Plusieurs définitions en ont été données[1] : étude des « relations entre les facteurs géographiques et les entités politiques » (André-Louis Sanguin) ; « discipline qui essaie d’expliquer la formation et l’action des puissances politiques dans l’espace » (Fondation des études pour la défense nationale) ; « analyse géographique de situations socio-politiques » (Michel Foucher). Historiquement le terme géopolitique désigne les rapports de pouvoir entre États mais le terme s'applique plus généralement à l'étude des rapports de pouvoir dans l'espace quelle qu'en soit l'échelle, y compris donc à une échelle locale[2].
On trouve des réflexions géopolitiques chez des auteurs de l'ère classique commeMontesquieu. Toutefois, c'est enAllemagne que la notion se construit auXIXe siècle, sous l'impulsion fondatrice deFriedrich Ratzel. La discipline se développe ensuite en France, en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Parce qu'elle a servi à légitimer l'expansionnisme allemand puis l'idéologie nazie, cette discipline tombe en désuétude après laSeconde Guerre mondiale. Le travail réalisé par des universitaires tels qu'Yves Lacoste dans lesannées 1980 permet une renaissance de la discipline, qui retrouve sa pleine légitimité et commence à nouveau à être enseignée.
En tant qu'activité humaine, la géopolitique est pratiquée bien avant que le terme n'apparaisse[3]. Toutes les sociétés, même celles qui ne disposent pas d’État, connaissent des rivalités de pouvoirs et des conflits territoriaux. SelonAlexandre Defay, la naissance de l'État est un tournant en ce qu'avec lui,« l'espace acquiert une dimension géopolitique permanente. Désormais, l'espace n'est plus seulement façonné et cloisonné par la diversité du milieu naturel et par celle du peuplement mais aussi par l'exercice de souverainetés étatiques concurrentes. Au regard de ces dernières, l'espace est le théâtre et l'enjeu de leurs rivalités »[4].
Quoique le terme ne soit pas utilisé, des auteurs commeMachiavel ouClausewitz s'attachent à expliciter des « bonnes pratiques », qui soumettent l'efficacité à lamorale, que les dirigeants doivent employer pour comprendre et exploiter des rapports de forces[5]. La géopolitique se fonde alors sur la géographie de la puissance publique ;Napoléon Ier affirmait ainsi que« tout État fait la politique de sa géographie »[6]. Pour Defay, l'État fait en réalité la politique de la géographie qu'il perçoit être la sienne, à travers les moyens dont il dispose pour l'appréhender, ainsi que ses idéologies,« faute de quoi cette formule pourrait laisser croire à un déterminisme du milieu sur le politique, piège dans lequel sont tombés plusieurs des premiers théoriciens de la géopolitique »[7].
Le terme apparaît pour la première fois chezGottfried Wilhelm Leibniz dans un manuscrit inédit de 1679[9],[10]. L'usage du concept ne se répand qu'en 1889, sous la plume duprofesseur descience politique et degéographiesuédoisRudolf Kjellén dans unarticle de presse qui évoque les frontières suédoises[11], puis dans son ouvrageStormakterna (Les grandes puissances)[12], où il écrit :« La géopolitique est la science de l'État comme organisme géographique ou comme entité dans l'espace : c'est-à-dire l'État comme pays, territoire, domaine ou, plus caractéristique, comme règne. Comme science politique, elle observe fermement l'unité étatique et veut contribuer à la compréhension de la nature de l'État ».
Le terme de géopolitique avancé par le géographe suédoisRudolf Kjellén (1864-1922) reprend des éléments degéographie politique énoncés par le géographe allemandFriedrich Ratzel, considéré comme le père de laGeopolitik allemande. Ratzel analyse l'État en rapport avec sa géographie, son espace, son milieu, les deux sont en interactions. Dans son ouvragePolitische Geographie oder die Geographie der Staaten, des Verkehrs und des Krieges[13], l'État est perçu comme un être vivant. À la suite des analyses de Kjellén et deFriedrich Ratzel, nombre d'universitaires et de militaires vont mettre au point des analyses géopolitiques au service de leur pays.
