Christophe de Grèce (1888-1940), prince de Grèce et de Danemark, qui épouse, en premières noces, la roturière américaineNancy Stewart (1878-1923) devenue, après sa conversion à l'orthodoxie, la princesse Anastasia de Grèce, puis, en secondes noces, la princesse françaiseFrançoise d'Orléans (1902-1953).
Le gouvernement grec organise, en, une consultation populaire pour élire à la tête du royaume un prince étranger ayant la faveur de ses futurs sujets. Lors de ceréférendum,Alfred du Royaume-Uni, second fils de la reineVictoria, est élu avec 230 066 voix tandis que le prince Guillaume, également désigné comme candidat possible, n’en recueille que six[b]. Cependant, le candidat anglais est écarté par les « Puissances protectrices » (Russie,France etGrande-Bretagne) qui dirigent la politique du jeune État grec. Le choix d’un fils de Victoria risquerait en effet de donner une trop grande influence au Royaume-Uni sur le gouvernement d’Athènes, et letraité de Londres de 1832 interdit aux membres des familles régnantes des « Puissances protectrices » de monter sur le trône hellène[7]. La souveraine britannique est par ailleurs opposée à cette élection : elle désire en effet voir son fils devenirduc de Saxe-Cobourg-Gotha à la suite de son oncle,Ernest II[8].
Par le truchement des grandes puissances, Guillaume ceint donc une couronne quelques mois seulement avant son père[c]. Contrairement au roi OthonIer, Guillaume n’est pas élu « roi de Grèce » mais seulement « roi des Hellènes » : c’est là la marque du refus de ses sujets d’être à nouveau dirigés par un souverain despotique. C'est aussi l'affirmation qu'il règne sur tous les Grecs, y compris ceux qui vivent en dehors duroyaume de Grèce[16],[17].
Dès son intronisation àCopenhague par une délégation grecque conduite par l'amiralKonstantínos Kanáris, les circonstances semblent favorables au nouveau monarque. Ainsi qu'il l'avait promis au moment de l'élection royale, le gouvernement britannique annonce en effet qu’il compte céder lesîles Ioniennes à la Grèce en l'honneur du souverain[18]. Malgré tout, la cession tarde à s’opérer et le jeune roi quitte leDanemark, le, plusieurs mois avant que l’archipel soit officiellement devenu grec[19].
L’arrivée du roi des Hellènes àAthènes, le, donne lieu à des scènes de liesse populaire. Pendant une semaine, l’Acropole et letemple de Zeus sont illuminés en l’honneur du jeune souverain et des festivités sont organisées dans la capitale[22],[23]. Malgré son jeune âge (il n’a pas encore dix-huit ans), Georges a été déclaré majeur par l’Assemblée hellénique le[24],[d] et c’est donc en tant que souverain de plein droit qu’il prête serment devant le Parlement grec le[25],[26].
Les premiers mois de son règne sont difficiles. Le jeune homme, dont l’attitude est parfois jugée puérile par les diplomates des puissances, s’intéresse d'abord peu à la politique. C’est donc le comteWilhelm Sponneck, choisi par Copenhague pour le conseiller, qui prend en main les rênes du pouvoir et préside leconseil des ministres. Or, l’homme d’État danois fait preuve de beaucoup de maladresses dans sa gestion des affaires du royaume, dans un contexte de fortes tensions entre les partis politiques[27].
Le drapeau des îles Ioniennes sous protectorat britannique (1814-1864).
Le (21 mai julien), les îles Ioniennes sont intégrées auroyaume hellène, au grand bonheur de leurs habitants. Cependant, le gouvernement de Georges mécontente rapidement la population locale par les mesures qu'il adopte. Il rattache en effet l'Église ionienne, qui dépendait jusque-là dupatriarche œcuménique, à l'Église grecque autocéphale et supprime l'Académie ionienne, établissement d'enseignement supérieur qui avait joué un grand rôle dans le développement dusentiment national grec. Ce faisant, il réveille le particularisme des insulaires et, à Athènes, les députés de l’archipel menacent un moment de faire appel auRoyaume-Uni pour recouvrer leur autonomie[30],[31].
Déterminé à ne pas commettre les mêmes erreurs que son prédécesseur, GeorgesIer apprend rapidement lalangue grecque[32] et s'hellénise avec l'aide de l'homme politiqueAléxandros Koumoundoúros[33]. Le roi choisit pour devise« Ma force est l’amour de mon peuple »[e] et se montre fréquemment dans les rues d’Athènes. Contrairement àOthonIer, il s'y promène sans aucune pompe et n’hésite pas à se mêler à la population, ce qui lui gagne l'attachement de ses sujets[34]. Il profite par ailleurs de chaque occasion pour parcourir la Grèce et rencontrer ses habitants[35].
Sur la scène internationale, le roi maintient une politique prudente. S’il n’est pas opposé à laGrande Idée, il est conscient de la difficulté que représente sa mise en œuvre. Il garde ainsi une attitude mesurée vis-à-vis de son voisin, l’Empire ottoman[41]. Le roi compte néanmoins sur ses relations familiales pour l’aider à réaliser l’union de tous les Grecs dans un même État. Il s’appuie particulièrement sur son beau-frère, le futurÉdouard VII du Royaume-Uni, qui est pour lui un fidèle soutien. Les liens entre les deux hommes apparaissent clairement lors de larévolte crétoise de 1866-1869, pendant laquelle le prince de Galles fait pression sur le ministre britannique des Affaires étrangères,Edward Stanley, comte de Derby, pour qu’il intervienne en faveur des Grecs contre laSublime Porte[42]. Cependant, lespuissances protectrices refusent de soutenir lesirrédentistes hellènes et les Turcs écrasent la rébellion dans le sang[43].
