la mère disparue :« Ma mère n'a pas de tombe. C'est seulement le 13 octobre 1958 qu'un décret la déclara officiellement décédée, le11 février 1943[224]. » L'écriture transforme ainsi un élément biographique en une structure formelle génératrice, tout en faisant de l'espace textuel, du lieu même de l'inscription, un substitut de cet autre lieu, improbable, innommable, inassignable[192].
D'autres nombres ont été identifiés comme récurrents chez Perec : le 17[225], le 43[226].
Perec définit les grands principes de son écriture dès 1963, dans son articleRobert Antelme ou la vérité de la littérature. Il s'agit de transmettre une expérience, non en entassant les faits et en multipliant les descriptions, mais en les élaborant, en les transformant, en les intégrant dans un cadre littéraire spécifique. Pour lui, le véritable écrivain doit interposer entre son expérience et ses lecteurs, unegrille.« Par le biais de la grille, l'écriture n'est plus soumise à la dictée de l'expérience. Comme plus tard pour Perec oulipien, par le biais de la contrainte l'écriture n'est plus soumise à la dictée de l'inspiration[227]. » Ainsi, il pourra« dire le dedans en ne décrivant que le dehors[228]. »
Pour Perec, écrire, c'est aménager l'espace de la parole, le baliser, le maîtriser, le prendre en charge. Pour arriver à reconstruire sa mémoire, il faut pouvoir délimiter et orienter l'espace des signes[94].
« Cette activité d'écriture pour moi est une manière continuelle de me définir par rapport au monde dans lequel je suis, en essayant de le comprendre, en essayant de jouer avec, en essayant de l'interpréter, de le dominer par la parole. Je ne suis pas le langage, j'essaye de le contourner, ou de me réfugier dedans pour produire des choses qui m'amusent, qui font que je décris les choses avec jouissance[229]. »
La grande singularité de son œuvre, sa variété, est signifiante d'un tâtonnement existentiel et d'un refus des carcans identitaires portés par le style, pour celui qui eut à construire ses propres liens de filiation[230]. Son itinéraire laisse progressivement apparaître une solide foi dans l'écriture comme processus transformationnel, comme transfert et restructuration d'un matériau donné. Son projet est vaste et ambitieux : le remaniement radical du roman contemporain[231] :
« L'ambition du « Scriptor », son propos, disons son souci, son souci constant, fut d'abord d'aboutir à un produit aussi original qu'instructif, à un produit qui aurait, qui pourrait avoir un pouvoir stimulant sur la construction, la narration, l'affabulation, l'action, disons, d'un mot, sur la façon du roman d'aujourd'hui[232]. »
Ses textes restent ouverts :« Cette idée d'un livre ouvert est très importante pour moi : qu'il soit en quelque sorte inachevé, en porte-à-faux. Il faut qu'on puisse rêver sur le livre et qu'on ait envie de jouer avec, de recommencer quelque chose dans un autre ordre[233]. »
L'écriture de Perec n'est jamais reliée à une langoureuse déploration, bien au contraire. Presque partout, un léger sourire plane sur cette œuvre. Alors même qu'il se confronte à des thèmes douloureux, il s'en échappe quelque chose de gai, de joyeux, de léger et de profond à la fois[234]. Sa langue a un rythme particulier : un rien de lenteur, à peine d'amplification et aucun abandon à l'excitation[235].
Dès la période de laLigne générale est mise en avant une volonté de totalité, qui seule peut permettre une relation entre l'écriture et le réel. Mais Perec va plus loin : pour lui, tout ce que les écrivains ont produit fait partie du réel. Peuvent donc être mis à égalité l'espace fictionnel et l'espace tout court. Son œuvre pourra ainsi être diverse,mais cohérente, multiformemais ordonnée[180].
Perec ajoute à cette notion de totalité celle d'exhaustivité. Sa vision du réalisme est moins extensive qu'intensive, moins attentive à explorer une surface qu'à sonder une profondeur[237]. Il déclare s'inspirer« de ce qu'en peinture on appelle l'hyperréalisme. C'est en principe une description neutre, objective, mais l'accumulation des détails la rend démentielle et nous sommes ainsi tirés hors du réel[238]. » D'où la notion d'épuisement.
« Ne pas dire, ne pas écrire « etc. » Se forcer à épuiser le sujet, même si ça à l'air grotesque, ou futile, ou stupide[239] »
PourTentative d'épuisement d'un lieu parisien, Perec se rend pendant trois journées successives d'octobre 1974Place Saint-Sulpice et effectue neuf prises d'écritures, depuis des postes d'observation différents, pendant cinquante minutes à deux heures et demi, pour noter« ce qui se passe quand il ne se passe rien, sinon du temps, des gens, des voitures et des nuages[240]. » Il ne s'attache pas à décrire le lieu, mais en fait à la fois l'inventaire et le récit simultané, sans amplification, ni gros plan sur un détail, en restituant l'hétéroclite. L'écriture en temps réel cherche dans la masse des faits l’occurrence singulière, et donne l'impression de concurrencer le réel, sinon de le dédoubler, dans un récit hypnotisant[241]. En mai 1978, pourFrance Culture, il réitère l'expérience auCarrefour Mabillon pendant six heures[242]. Il rédige également uneTentative d’inventaire des aliments liquides et solides que j’ai ingurgités au cours de l’année mille neuf cent soixante-quatorze.
Cette activité de consigne et de collecte qui se veut sans terme peut frôler la manie. Une pareille mémoire de papier, artificielle, est le seul recours valable face à une amnésie que Perec sait ne pas pouvoir entretenir indéfiniment[243].
La totalité s'exprime également dans la notion depuzzle[z] :
« Tout ce que je vais écrire s'organise comme un puzzle dont chaque livre serait une pièce – l'ensemble de tout cela participera au puzzle de la littérature contemporaine dont les pièces sont les écrits des autres auteurs. Et moi je vais remplir un vide dans ce puzzle[244]. »
Cependant le puzzle — comme celui de Bartlebooth dansLa Vie mode d'emploi — reste inachevé, et« entre en cohérence avec une pratique du leurre et de la déception, une écriture de la trace et de l'absence[245]. » Car il y a une tension constante entre la hantise de la totalité et un continuel travail de fragmentation, une impossibilité de mettre en place toutes les pièces du puzzle[246].