Selon Alexandre Defay, professeur au centre de géostratégie de l'École normale supérieure,« la géopolitique a pour objet l'étude des interactions entre l'espace géographique et les rivalités de pouvoirs qui en découlent. […] elle est le terrain de manœuvre de la puissance locale, régionale ou mondiale »[14]. L'approche géopolitique ne tente pas seulement de décrire et d'analyser des enjeux et conflits « objectifs », elle traite« de conflits relatifs à des territoires représentés, c'est-à-dire des territoires qui — pour ceux qui les habitent, qui les convoitent ou encore qui les décrivent — sont imaginés. »[15] Autrement dit, on peut aller jusqu'à affirmer comme le faitThierry de Montbrial[16] que la géopolitique est la partie de la géographie politique qui s'occupe desidéologies relatives aux territoires.
La géopolitique dispose d'une histoire longue et internationale. D'origine allemande, elle fait l'objet de travaux auXIXe siècle en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Instrumentalisée par lenazisme, elle disparaît après la Seconde Guerre mondiale. Elle est recréée, sous la forme d'une discipline à cheval entre la géographie, la science politique et la stratégie militaire, dans la deuxième moitié duXXe siècle[17].
Dans ses nombreux ouvrages,Yves Lacoste développe trois concepts clefs permettant de conduire une analyse géopolitique[18] : l'étude de ladiachronie (évolution à travers le temps), de ladiatopie (évolution à travers l'espace) et desreprésentations.
L'étude de ladiachronie est l'analyse d'une situation, d'une culture ou d'une population à travers le temps, y compris sur des temps longs (plusieurs époques). Exemple : l'évolution, l'expansion et le recul deslangues et des populations celtiques.
L'étude de ladiatopie est l'analyse d'une situation à différentes échelles cartographiques (analyse multiscalaire). On peut ainsi examiner les déplacements, la gestion, la consommation et le coût de l'eau et/ou descarburants à partir d'une propriété personnelle (habitation, jardin) jusqu'à la planèteTerre en passant par lequartier, lacommune, l'agglomération urbaine ou l'espace rural, les divers échelons administratifs, lepays, les unions auxquelles ce pays appartient (Alena,Mercosur,U.E.,C.E.I.,O.U.A.,Asean,OTAN,O.P.E.P.,O.C.I. ou l'O.N.U. par exemple).
Le concept dereprésentation en géopolitique réside dans l'analyse des conceptions que peuvent avoir une personne ou un groupe (par exemple uneethnie ou uneconfession) par rapport à un sujet. Ainsi, on peut étudier la façon dont ils se perçoivent par rapport à leursterritoires, milieux et ressources et comment ils les gèrent et exploitent, ou encore par rapport au groupe auquel ils appartiennent et par rapport aux autres groupes. À titre d'exemples (pris dansFragments d'Europe sous la direction deMichel Foucher) la notion de « patriote » est à géométrie très variable : elle est souvent territoriale dans les pays nordiques (on prend soin du territoire, des ressources, du patrimoine) mais pluscommunautariste dans les pays méditerranéens, latins et slaves (plutôt que soigner le territoire, on s'identifie fortement à son groupe d'origine) et peut aussi être à coloration confessionnelle (comme chez lesBosniens-Herzégovins catholiques doncCroates, orthodoxes doncSerbes oumusulmans donc Bosniaques) ou régionale locale (cas desKosovars, desMacédoniens, desMoldaves ou desMonténégrins, mais on peut aussi analyser la façon dont se perçoit unCorse par rapport aux autres Français, et comment les autres Français le perçoivent…). Autre exemple :
Par ailleurs,Michel Foucher développe le concept d'horogenèse, néologisme qui se définit comme une discipline s'intéressant à la genèse des frontières (du grechôra, le territoire).