Heureusement pour GeorgesIer, laliste civile qui lui a été promise lors de l’élection royale est directement liée aux revenus perçus sur lesîles Ioniennes, dont la santé économique est bien meilleure que celle de la Grèce continentale, et sur le produit des remboursements que le royaume hellène doit aux puissances protectrices[46]. Le souverain n’a donc pas trop à s’inquiéter pour ses propres finances. Son train de vie reste cependant modeste, d’autant que lepalais où il réside, et qui appartenait au roiOthonIer avant le changement de dynastie, a été saccagé pendant la révolution de 1862 et que le mobilier et les objets qui le remplissaient ont été rendus à son ancien propriétaire[47],[48].
Entre difficultés politiques et bonheur familial (1866-1870)
Au printemps 1866, des réunions se déroulent dans différents villagescrétois[49] et, le, une assemblée, qui se tient près deLa Canée, rédige unepétition qu'elle envoie au sultanottoman et aux consuls des puissances européennes, parmi lesquelles laGrèce. Sans aller jusqu’à revendiquer l’indépendance de leur île, les Crétois demandent une série de réformes fiscales et politiques aux autorités ottomanes[50],[51].
Le sultanAbdülaziz adresse une réponse publique le suivant. Estimant que les Crétois jouissent, plus que n'importe quels autres sujets de l'Empire, de privilèges importants, le souverain ottoman rejette leurs demandes. Il considère par ailleurs que les Crétois se comportent en rebelles, et ordonne au gouverneur de l'île d'envoyer des troupes arrêter les meneurs du mouvement et de disperser les autres par la force[52].
Peinture représentant ledrame d'Arkadi. Le, 943 insurgés crétois réfugiés dans un monastère se donnent la mort en faisant sauter le bâtiment pour échapper à leurs assaillants ottomans et égyptiens.
Les événements crétois influent tout de même lourdement sur la vie politique grecque, et l’arrivée massive de réfugiés insulaires ainsi que l’envoi de fonds pour soutenir les révoltés pèsent sur les finances du pays. Alors que, depuis l’arrivée de Georges sur le trône, le royaume avait fait d’importants efforts d'économies, ses caisses sont à nouveau vides à l’été 1867[57]. L’insurrection compromet par ailleurs durablement les bonnes relations avecConstantinople et la Grèce et l’Empire ottoman sont au bord de la guerre lorsque la révolte est matée en[58].
Peu de temps après, GeorgesIer est invité chez le grand-ducConstantin Nikolaïevitch, frère cadet et conseiller écouté de l’empereur. Dans la résidence du prince, il fait la connaissance de sa fille aînée[h], la grande-duchesseOlga Constantinovna, alors âgée de quinze ans. L'intérêt mutuel des deux jeunes gens encourage Georges à demander officiellement la main de la princesse à ses parents. Après quelques hésitations dues à la jeunesse de sa fille, le grand-duc Constantin accepte la proposition et il est décidé que le mariage de Georges et d’Olga aurait lieu après le seizième anniversaire de la jeune fille[61].
Après des fiançailles solennelles le, les épousailles se déroulent dans la chapelle dupalais d'Hiver, à Saint-Pétersbourg, le. Les réjouissances s’étalent sur cinq jours entiers. Lors de la cérémonie, Georges a pour témoin son frère aîné, le prince héritierFrédéric de Danemark, venu tout spécialement en Russie pour le mariage, mais ses parents, retenus à Londres par un problème de santé de laprincesse de Galles, sont absents[61],[63]. Une fois les festivités terminées, Georges et Olga passent une courtelune de miel au palais deRopcha, à une cinquantaine de kilomètres de Saint-Pétersbourg. Puis, le couple part pour la Grèce le et la jeune femme découvre son nouveau pays le 24 du même mois[61],[64].
La famille royale en 1888, lors d'un séjour du grand-ducPaul Alexandrovitch de Russie à Athènes. Sur la photo, apparaissent, de gauche à droite, le princeNicolas, la princesseMarie (assise par terre), la reineOlga, le diadoqueConstantin (debout au milieu), le grand-duc Paul (avec un petit chien sur les genoux), la princesseAlexandra, le roi GeorgesIer et le princeGeorges.
En Grèce, la vie de la famille royale est relativement tranquille et retirée. Lacour athénienne est loin d’être aussi brillante et fastueuse que celle des autres États européens[72] et les journées, dans la capitale grecque, sont parfois monotones pour les membres de la famille royale[73]. Au printemps et en hiver, elles se partagent entre lepalais royal de laplace Sýntagma (àAthènes) et celui deTatoï (au pied duParnès). Pendant les quatre mois d'été, elles se déroulent au palais deMon Repos (àCorfou) et à l’étranger : àAix-les-Bains (enFrance), àFredensborg (auDanemark) ou dans lacapitale russe[74]. Les parents étrangers de Georges et d’Olga (latsarine, letsarévitch, laprincesse de Galles, etc.), se rendent par ailleurs à plusieurs reprises en Grèce[75].
Lorsqu'elle se trouve dans la capitale grecque, il n'est pas rare que la famille royale se rende, le dimanche, àPhalère, pour y marcher au bord de l'eau. Georges, Olga et leurs enfants prennent alors l'omnibus à cheval qui passe devant le palais et dans lequel un compartiment leur est réservé. L'omnibus s'arrête, les trompettes du palais sonnent et la famille royale sort rapidement, afin de montrer ostensiblement son désir de ne pas faire attendre trop longtemps les autres passagers. Cette attitude rapproche la famille royale de la population et fait beaucoup pour entretenir une popularité parfois vacillante. GeorgesIer a coutume de répéter à ses enfants :« N'oubliez jamais que vous êtes des étrangers parmi les Grecs, et faites en sorte qu'ils ne s'en souviennent jamais »[75].