Perec découvre la notion decontrainte lors de son entrée à l'Oulipo, qui marque une nette coupure dans son travail[247]. Cette approche est pour lui particulièrement féconde et irrigue toute son œuvre postérieure. Dépassant un formalisme mécanique, Perec en fait le moteur d'une "machine à raconter des histoires"
« J'aime multiplier les systèmes de contraintes lorsque j'écris : ce sont les pompes aspirantes de mon imagination[248]. »
Pour lui, la potentialité d'une contrainte semble être en proportion directe avec sa difficulté[249]. Celles qu'il utilise s'appliquent de façon privilégiée à la dimension matérielle de la langue, à sessignifiants. D'où deshomophonismes, desanagrammes, despalindromes, deslipogrammes[250]. Mais la contrainte n'est pas un but en soi. Il importe moins d'appliquer une grille de travail sur un texte que de multiplier au contraire les systèmes d'écriture, de s'imposer des règles pour le plaisir de pouvoir en jouer et aussi pour les déjouer :« J'ai passé autant de temps à tricher qu'à respecter les règles, ce qui ne me gène pas du tout[251]. »
La Disparition respecte le premier principe deRoubaud : « Un texte écrit suivant une contrainte parle de cette contrainte[252]. » Renversant la domination hiérarchique du fond sur la forme, c'est le roman de la disparition duE, roman de ce qu'il raconte et récit de la contrainte qui crée ce qui se raconte[253].
Perec utilise beaucoup les possibilités offertes par lacombinatoire.La Vie mode d'emploi est construite à partir d'unbi-carré latin d'ordre 10,Ulcérations comprend 400 permutationshétérogrammatiques. Il développe lasextine, poème de six strophes de six vers chacune dont les mots-rimes sont déterminés par une séquence mathématique.Raymond Queneau ayant démontré l'existence d'une telle séquence (nommée quenine) pour d'autres nombres, Perec utilise une quenine d'ordre 11 (onzine) dans la section en C d'Alphabets et une pseudo-quenine[aa] d'ordre 10 dansLa Vie mode d'emploi pour régler les éléments de chaque chapitre[254]. Le travail sur la combinatoire se caractérise par l'économie de moyens, la plus grande variété d'agencements possibles, le refus de toute redondance. Il s'agit là de critères d'optimisation, de démarches susceptibles de disposer des meilleures conditions à la création de texte[254].
PourJean-François Chassay, en utilisant la contrainte, Perec n'a pas cédé à une manie mais, au contraire,« a joué l'essentiel : une superposition de deux systèmessémiotiques. Celui qui « dit », comme dit la parole « normale », celui dont vous pourriez supposer qu'il provient d'une volonté de dire un message à un destinateur ; et l'autre, celui qui dit des nouvelles d'un tout autre monde, ou « e » n'existerait pas, où toute parole autre quepalindromique, et donc à double sens, serait interdite, où les façades des immeubles parisiens seraient devenus des échiquiers invisibles et très particuliers que parcourraient, et pas n'importe comment, des cavaliers fantômes. Ce qui se joue dans ces contraintes ce ne sont pas des fictions de mondes, mais c'est notre monde, notre univers sémiotique lui-même transporté dans la fiction, ce sont des textes qui jouent duDiscours sur un autre instrument que notre langue habituelle, ce sont des textes qui jouent double jeu[255]. »
« Quand on établit un système de contraintes, il faut qu'il y aussi de l'anticontrainte dedans. Il faut – et c'est important – détruire le système des contraintes. Il ne faut pas que ça soit rigide, il faut qu'il y ait du jeu, que ça grince un peu ; il ne faut pas que ça soit complètement cohérent ; unclinamen, c'est dans la théorie des atomes d'Epicure : le monde fonctionne parce qu'au départ il y a un déséquilibre[256]. »
Leclinamen perecquien se distingue de la« version oulipienne standard. » Par sa complexité : il est au moins aussi sophistiqué que le contrainte qu'il a pour objet de contester[ab]. Par son aptitude à produire du sens : il rend le texte, non seulement moins mécanique, mais plus signifiant, en l'intégrant dans un réseau de relations souvent fort complexes[257].
La transparence apparente des textes de Perec,« ourdis de manière un peu trop polie pour être tout à fait honnête[258] », est piégée. Les passagesa priori anodins dissimulent trappes et labyrinthes, ils suscitent l'hésitation, nécessitent un retour patient à la case départ, et provoquent un malaise admiratif chez le lecteur échaudé qui, pourtant, en redemande aussitôt[259].
De même que les facéties verbales ou le marquage autobiographique, le faux caractérise l'écriture de Perec : présence dans toute son œuvre de personnages de faussaires, fréquence des allusions ou de références à de fausses œuvres d'art, intérêt pour le trompe-l’œil, présence d'une rubriquefaux dans leCahier des charges deLa Vie mode d'emploi, recours quasi systématique à l'altération volontaire.Un Cabinet d'amateur est l'histoire d'une gigantesque mystification, dans laquelle le faux triomphe parce qu'il est identifié par sa copie. Perec, en« conteur jubilatoire », ne traite pas le faux commeobjet de fiction, mais comme unmoyen privilégié de produire de la fiction[125].
Selon le principe que« la meilleure des ruses est de sembler ne pas en avoir[260] », Perec pratique la double couverture, une révélation partielle servant de masque[261], alors qu'un leurre peut en cacher un autre[262]. Par exemple, au chapitre XIV deLa Vie mode d'emploi, l'insertion d'un portrait de Dinteville écrit par Cadignan fait croire à l'existence d'un vrai texte de Cadignan, alors qu'il s'agit d'un faux texte de Cadignan masquant un vrai texte deRabelais[263].
De l'aveu même de Perec, son écriture est tendue entre deux visées à première vue inconciliables : rester caché, être découvert[264]. Les dévoilements de certains aspects de sa machinerie textuelle s'accompagnent d'une immanquable théorie d'omissions et de chausse-trapes[265].
Ce mécanisme de la ruse, étroitement dépendant des thèmes de la judéité et du deuil, permet à Perec de contourner son enfance et son identité, dans le double sens d'éviter et dedessiner les contours[266]. Ce qui n'empêche pas son œuvre d'être d'une profonde cohérence, en déclinant inlassablement les problèmes du sens, de la connaissance, de la mémoire, dans une écriture porteuse d'une réflexion sur le langage[267].
Perec se livre en permanence à des opérations de prélèvement, de détérioration, d'insertion, d'amélioration d'autres textes[268],[269]. Il est fasciné par les possibilités d'invention qu'offre« le fait de se lover dans les phrases des autres pour mieux les déloger. C'est être ôteur pour être auteur[270]. » Cette action d'appropriation minutieuse allie une sorte de gourmandise aimante ou maniaque à l'égard du texte d'origine à la patience un peu machiavélique d'une pratique de faussaire[271].
Perec revendique ces chapardages :« Tout ce que les écrivains ont produit fait partie du réel de la même manière que le réel », déclare-t-il dans une conférence àWarwick[276]. Mais ces citations et autocitations demeurent implicites, tantôt camouflées dans le récit par la disparition des marques traditionnelles comme guillemets ou italiques, tantôt signalées comme discours empruntés, mais avec des attributions fantaisistes, et parfois accompagnées de quelques indices— plus ou moins faux — pour les signaler[277].
