

Lagéologie de Mars, parfois appeléearéologie[3], recouvre l'étude scientifique de la planèteMars, de ses propriétés physiques, de ses reliefs, de sa composition, de son histoire et de tous les phénomènes qui l'ont affectée ou l'affectent encore.
Il s'agit d'une discipline relativement récente, inaugurée le à l'occasion du premier survol de Mars par lasonde spatialeMariner 4, qui permit de découvrir une planète dépourvue dechamp magnétique global, présentant une surface cratérisée rappelant celle de laLune, uneatmosphère ténue, une pression au sol d'environ600Pa et une température moyenne de210 kelvins (−63 °C). Cependant, c'est avec la sondeMariner 9 que l'étude systématique et approfondie de la planète Mars commence, le. Premier engin à se satelliser autour d'une autre planète que laTerre, Mariner 9 a permis de cartographier la totalité de la surface martienne avec une résolution comprise entre100m et 1 km parpixel, révélant toutes les structures géologiques majeures de la planète, sa dichotomie crustale, ses massifs volcaniques gigantesques et son système de canyons appeléValles Marineris en référence auprogramme Mariner en général, et à Mariner 9 en particulier.
Ensuite, leprogrammeViking à la fin des années 1970, leprogrammePhobos à la fin des années 1980 et les missionsMars Global Surveyor etMars Pathfinder dans les années 1990, ont permis d'affiner les connaissances sur la « planète rouge ». Lesorbiteurs2001 Mars Odyssey,Mars Reconnaissance Orbiter etMars Express, ainsi que lesroversSpirit etOpportunity au sol, complétés par l'atterrisseurPhoenix, ont ouvert la voie à une véritable étude géologique martienne. Les études se poursuivent en 2012 avec la mission américaineMars Science Laboratory et la mission russePhobos-Grunt, qui emportait le petit satellite chinoisYinghuo 1 pour étudier l'interaction duvent solaire et de l'atmosphère de Mars[4]. À horizon plus lointain on peut citer le robot mobile européenExoMars duprogrammeAurora, destiné à analyser le sol en vue d'y rechercher des traces d'exobiologie passée ou présente, ainsi que la missionMars Sample Return, partagée entre l'Agence spatiale européenne et laNASA, conçue pour rapporter quelques centaines de grammes d'échantillons de sol martien surTerre.

L'étude systématique de la planète a radicalement transformé la vision que nous en avions. Mars est aujourd'hui perçue comme une planète au passé riche et géologiquement très actif, entourée jadis d'un champ magnétique global et qui possédait alors presque certainement une atmosphère épaisse et de grandes quantités d'eau liquide plutôt acide. De surcroît, sonnoyau serait toujours essentiellement, voire entièrement, liquide, et il n'est pas totalement exclu que certains volcans puissent encore connaître une activité épisodique[10].
Quatrièmeplanète dusystème solaire en partant duSoleil,Mars est uneplanète tellurique moitié moins grande que laTerre, près de dix fois moins massive, dont la surface est un peu inférieure à celle des terres émergées de notre planète (144,8 contre 148,9 millions dekilomètres carrés). Lagravité y est le tiers de celle de la Terre, tandis que la durée du jour solaire martien, appelésol, excède celle du jour terrestre d'un peu moins de40 minutes. Mars est une fois et demie plus éloignée duSoleil que la Terre, sur uneorbite sensiblement pluselliptique et reçoit, selon sa position, entre deux et trois fois moins d'énergie solaire que notre planète. L'atmosphère de Mars étant de surcroît plus de cent cinquante fois moins dense que la nôtre et ne générant par conséquent qu'uneffet de serre très limité, ce faiblerayonnement solaire explique que la température moyenne sur Mars soit inférieure à−60 °C.

Le tableau ci-dessous permet de comparer les valeurs de quelques paramètres physiques entre Mars et la Terre :
| Propriété | Valeurmartienne | Valeurterrestre | % Mars / Terre |
|---|---|---|---|
| Rayonéquatorial | 3 396,2 ± 0,1 km | 6 378,1 km | 53,3 % |
| Rayonpolaire | 3 376,2 ± 0,1 km | 6 356,8 km | 53,1 % |
| Rayon moyen volumétrique | 3 389,5 km | 6 371,0 km | 53,2 % |
| Surface | 144 798 500 km2 | 510 072 000 km2 | 28,4 % |
| Volume | 1,631 8 × 1011 km3 | 1,083 207 3 × 1012 km3 | 15,1 % |
| Masse | 6,418 5 × 1023 kg | 5,973 6 × 1024 kg | 10,7 % |
| Masse volumique moyenne | 3 933,5 ± 0,4 kg/m3 | 5 515 kg/m3 | 71,3 % |
| Gravité de surface à l'équateur | 3,711 m/s2 | 9,780 327 m/s2 | 37,9 % |
| Vitesse de libération | 5 027 m/s | 11 186 m/s | 44,9 % |
| Période de rotation sidérale | 1,025 956 75 d≈ 88 642,663 s | 86 164,098 903 691 s | 102,9 % |
| Durée du jour solaire | 1 sol≈ 1,027 491 25 d≈ 88 775,244 s | 1 d= 86 400 s | 102,75 % |
| Inclinaison de l'axe | 25,19° | 23,439 281° | - |
| Albédo de Bond | 0,25 | 0,29 | - |
| Albédo géométrique visuel | 0,15 | 0,367 | - |
| Demi-grand axe de l'orbite | 227 939 100 km | 149 597 887,5 km | 152,4 % |
| Excentricité orbitale | 0,093 315 | 0,016 710 219 | 558,4 % |
| Période orbitale | 668,599 1 sols≈ 686,971 d | 365,256 366 d | 188,1 % |
| Aphélie | 249 209 300 km | 152 097 701 km | 163,8 % |
| Périhélie | 206 669 000 km | 147 098 074 km | 140,5 % |
| Rayonnement solaire | 492 à 715 W/m2 | 1 321 à 1 413 W/m2 | - |
| Température moyenne au sol | −63 °C≈210 K | 14 °C≈287 K | - |
| Température la plus élevée | 20 °C≈293 K | 58 °C≈331 K | - |
| Température la plus basse | −133 °C≈140 K | −89 °C≈184 K | - |
Le robot Curiosity de la NASA, qui s'est posé le sur Mars, a révélé des températures supérieures à0 °C dans le cratère de Gale, la mesure exacte étant276 K soit environ3 °C[11].Mars étant environ dix fois moins massive que laTerre mais dix fois plus massive que laLune, sa surface présente des similitudes avec ces deux corps célestes. On y trouve des terrains criblés decratères d'impact rappelant ceux de la Lune, mais aussi des formations d'originetectonique et climatique comme sur Terre, notamment desvolcans, desrifts, desvallées, desmesas, des champs dedunes et descalottes polaires. La fine atmosphère martienne, dans laquelle circulent desnuages localement abondants, est le siège d'une météorologie particulière, dominée par des tempêtes de poussières qui obscurcissent parfois la planète tout entière. Sonexcentricité orbitale, cinq fois plus marquée que celle de la Terre, est à l'origine d'une asymétrie saisonnière très sensible : dans l'hémisphère nord, la saison la plus longue est le printemps (198,6 jours), qui excède la plus courte (l'automne, 146,6 jours) de 35,5 % ; surTerre, l'été, la saison la plus longue, n'excède la durée de l'hiver que de 5 %. Cette particularité explique également que la superficie de la calotte polaire australe se réduise nettement plus en été que celle de la calotte polaire boréale.
L'absence d'uneflexure significative de lalithosphère martienne sous les dépôts du pôle Sud indique que leflux géothermique y est inférieur à 10 mW/m2. Un calcul analogue avait antérieurement conduit à une estimation de 7 mW/m2 dans la région du pôle Nord. L'intérieur de Mars est donc beaucoup plus froid que celui de la Terre (60 mW/m2 en moyenne)[12].
La géologie martienne est marquée par la dichotomie crustale entre les basses plaines peu cratérisées de l'hémisphère nord et les hautes terres très cratérisées de l'hémisphère sud, avec, entre ces deux domaines principaux, deux régions volcaniques bien différentiées. En vertu du principe empirique selon lequel l'âge d'une région est une fonction croissante de sontaux de cratérisation[13], ces trois types majeurs de terrains martiens ont très tôt été rattachés à trois époques caractéristiques de l'histoire géologique de la planète, nommées d'après des régions typiques de ces périodes[14] :
Cette chronologie en trois époques est aujourd'hui bien acceptée — la datation de chacune de ces époques demeure, en revanche, très incertaine — et permet de rendre compte des phénomènes observés à la surface de Mars par les différentes sondes en activité autour de cette planète, notamment la présence simultanée de minéraux, formés à des époques différentes, supposant pour les uns un environnement très humide et pour les autres au contraire l'absence totale d'eau liquide. Les datations proposées pour ces trois époques — ouéons — géologiques, selon l'échelle de Hartmann standard et l'échelle de Hartmann & Neukum, sont les suivantes (âges en millions d'années) :

Depuis 2004, on utilise aussi une échelle basée sur la minéralogie, avec des éons chronostratigraphiques (LHB correspond en anglais augrand bombardement tardif).