Malgré tout, le roi n’est pas sans traverser des moments denostalgie. C’est la raison pour laquelle il fait discrètement installer une ferme laitière, tenue par des Danois, sur les terres du palais deTatoï, acquis en 1871. L’endroit est, pour lui, un lieu de repos bucolique où il a tout le loisir de renouer avec ses souvenirs d’enfance. La reine Olga est par contre beaucoup moins discrète dans l’expression de son mal du pays et visite très régulièrement les navires russes qui font escale auPirée[76].
Un an après la fin de l’insurrection crétoise, le, un groupe de touristes occidentaux, parmi lesquelsLord et Lady Muncaster, le secrétaire de l’ambassade britannique E. H. C. Herbert (cousin ducomte de Carnavon), Frederick Vyner (beau-frère dumarquis de Ripon[k]), le comte Boyl di Putifigari, secrétaire de l'ambassade italienne, etM. et Mrs Lloyd[77], est pris en otage par une bande de vingt-cinqbrigands alors qu’il se dirige vers le site deMarathon. Les bandits, dirigés par les frères Arvanitakis, exigent, pour la libération de leurs prisonniers, une rançon de25 000livres. Afin de récupérer cet argent, ils rendent leur liberté à plusieurs des otages (et à toutes les femmes) et les envoient àAthènes, où ils doivent informer leurs gouvernements de ce qui vient de se passer[78],[79],[80].
Le roi et les plus hauts dignitaires du pays assistent aux funérailles officielles des victimes organisées à Athènes. À l’étranger, et surtout enGrande-Bretagne, l’émotion est immense etles journaux se déchaînent contre le royaume de Grèce et sa population. Dans le pays même, l’assassinat est perçu comme une honte nationale et il est suivi d’un durcissement de la lutte contre le brigandage. Dans les provinces du Nord, où les hors-la-loi profitent de la proximité de lafrontière avec l'Empire ottoman pour s'y réfugier, lagendarmerie est renforcée et les crédits accordés à la surveillance de la frontière sont augmentés[83],[84],[85].
Évolution politique et expansion territoriale (1871-1881)
L'homme politiqueCharílaos Trikoúpis à la tribune duParlement. Tableau de N. Orlof datant de la fin des années 1880.
De 1864 à 1874, vingt-et-un gouvernements se succèdent et le plus long ne dure qu’un an et demi[l].Charílaos Trikoúpis dénonce cette instabilité ministérielle dans un article anonyme intitulé « Τί φτάει ; » (« À qui la faute ? ») publié dans le journalKairoi en. Il blâme le roi GeorgesIer et ses conseillers pour la continuelle crise politique que connaît le pays. Il accuse le souverain de se conduire enmonarque absolu en imposant ungouvernement minoritaire à son peuple. Selon lui, si le souverain insistait pour que seuls des hommes politiques appartenant à une majorité élue à laVoulí soient nommés Premiers ministres, alors les députés seraient obligés de travailler ensemble de façon plus harmonieuse et de constituer des gouvernements de coalition. Pour Trikoúpis, une telle attitude mettrait fin à l’instabilité politique et réduirait en outre le nombre des petits partis qui pullulent dans le pays[86].
Peu de temps après, Trikoúpis admet être l’auteur de cet article afin de protéger l’individu que la police a arrêté pour l’avoir écrit. Il est placé à son tour en détention, mais il est ensuite acquitté des charges d'« atteinte à l’ordre constitutionnel » qui pèsent sur lui et relâché[86]. L’année suivante, le roi demande à Trikoúpis de former un nouveau gouvernement (sans majorité parlementaire) puis prononce undiscours du Trône où il déclare que, dorénavant, le leader de la majorité parlementaire serait désignéPremier ministre[86],[87],[88].
La Russie se préparant à lâcher les chiens de la guerre sur les Balkans, tandis que la Grande-Bretagne l’avertit de prendre garde à ce qu’elle fait. Caricature du magazine anglaisPunch du.
De son côté, la Grèce se montre plus conciliante avec l’Empire ottoman. Convaincue que le réveil national des peuplesbalkaniques et la montée du panslavisme représentent un danger pour lepanhellénisme et laGrande Idée, la diplomatie grecque cherche à préserver la paix et à empêcher de nouveaux soulèvements à l’intérieur des provinces chrétiennes de la Turquie. Athènes espère, en échange, obtenir de laSublime Porte des compensations territoriales enÉpire, enThessalie et enCrète ou, au moins, des avantages sur ses frontières. La Grèce souhaite en effet bénéficier du raccordement de sonréseau ferroviaire auchemin de fer serbe. Surtout, Athènes cherche à empêcher le projet deConstantinople d’installer des colonscircassiens en Épire et en Thessalie. Mais, une fois l'ordre à peu près rétabli sur son territoire et après avoir fait mine d’accepter les demandes grecques, l’Empire ottoman fait marche arrière. Se sentant trahi par son voisin, le royaume hellène retourne à sa politique traditionnelle de défiance vis-à-vis de la Porte[91].
Tableau de Konstantin Makovsky,Les martyres bulgares (1877).