Perec parvient à donner des lettres de noblesse à la copie qui, sous sa plume, devient une virtualité neuve de l'art[278]. Pour lui,« il faut lire entre les livres comme on lit entre les lignes[279] » et il voit cet« art citationnel » comme« le relais nécessaire de toute invention[280]. »
Ce choix lui permet de combler le vide généalogique que lui a imposé sa condition d'orphelin, de se donner une famille selon son cœur, celle de ses pères littéraires[180].
« Si vous voulez copier Perec, copiez sa manière de copier », résumePhilippe Lejeune[281].
Claude Burgelin identifie trois pôles dans l’œuvre et le« parcours mental » de Georges Perec : la mémoire absente d'une langue originelle perdue, manque qui fonde sa relation à l'écriture et à la lettre ; l’image de la clôture, cet enclos — chambre, immeuble, île — dans lequel tournent plusieurs de ses livres ; la reprise d'un même mouvement : recommencer à commencer, principe moteur de presque toute l’œuvre[282].
Bernard Magné propose une synthèse de l’œuvre de Perec autour de la notion d'æncrage. Il la définit comme une fusion de l'encrage — procédés concrets d'écriture, mécanismes inscrits dans le texte perecquien et qui lui donnent sa ou ses formes — et de l'ancrage — repères qui permettent de donner sens et unité à une histoire individuelle mise en pièces par les effets dévastateurs de l'histoire[283]. Pour lui, l'æncrage se définit par trois caractéristiques : récurrence, possibilité d'être relié à un élément autobiographique, base d'une contrainte formelle[284].
un æncrage arithmétique,« quelque chose comme une numérologie de l'intime », ordonné autour des nombres 11 et 43, 73 et 37. Ces nombres peuvent se manifester par leurmention, quand ils apparaissent dans le discours, ou par leurfonction quand ils règlent certains aspects formels de l'énoncé. Le 11 et le 43 sont des æncrages essentiels : c'est le 11 juin 1943 que la mère de Perec a été déportée en direction d'Auschwitz. C'est à la même date qu'un décret la déclare officiellement décédée, mais il s'agit d'une mort fictive, la date de la mort réelle étant inconnue[286].
une« géométrie fantasmatique » organisée autour des figures du carré et des symétries bilatérales. Carré 10 x 10 réglant l'ordre des chapitres dansLa Vie mode d'emploi ; Carré 9 x 9 qui organise la liste des localités, pays et hôtels dans lesDeux cent quarante trois cartes postales en couleur ; poèmes carrés comme leCompendium deLa Vie mode d'emploi (deux strophes de 60 vers de 60 signes typographiques) ou les poèmes deLa Clôture (12 vers de 12 lettres) et d'Alphabets (11 vers de 11 lettres). Symétrie bilatérale dupalindrome,chiasmes (comme dans le mini bestiaire alphabétique deLa Disparition),boule de neige, diagonales d'Espèces d'espaces ou d'Alphabets[287].
la question du nom propre et de son instabilité. Au hasard des modifications de frontières entreRussie etPologne, et des fantaisies de l'état-civil, le nomPeretz est devenuPerec, il aurait pu êtrePérec ouPerrec. DansLes Choses, Jérôme et Sylvie n'ont pas de nom propre, dansQuel petit vélo ?, le héros en a 72, dansUn homme qui dort, il n'a pas d'état-civil. Partout se multiplient surnoms, pseudonymes et homonymes. Dans les dossiers préparatoires de53 jours, Perec recense les 171 pseudonymes deStendhal. Le nom de Bartlebooth est forgé à partir deBartleby, héros deMelville, et de Barnabooth, deValéry Larbaud[ae]. LesBeaux présents et lesBelles absentes sont deslipogrammes à partir d'un nom propre[288].
Roland Brasseur se gausse de ces constructions savantes et revendique le simple plaisir de la lecture :« Jusqu'à ces dernières années, on s'est passé des biographèmes et des æncrages pour lire Perec, et rien n'interdit à quiconque de se passer encore de ces rassurants passe-partout[289]. »
Hugues Corriveau a une lecture pessimiste :« Y-a-t-il moyen de ne souligner qu'une euphorie de lecture dans cette œuvre toute empreinte d'une folle envie de la mort, d'un irrésistible désir de s'abîmer dans la matière, dans la fragile et aléatoire réussite de ses projets ? Nous sommes aux prises avec une œuvre absolument catastrophique, qui se laisse constamment séduire par la déception, qui frôle toujours, avec ironie soit, mais non moins sincèrement, le malheur, la tentation absolue de l'échec, tant dans les recherches formelles que dans les fictions et personnages. Ces textes, sous des apparences drolatiques, cachent insidieusement de formidables tragédies, des héros gangrénés par l'ironie inquiétante de leurs projets, des tensions dramatiques à la limite du silence, du désastre. Là où se semble se dessiner quelque possibilité de réussite, advient l'inévitable détournement qui modifie le cours des choses, qui renvoie l'entreprise à sa propre négation[290]. »
Ce que confirme Maurice Corcos :« La dimension commune aux personnages perecquiens, c'est leur réaction blanche ou quasi délirante à un événement traumatique, témoignant d'un processus de demétaphorisation du monde face à l'ébranlement du sens, puis leur tentative de transmettre ne serait-ce que les berges du trou dans lequel ils ne cessent de tomber[291]. »
Marcel Bénabou explique l'extraordinaire succès posthume de l’œuvre par ce qu'il nomme« le paradoxe de Perec », un mélange unique de proximité et de singularité : Perec est perçu comme un écrivain amical, voire fraternel, avec un souci du lecteur constamment perceptible[116].
« Ce sont là des textes résolument écritspour le lecteur, pour lui offrir l'occasion d'une lecture où expérimenter, jouer, chercher, découvrir, déconstruire et reconstruire, se passionner s'écrier bon-sang-mais-c'est-bien-sûr... Où lire, en somme. Lireà la rencontre d'un auteur d'abord soucieux de ne pas fermer les voies d'accès à cette rencontre, soucieux de circonscrire les lieux d'un véritable travail à deux où les souvenirs, les lectures, les interrogations, les provocations malicieuses, le symptômemétatextuel omniprésent, sont autant d'invites à partager avec lui le travail quifera le texte[203]. » Perec a horreur du« lecteur-paillasson. Il y a dans tous ses textes une place pour moi, pour que je fasse quelque chose. Un appel à moi comme à un partenaire, un complice. Je dois prendre le relais[293]. »
Les pistes n'en finissent plus de se croiser, de se décroiser, de se recroiser ; d'étranges coïncidences démentent les précédentes ; les permutations, les inversions nous plongent parfois dans un labyrinthe, parfois dans un miroir. L'information est revue, contredite, corrigée, mélangée, cachée, faussement dévoilée. Perec nous entraîne dans une (re)découverte perpétuelle de la (re)lecture de son œuvre. On n'en a jamais terminé avec lui[294].