La topographie de la surface martienne révèle une nettedichotomie crustale entre, d'une part, une région de l'hémisphère sud correspondant à une écorce épaisse et irrégulière jusque sous lerenflement de Tharsis, et, d'autre part, une région de l'hémisphère nord correspondant à une écorce plus fine assez uniforme[16]. En première approximation, on peut considérer que l'écorce martienne a unemasse volumique uniforme de 2 900 kg/m3, ce qui conduit à une épaisseur moyenne d'environ 50 km, soit 4,4 % du volume de la planète, avec comme valeurs extrêmes 92 km dans la région deSyria Planum et à peine 3 km sous lebassin d'impact d'Isidis Planitia, tandis que l'écorce aurait moins de 10 km sous toute la région d'Utopia Planitia. D'un point de vue macroscopique, la cohérence des paramètres physiques de Mars implique que l'écorce n'ait jamais plus de 125 km d'épaisseur[17].
L'une des révélations apportées par les mesuresgravimétriques fines réalisées parMars Global Surveyor a été la découverte de structures évoquant des chenaux enfouis sous la surface de l'hémisphère nord et détectés par leur déficit de masse alors même qu'ils demeurent invisibles en surface[16]. Ces structures, qui correspondraient à des reliefs de 1,5 à 4,5 km si elles sont remplies de sédiments secs mais de 1 à 3 km environ dans le cas de sédiments mélangés à de laglace[18], sont parfaitement en accord avec le modèle, généralement admis pour décrire l'histoire de laplanète Mars, selon lequel l'hémisphère nord aurait abrité, auNoachien, de vastes étendues d'eau liquide, voire un océan semi-permanent peut-être recouvert d'une banquise, au centre d'unehydrosphère globale avant d'être comblé de matériaux volcaniques à l'Hespérien et de dépôts éoliens à l'Amazonien pour donner naissance aux basses plaines uniformes caractéristiques de cet hémisphère.
Les trois cartes ci-dessous, issues notamment des relevéstopographiques etgravimétriques de la sondeMars Global Surveyor au début des années 2000[19], permettent de se faire une idée plus précise de la structure de l'écorce martienne et de la distribution des masses sous la surface de la planète. C'est notamment la deuxième carte, reproduisant les variations d'intensité du champ de gravité à la surface martienne, qui donne une idée de la répartition des concentrations de masse dans l'écorce : sous lesbassins d'impact, et sous lesvolcans ; outre les anomalies correspondant aurenflement de Tharsis et àElysium Mons, on repère ainsi trois petites anomalies positives au niveau deMalea Planum, d'Hadriacus Mons et d'Hesperia Planum, trois provinces volcaniques anciennes jouxtantHellas Planitia, tandis qu'une anomalie positive est nettement visible sous le petit bassin d'Isidis Planitia, ainsi que sous ceux d'Utopia et d'Argyre, matérialisant la concentration de masse résultant de l'impact cosmique. La troisième carte représente les variations de distance, depuis le centre de Mars, du « Moho » martien — c'est-à-dire de l'interface entre lemanteau et l'écorce martienne, appelée surTerrediscontinuité de Mohorovičić (généralement désignée par le raccourci « le Moho ») en raison de son effet sur la propagation desondes sismiques, mais qui n'a jamais pu être observé expérimentalement sur Mars faute d'étude sismique sur cette planète — ce qui permet de déduire les variations d'épaisseur de l'écorce :
| Topographie martienne vue par l'instrument MOLA deMGS. Les couleurs indiquent une altitude croissante du bleu au blanc en passant par le vert, le jaune, le rouge et le brun. Cette carte est bien connue, quoique généralement représentée avec le méridien 0° au centre, et non sur le bord gauche comme ici. On repère aisément le grandbassin d'impact d'Hellas Planitia en bleu marine en bas à gauche,Utopia Planitia dans le quart supérieur gauche, ainsi que lerenflement de Tharsis dans la partie droite de la carte, avec en diagonale les trois volcans de la chaîne deTharsis Montes qui apparaissent en blanc, ainsi que les grandsvolcans boucliers d'Olympus Mons (en blanc également) et d'Alba Mons (en brun et rouge au nord de l'ensemble). À droite de Tharsis sont visibles lescanyons deValles Marineris, au sud desquels le bassin d'Argyre Planitia apparaît en bleu ciel dans le quart inférieur droit de la carte. | |
| Champ de gravité martien déduit de la trajectoire deMGS. La carte est également tracée avec le méridien 0° sur le bord gauche, ce qui permet d'identifier d'un seul coup d'œil la contrepartie topographique des variations de gravité identifiées par la sonde. Les couleurs indiquent une gravité croissante du bleu au blanc en passant par le vert, le jaune et le rouge. On repère ainsi que lerenflement de Tharsis, d'altitude très supérieure auniveau de référence martien, correspond à une anomalie de gravité positive, de même que le bassin d'Utopia Planitia, qui est pourtant d'altitude cette fois sensiblement inférieure au niveau de référence. A contrario, le sillon bleu marine apparaissant sous l'équateur à droite de la carte correspond àValles Marineris, vastefossé d'effondrement d'originetectonique se traduisant par une « déchirure » de l'écorce et un défaut de masse localisé. | |
| « Moho » calculé à partir des données topographiques et gravimétriques croisées avec l'évaluation de la densité locale de l'écorce martienne. Les couleurs indiquent une distance croissante au centre de la planète (soit une profondeur décroissante sous le niveau de référence) du bleu au blanc en passant par le vert, le jaune et le rouge ; il s'agit en quelque sorte de l'altitude de la surface dumanteau. On voit ainsi que l'écorce est la plus épaisse dans les régions volcaniques, notamment sous lerenflement de Tharsis avec un maximum dans la région d'Olympus Mons, tandis qu'elle est la plus fine sous lesbassins d'Utopia, d'Isidis, d'Hellas et d'Argyre. La dichotomie crustale martienne affecte également de façon flagrante la topographie du Moho, bien que la limite entre les deux domaines ne se superpose pas exactement avec celle visible en surface. |
Le recoupement de ces trois types d'informations offre une clé essentielle pour comprendre la géologie à grande échelle des couches superficielles de laplanète Mars.
En l'absence de donnéessismiques exploitables[20], la structure interne de laplanète Mars demeure difficile à préciser. L'exploitation des informations recueillies par les diverses sondes qui ont exploré la planète, telles que lemoment d'inertie et les relevésgravimétriques etmagnétiques, a néanmoins permis de déterminer que celle-ci serait constituée d'unmanteau solide desilicates riches enfer et d'unnoyau liquide ou au moins encore essentiellement liquide[21],[22]. Une communication de 2009[23] a fait état de calculs fondés sur des modèles géochimiques de la planète Mars selon lesquels lenoyau contiendrait de 5 à 13,5 % desoufre et lemanteau contiendrait de 11 à 15,5 % defer.
Lenoyau de Mars aurait un rayon compris entre 1 300 et 2 000 km[24] (soit entre 38 % et 59 % du rayon de la planète), peut-être plus précisément entre 1 520 et 1 840 km[25] (soit entre 45 % et 54 % du rayon de Mars), incertitude due en partie à l'inconnue concernant la fraction demanteau qui pourrait être liquide et réduirait par conséquent la taille du noyau ; on trouve assez souvent citée la valeur 1 480 km comme rayon du noyau de Mars[17], soit 43,7 % du rayon moyen de la planète elle-même (3 393 km). Les caractéristiques physiques (taille, densité) du noyau peuvent être approchées qualitativement par lemoment d'inertie de la planète, qui peut être évalué en analysant laprécession de sonaxe de rotation ainsi que les variations de savitesse de rotation à travers les modulations pareffet Doppler des signaux radio émis par lessondes posées à sa surface ; les données deMars Pathfinder ont ainsi permis d'affiner celles précédemment recueillies avec les sondesViking et d'établir que la masse de Mars est plutôt concentrée en son centre[26], ce qui plaide pour un noyau dense et pas trop gros.
Avec une température estimée en 2005 à environ2 000 K, le noyau de Mars serait entièrement liquide pour un taux d'éléments légers (essentiellement dusoufre) de 14,2 % en masse[21], ce qui laisse supposer une composition majoritairement defer allié à d'autres métaux (typiquement dunickel) et peut-être jusqu'à 17 % d'éléments légers. Des expériences conduites sur des systèmesfer-soufre etfer-nickel-soufre à des pressions comparables à celles estimés au cœur de Mars amènent à envisager que le noyau martien, encore entièrement liquide, se solidifierait par cristallisation superficielle, au contact dumanteau, formant des sortes de « flocons » tombant en « neige » jusqu'au centre ; une autre possibilité pourrait être la formation d'une graine solide desulfure de fer cristallisé au centre du noyau liquide[27].
En 2025, l'analyse desondes sismiques révèle l'existence — comme dans la Terre — d'une phase PKiKP (ondes P ayant traversé l'interface manteau-noyau et s'étant réfléchies à la surface du noyau interne puis ayant retraversé la première interface), révélant ainsi la présence d'un noyau interne solide de rayon 613 ± 67 km et de vitesseVP supérieure d'environ 30 % à celle du noyau externe liquide[28].
Mars ne possède pas demagnétosphère. Toutefois, lemagnétomètre et réflectomètre àélectrons MAG/ER de la sondeMars Global Surveyor a mis en évidence dès 1997 unmagnétisme rémanent[29], jusqu'à 30 fois supérieur à celui de l'écorce terrestre[30], au-dessus de certaines régions géologiquement anciennes de l'hémisphère sud[31], et notamment dans la région deTerra Cimmeria etTerra Sirenum[32]. Les mesures font état d'unchamp magnétique atteignant 1,5 µT à 100 km d'altitude, ce qui requiert l'aimantation d'un volume significatif d'écorce martienne, d'au moins 106 km3[33]. Pendant neuf ans,MGS a mesuré les paramètres magnétiques au-dessus de la surface martienne, l'instrument MGS MAG (MGS Magnetometer) recueillant des données vectorielles depuis une altitude typiquement de 400 km, s'approchant parfois à 90 km de la surface, et MGS ER (MGS Electron Reflectometer) mesurant le magnétisme total depuis une altitude de 185 km en moyenne. Il n'existe donc pas à l'heure actuelle de carte magnétique de la surface martienne elle-même, de même que la nature exacte des minéraux magnétisés ne peut qu'être supposée dans l'état actuel de nos connaissances.
L'étude desmétéorites de Mars suggère que cepaléomagnétisme résulte, comme surTerre, de l'aimantation de minérauxferromagnétiques tels que lamagnétite Fe3O4 et lapyrrhotiteFe1-δS dont lesatomes alignent leurmoment magnétique sur le champ magnétique global et figent cette configuration en passant en dessous de latempérature de Curie duminéral — soit par exemple858 K (585 °C) pourFe3O4, mais seulement593 K (320 °C) pourFe1-δS. Les autres minéraux candidats comme vecteurs du paléomagnétisme de l'écorce martienne sont l'ilménite FeTiO3 ensolution solide avec l'hématite Fe2O3, de même structure, pour former des titanohématites, et dans une moindre mesure la titanomagnétite Fe2TiO4, dont l'aimantation et la température de Curie sont cependant inférieures[33].
L'absence d'un tel paléomagnétisme au-dessus des bassins d'impacts de l'hémisphère sud tels qu'Hellas etArgyre est généralement interprétée comme l'indication que Mars ne possédait plus de champ magnétique global lors de ces impacts, bien qu'il soit également possible que le refroidissement des matériaux sur le lieu de l'impact ait été trop rapide pour permettre l'alignement de leur aimantation éventuelle sur le champ magnétique global[34]. A contrario, un paléomagnétisme significatif, et parfois même assez élevé, a été relevé au-dessus des 14 bassins les plus anciens identifiés sur la planète[33]. De la même façon, aucun champ magnétique notable n'a été détecté au-dessus des régions volcaniques majeures d'Elysium Planitia et durenflement de Tharsis, en revanche un magnétisme faible mais de plus forte intensité a été relevé au-dessus des provinces volcaniques plus petites et plus anciennes des hautes terres australes.
L'analyse des composantes tridimensionnelles du champ magnétique relevé en quelques dizaines de points significatifs de la surface martienne a permis à plusieurs équipes d'extrapoler la position du pôle paléomagnétique de Mars[35]. Ces simulations — qui doivent néanmoins être prises avec un certain recul — sont assez cohérentes entre elles et conduisent à localiser l'un des pôles paléomagnétiques martiens entre 150° E et 330° E d'une part et 30° S et 90° N d'autre part, c'est-à-dire approximativement dans un rayon de3 600 km autour d'un point situé à mi-chemin entreAlba Mons etOlympus Mons.
Paléomagnétisme martien mesuré parMGS au-dessus de la région deTerra Cimmeria etTerra Sirenum. Les bandes de polarité opposée sont bien visibles, mais aucun axe de symétrie n'a pu être mis en évidence jusqu'à présent. | SurTerre, l'expansion des fonds océaniques se traduit, de part et d'autre desdorsales, par l'aimantation rémanente du plancher océanique en bandes symétriques de polarisation opposée suivant lesinversions du champ magnétique global de notre planète. |
Fait remarquable, les anomalies magnétiques mesurées parMGS sont structurées en bandes parallèles, de façon rappelant les anomalies magnétiques océaniques surTerre (voir schéma ci-contre) : le refroidissement de la croûte océanique formée auxdorsales au fur et à mesure que lesplaques s'écartent conduit celle-ci à acquérir une aimantation rémanente qui « mémorise » l'orientation duchamp magnétique terrestre au passage de la température de Curie; chaqueinversion du champ magnétique terrestre est donc « enregistrée » dans les roches ainsi formées, dont l'aimantation forme par conséquent des séquences symétriques de part et d'autre des dorsales. Une telle symétrie n'a en revanche jamais été relevée sur Mars, de sorte qu'aucun élément ne permet actuellement de supposer l'existence passée d'une quelconquetectonique des plaques sur la planète rouge[36]. Seule une observation à plus haute résolution permettrait de clore le débat.
Lorsqu'il est global, lechamp magnétique d'uneplanète est principalement d'origine interne. On suppose qu'il est provoqué par laconvection des fluidesconducteurs (c'est-à-dire des métaux liquides) composant la partie externe du noyau. Ce processus est connu sous le nom d'effet dynamo. Ces mouvements de convection impliquent l'existence d'ungradient thermique suffisant dunoyau vers lemanteau ; en l'absence d'un tel gradient, l'effet dynamo ne pourrait pas se maintenir. Ce fait serait à l'origine de la disparition du champ magnétique global de Mars, il y a sans doute au moins quatre milliards d'années : lesimpacts d'astéroïdes dugrand bombardement tardif auraient injecté suffisamment d'énergie thermique dans le manteau de Mars en convertissant en chaleur l'énergie cinétique desimpacteurs, ce qui aurait stoppé l'effet dynamo en annulant le gradient thermique nécessaire à son maintien[37].
L'attribution de la disparition du champ magnétique global martien à un impact cosmique a été reprise dans une théorie alternative impliquant cette fois uneprotoplanète résiduelle de la taille de laLune percutantMars bien avant le grand bombardement tardif, c'est-à-dire quelques dizaines de millions d'années seulement après la formation de la planète (de façon similaire à l'impact hypothétique deThéia avec la proto-Terre[38]), au voisinage du pôle nord actuel et sous un angle d'incidence assez faible : cet impact serait à l'origine d'une part de la dichotomie crustale[39],[40] (l'idée recoupe la théorie, assez discutée, dubassin boréal[41]) et d'autre part de l'absence de paléomagnétisme dans l'écorce de l'hémisphère nord, en raison de la disparition du gradient thermique entre lenoyau et lemanteau dans l'hémisphère nord uniquement, laissant subsister un effet dynamo concentré dans l'hémisphère sud[42]. Mars aurait ainsi connu transitoirement un magnétisme non pas global, mais « hémisphérique » et décentré vers le pôle sud, ce qui expliquerait l'intensité exceptionnelle du magnétisme rémanent dans certaines parties de l'écorce de l'hémisphère sud, ainsi que l'absence de paléomagnétisme notable dans l'hémisphère nord. En 2022, l'identification dezones de cisaillement profondes, observables dans le canyon deValles Marineris, les compositions minéralogiques au fond du canyon et des anomalies magnétiques viennent renforcer l'hypothèse d'un impact géant[43],[44].
Cette théorie n'est pas la seule proposée pour rendre compte de la superposition d'une « dichotomie magnétique » à la dichotomie crustale martienne : la différence d'épaisseur et de structure de l'écorce martienne entre les deux hémisphères[45], la fonte partielle de l'écorce de l'hémisphère nord à l'origine du remodelage de sa surface[46], et la serpentinisation de l'écorce martienne auNoachien[47], sont les explications les plus couramment avancées.
Dès les premiers clichés de la planète pris au début des années 1970 parMariner 9, les principales caractéristiques géologiques martiennes avaient été identifiées :
L'USGS avait d'emblée défini, sur la base de ces clichés, 24 unités géologiques organisées selon les régions et leur âge estimé, qui demeurent toujours valables pour une étude morphologique globale de la planète, bien que les informations alors disponibles aient été depuis considérablement enrichies — et souvent fortement nuancées — par les résultats recueillis au cours des missions d'exploration ultérieures, jusqu'à nos jours :
| Pôles | Plaines | Terrains volcaniques | Canyons et vallées | Terrains irréguliers de l'hémisphère sud | |||||||||||
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Amazonien | Aprc | Apt | Aps | ||||||||||||
| AHvu | Avy | AHa | |||||||||||||
| Apb | Apc | AHcf | AHct | ANch | |||||||||||
| AHvi | |||||||||||||||
| Hespérien | Hpr | ||||||||||||||
| HNdp | Hprg | Hpst | Hvo | HNk | |||||||||||
| HNbr | |||||||||||||||
| Noachien | Npm | Nplc | Nc | ||||||||||||
| Nm | Nhc | ||||||||||||||
| Unités géologiques martiennes proposées dès 1978 par l'USGS sur la base des clichés deMariner 9[48]. | |||||||||||||||
| Unité | Description | Interprétation |
|---|---|---|
| Aprc | Amazonian Polar Residual Cap. Terrains clairs constituant les régions des calottes polaires qui persistent pendant l'été et dont les bords présentent une structure spiralée s'élargissant dans le sens inverse des aiguilles d'une montre au pôle nord et dans le sens des aiguilles d'une montre au pôle sud, avec un décalage de 2 à 3º par rapport au pôle sud. | Calotte polaire permanente, constituée essentiellement deglace. |
| Apb | Amazonian Bedded Plains. Terrains lisses et ondulés présentant desmesas et des dépressions laissant apparaître de fines stratifications. Ces terrains semblent sortir de sous les calottes polaires et sont faiblement cratérisés. | Dépôts éoliens récents. |
| HNpd | Hesperian Noachian Deflation Plains. Terrains irréguliers généralement plans affleurant sous des plaines géologiquement plus jeunesAps,Apc ouApb, ainsi que sous des plateaux cratérisés plus anciensNplc, qu'on trouve principalement dans les régions polaires australes. Des restes de cratères enfouis sont localement visibles. | Surfaces anciennes, de l´Hespérien voire duNoachien, exhumées par l'érosion éolienne de terrains meubles plus récents. |
| Apt | Amazonian volcanic Plains of Tharsis Montes region. Plaines volcaniques dudôme de Tharsis. 28 cratères par 106 km2. | Plaines formées de coulées de lave récentes (Amazonien). |
| Aps | Amazonian Smooth Plains. Plaines lisses, dispersées sur une grande partie de la planète mais concentrées autour deVastitas Borealis. 59 cratères par 106 km2. | Accumulation de dépôts éoliens et volcaniques de plusieurs centaines de mètres d'épaisseur, recouvrant le relief sous-jacent. |
| Apc | Amazonian Cratered Plains. Plaines cratérisées, apparaissant comme variations locales des régionsAps. 89 cratères par 106 km2. | Dépôts éoliens et volcaniques laissant apparaître localement des affleurements de terrains plus anciens, et donc davantage cratérisés. |
| Hpr | Hesperian Rolling Plains. Plaines ondulées, plus fracturées que les régionsApc, englobant les régionsNplc,Nhc etHNk, également localisées au pied des escarpements marquant la limite entre les hautes terres de l'hémisphère sud et les plaines basses de l'hémisphère nord, ainsi qu'au pied du bord septentrional d'Hellas Planitia, evoluant progressivement en régions volcaniques d'âge intermédiaireAHvi. 73 cratères par 106 km2. | Plaines de laves de l'Hespérien. |
| Hprg | Hesperian Ridged Plains. Plaines plissées, essentiellement dans les régions d'Hesperia Planum,Syrtis Major Planum,Solis Planum,Sinai Planum etLunae Planum. Difficiles à distinguer des dépôts plus anciens de l'unitéHvo dans la région deMalea Planum. Les terrainsHprg situés au nord-est ducratère Schiaparelli pourraient être dus à la présence d'un cratère plus ancien enfoui sous les formations plus récentes dont les rebords affleureraient localement. 124 cratères par 106 km2, soit à peu près la même valeur que celle desmers lunaires. | Écoulements de lave de l'Hespérien. |
| Hpst | Hesperian Streaked Plains. Plaines moyennement à fortement cratérisées marquées par des traînées claires et sombres sous le vent depuis les cratères d'Elysium Planitia. Ces terrains peuvent se fondre dans ceux de l'unitéHprg. Des vues à haute résolution permettent d'y repérer des fractures et des escarpements lobés. 133 cratères par 106 km2. | Écoulements de lave de l'Hespérien. |
| Npm | Noachian Mottled Plains. Plaines présentant des alternances d'albédo et formant une large bande de terrains sombres ceinturant la calotte boréale entre 50 et 70º N et criblés de cratères d'albédo plus élevé. 134 cratères par 106 km2. | Plaines de lave cratérisées corrélées localement aux stratesnoachiennesNplc etNhc constituant des terrains plus élevés bordant le sud des régions plus bassesApc etAps. |
| Nplc | Noachian Cratered Plateau. Terrains élevés présentant des pentes très faibles et formant de vastes régions très cratérisées, typiques de l'hémisphère sud, avec de nombreux cratères enfouis ou partiellement enfouis, et des zones relativement planes entre les cratères. Ces régions peuvent être localement très accidentées, et marquées par des réseaux de chenaux et des zones chaotiques. 135 cratères par 106 km2. | Écoulements de lave duNoachien mêlés d'éjectas volcaniques etmétéoritiques très irréguliers. |
| AHvu | Amazonian Hesperian Undivided Volcanic. Dômes et cônes volcaniques de petite taille (moins de 30 km) généralement associés à des structures volcaniques de plus grande échelle. Les cratères volcaniques sont fréquents. L'extension spatiale de ces terrains est trop faible pour permettre une datation statistique fiable sur la seule base de leur taux de cratérisation. | Édifices volcaniques d'âge indéterminé maisa priori relativement récents d'après leur morphologie générale. |
| Avy | Amazonian Young Volcanic. Terrains volcaniques de formation récente constituant les grands boucliers dudôme de Tharsis, avec un taux de cratérisation particulièrement faible et de nombreux écoulements de lave très fluide donnant aux surfaces, par ailleurs lisses, un aspect finement strié. | Volcans basaltiques récents (800 à 200 millions d'années). |
| AHvi | Amazonian Hesperian Intermediate Age Volcanic. Terrains volcaniques d'âge intermédiaire en surface du bouclier d'Alba Patera et des boucliers partiellement enterrés, des dômes et des édifices pentus d'Elysium Planitia. La cratérisation y est plus élevée que celle des terrainsAvy. Ces régions sont localement associées à des terrainsHpr. | Volcans boucliers,stratovolcans et dômes éruptifs constitués de laves basaltiques assez visqueuses mêlés de matériaux pyroclastiques. |
| Hvo | Hesperian Old Volcanic. Terrains volcaniques anciens constituant les régions d'Hesperia Planum autour deTyrrhena Patera, d'Hadriaca Patera en bordure nord-est dubassin d'Hellas Planitia, et deMalea Planum au sud-ouest de ce même bassin. | Volcans boucliers et écoulements de lave fluide associés ; le faible relief de ces régions pourrait résulter de la compensation isostatique de la coûte autour de ces édifices volcaniques ou simplement de la grande fluidité des laves émises par ces volcans. |
| AHa | Amazonian Hesperian Aureole. Formations basses en forme de collines allongées ou de rides émanant de la base de volcans tels qu'Olympus Mons,Elysium Mons,Albor Tholus etApollinaris Patera ; dans la région d'Elysium, ces terrains semblent se fonde progressivement dans l'unitéHpr. | Flots de lave émanant de fissures latérales autour de l'édifice central. |
| AHcf | Amazonian Hesperian Canyon Floor. Terrains plats et lisses formant le fond de canyons tels queValles Marineris se fondant localement dans des terrainsAHct. | Dépôts fluviatiles, dépôts éoliens, éboulements. |
| AHct | Amazonian Hesperian Cahotic. Terrains chaotiques caractérisés par des fractures, des sillons et de gros blocs à l'intérieur de cratères, de chenaux ou d'autres types de reliefs en creux, typiquement dans la région située entreArgyre Planitia etChryse Planitia. | Effondrements de cavités souterraines probablement dus à la fonte et à l'écoulement d'importantes quantités de glace jusqu'alors piégée dans lepergélisol. |
| ANch | Amazonian Noachian Channel Material. Terrains typiques du fond des formations ressemblants à deslits decours d'eau asséchés, localement enfouis sous des unitésAps ou se fondant dans des terrainsApc. | Dépôts fluviatiles ou éoliens. |
| HNk | Hesperian Noachian Knobby. Terrains irréguliers situés préférentiellement en lisière de grands cratères anciens et à la limite de la dichotomie crustale, typiquement au contact des unitésNplc etNhc, localement associés à des terrains chaotiques. | Origines géologiques très diverses ; éjectas retombés au sol aprèsimpact cosmique, érosion de terrains anciens, matériaux dégradés du bord debassins d'impacts et de grandscratères, voire gros blocs apparemment emportés par la fonde brutale de grandes quantités d'eau gelée dupergélisol. |
| HNbr | Hesperian Noachian Basin Rim. Rebords des bassins d'Hellas, d'Argyre, d'Isidis, deLowell et deSchiaparelli, incluant des terrainsHNk. | Éjectas et blocs remontés en surface de terrains anciens à la faveur d'impacts météoritiques. |
| Nc | Noachian Cratered. Rebords de grands cratères de plus de 400 km de diamètre environ, incluant des terrainsHNk. | Éjectas de cratères d'impact. |
| Nm | Noachian Mountain. Grandes masses de plus de 10 km d'encombrement généralement allongées associées à l'unitéHNbr et typiquement représentées parPhlegra Montes, dans la région d'Elysium Planitia. | Formations liées aux failles résultant des impacts à l'origine des grands bassins. |
| Nhc | Noachian Hilly & Cratered. Terrains accidentés très cratérisés typiques de l'hémisphère sud, se distinguant de l'unitéNplc par le fait que les régions situées entre les cratères sont irrégulières. L'albédo des régions australes situées au-delà de 50º S présente une structure tachetée. | Peut-être les plus anciennes surfaces de la planète. |
Les paragraphes qui suivent résument les principales caractéristiques géologiques de la planète Mars.
La principale caractéristiqueorographique de Mars est l'opposition entre, d'une part, un hémisphère nord constitué d'une vaste plaine dépourvue de relief significatif[50] s'étendant sur un peu plus du tiers de la surface de la planète, et, d'autre part, un hémisphère sud formé de terrains élevés très cratérisés et assez accidentés, avec des failles, des escarpements, des éboulements, et des régions au relief chaotique. Ces deux régions sont de natures géologiques radicalement différentes : l'écorce martienne est sensiblement plus fine dans l'hémisphère nord que dans l'hémisphère sud[16], les terrains de l'hémisphère sud sont plus anciens, de quelques centaines de millions d'années à un ou deux milliards d'années, que ceux de l'hémisphère nord, et les signatures spectrales minéralogiques de ces derniers semblent marquées par une ancienne présence d'eau liquide abondante et acide ayant définitivement affecté lacomposition minéralogique de ces régions (voir plus loin).
Les particularités de la limite entre ces deux grands domaines géologiques martiens sont particulièrement bien illustrées par la région d'Aeolis Mensae, entreTerra Cimmeria etElysium Planitia : on y trouve des formations tectoniques complexes et pas toujours bien comprises, ainsi que des traces d'érosion éolienne très marquées[51].
Deux types de scénarios ont été proposés pour rendre compte de cette situation[52]:

L'abondance descratères d'impact est la caractéristique première des terrains anciens de l'hémisphère sud. Il y en a bien entendu également dans l'hémisphère nord, et les cratères martiens présentent une grande variété de formes : vieux cratères à fond plat très érodés et parfois partiellement enfouis dans l'hémisphère sud, petits cratères très creux en forme de bol sur les terrains jeunes de l'hémisphère nord, avec une particularité martienne — inconnue sur laLune — liée à la présence de composés volatils dans le sol : les « cratères à rempart, » tels que lecratère Yuty ; ces cratères particuliers sont caractérisés par la présence d'éjectas lobés très reconnaissables[57]. Les cratères dits « à piédestal » résultent, quant à eux, de l'érosion différentielle des terrains meubles environnant uncratère d'impact dont les bords et les matériaux immédiatement en contact avec l'impact ont été durcis sous l'effet mécanique et thermique du choc avec l'impacteur. L'instrumentHRSC deMars Express a fourni d'excellents clichés d'un de ces cratères dans la région d'Hephaestus Fossae[58].
Les impacts résultant de la collision avec unimpacteur suffisamment énergétique pour percer l'écorce martienne et provoquer des épanchements magmatiques donnent lieu, non plus à un cratère, mais à unbassin d'impact ; les principaux bassins identifiés sans ambigüité sur Mars sont, par taille décroissante :
L'existence duBassin boréal comme bassin unique est loin d'être prouvée[16], mais, si cette hypothèse était avérée, il regrouperait géologiquement un ensemble de dépressions comprenantVastitas Borealis,Arcadia Planitia etAcidalia Planitia, ce qui en ferait de loin la plus vaste structure de ce type dans lesystème solaire.
Amazonis Planitia, qui ressemble également à un bassin d'impact, n'en serait cependant pas un et aurait une origine plutôt volcanique, étant située entre les deux grandes régions volcaniques martiennes :Elysium Planitia à l'ouest et lerenflement de Tharsis à l'est. L'instrument MARSIS —Mars Advanced Radar for Subsurface and Ionospheric Sounding — deMars Express a par ailleurs révélé l'existence de nombreux autres impacts plus ou moins gros, aujourd'hui invisibles car enfouis dans le sol de la planète[53],[59],[60].
La formation des bassins d'impact martiens remonte essentiellement aux premiers âges de la planète, il y a plus de quatre milliards d'années : les derniers impacts majeurs ont dû se produire à la fin duNoachien, lors dugrand bombardement tardif, il y a entre 4,1 et 3,9 (voire 3,8) milliards d'années — leBassin Caloris, surMercure, etMare Imbrium (la « Mer des Pluies »), sur laLune, sont également datés de cette époque, qui correspond, pour la Lune, auNectarien et à l'Imbrien inférieur ; il est possible que lessatellitesPhobos etDeimos aient un rapport avec cet épisode, commeastéroïdes incidents capturés par Mars — mais il resterait alors à expliquer leur orbite quasi circulaire avec une inclinaison très faible sur l'équateur martien — ou comme agglomérats de matériaux projetés dans l'espace et satellisés à la suite decollisions avec desimpacteurs de taille suffisante[61], Phobos en deçà et Deimos au-delà de l'orbite synchrone de Mars, laquelle correspond à une altitude de 17 000 km au-dessus de la surface ; le scénario le plus probable, dans ce cas de figure, serait une ou plusieurs collisions avec un ou plusieursplanétésimaux peu après la formation de Mars (scénario similaire à celui de la formation de laLune à la suite de l'impact deThéia sur la proto-Terre), il y a environ 4,5 milliards d'années, plutôt que lors dugrand bombardement tardif, 500 millions d'années plus tard.