Le,Saint-Pétersbourg déclare la guerre à la Turquie pour soutenir lesBulgares. La Serbie, le Monténégro et laRoumanie se joignent aux armées du grand-ducNicolas Nikolaïevitch[92]. Face à ces événements, la Grèce est partagée sur la politique à suivre. Le roi GeorgesIer et son gouvernement craignent en effet les visées de la Russie sur Constantinople et celles des Serbes et des Bulgares sur laMacédoine. Ils sont cependant conscients que l’Empire ottoman est en grande difficulté et que l’entrée en guerre d’Athènes pourrait donner lieu à un important accroissement territorial pour le royaume hellène. La Grèce cherche donc à conclure une alliance avec la Russie, mais celle-ci se montre réticente. Convaincue que la victoire lui est acquise, Saint-Pétersbourg veut empêcher les Grecs de s’opposer à son projet deGrande Bulgarie[93]. Athènes se tourne donc vers laGrande-Bretagne, qui soutient traditionnellement la Porte, afin d’obtenir des compensations territoriales en échange de saneutralité. Cependant, Londres ne fait que de vagues promesses au gouvernement de Georges[94] et la Grèce décide de favoriser l’insurrection des populations hellènes de l'Empire ottoman afin de pouvoir peser sur d’éventuelles négociations de paix entre les puissances belligérantes[95]. Une nouvelle fois, laCrète se soulève et des révoltes se produisent également en Thessalie et enÉpire[96],[97].
La Grande Bulgarie du traité de San Stefano (1878).
Le, la Russie et l’Empire ottoman signent letraité de San Stefano, qui donne naissance à une vasteBulgarie autonome comprenant la majeure partie de la Macédoine et une grande partie de laThrace. La Roumanie, la Serbie et le Monténégro sont agrandis et obtiennent leur pleine indépendance tandis que le gouvernement des autres provinces chrétiennes de l’Empire ottoman est réformé sous l’égide de la Russie. En fait, seule une minuscule partie de la Thessalie et de l'Épire doit être concédée à la Grèce[m], qui perd toute influence dans les Balkans[101].
L'expansion territoriale de laGrèce entre 1832 et 1947.
Alors que la guerre semble sur le point de reprendre[102] et que l’Empire ottoman continue à être secoué par la révolte de ses populations hellénophones[103], uncongrès international est convoqué à Berlin par les grandes puissances au mois de. Sous l’égide du chancelierOtto von Bismarck, les diplomates européens discutent du sort de l’Empire turc et la Russie se retrouve bientôt isolée[104]. Avec la signature dutraité de Berlin, la Bulgarie est en effet divisée en deux provinces (laBulgarie septentrionale et laRoumélie orientale), et seule la première reçoit une réelle autonomie. Surtout, les territoires bulgares sont amputés de laMacédoine et de laThrace, ce qui représente un grand soulagement pour la Grèce. LaRoumanie, laSerbie et leMonténégro voient leur indépendance une nouvelle fois reconnue mais leurs gains territoriaux sont quelque peu amoindris. LaBosnie-Herzégovine est occupée par l’Autriche-Hongrie etChypre par le Royaume-Uni[n]. Enfin, des réformes doivent être organisées sous la surveillance des grandes puissances (et plus seulement de la Russie) dans les autres provinces balkaniques de l’Empire ottoman[105]. La Grèce, qui a demandé durant le congrès qu'on lui cède laCrète, l’Épire et laThessalie[106],[107], obtient en partie satisfaction. Le traité de Berlin invite en effetConstantinople etAthènes à se mettre d'accord sur un nouveautracé frontalier et précise que les puissances pourraient exercer leur médiation si les deux pays ne parviennent pas à un accord. La Crète n'est cependant pas concernée par le traité et l'énosis ne peut donc pas être réalisée[108].
Après le congrès, laSublime Porte cherche toutefois à retarder l'application des réformes prévues et, en 1880, les nouvelles frontières balkaniques ne sont toujours pas délimitées. Une proposition très favorable à la Grèce, incluant lemont Olympe et la ville deIoannina dans les territoires devant lui revenir, est faite par les Britanniques et les Français au mois de juin. Les Turcs s'opposent à ce projet etCharílaos Trikoúpis commet l’erreur de menacer l’Empire ottoman d’une mobilisation de son armée. Le remplacement deCharles de Freycinet parJules Ferry commeprésident du Conseil enFrance provoque des dissensions entre les grandes puissances et permet aux Ottomans de ne livrer aux Grecs que la Thessalie et la partie de l’Épire située autour d’Arta. Lorsque le gouvernement de Trikoúpis est renversé, le nouveau Premier ministre grec,Aléxandros Koumoundoúros, accepte à contrecœur les nouvelles délimitations territoriales[109],[110].
Entre agitation nationale et vie familiale (1882-1898)
Le Premier ministre mobilise donc l’armée hellène dans le but d'attaquer l'Empire ottoman. Cependant, la Grande-Bretagne et la France organisent un blocus maritime du pays pour l'empêcher de s'en prendre à son voisin. Pour la Grèce, l'intervention étrangère est d'autant plus humiliante que, du côté de laRoyal Navy, l’amiral chargé du blocus n’est autre que le princeAlfred du Royaume-Uni, c’est-à-dire l’homme que les Grecs avaient d’abord élu comme roi en 1863[109],[114]. Sous la pression des forces étrangères, Deligiánnis est donc contraint de démobiliser l’armée etCharílaos Trikoúpis redevient Premier ministre[109]. Entre 1882 et 1897, les deux hommes alternent à la tête du gouvernement[115].
L’événement est un complet succès pour la monarchie. À de nombreuses occasions durant cette semaine de réjouissances, le roi est acclamé par la foule. Malgré ses origines étrangères et les réussites limitées de sa politique, le souverain est en effet parvenu à se faire aimer et respecter de ses sujets[117].