L'aura des textes de Perec semble pourtant difficile à définir. Il se joue« quelque chose d'essentiel dans ses pages, quelque chose que nous ne parvenons pas toujours à saisir, pourtant tout armés que nous sommes de nos théories et de nos outils critiques », déclare l'universitaire Jean-Luc Joly[295].
Le singulier destin posthume de Perec, devenu en quelques années seulement une figure majeure de la littérature, s'est accompagné d'une certaine mythisation[296],[297]. Situation non sans danger, car elle a encouragé une intense pulsion d'analyse de l’œuvre dans tous ses recoins, source d'altérations et d'approximations hasardeuses[116]. Les formules ressassées autour de son œuvre et de sa personne, finissent par en barrer l'accès[298].
Depuis sa mort en 1982, nombreux sont les écrivains qui sont hantés ou aiguillonnés par sa présence : ses exigences, sa manière de jouer, de déplacer, d'arpenter, de questionner, d'enlabyrinther. Au terme de la rédaction deLa Vie mode d'emploi, il se réjouissait d'avoir fait« imploser le roman ». Mais ce sont presque tous les genres qu'il a fait se décaler, se desserrer, se recomposer autrement. Il a aussi fait sortir les sciences humaines de leurs procédures et de leurs méthodes, en posant quelques questions toutes simples sur nos façons de penser, de classer, d'énumérer, de regarder. Il a contribué à renouveler notre vision des lieux et des temps. Il nous a amenés à considérer autrement notre relations à nos espèces d'espaces, à regarder notre quotidien comme une question et non comme un donné, à chercher sous l'infra-ordinaire ce dont nous détournons si souvent les yeux[299].
La Poste française a édité un timbreGeorges Perec 1936-1982 dessiné parMarc Taraskoff, d’après une photo d'Anne de Brunhoff, et gravé parPierre Albuisson, émis le.
Le, soit 80 ans après sa naissance, Google lui dédie undoodle[303].
Le 13 mars 2018 une journée entière est consacrée à Georges Perec sur Twitter. Ce #JourSansE, organisé par Réseau Canopé[304] sur une idée d'Emmanuel Vaslin, a vu la publication sur le réseau social de 10 000 contributions, respectant la double contrainte des 280 caractères et dulipogramme en "e", clin d'œil à son romanLa Disparition[305],[306],[307],[308].
Chaque vendredi matin, de janvier à juin 2020, Emmanuel Vaslin invite sur Twitter tous les contributeurs intéressés à partager des fragments d’écriture respectant la contrainte des 280 signes et incluant le hashtag #infraPerec répondant, en clin d’œil à son ouvrageL'Infra-ordinaire[309], aux questions posées par un objet du quotidien, du banal, de l’ordinaire (mes chaussures, ma rue, ma boîte aux lettres, l'écran de mon téléphone...)[310],[311].
Le 3 mars 2022, pour les 40 ans de la mort de Perec,Pierre Ménard, Emmanuel Vaslin,Thomas Baumgartner et Hélène Paumier proposent en ligne surTwitter une performance collective en donnant rendez-vous à qui le veut pour une «Tentative d'épuisement d'un lieu planétaire »[312].
En mars 2024, les éditions L'Œil ébloui entament la publication de 53 livres de 53 pages écrits par 53 auteurs différents en hommage à Georges Perec[313].
Plaque « Disparition » en hommage à Georges Perec. Œuvre de l'artiste Christophe Verdon. Café de la Mairie, place Saint-Sulpice à Paris.
Créée à la fin de l'année 1982 par Éric Beaumatin, l'Association Georges Perec[314] a « pour but de promouvoir la lecture, l'étude et le rayonnement de l'œuvre de Georges Perec et de développer, de conserver et exploiter un fonds documentaire qui est sa propriété et dont la vocation est publique ». Ce fonds documentaire comprend les manuscrits, la quasi-totalité des éditions françaises et étrangères des œuvres de Perec, ainsi que des études consacrées à cet auteur. Elle accueille également les travaux universitaires, francophones ou non, se rapportant à celui-ci.
Sise à Paris, à labibliothèque de l'Arsenal, l'Association Georges Perec accueille les chercheurs lors de sa permanence hebdomadaire. Elle organise un séminaire précédemment mensuel, maintenant annuel, où, depuis 1986, des chercheurs viennent présenter leurs travaux. Elle publie un bulletin bisannuel interne ainsi que lesCahiers Georges Perec[315].
1979 :Les Mots croisés, précédés de Considérations de l'auteur sur l'art et la manière de croiser les mots, Mazarine. Sera suivi deLes Mots croisés II, P.O.L / Mazarine,
1954-1955 : Georges Perec,Bernard Quilliet,Les Aventures extraordinaires d'Enzio, roi de Sardaigne, bande dessinée incomplète — Publiée dans lesCahiers de l'Herne, n° 116, 2016
1956 :Manderre, nouvelle — Publiée dans lesCahiers de l'Herne, n° 116, 2016
1956 :« Jean Duvignaud,Marée basse »,dans Jean Duvignaud, Le Pandémonium du présent, Plon, - — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1957 :« Jacques Nantet,Les juifs et les nations »,Les Lettres nouvelles,no 45, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1959 :« Défense de Klee »,dactylogramme, — Publié dans lesCahiers Georges Perec n° 6, 1996, repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1959 :« Nouveau roman (suite)10 novembre 1959 »,L'Herne,no 116,
1959-1960 :« Quelques considérations sur la littérature d'aujourd'hui (ou quelques réflexions) »,L'Herne,no 116,
1961 :« Situation du roman français contemporain »,L'Herne,no 116, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1961 :« John Perkins, parHenri Thomas »,dactylogramme, — Publié dans laRevue des belles lettres, 2013, repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1963 :« Le 6e congrès de l'Union des étudiants communistes. Discussions et perspectives »,Partisans,no 9, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1963 :« La Chasse au mérou. [Recension du livre deGeorges Limbour] »,Partisans,no 11, — Repris dans lesCahiers de l'Herne, n° 116, 2016 et dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1967 :« Roger Price, Le Cerveau à sornettes », dansJulliard,coll. « Humour secret », — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1967 :« La chose »,Magazine littéraire,no 316, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1967 :« Chemin de pierre, sur des dessins et des peintures de Pierre Getzler »,catalogue d'exposition, — Repris dans lesCahiers Georges Perec n° 10, 2010 et dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1967 :« Roland Barthes,Le Système de la mode »,Dactylogramme, vers 1967 — Publié dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1967 :« Écriture et mass-media »,Preuves,no 202, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1968 :L'Art et la manière d'aborder son chef de service pour lui demander une augmentation,coll. « L'Enseignement programmé », — Réédité par Hachette en 2008
1969 :Petit abécédaire illustré,Au Moulin d'Andé, Tirage à cent exemplaires signés[ah]. — Repris dans le recueilVoeux, Seuil, 1989
1969 :« Les Horreurs de la guerre, drame alphabétique en trois actes et trois tableaux »,Union des écrivains,no 1, — Repris dans Oulipo,La Littérature potentielle, 1973
1970 :Je suis né — Repris dans le recueilJe suis né, Seuil, 1990
1972 :« Les gnocchis de l’automne[ai] ou réponse à quelques questions me concernant »,Cause commune,no 1, — Repris dans le recueilJe suis né, Seuil, 1990