De façon schématique, le volcanisme martien semble avoir globalement évolué depuis un volcanisme de plaine datant de la fin duNoachien à la première moitié de l'Hespérien, défini par des épanchements de lave basaltique très fluide, comme celle des « mers » lunaires, et qui constitue une fraction notable de la surface martienne, jusqu'à des cônes volcaniques bien formés rappelant lesstratovolcans terrestres à partir de la seconde moitié de l'Hespérien. Entre ces deux extrêmes, tout une gradation de morphologies permet de rendre compte de la variété de terrains et de formations volcaniques rencontrés sur toute la surface de la planète, notamment les fameuxvolcans boucliers martiens.

La plus ancienne forme de volcanisme martien, remontant à la fin duNoachien et perdurant à l'Hespérien, serait celle des étendues basaltiques qui recouvrent le fond desbassins d'impact tels qu'Argyre etHellas, ainsi que certaines étendues planes localisées entre ces deux bassins et celui d'Isidis (notammentSyrtis Major Planum,Hesperia Planum etMalea Planum), de façon rappelant les terrains volcaniques lisses identifiés surMercure (par exempleBorealis Planitia), surVénus (typiquementGuinevere Planitia) et sur laLune — les « mers » lunaires, la plupart du temps corrélées à desimpacts cosmiques.
SurMars, ces plaines de lavenoachiennes constituent les régions deMalea Planum,Hesperia Planum etSyrtis Major Planum, qui se présentent comme des plateaux basaltiques dont la surface, typique de l'Hespérien, est géologiquement plus récente. La dynamique sous-jacente à ce type de volcanisme, entrefissure etpoint chaud, n'est pas vraiment comprise ; en particulier, on n'explique pas vraiment le fait que les volcans deMalea, d'Hesperia et d'Elysium soient plus ou moins alignés sur une aussi grande distance.
Unechambre magmatique a été identifiée sous lescaldeiras deSyrtis Major par l'anomalie gravitationnelle qu'elle provoque[62].Syrtis Major Planum apparaît ainsi comme unvolcan bouclier particulièrement plat et érodé. Ces formations combinent des caractéristiques effusives et explosives les faisant ressembler aux bouclierspyroclastiques terrestres, tels que l'Emi Koussi dans lemassif du Tibesti. C'est notamment le cas d'Hesperia Planum, dont le front occidental au contact d'Hellas Planitia, à proximité immédiate d'Hadriacus Mons, présente des cavités éboulées — telles qu'Ausonia Cavus — plus ou moins souterraines prolongées par deslits decours d'eau asséchés —Dao Vallis etNiger Vallis, voireHarmakhis Vallis un peu plus loin au sud — qui rappellent, à bien plus grande échelle, les traces laissées sur Terre par deslahars.
Des plaines de lave bien plus vastes, et aussi parfois assez récentes (jusqu'à la seconde moitié de l'Amazonien), entourent les édifices des deux grands domaines volcaniques martiens, à savoirElysium Planitia et surtout lerenflement de Tharsis de part et d'autre d'Amazonis Planitia. L'exemple typique en est le très vaste ensemble d'âges hétérogènes formé par les plateaux deDaedalia,Icaria,Syria,Sinai,Solis,Thaumasia etBosporos au sud deValles Marineris : au moins 163 bouches volcaniques ont été recensées sur le renflement deSyria[63], à l'origine de coulées de lave s'étendant sur plus de 45 000 km2. Toutes ces plaines semblent résulter d'épanchements de lave sur les flancs des volcans, voire des premières coulées de lave très fluide des volcans eux-mêmes. Ainsi, la surface particulièrement lisse d'Amazonis Planitia résulterait de dépôts volcaniques continus depuis l'Hespérien jusqu'à des périodes assez récentes de l'Amazonien[64].

Unvolcan bouclier, expression issue de l'islandaisSkjaldbreiður désignant un volcan aplati en forme de « grand bouclier » (sens littéral de cetoponyme), est caractérisé par la très faible pente de ses flancs. SurTerre, un tel volcan résulte d'épanchements de laves pauvres en silice, très fluides, qui s'écoulent facilement sur de grandes distances, formant des structures aplaties s'étalant sur des surfaces très importantes, contrairement, par exemple, auxstratovolcans, dont le cône, bien formé, a une base bien plus restreinte. Le type même de volcan bouclier est, sur Terre, leMauna Loa, àHawaï ; lePiton de la Fournaise, àLa Réunion, en est un autre, plus petit mais très actif.
SurMars, les structures volcaniques les plus spectaculaires sont précisément des volcans boucliers. Le plus étendu d'entre eux,Alba Mons, s'étend sur quelque 1 600 km de large mais ne s'élève qu'à 6 800 m au-dessus duniveau de référence. L'analyse topographique détaillée de cet édifice volcanique parmi les plus volumineux dusystème solaire révèle trois grandes périodes d'activité à travers les ruptures de pente et les flux de lave particuliers relevés autour de son système de caldeiras[65]. Les premières éruptions auraient consisté en des laves fluides qui se seraient répandues sur une large surface, puis des éruptions plus localisées auraient donné naissance au bouclier central, et enfin une phase finale aurait abouti au dôme portant le système de caldeiras, dont la masse aurait favorisé l'élargissement desgrabens d'Alba et deTantalus ainsi que la faible inclinaison du sommet vers l'est.Alba Mons se situe exactement auxantipodes dubassin d'impact d'Hellas Planitia, et sa formation serait peut-être due au contre-coup de l'impact à l'origine de ce bassin, il y a environ 4 milliards d'années. La datation de cet ensemble est cependant délicate, son aspect général plutôt érodé et couvert de poussières[66] suggérant un âge ancien, mais la faiblecratérisation de ses surfaces (comparée par exemple à celles deSyrtis Major, autre volcan bouclier clairement plus ancien au point de ressembler davantage à un plateau basaltique qu'à un volcan) et sa morphologie générale finalement assez proche de celle des volcans durenflement de Tharsis, avec leurs grands épanchements de lave en lobes latéraux et des éruptions successives se resserrant autour des caldeiras, plaident plutôt pour une activité centrée au milieu de l'Hespérien et se prolongeant au début de l'Amazonien.
Olympus Mons, le plus célèbre et le plus haut des volcans martiens, culmine à 21 229 m au-dessus du niveau de référence[67] (des altitudes supérieures sont encore très souvent publiées, même récemment sur des sites institutionnels américains[68], mais relèvent d'estimations duXXe siècle antérieures aux mesures du MOLA deMGS) et possède un système decaldeiras[69] long de 85 km, large de 60 km et d'une profondeur atteignant 3 km ; il couvre une surface d'environ 320 000 km2 et de 624 km de plus grande largeur[70], délimitée par un talus[71] pouvant atteindre par endroits 6 000 m de dénivelé. L'origine de cet escarpement est pour l'heure inconnue : les volcans qui présentent surTerre de telles formations sont typiques d'unvolcanisme sous-glaciaire, caractérisé par l'épanchement de laves sous une masse de glace qui en limite l'extension basale pour contraindre l'édifice volcanique dans une géométrie cylindrique, comme c'est le cas duHerðubreið, enIslande ; néanmoins, nous serions ici en présence d'un volcan qui se serait développé sous uninlandsis de 5 à 6 km d'épaisseur, ce qui semblea priori inconcevable au vu de nos connaissances actuelles sur laplanète Mars, de sorte que l'origine de cette particularité topographique doit encore être expliquée, et que les théories à ce sujet abondent.
Les autres grands volcans martiens sont également des volcans boucliers : du nord au sud,Ascraeus Mons,Pavonis Mons etArsia Mons constituent lesTharsis Montes et sont les trois plus grands édifices durenflement de Tharsis, tandis qu'Elysium Mons est la principale formation d'Elysium Planitia. La fluidité des laves de ces édifices volcaniques est bien illustrée par les cavités d'effondrement relevées par exemple sur le flanc sud d'Arsia Mons[72], formées après que la lave s'est solidifiée en surface tandis qu'elle continuait à s'écouler en dessous, laissant des cavités dont le sommet s'est effondré une fois vidées.
Les volcans boucliers martiens atteignent des tailles gigantesques par rapport à leurs équivalents terrestres en raison de l'absence detectonique des plaques sur Mars : l'écorce martienne demeure immobile par rapport auxpoints chauds, qui peuvent ainsi la percer au même endroit pendant de très longues périodes de temps pour donner naissance à des édifices volcaniques résultant de l'accumulation de laves pendant parfois plusieurs milliards d'années, alors que, sur Terre, le déplacement desplaques lithosphériques au-dessus de ces points chauds conduit à la formation d'un chapelet de parfois plusieurs dizaines de volcans, chacun ne demeurant actif que pendant quelques millions d'années, ce qui est bien trop bref pour permettre la formation de structures aussi imposantes que sur Mars. L'archipel d'Hawaï est le meilleur exemple terrestre illustrant le déplacement d'une plaque tectonique au-dessus d'un point chaud, en l'occurrence de laplaque pacifique au-dessus dupoint chaud d'Hawaï ; de la même façon, l'archipel desMascareignes résulte du déplacement de laplaque somalienne au-dessus dupoint chaud de la Réunion.
D'autres types de volcans présents sur Mars rappellent davantage lesstratovolcans, qui résultent de l'accumulation de dépôts de laves mêlées decendres volcaniques. Ce sont lestholi (pluriel latin detholus), édifices de taille plus modeste que les volcans boucliers, aux pentes plus accusées, surtout près du cratère, ainsi que lespaterae, qui se réduisent parfois à leurcaldeira. Tous ces types de volcans sont présents dans les régions durenflement de Tharsis et d'Elysium Planitia, la tendance générale étant cependant de trouver les volcans boucliers dans la région de Tharsis tandis que les volcans d'Elysium s'apparentent davantage à des stratovolcans.