L'année suivant le jubilé royal, deux des enfants de Georges et d'Olga se marient. Le, la princesseAlexandra épouse, àSaint-Pétersbourg, son cousin le grand-ducPaul Alexandrovitch de Russie, sixième fils de l’ancien tsarAlexandre II. Pour Olga, restée très attachée à sa terre natale, l’événement est un grand moment de bonheur mais, pour Georges, dont Alexandra est la fille préférée, c’est aussi une séparation qui lui pèse énormément[118],[119].
La princesse Alexandra de Grèce et sa fille, la grande-duchesseMaria Pavlovna de Russie, en 1890.
En, la princesseAlexandra de Grèce qui, à l’âge de21 ans, a déjà donné naissance à unepetite fille l’année précédente, est enceinte de sept mois. Le, elle visite le domaine princier d’Ilynskoe avec son mari. Lors d’une promenade le long des berges de laMoskova, elle fait une chute en sautant sur un bateau amarré à la rive. L’incident semble d’abord bénin, mais, le lendemain soir, la jeune femme est en proie à de vives douleurs et s'effondre durant un bal. L’accouchement se déclenche et Alexandra donne naissance à un fils prématuré, le grand-ducDimitri Pavlovitch de Russie. Cependant, la princesse tombe dans lecoma et trouve la mort six jours plus tard, le[130],[131].
Lorsque Alexandra perd conscience, GeorgesIer et le reste de la famille royale de Grèce se trouvent àFredensborg, au Danemark. Mis au courant de la tragédie par télégramme, les parents de la princesse traversent l’Europe orientale pour gagner Ilynskoe. Ils arrivent au chevet de leur fille peu de temps avant sa mort. Après des funérailles officielles à Saint-Pétersbourg, la famille royale rentre en Grèce, mais la perte de sa fille préférée laisse le roi dans une très grande tristesse. Il lui faut plusieurs mois pour retrouver un rythme de vie normal[130],[131].
Un an plus tard, en, leCongrès olympique dirigé par le baronPierre de Coubertin vote à l’unanimité la restauration desJeux olympiques. La ville d’Athènes est alors choisie comme ville hôte de la première compétition internationale, qui doit se tenir en 1896[136]. Dans le royaume hellène, le choix de la Grèce pour accueillir l’événement suscite l’enthousiasme. Le coût du projet rend cependant le gouvernement de Charílaos Trikoúpis réticent et il faut notamment l’intervention du mécèneGeorges Averoff pour que les Jeux soient effectivement organisés[137].
Le, la cérémonie d’ouverture des Jeux est présidée par le roi Georges dans leStade panathénaïque, rénové pour l’occasion. Dans les jours qui suivent, de nombreuses épreuves sont organisées par les fils du roi, et le princeGeorges est même président des arbitres[138]. Pour la population, les Jeux sont un grand moment de fierté nationale et, lorsque le bergerSpyrídon Loúis remporte l'épreuve demarathon, le diadoqueConstantin saute des gradins pour courir à ses côtés sur les derniers mètres tandis que le monarque se lève pour les applaudir[139].
Alors qu’Athènes avait auparavant joué l’apaisement, le Premier ministreTheódoros Deligiánnis décide d'apporter son soutien aux insurgés. Contraint par la vague denationalisme qui s'empare du pays, le roi envoie alors son deuxième fils, le princeGeorges, qui est officier dans lamarine hellénique, prendre possession de l’île[143]. Un corps expéditionnaire de 1 400 soldats placés sous le commandement du colonelTimoléon Vássos, aide de camp du souverain, est par ailleurs envoyé en Crète afin de mettre en œuvre le rattachement du territoire à la Grèce[144]. Cependant, les grandes puissances s’opposent à l’expansion territoriale grecque et annoncent, le, que la Crète doit être placée sous administration autonome. Londres, Paris et Saint-Pétersbourg ordonnent par ailleurs aux armées turque et grecque de se retirer[145],[146].
Représentation de labataille de Domokos parFausto Zonaro. Livrée le, elle oppose les troupes ottomanes du généralEdhem Pacha aux forces grecques commandées par le diadoqueConstantin. Battues, ces dernières sont alors contraintes de se retirer.
Pourtant, l’armée ottomane est bien mieux préparée que l'armée grecque. Les soldats hellènes sont rapidement obligés de battre en retraite et, à la fin du mois d’, la guerre est perdue. Elle devient alors connue sous le nom humiliant de « guerre de Trente jours ». Grâce à l’intervention duprince de Galles et du tsarNicolas II de Russie, les conséquences de la défaite sont considérablement atténuées pour la Grèce, mais le pays est tout de même forcé de renoncer à la Crète, de faire quelques concessions territoriales mineures à l’Empire ottoman et de lui verser une indemnité de 4 000 000 delivres turques[152].
En dépit de la défaite de la Grèce face à l'Empire ottoman, l’agitation reste forte en Crète et le vice-consul britannique y est assassiné[155]. Les grandes puissances proposent alors de faire du princeGeorges le gouverneur de l’île sous la suzeraineté du Sultan, ce qui placede facto la Crète sous domination grecque, avec cependant unstatut d'autonomie[156],[157],[158].