1973 :« Histoire du lipogramme ; Un roman lipogrammatique ; Traductions lipogrammatiques de poèmes bien connus (Rimbaud etBaudelaire) ; Palindrome (Edna d'nilu o, mû, acéré, pseg, roeg) ; Boule de neige ; Les Horreurs de la guerre, drame alphabétique en trois actes et trois tableaux », dansOulipo,La Littérature potentielle, Gallimard,coll. « Idées »,
1973 :« Chalands et nonchalants »,Cause commune,no 7, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1973 :« La mort des choses »,Les Peintres témoins de leur temps, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1973 :« Ô images, vos suffisez à mon bonheur »,La quinzaine littéraire,no 172, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1973 :Versions latines — Repris dans le recueilVoeux, Seuil, 1989
1974 :« Experimental demonstration of the tomatotopic organisation in the Soprano (Cantatrix sopranica L.) »,Banana Split,no 2, — Repris dans le recueilCantatrix sopranica L. et autres écrits scientifiques, Seuil, 1991
1975 :« 30 banalités idiosyncratiques sur la ville deNew-York »,manuscrit, — Publié dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1975 :« Tentative d'épuisement d'un lieu parisien »,Cause Commune,no 1, — Réédité chezChristian Bourgois, 1982
1975 :Les adventures de Dixion Harry, by Georges Perec — Repris dans le recueilVoeux, Seuil, 1989
1976 :« Lire : esquisse socio-physiologique »,Esprit,no 453, — Repris dans le recueilPenser/Classer, Hachette, 1985
1976 :« Tentative d’inventaire des aliments liquides et solides que j’ai ingurgités au cours de l’année mille neuf cent soixante-quatorze »,Action poétique,no 65, — Repris dans le recueilL'Infra-ordinaire, Seuil, 1989
1976 :« La mode : douze regards obliques »,Traverses,no 3, — Repris dans le recueilPenser/Classer, Hachette, 1985
1976 :« Tentative de description d'un programme de travail pour le années à venir »,dactylogramme, — Publié dans lesCahiers Georges Perec n° 1, 1985 et repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1979 : [Treize ancrages dans l'espace] — Notes prises pendant la traversée de l'Atlantique jusqu'àEllis Island, publiées dansTexte en main n° 12, printemps-été 1997
1979 :« 11 x (11 + 11) + 11 »,Jacques Poli,Peintures entomologiques 1978-1979, Paris,Galerie Adrien Maeght, — Repris dans le recueilBeaux présents, Belles absentes, Seuil, 1994. Compléments dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1979 :« Paolo Boni, mécanicien de l'imaginaire »,dactylogramme, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1979 :« J'aime, je n'aime pas »,L'Arc,no 76, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1979 :« Ellis Island, description d’un projet »,Recherches,no 38, — Repris dans le recueilJe suis né, Seuil, 1990
1979 : Gamine de blouse, brève anthologie du jazz américain — Repris dans le recueilVoeux, Seuil, 1989
1980 :What a man !, Le castor astral,
1980 :« Considérations sur les lunettes »,Les Lunettes, — Repris dans le recueilPenser/Classer, Hachette, 1985
1980 :« 81 fiches-cuisine à l'usage des débutants »,Manger, — Repris dans le recueilPenser/Classer, Hachette, 1985.Écouter en ligne
1980 :« Distribution spatio-temporelle deCoscinoscera Victoria, Coscinoscera tigrata carpenteri, Coscinoscera punctata Barton & Coscinoscera nigrostriata d'Iputupi »,Catalogue de l'expositionCartes et figures de la terre, Centre Beaubourg, — Repris dans le recueilCantatrix sopranica L. et autres écrits scientifiques, Seuil, 1991
1980 :« Une amitié scientifique et littéraire : Léon Burp etMarcel Gotlib, suivi de Considérations nouvelles sur la vie et l’œuvre de Romuald SainSohaint »,Préface au volume II de l'édition complète hors commerce de Gotlib,Rubrique-à-brac, — Repris dans le recueilCantatrix sopranica L. et autres écrits scientifiques, Seuil, 1991
1980 :« Fragments de désert et de culture »,Traverses (Centre Georges Pompidou),no 19, — Repris dansLe Cabinet d'amateur, n° 3, printemps 1994
1980 :« Le Pacte »,Le Bout des Bordes n° 5-6, Cerisols, Obliques, — Repris dans le recueilBeaux présents, Belles absentes, Seuil, 1994
1980 :« Jacques Roubaud (1932 - ) »,notice, — Publiée dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1980 :« Alphabet pourStämpfli »,Catalogue de l'expositionPeter Stämpfli, œuvres récentes,,Centre Georges Pompidou, –Repris dansLe Cabinet d'amateur, n° 1, Les Impressions nouvelles, Printemps 1993
1980 :« Emprunts à Queneau »,Les Amis de Valentin Brû,nos 13-14,
1980 :« Questions réponses. Autobibliographie prospective pour les dix années à venir »,Action poétique,no 81,
1980-1981 :Perec/rinations, Zulma, — Jeux initialement parus dans le supplément Ile-de-France deTélérama
1980 : ROM POL — Repris dans le recueilVoeux, Seuil, 1989
1980-1982 :Jeux intéressants, parus de mai 1980 à juillet 1982 dansÇa m'intéresse, Zulma,
1981 :« X prend Y pour Z ; Anagramme saturé ; Variations lipogrammatiques, dontÀ l'OuLiPo; What a man ! , signé Gargas Parac ; Palindromes syllabiques ; Séries ; Quatre figures pourLa Vie mode d'emploi[318] », dansOulipo,Atlas de littérature potentielle, Gallimard,coll. « Idées »,
1981 :« De quelques emplois du verbehabiter »,L'Équerre-Plan Construction,, — Repris dans le recueilPenser/Classer, Hachette, 1985
1981 :« Avez-vous luHarry Mathews »,Le Monde, — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1981 :« Promenades dans Londres »,Atlas/Air France, — Repris dans le recueilL'Infra-ordinaire, Seuil, 1989
1981 :« Aimer »,La Galaxie Georges Perec, Maison du livre et des mots,Villeneuve-lès-Avignon, — Repris dans le recueilBeaux présents, Belles absentes, Seuil, 1994
1981 :« Sylvie Weil et Louise Rameau,Trésor des expressions françaises »,(préface), — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1981 :« Tout autour de Beaubourg »,Atlas/Air France, — Repris dans le recueilL'Infra-ordinaire, Seuil, 1989
1981 :« Quelques-unes des choses qu’il faudrait tout de même que je fasse avant de mourir »,France Culture, — Repris dans le recueilJe suis né, Seuil, 1990
1981 :« J.R. : Tentative de saturation onomastique »,Banana split,no 4, — Repris dansLe Cabinet d'amateur, n° 6, décembre 1997
1981 :Un petit peu plus de quatre mille poèmes en prose pourFabrizio Clerici,Action poétique (no 85),.– Réédité par Les impressions nouvelles en 1996
1981 :Dictionnaire des cinéastes — Repris dans le recueilVoeux, Seuil, 1989
1981 :« Prise d'écriture »,La Chronique des écrits en cours,no 1,– Repris dans Bernard Magné,Perecollages 1981-1988, Presses Universitaires du Mirail, 1989
1981-1982 :Nouveaux jeux intéréssants, parus dansJeune Afrique de septembre 1981 à février 1982, Zulma,
1982 :« De laBeauce àNotre-Dame de Chartres »,Préface au recueil de photomontages d'Alain Brandard,La Cathédrale de Chartres dans tous ses états, Denoël, — Repris dans le recueilCantatrix sopranica L. et autres écrits scientifiques, Seuil, 1991
1982 :CocktailQueneau — Repris dans le recueilVoeux, Seuil, 1989
[non daté] : [Un peu moins de vingt mille incipit inédits de Georges Perec],Études littéraires, Volume 23, numéro 1-2, été–automne 1990, Université de Laval.Lire en ligne
[non daté] :« L'art effaré »,Le Fou parle,nos 21-22, –Repris parLes Cahiers de l'IRCAM, n° 6, 1994.