Le terme de géopolitique revêt une connotation stratégique, voire militaire, tandis que le terme degéographie politique fait plutôt référence à l'organisation des États, des régions, des entités administratives, des frontières, et des habitants. On constate que de nos jours lamondialisation et l'effondrement d'un monde bipolaire ont multiplié et complexifié les liens entre toutes les populations de la planète. Depuis une dizaine d'années, les centres universitaires multiplient les sections géopolitiques afin de répondre à une demande croissante d'analyse ditegéopolitique.
Par sa recherche des interactions entre les grandes zones du monde (énergie etmatières premières, flux deressources, passages à risques), la géopolitique s'intéresse naturellement à la politique internationale et à ses aspectsdiplomatiques. Certains auteurs commeBéatrice Giblin se sont toutefois penchés sur des questions de géopolitique interne.
Dès le début des années 1980 étaient entrevus des risques demarginalisation géopolitique de l'Europe, qui pourraient s'accentuer aujourd'hui si la réaction n'est pas adaptée :
liaisons sur l'océan Pacifique prenant le pas sur celles de l'océan Atlantique ;
impact de la fonte de la banquise dans l'Arctique sous l'effet du changement climatique, et évolutions structurelles du transport maritime et aérien ;
La géopolitique aborde un grand nombre d'enjeux divers qui sont objets de relations internationales. Elle s'intéresse notamment aux enjeux démographiques, liés à la croissance ou au déclin des populations, ainsi qu'aux grands mouvements de population (flux désordonnés, migrations, etc.). Elle traite par conséquent également des questions liées aux langues et à leurs usages et pérennité, et aux enjeux culturels qui y sont associés.
Les sujets liés aux menaces, nécessairement protéiformes, sont également abordés. La géopolitique s'intéresse ainsi aux menacesterroristes et à leur gestion, aux risques deprolifération nucléaire, à la recherche de la maîtrise desarmes de destruction massive, etc.
Les différentes formes d'organisation du territoire sont aussi un objet d'étude majeur. La polarisation et les maillages mondiaux, l'organisation des pôles de compétence économique et technologiques, les imbrications économiques et la fracture numérique sont des sujets privilégiés de la géopolitique moderne.
Les remises en cause internes de l'État, enfin, sont couverts par la discipline. Les régionalismes, les séparatismes, les mouvements d'unification, font l'objet d'analyses permettant de saisir leurs causes et leurs conséquences.
Le détroit d'Ormuz : point de tension géostratégique entre l'Iran,Oman (péninsule de Musandam) et lesÉmirats arabes unis.
La géopolitique s'attache à étudier les différents facteurs qui aboutissent à la constitution des alliances.
La géopolitique s'intéresse aux différents facteurs qui influencent les stratégies :
maîtrise globale des mers et/ou de la terre (peuples de la mer, peuples de la terre) : on assiste souvent à des différences de stratégie entre une puissance ou une alliance entre puissances maritimes et une puissance ou une alliance entre puissances continentales, ce facteur influence les autres ;
contrôle des points de passage et des moyens de transport : détroits, cols, tunnels, aéroports, ports, gares ;
facteurs financiers (impôts, taxes…) ;
accès aux ressources naturelles et aux matières premières ;
maîtrise des techniques (navigation, aéronautique et espace…) ;
types de régimes politiques (démocratie, etc.) ;
facteurs culturels, sociologiques et philosophiques ;
Les États-Unis ont mis en place depuis la fin des années 1980 unestratégie globale visant à assurer la suprématie de l'armée américaine et des entreprises américaines sur le monde[19]. Elle est structurée autour d'un consortium de grandes entreprises des secteurs de l'informatique et de l'aéronautique, qui a permis de projeter les forces américaines en Irak, lors des deux guerres du Golfe en 1991 et en 2003. Cette stratégie globale concerne maintenant presque tous les secteurs d'activité, et s'appuie sur une utilisation très structurée destechnologies de l'information (Internet, réseaux).
On constate ses effets également dans l'alliance que les États-Unis ont réalisée, en réponse auprotocole de Kyoto, avec la Chine, l'Inde, le Japon, et l'Australie, visant à développer lecharbon propre, et les nouvelles générations de réacteurs nucléaires (réacteurs de génération IV,Integral Fast Reactor(en)).