Après le désastre de laguerre de Trente jours, la société grecque connaît une grave crise morale qui aboutit à une remise en cause des élites et au développement de violences politiques, dont le point culminant est l’assassinat du Premier ministreTheódoros Deligiánnis, le. Cherchant à expliquer les raisons de l’échec de laGrande Idée, les Grecs se focalisent sur laquestion linguistique, qui divise le pays. Depuis sonindépendance, le royaume hellène vit en effet en situation dediglossie : la langue officielle (oukatharévousa) est une version archaïsante dugrec moderne et la langue populaire (oudhimotiki) n’est pas employée dans la vie publique. Si la katharévousa est incompréhensible pour la majeure partie de la population, elle a l’avantage de ne pas employer de mots d’origine étrangère et est donc considérée comme une langue plus pure que la dhimotiki, qui a intégré dans son vocabulaire de nombreux termes d’origineturque ouitalienne[159].
Représentation de l'émeute du, point culminant de la révolte de l'Evangelika.
Déjà compromise par la défaite de 1897, la famille royale est directement éclaboussée par la question linguistique en 1901. En novembre de cette année, la reineOlga est en effet impliquée dans une affaire qui touche à la traduction desÉvangiles en grec moderne et qui aboutit à des émeutes meurtrières àAthènes[163]. L’événement, connu sous le nom d’« Evangelika », aboutit à la chute du ministèreTheotókis, à la démission du métropoliteProcope II et au renvoi des chefs de la police et de lagendarmerie. Il contribue par ailleurs à renforcer la défiance entre le souverain et son peuple[164].
Dans l’île, la charge confiée au second fils du roi, le princeGeorges, est donc loin d’être de tout repos. La population se montre peu satisfaite de la solution intermédiaire que lui imposent les étrangers et des émeutes continuent à se produire. Dans le même temps, les grandes puissances se comportent plus en conquérantes qu’en libératrices : elles occupent chacune une partie du territoire et se montrent incapables de s’entendre. Le prince a en outre parfois le sentiment de n’être pas soutenu par le gouvernement grec, trop échaudé par laguerre qu’il a perdue en 1897 pour s’investir vraiment dans les affaires crétoises. À un enthousiasme général succède donc une déception, aggravée par la mainmise des conseillers athéniens de Georges sur les meilleurs postes et charges administratives insulaires[168],[169].
Le prince Georges, deuxième fils du roi des Hellènes et haut-commissaire de la Crète autonome.
Pour faire face à l’instabilité qui règne enCrète, le prince choisit de gouverner sans s'appuyer sur l'Assemblée du territoire. En agissant ainsi, il s’attire les foudres d’Elefthérios Venizélos, ministre de la Justice du gouvernement insulaire. Les deux hommes entrent bientôt dans un conflit ouvert qui déstabilise davantage l’île[170]. En, Venizélos convoque uneassemblée révolutionnaire à Thérissos, dans les collines près deLa Canée. En avril, l'agitation annexionniste s'accentue dans l'île. La nouvelle assemblée nationale crétoise, tout juste élue, vote la réunion avec la Grèce. Tous les fonctionnaires, même lesgendarmes ou les plus proches conseillers du prince, cessent d'exercer leurs fonctions au nom de laCrète autonome et attendent de reprendre leur service au nom du roi des Hellènes. Georges lui-même est prêt à rejoindre le parti annexionniste, mais il reste tenu par son engagement auprès des grandes puissances. L'agitationvénizéliste est par ailleurs aussi dirigée contre lui et il doit donc se prononcer contre uneénosis pour laquelle il œuvre depuis qu'il est haut-commissaire[171].
Georges déclare la loi martiale, mais la présence de deux gouvernements parallèles amène à un semblant de guerre civile et des affrontements font plusieurs victimes dans la région deLa Canée[172]. Fin, le prince songe à démissionner de ses fonctions de haut-commissaire mais il en est dissuadé par son père, à qui il s'en est ouvert, et par le gouvernement grec deDimítrios Rállis[173]. L’année suivante, les élections à l’assemblée officielle montrent la profonde division de la population crétoise : 38 127 personnes soutiennent le prince tandis que 33 279 autres offrent leurs voix aux partisans de Venizélos. Une révolte ouverte se déclare, pendant laquelle la gendarmerie insulaire reste fidèle au prince Georges tout en tentant d'effectuer son travail le plus objectivement possible[170].
En 1906, la diplomatie britannique organise des négociations entre les deux camps. Les puissances essaient de modifier le statut de la Crète en proposant une sorte d'hellénisation progressive tout en maintenant les symboles de la souveraineté ottomane. Ce projet est présenté le au prince Georges qui préfère démissionner de ses fonctions de haut-commissaire le[174]. Les vénizélistes acceptent quant à eux le projet occidental[170],[175]. Une concession supplémentaire est faite aux partisans de l'énosis : le roi Georges obtient le droit de nommer le successeur de son fils au poste de haut-commissaire. La Crète entre alors dans une sorte d'union personnelle avec la Grèce. L'ancienPremier ministre grecAléxandros Zaïmis est désigné pour succéder au prince. Le, ce dernier quitte définitivement l'île[170],[176].
En réponse à larévolution des Jeunes-Turcs de 1908, les soutiens de Venizélos deviennent encore plus nombreux. Le, l’Assemblée crétoise vote une résolution en faveur de l’union de l’île à la Grèce, et ce malgré les réserves du gouvernement hellène deGeórgios Theotókis et les objections des grandes puissances[177].