1954 :Lettre àJean Duvignaud, publiée par le destinataire dansPerec ou la cicatrice, Actes Sud, 1993 — Reprise dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1957: Première lettre àMaurice Nadeau,Cahiers Georges Perec n° 4, 1990 — Repris dansEntretiens, conférences, textes rares, inédits, Joseph K., 2019
1971 : livret deDiminuendo, composition musicale de Bruno Gillet. Création en septembre 1971 à laBiennale de Paris, reprise en juillet 1972 auFestival d'Avignon
1972 : partition deSouvenirs d'un voyage à Thouars,
1978 : texte deScrabble Music, jeu-feuilleton radiophonique, composition musicale de Philippe Drogoz. Diffusion France-Culture, émissionLes Pouvoirs de la musique, 10, 17, 24 février et 3 et 10 mars 1978
1970 :Extraordinaires aventures de Mr Eveready, feuilleton radiophonique en 165 épisodes pour la Radio-Abidjan
1972 :AudioPerec, France Culture, Atelier de création radiophonique, 5 mars 1972. Contient :L'Augmentation, Le Petit abécédaire illustré, Diminuendo, Souvenir d'un voyage à Thouars, Tagstimmen, Oulipo : gloses et textes. 170 min.Écouter en ligne
1977 :Poésie ininterrompue, France Culture, 20 février 1977, 145 min — Publié dansGeorges Perec (CD audio + textes), André Dimanche éditeur, 1997.Écouter en ligne
1978 :Carrefour Mabillon, enregistré le 19 mai 1978, diffusé sur France Culture le 25 février 1979, 120 min — Publié dansGeorges Perec (CD audio + textes), André Dimanche éditeur, 1997.Écouter en ligne
1981 :50 choses qu'il ne faut pas oublier de faire avant de mourir, France Culture, 14 novembre 1981.Écouter en ligne
1972 :Der Mechanismus des Nervensystems im Kopf (Fonctionnement du système nerveux dans la tête), traduction d'Eugen Hemlé, première diffusion :Westdeutscher Rundfunk, 15 juin 1972
Contient :Les Choses,Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?,Un homme qui dort,La Disparition,Les Revenentes,La Vie mode d'emploi,Un cabinet d'amateur,Le Voyage d'hiver
Contient : Tome I :Les Choses,Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?,Un homme qui dort,La Disparition,Les Revenentes,Espèces d'espaces,W ou Le souvenir d'enfance,Je me souviens. Tome II :La Vie mode d'emploi,Un cabinet d'amateur,La Clôture et autres poèmes, L'Éternité,Tentative d'épuisement d'un lieu parisien,Le Voyage d'hiver,Ellis Island,L'art et la manière d'aborder son chef de service pour lui demander une augmentation,L'Augmentation
↑Perec dansW ou le Souvenir d'enfance (première partie, chapitre VIII) orthographie le nom de sa mère « Schulevitz »
↑« La graphie de son nom, Perec, est celle de son père, mais non celle de son grand-père ou de son oncle qui, eux, s'appellent Peretz » Claude Burgelin,Album Georges Perec, Gallimard, 2017, p. 14
↑Perec la raconte dans un texte de 1965 et en tire un film en 1976
↑ En janvier 2025, la mise en vente par les héritiers deSuzanne Lipinska de lettres et de textes intimes de Perec la concernant fait l'objet d'un recours en justice par les ayants-droit de Perec[33]
↑Perec note sur le manuscrit daté du 27 décembre 1956 :« Toute explication, esthétique ou métaphysique, n'aurait fait qu'enlever à ces quelques pages leur possible spontanéité. » (Cahier de l'Herne n° 116, 2016, p.33)
↑Un nombre impressionnant de figures de larhétorique classique se retrouvent dans l'index — volontairement incomplet et parfois légèrement biaisé —, mais ce recensement a été effectuéa posteriori, comme un clin d’œil supplémentaire au lecteur averti ; il n'a pas été générateur de texte[55].
↑Perec avait fait peur de la « terreur » que serait pour lui d'écrire de la poésie « librement » (Entretien avec Jean-Marie Le Sidaner,L'Arc, n° 76, 1979)
↑Perec a donné plusieurs versions de la liste de ses emprunts à Flaubert. Elles sont synthétisées dansEntretiens et conférences, Nantes, Éditions Joseph K., 2003, volume I, p. 33 note 7.