Lalangue est le facteur essentiel de la communication entre les peuples. Plusieurs grandes langues nationales d'Empires sont devenues de grandes langues de communication internationale. Celles qui ont eu le plus d'influence sont, dans l'aire occidentale, dès l'Antiquité legrec ancien, puis lelatin ; à partir duXVIIe siècle lefrançais et à partir de 1918 et surtout 1945 l'anglais. Dans le monde actuel, sur 6 000 à 7 000 langues environ reconnues par l'ethnolinguistique, une douzaine sont parlées ensemble en langue première ou seconde par environ les deux tiers de la population mondiale. À côté des six langues de travail de l'ONU, l'anglais, le français, l'espagnol, lerusse, lechinois, l'arabe, six autres langues dépassent les 100 millions de locuteurs et ont un poids économique et culturel régional :hindi-ourdou,portugais,indonésien,allemand,japonais,bengali ; sur ces douze langues, les neuf premières sont dominantes dans un sous-continent.
De sa clarté et sa précision ont résulté des règles strictes dedroit international public, reconnues dans le statut des langues officielles retenues par l'Organisation des Nations unies. Le français est ainsi l'une des six langues officielles reconnues par l'ONU pour lesnégociations internationales et il continue à jouer un rôle important dans ladiplomatie.
Plusieurs types de réactions s'observent. Compte tenu du déclin relatif depuis 2000 de l'hégémonie américaine qui reste néanmoins la première, de l'essor du polycentrisme, particulièrement des BRIC (acronyme deBrésil,Russie,Inde,Chine) mais aussi de l'Union européenne (UE) post Brexit, de la nécessité de rapprocher les peuples à l'ère de lacrise écologique globale, certains préconisent la diffusion accélérée et la reconnaissance par des organisations internationales de la langue internationale auxiliaire neutre au côté des grandes langues nationales de communication internationale. Déjà en septembre 1922, treize pays de laSociété des Nations (SDN), incluant environ la moitié de la population mondiale, avaient recommandé l'utilisation de cette langue internationale auxiliaireEspéranto comme langue de travail additionnelle de l'institution[21], mais le gouvernement français de l'époque avait alors mis son véto de fait. La langue internationale auxiliaire est, selon le secrétaire général adjoint de la SDN,Nitobe Inazō,« de huit à dix fois plus facile que n'importe quelle autre langue »[22]. Elle est facile, c'est-à-dire à la fois simple (petit nombre d'éléments à apprendre), régulière (pas d'exceptions), claire (à quasiment toute variation dans la pensée correspond une variation concomitante dans la langue) et internationale par destination et par création. De plus on observe unevaleur propédeutique de l'espéranto : c'est une langue tremplin permettant d'apprendre de 20 à 30 % plus vite les autres langues. La facilité de l'espéranto permet à la fois la communication internationale et à chacun de travailler le plus souvent quand il le souhaite dans la langue de son choix, ce qui accroit l'efficacité générale et la solidarité nécessaires dans le monde qui vient. Son rôle positif a été reconnu par des résolutions de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) en 1954 et 1987. Les anglophones de naissance représentent 6 % de la population mondiale et l'équité linguistique serait favorable à la très grande majorité.
La langue est aussi un enjeu crucial pour les relations entre les États avec la constitution deblocs linguistiques intercontinentaux, tels que l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), l’Union latine, l’Union des pays de langue néerlandaise ou encore le Conseil turcique et dans une plus large mesure, le Commonwealth of Nations. C'est un véritable enjeu de puissance[23].
Dans un contexte demondialisation, et d'hégémonie linguistique croissante où l'utilisation d'Internet se répand de plus en plus, on peut s'interroger sur la pérennité d'un nombre croissant de langues. Cependant l'attribution d'un nom à une langue est un« enjeu géopolitique » essentiel : ainsi une même langue du point de vuelinguistique (c'est-à-dire dont les locuteurs se comprennent spontanément et totalement, sans dictionnaire ni traducteur) peut s'écrire à l'aide d'alphabets différents et/ou porter des noms différents selon les pays (Hindi/Ourdou ouCroate-Bosnien/Monténégrin-Serbe par exemple).