Sans être réellement annexée par le royaume hellène, l’île est donc,de facto, détachée de l’Empire ottoman. Sur le continent, cependant, la pusillanimité du roi et du gouvernement choque, et cela particulièrement chez les militaires. Le, un groupe d’officiers, réunis dans laLigue militaire (engrec :Στρατιωκικός Σύνδεσμος /Stratiotikos Syndesmos), organise uncoup d'État contre le gouvernement : c’est le « coup de Goudi ». Bien que se déclarant monarchistes, les membres de la Ligue, dirigée parNikólaos Zorbás, demandent notamment au souverain de démettre ses fils de l’armée. Officiellement, il s'agit de protéger les princes des jalousies que pourraient faire naître leurs amitiés avec certains militaires. Mais la réalité est bien différente : les officiers continuent en effet à juger le diadoque responsable du traumatisme de laguerre de 1897[178]. La situation est si tendue que les fils de GeorgesIer se voient contraints de démissionner de leurs postes militaires pour épargner à leur père la honte de devoir les renvoyer[179]. Le diadoque est par ailleurs conduit à quitter la Grèce avec son épouse et leurs enfants. La famille s'installe alors, pour plusieurs mois, àKronberg, enAllemagne[180].
Cependant, Venizélos ne cherche pas à affaiblir ladynastie des Glücksbourg. Pour montrer qu'il n'obéit pas à l'armée, le Premier ministre replace, en 1911, le diadoque à la tête de l'état-major[o],[184]. Bientôt, sous la supervision de Constantin et de celle du Premier ministre, l’armée hellène est modernisée et équipée, avec lesoutien d’officiers français et anglais. De nouveaux navires de guerre sont également commandés par la marine. Le but de cette modernisation est de rendre le pays prêt à une nouvelle guerre contre l'Empire ottoman[185],[186],[187].
Du côté grec, le conflit se déroule sur deux fronts : dans le Nord-Est du pays, vers laThessalie et laMacédoine, et dans le Nord-Ouest, vers l'Épire. Les troupes hellènes, composées de 120 000 hommes, sont donc divisées en deux armées, et celle qui se dirige vers le nord-est est commandée par le diadoqueConstantin. Selon les ordres du roi et d'Elefthérios Venizélos, cette armée a pour objectif d'atteindre la ville deThessalonique avant les forces bulgares. Il s’agit là d’un objectif principalement politique et symbolique, qui va à l'encontre du sentiment de l’état-major. En effet, le diadoque et ses hommes préfèreraient marcher surBitola, dans l’actuellerépublique de Macédoine. L’objectif serait alors d'abord militaire : Bitola étant la principale place forte turque de la région, sa conquête permettrait de vaincre totalement les troupes ottomanes et de prendre ainsi une revanche sur ladéfaite de 1897. La prise de Bitola donnerait aussi à la Grèce le contrôle de la quasi-totalité de la Macédoine[189].
L'armée grecque entrant dans Thessalonique (1912).
Après une vingtaine de jours de combats victorieux, les troupes du diadoque arrivent aux portes de Thessalonique et encerclent la ville. Le commandant de la cité et de laIIIe armée turque,Hasan Tahsin Pacha, juge alors sa situation intenable. Il demande à ouvrir des pourparlers avec l'état-major grec, ainsi qu'avec les représentants bulgares, dont l’armée approche à grands pas de la ville. Cependant, les Grecs font aux Turcs des conditions plus favorables et le commandant se rend au diadoque. Les troupes grecques, avec à leur tête Constantin et d'autres membres de la famille royale[p], entrent dans Thessalonique le, jour de la fête de son saint patron,saint Dimitrios[188],[191]. L’événement donne lieu à des scènes de liesse populaire et les princes sont ovationnés par la foule. La reddition d’Hussein Tashin-Pacha, qui remet symboliquement son épée à Constantin à l’intérieur même du palais des gouverneurs, est le point d'orgue de cette journée[192].
Cependant, les forces hellènes ne précèdent que de quelques heures les troupes bulgares, commandées par le généralGueorgui Todorov et les princesBoris etCyrille. Mécontent de la victoire grecque, Todorov déclare à Constantin qu’étant donné que laBulgarie et la Grèce sont alliées dans le conflit, leurs armées doivent occuper conjointement la capitale macédonienne. Le diadoque lui répond alors que ce sont les Grecs qui ont obtenu la reddition de Thessalonique et que c’est à eux seuls de la tenir. Les relations entre les deux armées sont donc très tendues[192]. Cependant, après une visite du roiFerdinand Ier de Bulgarie dans la ville,Athènes etSofia conviennent de reporter la question de la possession de Thessalonique au moment des pourparlers de paix, même si ce sont bien les troupes hellènes qui l'occupent[193].
Une fois la ville conquise, Constantin en devient gouverneur. Il accueille son père, le roi GeorgesIer, et le Premier ministreElefthérios Venizélos, dans la ville, le. Lors de cet événement, la famille royale est une nouvelle fois acclamée et des démonstrations de joie se produisent dans les rues[194]. L’héritier du trône ne perd cependant pas de vue ses objectifs militaires. Souhaitant toujours prendre Bitola, il envoie ses troupes en direction de la Macédoine centrale, où elles remportent de nouvelles victoires[190].
Désireux de tirer avantage de la popularité du diadoque pour renforcer sa dynastie, GeorgesIer prend la décision d’abdiquer en sa faveur. ÀThessalonique, le roi informe ainsi safamille, qu’il souhaite quitter le pouvoir à l’occasion de sonjubilé d'or, qui doit avoir lieu en octobre. Le monarque explique alors qu’il n’a plus assez de vigueur pour continuer à gouverner et que Constantin a désormais l’âge idéal et l'envergure nécessaire pour le remplacer[195],[196].
Conscientes que l'assassinat du roi dans une ville largement peuplée deSlaves pourrait raviver les tensions avec laBulgarie, les autorités refusent tout motif politique aurégicide et déclarent que Schinás est un déséquilibré alcoolique. Arrêté par la police, l'homme est placé en détention mais il meurt avant son procès, en sedéfenestrant de sa prison, le[198],[199].