↑L'usure contrôlée, L'indestructibleRolls, Le papier roi, Les idées du jour, Trois critiques cinématographiques, Le vrai petit bistrot,Astérix au pouvoir, Éloge duhamac, Du lexique et des antiquaires, La dictature duwhisky, Esquisse d'une théorie desgadgets, Desdrugstores et de leur environnement, Lecomputeur pour tous, Lehit-parade, Pour un usage rationnel du bouillon, Principes élémentaires de la diversification, Du terrorisme desmodes, En guise de bienvenue [non publié], Le livre, le lit, le litre [non publié]
↑Entretien Georges Perec / Ewa Pawlikovska,Littératures, n° 7, printemps 1983, Presses Universitaires du Mirail, p. 70Lire en ligne
↑a etb« Pouvoirs et limites du romancier contemporain - Conférence de Warwick, 5 mai 1967 », dansParcours Perec, Presses Universitaires de Lyon,(ISBN2-7297-0365-9),p. 36-37
↑Marcel Bénabou, Introduction àWhat a man !, Le Castor astral, 1996, p.7
↑Bernard Magné, « Les Revenentes : de l'effervescence entre lengge et texte »,Perecollages 1981-1988, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail,,p. 177(ISSN0563-9751)
↑Dominique Quélen, Jean-Christophe Rebejkow, « Un cabinet d'amateur : le lecteur ébloui »,Cahiers Georges Perec, Seuil,no 6,,p. 173
↑Cité parMaxime Decout,À la manière de Georges Perec, L'Herne, n° 116, 2016, p. 82
↑Laurent Demanze,La philologie fantastique de Georges Perec, L'Herne, n° 116, 2016, p. 84
↑Espèces d'espaces. Cité par Cécile de Bary,Une mémoire fabuleuse. De l'Histoire à l'histoire, dansGeorges Perec et l'histoire,Études Romanes, n° 46, Université de Copenhague, 2000
↑Les Lieux d'une ruse, dansPenser/Classer. Cité par Daphné Schnitzer,Entrer dansLa Boutique obscure (sans se heurter à la table), Études romanes, n° 46, Université de Copenhague, 2000, p. 184
↑a etbJean-Denis Bertharion, « Je me souviens : un cryptogramme autobiographique »,Le Cabinet d'amateur, Les Impressions nouvelles,no 2,,p. 73-84 et 251
↑Lettre à Maurice Nadeau, 7 juillet 1969, citée parRégine Robin,Un projet autobiographique inédit de Georges Perec, L'Arbre,Le Cabinet d'amateur, n° 1, Les Impressions nouvelles, Printemps 1993, p. 6
↑Régine Robin, « Un projet autobiographique inédit de Georges Perec, L'Arbre »,Le Cabinet d'amateur, Les Impressions nouvelles,no 1,,p. 5-28
↑Espèces d'espaces, p. 76. Cité par Jacques-Denis Bertharion,Poétique de Georges Perec, Nizet, 1998, p. 230
↑Derek Schilling,Mémoires du quotidien : les lieux de Perec, Presses Universitaires du Septentrion,(ISBN978-2-85939-894-1),p. 156
↑Maurice Corcos,Penser la mélancolie, une lecture de Georges Perec, Albin Michel, 2005, p. 201.(ISBN978-2-226-16827-6)
↑Maurice Olender,Penser/Classer : la dynamique de l'atelier posthume de Perec,L'Herne, n° 116, 2016
↑L'Infra-ordinaire, cité par Jacques-Denis Bertharion,Poétique de Georges Perec, Nizet, 1998, p.238
↑L'infra-ordinaire, p. 12. Cité par Manet van Montfrans,Georges Perec et la contrainte du réel, Rodopi, 1999, p.135
↑Bernard Magné, « La cantatrice et la papillon, à propos de deux pastiches d'article scientifique chez Georges Perec »,Perecollages 1981-1988, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail,,p. 193-206(ISSN0563-9751)
↑Maxime Decout,À la manière de Georges Perec,L'Herne, n° 116, 2016, p. 79
↑Jean-François Jeandillou, « Verbigérations cruciverbistes : pour un dialogue énigmatique dans les mots croisés de Georges Perec »,Le Cabinet d'amateur, Les Impressions nouvelles,no 4,,p. 75-96
↑Perec a regretté que ces poèmes n'aient jamais été lus comme des poèmes, mais comme des « exploits » (Entretien avec Patrice Fardeau,France Nouvelle, 18 avril 1979, cité par Bernard Magné,Cahiers Georges Perec n° 5, Éditions du Limon, 1992, p. 49. n. 98)
↑Bernard Magné,Quelques considérations sur les poèmes hétérogrammatiques de Georges Perec,Cahiers Georges Perec, n° 5, Éditions du Limon, 1992
↑Extrait publié dansMireille Ribière, « La poésie en question dans La Clôture et autres poèmes de Georges Perec »,Le Cabinet d'amateur,(lire en ligne)
↑Éric Beaumatin, « Le traducteur et l'écrivain : interprétations, récupérations et cohérences textuelles dans la version française deHarry Mathews,Le Naufrage du stade Odradek »,Cahiers Georges Perec, Le Castor astral,no 8,,p. 191-202
↑abc etdDavid Christoffel, Thomas Baumgartel,« Les cocotiers sont arrivés », Radio Perec,L'Herne, n° 116, 2016
↑abcde etfHans Hartje, « Georges Perec et le 'neues hörspiel' allemand »,Écritures Radiophoniques, Université Blaise Pascal. Centre de recherches sur les Littératures Modernes et Contemporaines. Clermont-Ferrand.,(lire en ligne)
↑Manuscrit cité par David Bellos,Georges Perec, une vie dans les mots, édition 1994 p. 387, édition 2022, p. 377
↑La « note d'intention » et la liste des contraintes sont publiées dans lesCahiers Georges Perec n° 15, Les Venterniers, 2023, p. 124-126
↑Valentin Decoppet,« Perecallement, traduireDie Maschine en français », dansCahiers Georges Perec n° 15, Les Venterniers,(ISBN979-10-92752-98-4),p. 128 et 147
↑La « note d'intention » est publiée dans lesCahiers Georges Perec n° 15, Les Venterniers, 2023, p. 217-223
↑Présentation et graphique combinatoire sont publiés dans lesCahiers Georges Perec n° 15, Les Venterniers, 2023, p.224-227
↑Chiara Nannicini Streitberger,« Les (en)jeux radiophoniques deTagstimmen et deKonzertstück », dansCahiers Georges Perec n° 15, Les Venterniers,(ISBN979-10-92752-98-4),p. 155-165
↑LaDescription générale est publiée dans lesCahiers Georges Perec n° 15, Les Venterniers, 2023, p. 231-241
↑Hans Hartje, « Les extraordinaires aventures de Georges Perec en Oulipie »,Cahiers Georges Perec, Le Castor astral,no 8,,p. 149-169
↑a etbDes extraits de la partition sont publiés dans lesCahiers Georges Perec n° 15, Les Venterniers, 2023
↑Wilfrid Mazzorato, « Ne pas aller en cours et rédiger un devoir de mémoire : à propos du filmLes Lieux d'une fugue »,Cahiers Georges Perec, Le Castor astral,no 9,,p. 131-141(ISBN978-2-85920-679-6)
↑Jacques Bens,Oulipo 1960-1963, Christian Bourgois, 1980(ISBN2-267-00230-2) , p. 43 — Réédité sous le titreGenèse de l'Oulipo, 1960-1963, Édition revue, augmentée et présentée parJacques Duchateau, Le Castor astral, 2005(ISBN2-85920-593-4)
↑Marcel Bénabou,Petit complément à l'adresse présidentielle in Bloomfield, Lapprand, Thomas,Oulipo@50/L'Oulipo à 50 ans, p.23
↑Marcel Bénabou,Perec et la judéité,Cahiers Georges Perec, n° 1,P.O.L, 1985, p. 16
↑John Pedersen, « Histoires per excellence... Une lecture d'Un homme qui dort »,Études romanes,no 46,,p. 141(ISSN1395-9670)
↑ab etcBernard Magné, « Pour une lecture réticulée »,Cahiers Georges Perec, Éditions du Limon,no 4, 1990.