La géopolitique dégage des grands mouvements ou tendances lourdes de l'Histoire des relations internationales afin de saisir les grandes orientations stratégiques des différents pays. L'utilisation du recul de l'Histoire permet de percevoir plus facilement les grandes tendances, et les motivations qui ont conduit les États à adopter des stratégies géopolitiques[24].
La géopolitique est attentive aux doctrines politiques dites du« Roi des rois ». Il s'agit de doctrines qui prétendent affirmer la prépondérance d'un pays sur un autre en termes de décisions politiques. Dans une telle situation, le pays A dominant respecte l'autonomie du pays B, mais le pays B s'admet en situation d'infériorité et peut recevoir des instructions du pays A[24].
Cette politique du « Roi des rois » est symbolisée par la stratégie de l'antiqueEmpire achéménide, qui ne destituait pas les souverains des pays soumis mais les transformait envassaux ou ensatrapes[24].
La politique duglacis est une politique qui vise à créer des zones tampons pour isoler une entité politique afin de l'empêcher de sortir de ses frontières[25]. Il vise à sécuriser un territoire en éloignant un maximum le cœur de commandement de la zone à protéger. Cette politique du glacis a été développée par l'Égypte ptolémaïque, avant d'être reprise sous de multiples formes[24]. Il en est ainsi desmarches carolingiennes, ou encore ducordon sanitaire[25].
Certaines zones disposent d'une importance stratégique en ce qu'elles sont le seul moyen de passage dans une zone adverse, ou permettent d'y entrer de manière discrète. Le contrôle descols alpins fut ainsi un enjeu majeur de l'époque pré-romaine (« péages celtes »), de l'époque romaine (péages imposés parRome) et de laSuisse[24].
Les invasions desVikings, qui remontent les fleuves par lesknörrs, ont mis en évidence dans l'Europe occidentale la nécessité de contrôler ces zones de passage[17].
L'Histoire est émaillée de confrontations entre les empires de la mer et ceux de la terre. Les modèles dethalassocratie sont les républiques deVenise et deGênes, qui se sont enrichies par le commerce en Méditerranée, à la suite descroisades et du partage de l'Empire byzantin[17].
La dynamisation du commerce maritime à partir duXVe siècle, notamment entreLondres,Bruges, les villeshanséatiques du nord, Gênes et Venise, a ainsi créé des thalassocraties et appauvri les pays continentaux dont les routes commerciales ont été contournées. C'est ainsi que déclinent les foires de Champagne (Provins,Troyes…) en France. La péninsule arabique s'est appauvrie dès lors que les voies maritimes péri-africaines ont été ouvertes, puis lecanal du suez. LeRoyaume-Uni a été la thalassocratie la plus éminente auXIXe siècle[17].
La géopolitique s'attarde sur les moyens de contournement d'un territoire ou d'un obstacle. Ce contournement peut avoir pour objectif de libérer un pays A de la contrainte que fait peser le passage par le pays B sur son commerce ou sur ses opérations politiques ou économiques[17].
La découverte parChristophe Colomb du « Nouveau Monde » et le transfert progressif du centre géopolitique de l'Europe, du sud-est méditerranéen vers le nord-ouest atlantique, a aussi court-circuité l'Afrique et le Moyen-Orient[17].
L'ouverture commerciale est une variable décisive étudiée par la géopolitique, et notamment par sa branche économique, la géoéconomie. Les ouvertures commerciales peuvent bouleverser la géopolitique d'un État ou d'une région, ainsi que ses structures sociales. Ce fut le cas, notamment, de l'ouverture commerciale au milieu duXIXe siècle duJapon et au dernier tiers duXXe siècle de laChine : ces pays, jusque-là figés dans des modèles socialement fermés et technologiquement archaïques, ont ainsi pu recevoir des technologies et des exportations des pays occidentaux[17].