Après avoir été rapatriée parbateau dans la capitale grecque, la dépouille du roi, entourée des drapeaux grec et danois, est placée dans lacathédrale d’Athènes et exposée publiquement pendant trois jours. Le corps du monarque est ensuite inhumé dans les jardins du palais royal deTatoï, que GeorgesIer affectionnait tout particulièrement[200].
Surtout, le successeur de Georges, le roiConstantinIer, est loin d’avoir la même personnalité que son père et son opposition au Premier ministreElefthérios Venizélos est à l'origine de difficultés politiques. Le nouveau souverain n’ayant jamais été formé aux affaires d’État par Georges, il fait en outre preuve de beaucoup de maladresse, dont les conséquences se révèlent désastreuses lors de laPremière Guerre mondiale[202].
En 1905, deux timbres crétois de la série « révolte de Therissos » représentant le portrait du roi ;
En 1912-1913, un timbre grec de la série « lutte contre la tuberculose » (jamais mis en circulation), montrant le roi et son épouseOlga entourés d'Héraclès et d'une couronne royale ;
En 1939, cinq timbres grecs de la série « intégration des îles Ioniennes », représentant le roi GeorgesIer et la reineVictoria à l'occasion des 75 ans du rattachement desîles Ioniennes ;
En 1956 et 1957, deux timbres grecs des séries « Rois de Grèce A » et « B » montrant le portrait du roi ;
En 1915, l’ordre de GeorgesIer (grec moderne :Βασιλικόν Τάγμα Γεωργίου Α' /Vasilikón tágma Yeoryíou A) est créé par le roiConstantinIer en souvenir de son père pour honorer les civils et les militaires qui ont œuvré pour leur pays[213].
ÀThessalonique, une salle de l'orphelinat Papafeio, où a été conduite la dépouille deGeorgesIer après l'attentat perpétré parAléxandros Schinás, abrite un petit musée consacré au premierroi des Hellènes depuis 1960[218].
JoëlleDalègre,Grecs et Ottomans 1453-1923 : de la chute de Constantinople à la disparition de l'Empire ottoman, Paris,L'Harmattan,, 264 p.(ISBN2747521621).
ÉdouardDriault et MichelLhéritier,Histoire diplomatique de la Grèce de 1821 à nos jours : La Grèce et la Grande Guerre - De la Révolution turque au traité de Lausanne (1908-1923),t. V, PUF,(lire en ligne).
MarcTerrades,Le Drame de l'hellénisme : Ion Dragoumis (1878-1920) et la question nationale en Grèce au début duXXe siècle, L'Harmattan, coll. « Études grecques »,(ISBN2-7475-7788-0).
↑Un premier décret, promulgué le, a d’abord reconnu la seule déposition du roi Othon et de sonépouse. Mais, le, un nouveau décret proclame la déchéance de la dynastie desWittelsbach tout entière (Driault et Lhéritier 1926,p. 7 et 54-55).
↑Édouard Driault et Michel Lhéritier nous apprennent ainsi que, rien que« pour l’empruntRothschild de 1832, la Grèce était redevable aux puissances garantes d’un arriéré de 95 millions, capital et intérêt, et chaque année, la France, l’Angleterre [et] la Russie versaient pour son compte à la maison Rothschild une somme d’environ 4 millions, intérêts et amortissement compris. […] En 1859 les puissances avaient consenti à n’exiger que 900 000 francs par an jusqu’en 1864. Mais la Grèce ne s’était pas acquittée des annuités de 1861, 1862, 1863. » (Driault et Lhéritier 1926,p. 142).
↑Très apprécié des Grecs, le prince Jean arrive à Athènes le et reste au pouvoir jusqu'au retour du roi le (Driault et Lhéritier 1926,p. 235).
↑En réalité, les deux jeunes gens s’étaient déjà rencontrés en 1863, lorsque Georges était venu en Russie pour remercier le tsar de son soutien lors de son élection. Cependant, Olga était alors âgée de douze ans et il ne semble pas qu’elle ait alors fait grande impression au souverain (Van der Kiste 1994,p. 25 etChristmas 1914,p. 81).
↑Avec le princeAndré, Olga et Georges s’expriment malgré tout en grec, car leur fils se montre très patriote et refuse d’utiliser une langue étrangère avec sa famille (Mateos Sáinz de Medrano 2004,p. 73).
↑En 1886, lorsque le Royaume-Uni organise le blocus de la Grèce avec sa marine, le marquis de Ripon estPremier Lord de l'Amirauté et c'est donc lui qui est aux commandes de laRoyal Navy.
↑À cette époque, les Grecs s'intéressent peu à Chypre, qu'ils considèrent cependant comme un territoire hellène. Satisfaits de la présence britannique dans l'île, ils espèrent sans doute que la province connaîtrait un sort similaire à celui desîles Ioniennes.
↑Venizélos se justifie alors en déclarant devant leParlement hellénique qu’il considère que le diadoque a« d’exceptionnels dons militaires comme peu d’officiers expérimentés en possèdent » (« exceptional military abilities such as few senior officers possess »). Il n’a pas toujours des mots aussi élogieux vis-à-vis de Constantin (Van der Kiste 1994,p. 70).
↑ThéodoreVirlet d'Aoust,Histoire des Kaïmênis ou îles volcaniques nouvelles du golfe de Santorin dans l'archipel de la Grèce, Clichy, imprimerie de M. Loignon,(lire en ligne),p. 12.
↑Michel & BéatriceWattel,Les Grand'Croix de la Légion d'honneur de 1805 à nos jours : Titulaires français et étrangers, Paris, Archives & Culture,(ISBN978-2-35077-135-9),p. 429.
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