Le plus spectaculaire et le plus complexe des ensembles géologiques martiens est formé des grandsvolcans de la région de Tharsis —Alba Mons,Olympus Mons et la chaîne de volcans deTharsis Montes — ainsi que du système decanyons prenant naissance au niveau des failles entrecroisées deNoctis Labyrinthus pour se développer à travers l'ensemble deValles Marineris puis les terrains chaotiques deXanthe Terra etMargaritifer Terra jusqu'aux abords deChryse Planitia. Toute cette région — lerenflement de Tharsis — résulterait de la remontée d'un système depanachesmantelliques à l'origine despoints chauds matérialisés par les différents volcans de Tharsis ainsi que, peut-être, des renflements deSyria Planum et des failles deNoctis Labyrinthus[73]. Au sud de cette région, c'est tout un fragment d'écorce qui se serait soulevé et déplacé avec un mouvement de translation vers le sud doublé d'une rotation dans le sens inverse des aiguilles d'une montre[74].
Syria Planum, en particulier, semble avoir joué un rôle tectonique déterminant sur l'ensemble de la région pendant une très longue période de temps, depuis leNoachien jusqu'à l'Amazonien[75]. Des dizaines de petitsvolcans boucliers de quelques dizaines de kilomètres de diamètre et quelques centaines de mètres de haut parsèment ce plateau volcanique[76],[77], dont la surface oscille entre 6 000 et 8 000 m d'altitude. L'unité géologique constituée parSyria Planum,Solis Planum etThaumasia Planum pourrait être vue comme une ébauche deplaque lithosphérique, soulevée et déplacée vers le sud en formant, au sud, un début deconvergence au niveau deClaritas Fossae,Coracis Fossae etNectaris Fossae, tandis qu'au nord apparaissait un énormerift long de 4 000 km au niveau deNoctis Labyrinthus et, surtout, deValles Marineris, dont l'origine tectonique par l'étirement nord-sud de l'écorce martienne avait été pressentie dès la fin des années 1970 par l'analyse des images retransmises parViking 1 Orbiter[78].
Valles Marineris est unfossé d'effondrement élargi par l'érosion jusqu'à atteindre par endroits une largeur de 600 km et une profondeur de 10 km[79]. L'érosion en question serait d'origine largementhydrologique, comme en témoigne la présence de sulfates hydratés[80], dont l'épaisseur des dépôts forme parfois de véritables montagnes[81],[82], et de vallées dendritiques témoignant de l'existence passée d'un réseau decours d'eau permanent et durable[83]. De surcroît, l'étude détaillée des clichés pris par les nombreuses sondes qui, en orbite, ont observé ces canyons, a révélé des formations rocheuses interprétées comme des traces d'activité fluviale très prolongée[84] et l'analyse parMars Global Surveyor des anomalies gravitationnelles au-dessus de cette région a montré que la signature deValles Marineris s'étend jusque dans lebassin deChryse Planitia[85], ce qui donne une idée de la quantité de matériaux charriés hors de ces canyons par l'érosion fluviale continue sur une période de temps suffisamment longue. Si les traces de volcanisme et d'activité fluviale sont patentes dansValles Marineris, les parois de ces canyons ont surtout été altérées, à l'Amazonien, par l'érosion éolienne et lesglissements de terrain[86], souvent de très grande ampleur ; mais ces altérations révèlent à leur tour les traces d'anciens écoulements souterrains le long des failles ainsi mises à nu[87]. Incidemment, l'estimation de la fréquence des glissements de terrain le long des parois deValles Marineris a conduit à proposer une réduction d'un facteur 3 de la fréquence d'impact météoritique sur les surfaces martiennes depuis 3 milliards d'années[88], contrairement aux modèles usuels qui tablent plutôt sur untaux de cratérisation constant, lequel aurait pour conséquence l'observation d'une augmentation difficilement explicable de la fréquence des glissements de terrain.
La nature des terrains formant le fond des canyons n'est toujours pas très bien comprise, notamment quant à la part entre origine volcanique et origine sédimentaire. Le volcanisme seraita priori plus significatif à l'ouest des canyons, à proximité deSyria Planum, et les terrains sombres qualifiés de « dépôts intérieurs stratifiés » situés dans la région deTithonium Chasma seraient volcaniques[89].
La seconde région volcanique de Mars est très différente de celle de Tharsis. Bien plus petite, elle est aussi nettement plus récente, avec de nombreux terrains formés semble-t-il il y a moins de cent millions d'années, certaines coulées de lave étant quant à elles datées, à partir de leurtaux de cratérisation, de moins de dix millions d'années[90]. L'une des particularités de cette région est de présenter divers modes d'interaction de la lave avec des terrains chargés de glace[91].
Les clichés des sondes satellisées autour de Mars montrent par ailleurs un certain nombre de petits cônes surmontés d'un cratère, par exemple près du pôle nord[92], qui pourraient être des volcans, mais il est également possible que ce type de structure s'apparente davantage à despingos, comme ceux d'Utopia Planitia[93], qui n'ont rien de volcanique mais sont, surTerre, typiques des climats polaires, où ils résultent de la dilatation cumulative de l'eau dupergélisol lorsqu'elle fond et gèle alternativement au gré des saisons.
Le fond de certainscratères deSyrtis Major Planum montre des arêtes allongées disposées de façon ordonnée, ce qui suggère fortement qu'on soit en présence dedykes. Ces structures se forment notamment dans les terrains traversés defailles provoquées notamment par lesimpacts météoritiques, et résultent de la plus grande résistance à l'érosion desroches magmatiques coulées dans ces failles, constituées de matériaux plus fragiles et qui finissent par disparaître en laissant une lamebasaltique ayant l'apparence d'un mur ou d'une digue (d'où le nom de ce type de structures). Un dyke peut également se former par cimentation debrèches sous l'effet d'uncours d'eau qui s'insinue dans les failles, aboutissant là encore à durcir le matériau de comblement, qui subsistera seul une fois l'érosion ayant fait son œuvre sur l'encaissant moins résistant.
La région deHuo Hsing Vallis est particulièrement intéressante à cet égard, car elle présente des dykes assez évidents dans sa partie méridionale[94],[95].
SurTerre, les dykes sont fréquemment associés à des gisements de minerais importants, ce qui justifie pleinement l'intérêt qu'on peut porter à ces structures surMars[96].

Lasuperficie et lamasse de laplanète Mars étant respectivement 3,5 et 10 fois moindres que celles de laTerre, cette planète s'est refroidie plus rapidement que la nôtre et son activité interne s'est donc réduite également plus vite : alors que levolcanisme et, plus généralement, latectonique (orogenèse,séismes,tectonique des plaques, etc.) sont encore très actifs sur Terre, ils ne semblent plus être notables sur Mars, où aucune tectonique des plaques, même passée, n'a jamais pu être mise en évidence.
Le volcanisme martien paraît également avoir cessé d'être actif, bien que l'âge semble-t-il très récent de certaines coulées de lave[97] suggère, pour certains volcans, une activité actuellement certes très réduite, mais peut-être pas rigoureusement nulle[10], d'autant que Mars, contrairement à laLune, n'a pas fini de se refroidir, et que son intérieur, loin d'être entièrement figé, contient en réalité unnoyau peut-être entièrement liquide[21]. D'une manière générale, l'analyse des données recueillies parMars Express a conduit une équipe deplanétologues de l'ESA dirigée par l'AllemandGerhard Neukum à proposer une séquence en cinq épisodes volcaniques[98] :
Ces datations reposent sur l'évaluation dutaux de cratérisation des coulées de lave correspondantes, qui semble recoupée par les observations indirectes à moyen terme mais contredites par les observations directes à court terme déduites de la fréquence des impacts récents observés sur plus de dix ans par les sondes satellisées autour de Mars, la principale difficulté de ce type de datation étant d'évaluer les biais statistiques introduits par la différence notable d'ordres de grandeur entre les surfaces anciennes (âgées de plus 2 milliards d'années), qui représentent une fraction importante de la surface de Mars, et les surfaces les plus récentes (âgées de moins de 200 millions d'années), qui sont comparativement extrêmement réduites.
Par ailleurs, si la fréquence des impacts récents relevée par les sondes satellisées autour de Mars semble suggérer un taux de cratérisation plus élevé que celui habituellement retenu pour dater les formations martiennes (ce qui conduirait à devoir « rajeunir » toutes ces datations), il semblerait plutôt que, à long terme, ce taux de cratérisation ait au contraire été divisé par trois depuis 3 milliards d'années[88], ce qui tendrait à « vieillir » les datations martiennes, et ce d'autant plus qu'elles sont relatives à des phénomènes récents.
Le tableau ci-dessous présente une synthèse synoptique des principaux volcans martiens et de la datation de leur formation lorsqu'elle a pu être déterminée à l'aide du taux de cratérisation relevé sur leurs différentes surfaces ; ces dates, lorsqu'elles sont estimées, se rapportent aux plus anciens terrains identifiés à la surface de chacun des volcans, ceux-ci s'étant nécessairement formés plus tôt, de sorte qu'il ne peut s'agir que d'une borne inférieure à l'âge de ces volcans — ce que traduit le signe « ≥ » :
Les images de la surface martienne transmises dès les années 1970 par les sondesViking en orbite autour de la planète rouge ont révélé l'omniprésence des formations géologiques résultant semble-t-il de l'action, parfois prolongée, de grandes quantités d'un liquide alors encore impossible à préciser,H2O ouCO2 selon les principales hypothèses formulées à l'époque, connues respectivement sous le nom « Blue Mars » et « White Mars, » ce dernier modèle, fondé sur le CO2, défendu notamment par l'astronome australien Nick Hoffman, de l'université de Melbourne ; ce n'est qu'avec la caractérisationin situ dejarosite (minéral se formant en milieuxaqueux) par lerover américainOpportunity en 2004, ainsi que dephyllosilicates (altération aqueuse deroches ignées) et dekiesérite (minéralhydraté) par lasonde européenneMars Express en 2005, que la nature de ce liquide a pu être formellement identifiée comme étant de l'eau — identification qui avait fait l'objet de réfutations minoritaires jusqu'au début des années 2000[102],[103].
Si les vallées fluviales elles-mêmes sont bien dessinées et bien évidentes à la surface de Mars, il manque en revanche toutes les structures de plus petites dimensions susceptibles d'indiquer l'origine de ces écoulements, malgré la très haute résolution des vues prises récemment par des sondes telles queMars Global Surveyor avec l'instrumentHiRISE —High Resolution Imaging Science Experiment. Cela pourrait signifier que ces vallées sont des structures très anciennes révélées par l'érosion partielle des sols, lesquels dissimuleraient par conséquent les traces de sources et des torrents à l'origine de ces cours d'eau. Les vallées sont en effet souvent discontinues, avec des segments invisibles sous ce qui semble être une région de terrains plus récents et moins érodés[104]. Une autre hypothèse est qu'elles proviendraient de l'écoulement plus récent d'eau fondue dupergélisol, ce qui expliquerait pourquoi de nombreux « cours d'eau » martiens semblent se terminer par une cavité en hémicycle.
Les clichés à haute résolution ont également mis en évidence la présence de plusieurs centaines deravines (appeléesgullies en anglais) sur les parois de nombreuxcratères etcanyons des terrainsnoachiens de l'hémisphère sud, le plus souvent face à l'équateur et jusqu'à une latitude d'environ 30° S ; ces structures ne semblent pas particulièrement érodées et ne présentent pas non plus de traces d'impact postérieures à leur formation, ce qui indiquerait leur apparition récente[105].
L'un des types de formations géologiques les plus remarquables concernant la présence passée decours d'eau à la surface de Mars sont les vallées au relief inversé, qui résultent de l'érosion éolienne des terrains environnant un ancienlit de cours d'eau, ce dernier devenant saillant car moins facilement érodé en raison de l'action durcissante, par cimentation, de l'eau qui s'écoulait jadis à cet endroit : les minéraux dissous dans l'eau précipitent entre les interstices de la couche sédimentaire sous-jacente, qui s'en trouve durcie par rapport aux terrains environnants. On voit ainsi apparaître, sous l'effet d'une érosion éolienne uniforme, des vallées en négatif, saillantes au lieu d'être en creux, comme c'est le cas au niveau ducratère Miyamoto[106], dans la région deMeridiani Planum.
Des formations géologiques spectaculaires et très explicites, telles que desdeltas, comme ceux ducratère Jezero[107] par18,9° N et 77,5° E ou ducratère Eberswalde[108] (auparavant appelé « cratère Holden NE ») par24,3° S et 326,5° E, ont également été observés, respectivement par l'instrument CRISM deMars Reconnaissance Orbiter et la MOC deMars Global Surveyor. Outre ces formations elles-mêmes, qui sont, sans ambiguïté, liées à une activitéhydrologique passée, de nombreux minéraux typiquement associés aux milieux humides y ont été identifiés, notamment desphyllosilicates[109] (voir plus loin).
Mars étant une planète froide depuis trois ou quatre milliards d'années qui semble avoir possédé unehydrosphère significative il y a également trois ou quatre milliards d'années, il ne paraît pas surprenant d'y trouver de nombreuses formations évoquant l'action passée ou présente deglaciers. Certaines formations en forme de langue sont assez typiques (voir ci-dessous[112]), tandis que des régions entières paraissent avoir été marquées par la glace, notammentDeuteronilus Mensae[113],[114], qui serait particulièrement riche en glace sous seulement quelques mètres de rochers.
Les glaciers martiens semblent souvent associés aux terrains irréguliers[115], auxcratères d'impact et auxvolcans ; on en a notamment décrit surHecates Tholus[116],Arsia Mons[117],Pavonis Mons[118] etOlympus Mons[119].
L'ESA a publié en été 2005 des clichés — alors assez médiatisés — pris par l'instrumentHRSC de la sondeMars Express montrant un cratère anonyme de 35 km de diamètre et 2 km de profondeur, situé par70,5° N et 103° E dans la grande plaine boréale deVastitas Borealis, dont le fond est partiellement recouvert de glace d'eau[120],[121] sur un champ de dunes sombres émergeant à la périphérie de la glace.
Plus spectaculaire encore, des formations évoquant assez distinctement la surface « fossilisée » d'une mer couverte de fragments debanquise disloquée ont été identifiées la même année par la mêmesonde dans l'est de la région d'Elysium Planitia, par environ5° N et 150° E couvrant une surface voisine de celle de lamer du Nord — 800 × 900 km2 pour 45 m de profondeur — et datée d'environ 5 millions d'années[122],[123].
Une vaste région martienne, longeant par le nord la frontière géologique matérialisant la dichotomie crustale au sud d'Amazonis Planitia entre les deux régions volcaniques d'Elysium Planitia et durenflement de Tharsis, est caractérisée par des formations atypiques se présentant comme des massifs lobés à la surface ondulée, géologiquement très jeunes au vu de la quasi absence decratères à leur surface (mais d'origine sans doute bien plus ancienne, remontant probablement à l'Hespérien[124]), et qui recouvrent parfois clairement des topographies plus anciennes :Lucus Planum par4° S et 182° E,Eumenides Dorsum par4,4° N et 203,5° E,Amazonis Mensa par2° S et 212,5° E, etGordii Dorsum par4,4° N et 215,9° E ; plus à l'ouest,Aeolis Planum par0,8° S et 145° E, etZephyria Planum par1° S et 153,1° E, au sud d'Elysium Planitia, sont également intégrés à cet ensemble.
La plus emblématique et la moins bien comprise de ces formations est celle entourantMedusae Fossae, située par3,2° S et 197° E, au sud-ouest d'Eumenides Dorsum, dans le quart nord-est duquadrangle de Memnonia (cf.quadrangleMC-16 de l'USGS). Ce matériau particulier présente une texture meuble et une fragilité à l'érosion éolienne bien mises en évidence à travers sesyardangs vus par l'imageur thermique THEMIS de la sonde2001 Mars Odyssey[125], et ci-dessous parHiRISE :
Lasonde européenneMars Express et sa caméraHRSC ont également fourni des clichés détaillés de cette région[129],[130].
Mars Express a permis l'étude intensive de la formation de Medusae Fossae à l'aide de son radar MARSIS[131], sous la responsabilité de l'Italien Giovanni Picardi. Ces études ont montré qu'il s'agit de dépôts atteignant par endroits 2,5 km d'épaisseur, dont les propriétés électriques[132] sont compatibles à la fois avec une nature poreuse (dépôts de cendres volcaniques d'origine éolienne) et une nature aqueuse (glace d'eau chargée de poussières, comme dans la calotte polaire australe résiduelle), les données alors recueillies ne permettant pas de trancher entre ces deux possibilités[133],[134]. Des analyses récentes ont montré que ces dépôts se sont peut-être étendus au-delà de la frontière géologique marquant la dichotomie crustale, comme pourraient le laisser penser des formations interprétées comme des restes de dépôts similaires sur les hautes terres au sud deMedusae Fossae[135].
L'instrument SHARAD deMars Reconnaissance Orbiter, précisément conçu pour analyser les échos radar superficiels, avait par ailleurs permis de déterminer que la structure des couches de dépôts constituant la formation deMedusae Fossae diffère de celle des calottes polaires[136], dans la mesure où aucune stratification particulière n'a pu être mise en évidence à partir des données recueillies par cet instrument, et ce malgré le fait qu'une stratification des terrains correspondants par couches de quelques dizaines de mètres d'épaisseur soit décelable dans l'infrarouge et lalumière visible ;a contrario, la calotte australe résiduelle montre quant à elle une stratification parfaitement détectable par SHARAD.