L'issue de la Seconde Guerre mondiale et des tensions entre les deux plus grandes puissances du monde est uneguerre froide, qui comprend de nombreux conflits localisés qu'elle a générés ou attisés. Une autre conséquence fut la résurgence des idéologiesthéocratiques, comme enIran.
La construction de voies ferroviaires ou routières stratégiques (comme auTibet, par laChine), de tunnels, de ponts ou de barrages géants (Chine, Corée, Japon par exemple).
La géopolitique s'intéresse à l'énergie dans la mesure où cette dernière est nécessaire à l'activité économique. Plusieurs sous-branches de la géopolitique se focalisent sur une ressource énergétique spécifique, comme lagéopolitique du pétrole oude l'énergie nucléaire.
Les choix énergétiques sont des décisions géopolitiques importantes, car elles déterminent le degré auquel un pays sera souverain, dépendant, ou soumis à d'autres pays. Par exemple, le choix dunucléaire enFrance sous laprésidence de Georges Pompidou (plan Messmer) a permis de réduire la dépendance du pays vis-à-vis du pétrole contrôlé à l'époque par les « sept sœurs » anglo-saxonnes[17].
Leszones d'influence sont des territoires sur lesquels un pays dispose d'une force d'influence, d'unsoft power, important. Ces zones peuvent être liées à la conservation par les anciennespuissances coloniales de liens privilégiés, notamment économiques et culturels, avec leurs anciennes colonies (Commonwealth, « Françafrique », etc.)
Les zones d'influence peuvent aussi être dues au maintien de liens politiques forts à la suite d'un désengagement d'un pays des gouvernements de pays proches. LaRussie a ainsi conservé unezone d'influence exclusive dans douze des quinze anciennesrépubliques soviétiques groupées au sein de laCEI.
L'axe du Mal relève d'un dispositif rhétorique qui vise, pour un pays, à démoniser ses adversaires en les regroupant sous un vocable commun malgré leurs différences de positionnement, d'idéologie, d'activités, etc. Les États-Unis utilisent l'expression pour désigner les pays les plus opposés à la stratégie américaine que sontCuba, leVenezuela, l'Iran, laSyrie, leSoudan, laCorée du Nord, etc. Les califats islamistes utilisent eux l'expression de Grand Satan et de Petit Satan pour désigner l'Amérique et Israël[17].
La géopolitique s'attache à étudier les grandes oppositions et le jeu des forces en présence au sein des grands pôles stratégiques mondiaux, qu'ils soient politiques, économiques ou technologiques. Il y a ainsi une géopolitique duConseil de Sécurité de l'ONU, duG8, de l'OMC, duFMI, de laBanque mondiale, de l'AIEA, de l'OMI, de l'OMM, etc.[17]
L'espace est, malgré letraité de non militarisation de l'espace, le lieu de la poursuite de confrontations géopolitiques terrestres et maritimes. Laconquête spatiale, l'attribution des orbites, les dispositifs de surveillance militaire, font l'objet d'un intérêt géopolitique[26].
Lechoc des civilisations est un concept de géopolitique particulièrement utilisé dans lesannées 1990. SelonSamuel Huntington (Le Choc des civilisations), les lignes de faille de la géopolitique mondiale sont culturelles, et les affrontements des décennies à venir auront lieu sur ces lignes de faille. Les affrontements qui prendront une ampleur mondiale seront ainsi les affrontements civilisationnels[27].
↑La politique étrangère de la France, textes et documents, Ministère des affaires étrangères, Direction de la presse, de l'information et de la communication,(lire en ligne)
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(en)Open Sources Center, un site de ressources en accès libre consacré aux six grandes problématiques géopolitiques (politique, terrorisme, renseignement, militaire, prolifération et santé publique). Il propose (pour les membres) un moteur de recherche interne puissant et précis.
(en)Theory Talks publie des entretiens avec des professeurs spécialisés en géopolitique.