↑Bernard Magné, « Le puzzle mode d'emploi »,Perecollages 1981-1988, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail,,p. 17(ISSN0563-9751)
↑W ou le souvenir d'enfance, cité par Bernard Magné,L'autobiotexte perecquien,Le Cabinet d'amateur, n° 5, Presses Universitaires du Mirail, Juin 1997, p. 5
↑Philippe Lejeune,La Mémoire et l'oblique, Georges Perec autobiographe, P.O.L, 1991, p.12
↑Phiippe Lejeune,La mémoire et l'oblique, Georges Perec autobiographe, P.O.L,(ISBN2-86744-196-X),p. 40-48
↑Paru dans le recueilCantatrix Sopranica L., Seuil, 1991, p. 84-85
↑Jacques Lecarme, « Perec et Freud ou le mode d'emploi »,Cahiers Georges Perec, Éditions du Limon,no 4,,p. 122-123
↑Cette liste d'exemples est largement complétée dans Bernard Magné,L'autobiotexte perecquien,Le Cabinet d'amateur, n° 5, Presses Universitaires du Mirail, Juin 1997, p. 16-18
↑W, p. 65, cité par Bernard Magné,Pour une lecture réticulée,Cahiers Georges Perec, n° 4, Éditions du Limon, 1990, p.159
↑Wilfrid Mazzorato et Serge Raysséguier, « L'intervention du dix-sept »,Le Cabinet d'amateur, Les Impressions nouvelles,no 4,,p. 97-108
↑Bernard Magné,L'autobiotexte perecquien,Le Cabinet d'amateur, n° 5, Presses Universitaires du Mirail, juin 1997, p. 18
↑Entretien avec Ewa Pawlikowska,Littératures, n° 7, printemps 1983. Cité parJean-François Chassay,Le Jeu des coïncidences dans La Vie mode d'emploi, Le Castor Astral, 1992, p.30
↑Interview par Jean Royer dansLe Devoir, citée par Bernard Magné,Pour une lecture réticulée,Cahiers Georges Perec, n° 4, Éditions du Limon, 1990, p. 151
↑Le Monde, 29 septembre 1978. Cité parNicole Bilous, « Les choses dansLes Choses »,Le Cabinet d'amateur, Les Impressions nouvelles,no 1,,p. 112
↑Espèces d'espaces. Cité par Derek Schilling,Mémoires du quotidien : les lieux de Perec, Presses Universitaires du Septentrion, 2006, p. 118
↑Tentative d'épuisement d'un lieu parisien. Cité par Derek Schilling,Mémoires du quotidien : les lieux de Perec, Presses Universitaires du Septentrion, 2006, p. 118
↑Derek Schilling,Mémoires du quotidien : les lieux de Perec, Presses Universitaires du Septentrion, 2006, p. 118-128
↑Derek Schilling,Mémoires du quotidien : les lieux de Perec, Presses Universitaires du Septentrion,(ISBN978-2-85939-894-1),p. 16
↑Le Sauvage, n° 60, 1978. Cité par Marcel Bénabou,Cahiers Georges Perec, n° 8, Le Castor astral, 2004, p.21
↑Cécile de Bary,Il faut encore une fois partir de l'image du puzzle, dansGeorges Perec, réception et mythisation, Rabat, Université Mohammed-V, 2001, p. 92
↑Les Nouvelles littéraires, octobre 1978. Cité par Bernard Magné,Textus ex machina, dansPerecollages 1981-1988, Presses Universitaires du Mirail, 1989, p.219
↑Bernard Magné, « Textus ex machina (de la contrainte considérée comme machine à écrire dans quelques textes de Georges Perec) »,Percollages 1981-1988, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail,,p. 219-229
↑Jean-François Chassay,Le Jeu des coïncidences dans La Vie mode d'emploi, Le Castor Astral, 1992, p.30
↑Oulipo,Atlas de littérature potentielle, Idées/Gallimard, 1981,p. 90.
↑a etbClaude Berge et Éric Beaumatin, « Georges Perec et la combinatoire »,Cahiers Georges Perec, Éditions du Limon,no 4,,p. 83-94
↑Jean-François Chassay,Du double jeu,Cahiers Georges Perec, n° 1,P.O.L, 1985, p. 91
↑Entretien avec Ewa Pawlikowska,Littératures, n° 7, 1983. Cité parBernard Magné, « Le puzzle mode d'emploi »,Perecollages 1981-1988, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail,,p. 46(ISSN0563-9751)
↑Bernard Magné,« Quelques pièces pour un blason, ou les sept gestes de Perec », dansPortrait(s) de Georges Perec, Bibliothèque Nationale de France,(ISBN9782-7177-2153-9),p. 203
↑Éric Beaumatin,L'homme et l’œuvre, ou comment en sortir,Cahiers Georges Perec, n° 4, Éditions du Limon, 1990, p.12
↑Éric Beaumatin, « L'homme et l’œuvre, ou comment en sortir »,Cahiers Georges Perec, Éditions du Limon,no 4,,p. 11
↑Bernard Magné, « Le puzzle mode d'emploi »,Perecollages 1981-1988, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail,,p. 36(ISSN0563-9751)
↑Bernard Magné, « Le puzzle mode d'emploi »,Perecollages 1981-1988, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail,,p. 215(ISSN0563-9751)
↑W ou le souvenir d'enfance, cité par Dominique Bertelli,Des lieux d'une ruse, dansL'Œuvre de Georges Perec, réception et mythisation, Rabat, Université Mohammed-V, 2001, p. 255
↑W ou le souvenir d'enfance, cité par Dominique Bertelli,Des lieux d'une ruse, dansL'Œuvre de Georges Perec, réception et mythisation, Rabat, Université Mohammed-V, 2001, p. 261
↑Bernard Magné,« Quelques pièces pour un blason, ou les sept gestes de Perec », dansPortrait(s) de Georges Perec, Bibliothèque Nationale de France,(ISBN978-2-7177-2153-9),p. 196-198