Mars possède unecalotte polaire à chaque pôle, ces calottes ayant chacune une dynamique particulière en raison de la dissymétrie des saisons sur Mars : l'hiver austral est bien plus long et plus froid que l'hiver boréal, tandis que l'été austral est plus chaud que celui de l'hémisphère nord. Il s'ensuit que la température des pôles martiens varie différemment au cours de l'année au pôle nord et au pôle sud[138], avec un minimum comparable de−120 °C au nord et−130 °C au sud, mais un maximum de−100 °C au nord et de−50 °C au sud : c'est ce qui explique que la calotte résiduelle boréale ait environ 1 000 km de diamètre, soit deux à trois fois moins que son extension maximum, tandis que la calotte résiduelle australe n'a qu'environ 300 km de diamètre[138].
Contrairement à celles de laTerre, les calottes polaires martiennes sont constituées, en surface, essentiellement de glace dedioxyde de carbone et d'une fraction deglace d'eau. Elles atteignent des épaisseurs considérables, la calotte australe ayant été mesurée par l'instrument italo-américain MARSIS de la sonde européenneMars Express comme ayant une épaisseur atteignant 3,7 km[139]. L'instrumentOMEGA, également embarqué à bord de cette sonde, avait permis d'estimer à 15 % la teneur globale en eau de la glace polaire australe, les 85 % restants étant constitués deCO2 gelé[140]. Mais l'épaisseur de la calotte semble au contraire constituée de dépôts de poussières mêlés deglace d'eau en proportions variables selon les couches successives. Ceci représente finalement des quantités d'eau considérables, dont on a calculé qu'elles permettraient de recouvrir toute la surface de Mars sur une épaisseur de 11 m[139].
La calotte polaire australe a été particulièrement étudiée par les sondes en orbite autour de la planète rouge, ce qui permet d'en brosser un portrait assez complet :
Par ailleurs, la compréhension du régime des vents aux latitudes tempérées de Mars, et notamment l'effet dubassin d'impact d'Hellas Planitia sur lacirculation atmosphérique aux latitudes moyennes australes, a permis d'expliquer pourquoi la calotte résiduelle australe est décalée, lorsqu'elle est réduite à sa plus faible extension à la fin de l'été, de 3° sur le méridien 315° E : ce bassin vaste et profond stabilise un puissantsystème dépressionnaire à l'ouest du pôle sud, dans la région d'Argentea Planum jusqu'au-dessus de la calotte australe résiduelle, et unanticyclone à l'est du pôle sud, vers Hellas Planitia etPromethei Planum ; les conditions de l'atmosphère martienne dans le système dépressionnaire occidental sont réunies près du pôle sud pour déclencher des chutes de neige carbonique, tandis que les conditions anticycloniques ne permettent jamais de telles chutes de neige et n'autorise le dépôt de glace carbonique au sol que par condensation sous forme de givre[152].
Les régions polaires martiennes présentent des manifestations géologiques inattendues : outre les traînées noires sur terrains en pente, diverses structures telles que les points noirs sur les dunes, souvent associés à des motifs dits « en araignée, » sont typiques de la « zone cryptique, » située environ entre 60° et 80° de latitude sud et 50° et 210° de longitude est ; ces structures particulières correspondraient à des manifestations de typegeyser résultant de lasublimation dedioxyde de carbone dans le sous-sol[153],[154],[155],[156],[157].
Les points noirs ont typiquement entre de 15 et 45 m de large et sont espacés de quelques centaines de mètres. Ils apparaissent au printemps au voisinage des calottes polaires, notamment celle de l'hémisphère sud qui se restreint bien davantage que celle de l'hémisphère nord pendant l'été, et demeurent visibles pendant quelques mois avant de s'évanouir avant l'automne ; ils ne réapparaissent qu'au printemps suivant, parfois au même endroit. Ces points noirs sont souvent associés à des structures « en araignée, » qui semblent résulter de l'affaissement convergent du sol aprèssublimation d'une couche deCO2 gelé sous une couche superficielle de poussières. La pression du CO2 gazeux peut être suffisante pour provoquer un jet propulsé à plus de160 km/h, emportant des poussières issues d'en dessous de la surface du sol, qui sont souvent plus sombres que celles des couches superficielles, ce qui expliquerait les structures observées au sol dans ces régions particulières du pôle sud de Mars.
L'instrumentHiRISE deMars Reconnaissance Orbiter a révélé l'existence insoupçonnée de traînées noires matérialisant les lignes de plus grande pente sur les bords de nombreux cratères ainsi que sur divers terrains en pente. Appeléesdark slope streaks en anglais, ce sont des formations assez fines qui peuvent néanmoins atteindre plusieurs centaines de mètres de long. Ces traînées s'allongent lentement au fil du temps, toujours en partant d'une source ponctuelle. Celles qui viennent de se former sont très sombres, et pâlissent au fur et à mesure qu'elles vieillissent ; leur durée de vie est de quelques dizaines de mois.
L'origine de ces formations demeure incertaine ; l'hypothèse généralement retenue en fait des écoulements de sable plus sombre issu des couches plus profondes des terrains sur lesquels elles sont observées, tandis que certains auteurs les attribuent à des écoulements desaumures provenant de la fonte partielle dupergélisol[159].
Ces bandes sombres, qui prennent naissance sur l'arête d'un escarpement — d'originetectonique ou sur uncratère d'impact — présentent des similitudes avec certains types de ravines inhabituelles, ce qui pourrait indiquer que des phénomènes voisins sont en jeu dans ce cas précis :

L'instrumentHiRISE de la sondeMRO a immortalisé, le, unglissement de terrain de grande ampleur sur une falaise d'environ 700 m de haut, rendu notamment visible par le nuage de poussières qui s'est élevé au-dessus de la région à la suite de ce phénomène.
La poussière martienne, dont les grains ont au plus quelquesmicromètres de diamètre, est bien plus fine que lesable — qui correspond à une granulométrie de 50 μm à 2 mm — mais peut néanmoins conduire à des formations semblables à celles rencontrées surTerre dans les déserts de sable, telles que desbarkhanes et des champs dedunes.
Les deux grands domaines géologiques martiens — hautes terres cratérisées de l'hémisphère sud d'un côté, plaines basses et lisses de l'hémisphère nord de l'autre — forment une dichotomie crustale matérialisée par une région intermédiaire essentiellement constituée de terrains dits « tourmentés, » que les anglophones appellentfretted terrains. Ce type de reliefs, découvert avec les clichés transmis par la sondeMariner 9, est caractérisé par des escarpements et des falaises d'un à deux kilomètres de dénivelé et des vallées fluviales larges à fond plat et aux bords abrupts. Une région caractéristique de ce type de terrains se trouve entre les longitudes 0° et 90° E, et les latitudes 30° N et 50° N[164].
On trouve également de tels terrains en bordure des grandsbassins d'impact, tels que celui d'Hellas Planitia, à « l'embouchure » deReull Vallis, formant transition avec les hautes terres dePromethei Terra :
Les terrains chaotiques résulteraient de l'action de grandes quantités d'eau soudainement libérées du sous-sol. Les structures interprétées comme deslits decours d'eau asséchés prennent en effet souvent naissance dans des régions chaotiques. L'hématite Fe2O3, très abondante dans ces structures (les dépôts d'hématite d'Aram Chaos sont les seconds plus importants identifiés sur Mars), constituent une indication forte de la présence passée de grandes quantités d'eau liquide dans ces régions.
On reconnaît ce type de terrains à la présence demesas, de buttes, de collines, découpées par des vallées qui peuvent sembler disposées avec une certaine régularité. Il s'agit de formations anciennes, dont l'âge, estimé à partir dutaux de cratérisation de leur fond ainsi que par recoupement avec d'autres structures géologiques dont l'âge a pu être déterminé par ailleurs, remonterait entre 3,8 et 2,0 milliards d'années avant le présent[166]. Ces régions semblent par endroits moins effondrées, donnant lieu à des mesas de plus grande taille, qui pourraient alors encore contenir de grandes quantités d'eau gelée[167].
Le volcanisme pourrait avoir joué un rôle déterminant dans la formation de ce type de structures, au moins pour certaines d'entre elles. Ainsi, desbasaltes riches enolivines ont été identifiés dansHydraotes Chaos[166].
L'instrumentHRSC de la sondeMars Express a également fourni d'excellents clichés en3D d'Iani Chaos[169],[170], d'Aram Chaos[171], d'Aureum Chaos[172], ainsi que de la région séparantKasei Valles etSacra Fossae, constituée de terrains chaotiques également spectaculaires[173],[174].
Un corpus de 35météorites provenant de Mars est aujourd'hui répertorié[175],[176] (d'autres sources peuvent indiquer un nombre bien plus élevé que 35), permettant de tirer quelques conclusions préliminaires sur la nature des sols martiens :
Bien que peu nombreuses et restreintes à des époques géologiques limitées, ces météorites permettent d'évaluer l'importance des rochesbasaltiques surMars. Elles soulignent les différences de composition chimique entreMars et laTerre[181] et témoignent de la présence d'eau liquide à la surface de la planète il y a plus de 4 milliards d'années.
Lessondes spatiales qui ont exploré la planète nous ont permis de mieux en connaître la composition chimique en surface. Dès les années 1970, les sondesViking 1 etViking 2 ont analysé le sol martien, révélant une nature qui pourrait correspondre à l'érosion debasaltes. Ces analyses ont montré une abondance élevée ensilicium Si et enfer Fe, ainsi qu'enmagnésium Mg,aluminium Al,soufre S,calcium Ca ettitane Ti, avec des traces destrontium Sr, d'yttrium Y et peut-être dezirconium Zr. Le taux desoufre était près de deux fois supérieur et celui depotassium cinq fois inférieur à la moyenne de l'écorce terrestre[182]. Le sol contenait également des composés desoufre et dechlore ressemblant aux dépôts résultant de l'évaporation de l'eau de mer. La concentration en soufre était plus élevée en surface qu'en profondeur. Les expériences destinées à déterminer la présence d'éventuelsmicroorganismes dans le sol martien en mesurant la libération d'oxygène après adjonction de « nutriments » ont mesurée un dégagement de molécules O2 significatif, ce qui, en l'absence d'autres traces biologiques par ailleurs relevées, a été attribué à la présence d'ionssuperoxyde O2−[183].
Le spectromètre APXS deMars Pathfinder a réalisé en automne 1997 une série de mesures[184] exprimées en pourcentage pondéral d'oxydes et reproduites dans le tableau suivant (la colonne de droite donne la somme initiale des pourcentages obtenus avantétalonnage) :
| « Terre » analysée | Na2O | MgO | Al2O3 | SiO2 | SO3 | Cl | K2O | CaO | TiO2 | FeO | Somme initiale |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Après déploiement | 2,3 ± 0,9 | 7,9 ± 1,2 | 7,4 ± 0,7 | 51,0 ± 2,5 | 4,0 ± 0,8 | 0,5 ± 0,1 | 0,2 ± 0,1 | 6,9 ± 1,0 | 1,2 ± 0,2 | 16,6 ± 1,7 | 68,6 |
| Près de Yogi | 3,8 ± 1,5 | 8,3 ± 1,2 | 9,1 ± 0,9 | 48,0 ± 2,4 | 6,5 ± 1,3 | 0,6 ± 0,2 | 0,2 ± 0,1 | 5,6 ± 0,8 | 1,4 ± 0,2 | 14,4 ± 1,4 | 78,2 |
| Sombre près de Yogi | 2,8 ± 1,1 | 7,5 ± 1,1 | 8,7 ± 0,9 | 47,9 ± 2,4 | 5,6 ± 1,1 | 0,6 ± 0,2 | 0,3 ± 0,1 | 6,5 ± 1,0 | 0,9 ± 0,1 | 17,3 ± 1,7 | 89,1 |
| « Scooby Doo » | 2,0 ± 0,8 | 7,1 ± 1,1 | 9,1 ± 0,9 | 51,6 ± 2,6 | 5,3 ± 1,1 | 0,7 ± 0,2 | 0,5 ± 0,1 | 7,3 ± 1,1 | 1,1 ± 0,2 | 13,4 ± 1,3 | 99,2 |
| Près de Lamb | 1,5 ± 0,6 | 7,9 ± 1,2 | 8,3 ± 0,8 | 48,2 ± 2,4 | 6,2 ± 1,2 | 0,7 ± 0,2 | 0,2 ± 0,1 | 6,4 ± 1,0 | 1,1 ± 0,2 | 17,4 ± 1,7 | 92,9 |
| Dune de la Sirène | 1,3 ± 0,7 | 7,3 ± 1,1 | 8,4 ± 0,8 | 50,2 ± 2,5 | 5,2 ± 1,0 | 0,6 ± 0,2 | 0,5 ± 0,1 | 6,0 ± 0,9 | 1,3 ± 0,2 | 17,1 ± 1,7 | 98,9 |
| Pierres & Roches | Na2O | MgO | Al2O3 | SiO2 | SO3 | Cl | K2O | CaO | TiO2 | FeO | Somme initiale |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Barnacle Bill | 3,2 ± 1,3 | 3,0 ± 0,5 | 10,8 ± 1,1 | 58,6 ± 2,9 | 2,2 ± 0,4 | 0,5 ± 0,1 | 0,7 ± 0,1 | 5,3 ± 0,8 | 0,8 ± 0,2 | 12,9 ± 1,3 | 92,7 |
| Yogi | 1,7 ± 0,7 | 5,9 ± 0,9 | 9,1 ± 0,9 | 55,5 ± 2,8 | 3,9 ± 0,8 | 0,6 ± 0,2 | 0,5 ± 0,1 | 6,6 ± 1,0 | 0,9 ± 0,1 | 13,1 ± 1,3 | 85,9 |
| Wedge | 3,1 ± 1,2 | 4,9 ± 0,7 | 10,0 ± 1,0 | 52,2 ± 2,6 | 2,8 ± 0,6 | 0,5 ± 0,2 | 0,7 ± 0,1 | 7,4 ± 1,1 | 1,0 ± 0,1 | 15,4 ± 1,5 | 97,1 |
| Shark | 2,0 ± 0,8 | 3,0 ± 0,5 | 9,9 ± 1,0 | 61,2 ± 3,1 | 0,7 ± 0,3 | 0,3 ± 0,2 | 0,5 ± 0,1 | 7,8 ± 1,2 | 0,7 ± 0,1 | 11,9 ± 1,2 | 78,3 |
| Demi Dome | 2,4 ± 1,0 | 4,9 ± 0,7 | 10,6 ± 1,1 | 55,3 ± 2,8 | 2,6 ± 0,5 | 0,6 ± 0,2 | 0,8 ± 0,1 | 6,0 ± 0,9 | 0,9 ± 0,1 | 13,9 ± 1,4 | 92,6 |
| Pierres sans terre (données calculées) | 2,6 ± 1,5 | 2,0 ± 0,7 | 10,6 ± 0,7 | 62,0 ± 2,7 | 0,0 | 0,2 ± 0,2 | 0,7 ± 0,2 | 7,3 ± 1,1 | 0,7 ± 0,1 | 12,0 ± 1,3 |
La teinte rougeâtre de la planète provient avant tout de l'oxyde de fer(III) Fe2O3, omniprésent à sa surface. Cettehématite amorphe (l'hématite cristallisée, quant à elle, est de couleur grise) constitue une fraction importante des grains de poussière transportés par les vents qui balayent continuellement la surface de la planète, mais ne semble pas pénétrer très profondément dans le sol, à en juger par les traces laissées depuis l'hiver 2004 par les roues desroversSpirit etOpportunity[185], qui montrent que la couleurrouille est celle des couches de poussières, plus épaisses et recouvertes de poussières sombres pourOpportunity, tandis que les roches elles-mêmes sont nettement plus sombres.
Par ailleurs, le sol de Mars analyséin situ par lasondePhoenix en automne 2008 s'est révélé êtrealcalin (pH ≈ 7,7 ± 0,5) et contenir de nombreux sels, avec une abondance élevée depotassium K+, dechlorures Cl−, deperchlorates ClO4− et demagnésium Mg2+[186]. La présence de perchlorates, notamment, a été abondamment commentée, cara priori assez peu compatible avec la possibilité d'une vie martienne[187]. Ces sels ont la particularité d'abaisser sensiblement latempérature de fusion de laglace d'eau et pourraient expliquer les « ravines » régulièrement observées par les sondes en orbite autour de la planète, qui seraient ainsi les traces d'écoulements desaumures sur des terrains en pente.
D'une manière générale, les rochers martiens se sont révélés être principalement de naturebasaltiquetholéitique[188].
Sol jonché de rochers volcaniques vu parMars Pathfinder le[189]. |
LessondesViking 1 etViking 2 étaient munies d'unspectromètre de masse à chromatographie gazeuse (GCMS, pourGas Chromatography−Mass Spectrometry) destiné à la détection demoléculesorganiques, mais n'ont rien détecté malgré l'apport attendu de 100 à 300 tonnes de composés organiques par an du seul fait des chutes demétéorites et depoussière interplanétaire. Cette absence de détection est aujourd'hui encore mal comprise[191].
Le mini-laboratoireSAM à bord durover Curiosity a été spécialement conçu pour la recherche des molécules organiques. Outre un GCMS et un spectromètre laser ajustable (TLS, pourTunable Laser Spectrometer), l'instrument SAM comprend un système de manipulation des échantillons solides (SMS, pourSample Manipulation System), un système de préparation d'échantillons (pyrolyse,dérivatisation, combustion et enrichissement), un outil de séparation et de conditionnement chimique (CSPL, pourChemical Separation and Processing Laboratory) et des moyens de pompage. Les échantillons sont chauffés afin de libérer les composés volatils absorbés dans l'échantillon ou libérés par la dissociation deminéraux, et les gaz analysés dans le GCMS et le TLS. Opérationnel dès 2012, le SAM a donné ses premiers résultats positifs en 2015, confirmés en 2018 : les sols ducratère Mojave et deConfidence Hills contiennent des composésthiophéniques,aromatiques etaliphatiques[192].

Des sondes américaines (notamment2001 Mars Odyssey etMars Reconnaissance Orbiter) et européenne (Mars Express) ont étudié globalement la planète pendant plusieurs années, permettant d'élargir et d'affiner notre compréhension de sa nature et de son histoire. Si elles ont confirmé la prédominance des basaltes à la surface de la planète, ces sondes ont également recueilli quelques résultats inattendus.
Ainsi, lasonde Mars Express, de l'ESA, possède un instrument appelé OMEGA — acronyme signifiant « Observatoire pour la Minéralogie, l'Eau, les Glaces et l'Activité » — de réalisation essentiellement française et sous la responsabilité deJean-Pierre Bibring, de l'IAS àOrsay, qui mesure le spectreinfrarouge (dans leslongueurs d'onde comprises entre 0,35 et 5,2 µm) de la lumière solaire réfléchie par la surface martienne dans le but d'y déceler lespectre d'absorption des différents minéraux. Cette expérience a pu confirmer l'abondance desroches ignées sur la surface de Mars, notamment desolivines et despyroxènes, mais ces derniers ont un taux decalcium plus bas dans les hautes terres cratérisées de l'hémisphère sud que dans le reste de la planète, où on le rencontre avec de l'olivine ; ainsi, les matériaux les plus anciens de l'écorce martienne se seraient formés à partir d'unmanteau appauvri enaluminium et en calcium[193].
Olivines etpyroxènes sont les constituants principaux despéridotites, desroches plutoniques bien connues surTerre pour être le principal constituant dumanteau.
Une découverte déterminante dans la compréhension de l'histoire de laplanète Mars a été l'identification par OMEGA dephyllosilicates largement répandus dans les régions les plus anciennes de la planète[194], révélant l'interaction prolongée des roches ignées avec l'eau liquide. L'instrument CRISM —Compact Reconnaissance Imaging Spectrometer for Mars — de la sondeMars Reconnaissance Orbiter a permis de préciser la nature de ces minéraux[195]:
Diversphyllosilicates contenant deshydroxydes defer et demagnésium en proportions variables ont ainsi été observés, et les smectites telles que lanontronite Ca0,5(Si7Al0,8Fe0,2)(Fe3,5Al0,4Mg0,1)O20(OH)4 et lasaponite (Ca0,5,Na)0,33(Mg,Fe)3(Si,Al)4O10(OH)2•4H2O sont les plus répandues, bien que deschlorites soient présentes par endroits.
Toutes ces observations sont riches d'enseignements quant à l'histoire géologique de laplanète Mars, et notamment ses conditions atmosphériques auNoachien, c'est-à-dire aux débuts de son existence[194].
OMEGA a également permis de détecter, en de nombreux endroits de la planète, dessulfates hydratés, tels que, par exemple, de lakiesérite MgSO4•H2O dans la région deMeridiani Planum[196], voire, dans la région deValles Marineris, des sulfates encore davantage hydratés dont il n'a pas été possible d'identifier la nature minéralogique[80], ainsi que des dépôts degypse CaSO4•2H2O sur de lakiesérite au fond d'un lac asséché, indiquant un changement de nature saline de ce plan d'eau au cours de son asséchement, passant dusulfate de magnésium [ Mg2+ ][ SO42−] ausulfate de calcium [ Ca2+ ][ SO42− ][197].
De vastes étendues de sulfate de calcium hydraté, vraisemblablement du gypse, ont également été détectées en bordure de la calotte polaire boréale[198]. La présence de ces minéraux hydratés est une indication forte de la présence passée d'étendues d'eau liquide à la surface de Mars, une eau contenant notamment dessulfates demagnésium et decalcium dissous.
La sonde2001 Mars Odyssey a détecté également la présence dechlorures dans les hautes terres de l'hémisphère sud[199], résultant de l'évaporation de plans d'eau salée ne dépassant pas 25 km2 en divers endroits de ces terrains anciens remontant auNoachien voire, pour certains, au début de l'Hespérien.
L'un des résultats les plus étonnants deMars Reconnaissance Orbiter provient de l'étude détaillée en 2008 de la région deNili Fossae, identifiée début 2009 comme source d'importants dégagements deméthane[200]. Le méthane a été détecté dès 2003 dans l'atmosphère de Mars, aussi bien par dessondes telles queMars Express que depuis laTerre ; ces émissions deCH4 se concentreraient notamment en trois zones particulières de la région deSyrtis Major Planum[201]. Or le méthane est instable dans l'atmosphère martienne, des études récentes suggérant même qu'il soit six cents fois moins stable qu'estimé initialement (on évaluait sa durée de vie moyenne à 300 ans) car le taux de méthane n'a pas le temps de s'uniformiser dans l'atmosphère et demeure concentré autour de ses zones d'émission, ce qui correspondrait à une durée de vie de quelques centaines de jours, avec une source de méthane 600 fois plus puissante qu'estimé initialement, émettant ce gaz une soixantaine de jours par année martienne, à la fin de l'été de l'hémisphère nord[202].

Les analyses géologiques menées en 2008 parMars Reconnaissance Orbiter dans la région deNili Fossae ont révélé la présence d'argiles ferromagnésiennes (smectites), d'olivine (silicate ferromagnésien (Mg,Fe)2SiO4, détectée dès 2003[204]) et demagnésite (carbonate de magnésium MgCO3)[205], ainsi que deserpentine[206]. La présence simultanée de ces minéraux permet d'expliquer assez simplement la formation deméthane, car, surTerre, du méthane CH4 se forme en présence decarbonates — tels que le MgCO3 détecté en 2008 — et d'eau liquide lors dumétamorphisme hydrothermal d'oxyde de fer(III) Fe2O3 ou d'olivine(Mg,Fe)2SiO4 enserpentine(Mg,Fe)3Si2O5(OH)4, particulièrement lorsque le taux demagnésium dans l'olivine n'est pas trop élevé et lorsque lapression partielle dedioxyde de carbone CO2 est insuffisante pour conduire à la formation detalcMg3Si4O10(OH)2 mais aboutit au contraire à la formation deserpentine et demagnétite Fe3O4, comme dans la réaction :
La probabilité de ce type de réactions dans la région deNili Fossae est renforcée par la nature volcanique deSyrtis Major Planum et par l'étroite corrélation, observée dès 2004, entre le taux d'humidité d'une région et la concentration de méthane dans l'atmosphère[207].

L'olivine, découverte dans la région deNili Fossae[204] ainsi qu'en d'autres régions martiennes[193] par leThermal Emission Spectrometer (TES) deMars Global Surveyor, est un minéral instable en milieu aqueux, donnant facilement d'autres minéraux tels que de l'iddingsite, de lagoethite, de la serpentine, deschlorites, dessmectites, de lamaghémite et de l'hématite ; la présence d'olivine sur Mars indique donc des surfaces qui n'ont pas été exposées à l'eau liquide depuis la formation de ces minéraux[208], laquelle remonte à plusieurs milliards d'années, jusqu'auNoachien pour les terrains les plus anciens. Il s'agit donc d'une indication forte de l'aridité extrême du climat martien au cours de l'Amazonien, aridité qui avait semble-t-il déjà commencé, au moins localement, à la fin de l'Hespérien.
Par ailleurs, la découverte en 2004 dejarosite, un sulfate ferrique hydraté de sodium de formule NaFe(III)3(OH)6(SO4)2[209], par lerover martienOpportunity surMeridiani Planum, a permis de préciser encore davantage l'enchaînement des épisodes climatiques sur Mars[210]. Ce minéral se forme en effet, surTerre, par l'altération de roches volcaniques en milieu aqueux oxydant acide, de sorte que sa détection sur Mars implique l'existence d'une période de climat humide permettant l'existence d'eau liquide acide. Mais ce minéral est également assez rapidement dégradé par l'humidité, pour former desoxyhydroxydes ferriques tels que lagoethite α-FeO(OH), qui a par ailleurs été retrouvée en d'autres endroits de la planète (notamment par le roverSpirit dans lecratère Gusev). Par conséquent, la formation de la jarosite en climat humide a dû être rapidement suivie jusqu'à nos jours d'un climat aride afin de préserver ce minéral, nouvelle indication que l'eau liquide avait cessé d'exister à l'Amazonien mais avait été présente aux époques antérieures de l'histoire de Mars.
Image composite du rocher « El Capitan » vu par la caméra panoramique (PanCam) duroverOpportunity en bordure ducratère Eagle, dans la région deMeridiani Planum, en. | Vue du rocher « El Capitan » avec les sphérules, ou « myrtilles, » riches enhématite, à la surface et dans la roche. |
Le scénario qui suit se veut une synthèse plausible déduites de nos connaissances actuelles issues des différentes campagnes d'exploration de laplanète Mars depuis une quarantaine d'années et dont les résultats ont été résumés plus haut.
Comme les autresplanètes dusystème solaire, laplanète Mars se serait formée il y a environ 4,6 milliards d'années par accrétion gravitationnelle deplanétésimaux résultant de la condensation de lanébuleuse solaire. Étant située en deçà de la limite des 4 UA duSoleil, au-delà de laquelle peuvent se condenser lescomposés volatils tels que l'eau H2O, leméthane CH4 ou encore l'ammoniac NH3, Mars s'est formée à partir de planétésimaux de nature essentiellementsidérophile (riches enfer) etlithophile (constitués desilicates), mais avec une teneur accrue en élémentschalcophiles, à commencer par lesoufre qui semble bien plus abondant surMars que surTerre, comme l'ont révélé d'intéressantes mesures réalisées parMars Global Surveyor[17].
Cette teneur élevée en soufre aurait eu pour effet de favoriser ladifférenciation du globe martien, d'une part en abaissant la température de fusion des matériaux qui le constituent, et d'autre part en formant dessulfures de fer qui ont séparé chimiquement le fer dessilicates et ont accéléré sa concentration au centre de la planète pour y former unnoyau d'élémentssidérophiles, plus riche en élémentschalcophiles que lenoyau terrestre ; l'étude desisotopesradiogéniques desmétéorites de Mars, et notamment du système182Hf/182W, a ainsi révélé que lenoyau de Mars se serait formé en à peine 30 millions d'années[211], contre plus de 50 millions d'années pour laTerre. Ce taux d'éléments légers expliquerait à la fois pourquoi lenoyau de Mars est encore liquide, et pourquoi les épanchements de lave les plus anciens identifiés à la surface de la planète semblent avoir été particulièrement fluides, jusqu'à s'écouler sur près d'un millier de kilomètres autour d'Alba Patera par exemple.
La nature des planétésimaux qui ont conduit à la formation de la planète a déterminé la nature de l'atmosphère primordiale de Mars, par dégazage progressif des matériaux en fusion dans la masse de la planète en cours de différenciation. En l'état actuel de nos connaissances[212],[213], cette atmosphère devait être essentiellement constituée devapeur d'eau H2O ainsi que dedioxyde de carbone CO2, d'azote N2, dedioxyde de soufre SO2, et peut-être d'assez grandes quantités deméthane CH4.
Au début de son existence, Mars a certainement dû perdre, plus rapidement que la Terre, une fraction importante de la chaleur issue de l'énergie cinétique desplanétésimaux qui se sont écrasés les uns sur les autres pour conduire à sa formation : sa masse est en effet 10 fois moindre que celle de la Terre, alors que sa surface est seulement 3,5 fois plus réduite, ce qui signifie que le rapport surface/masse de la planète rouge est près de trois fois plus élevé que celui de notre planète. Une croûte a donc certainement dû se solidifier à sa surface en une centaine de millions d'années, et il est possible que la dichotomie crustale observée aujourd'hui entre les hémisphères nord et sud remonte aux quelques centaines de millions d'années qui ont suivi la formation de la planète.
Une fois suffisamment refroidie, il y a environ 4,5 à 4,4 milliards d'années, la surface solide de la planète dut recevoir enpluie la vapeur d'eau atmosphériquecondensée, qui réagit avec lefer contenu dans les minéraux chauffés pour l'oxyder en libérant de l'hydrogène H2, lequel, trop léger pour s'accumuler dans l'atmosphère, s'échappa dans l'espace. Ceci aurait conduit à une atmosphère primitive où ne subsistèrent plus que leCO2, leN2 et leSO2 comme constituants majoritaires de l'atmosphère martienne primitive, avec unepression atmosphérique totale alors plusieurs centaines de fois supérieure à ce qu'elle est aujourd'hui — la pression standard actuelle auniveau de référence martien est par définition de 610 Pa.
Pendant l'époque géologique appeléeNoachien qui prit fin il y a environ 3,7 à 3,5 milliards d'années, Mars semble avoir offert des conditions très différentes de celles d'aujourd'hui et assez similaires à celles de laTerre à cette époque, avec un champ magnétique global protégeant uneatmosphère épaisse et peut-être tempérée permettant l'existence d'unehydrosphère centrée autour d'un océan boréal occupant l'actuelle étendue deVastitas Borealis.
L'existence passée d'un champ magnétique global autour de Mars a été découverte à travers l'observation, réalisée dès 1998 parMars Global Surveyor, d'unpaléomagnétisme au-dessus des terrains les plus anciens de l'hémisphère sud, notamment dans la région deTerra Cimmeria etTerra Sirenum[32]. Lamagnétosphère générée par ce champ magnétique global devait agir, comme la magnétosphère terrestre de nos jours, en protégeant l'atmosphère de Mars de l'érosion par levent solaire, qui tend à éjecter dans l'espace les atomes de la haute atmosphère en leur transférant l'énergie nécessaire pour atteindre lavitesse de libération.
Uneffet de serre aurait été à l'œuvre pour tempérer l'atmosphère martienne, qui sinon aurait été plus froide qu'aujourd'hui en raison du plus faible rayonnement émis par leSoleil, alors encore jeune et en voie de stabilisation. Les simulations montrent qu'unepression partielle de 150 kPa deCO2 aurait permis d'avoir une température moyenne au sol égale à celle d'aujourd'hui, soit210 K (un peu moins de−60 °C). Un renforcement de cet effet de serre au-delà de cette température aurait pu provenir de plusieurs facteurs complémentaires :

Nous savons que l'eau liquide était alors abondante sur Mars car l'étudeminéralogique de la surface de la planète a révélé la présence significative dephyllosilicates dans les terrains remontant à cette époque[214],[215],[216]. Or les phyllosilicates sont de bons indicateurs de l'altération deroches ignées en milieu humide. L'abondance de ces minéraux dans les sols antérieurs à environ 4,2 milliards d'années a conduit l'équipe de planétologues de l'ESA responsable de l'instrumentOMEGA et dirigée parJean-Pierre Bibring à proposer la dénomination dePhyllosien pour l'éonstratigraphique correspondant : c'est l'époque semble-t-il la plus humide qu'ait connu laplanète Mars.
Des études plus fines réalisésin situ par les deuxMars Exploration RoversSpirit etOpportunity respectivement dans lecratère Gusev, au sud d'Apollinaris Patera, et surMeridiani Planum, suggèrent même l'existence passée d'unehydrosphère suffisamment importante pour avoir pu homogénéiser le taux dephosphore des minéraux analysés sur ces deux sites situés de part et d'autre de la planète[217]. Une approche différente, fondée sur la cartographie de l'abondance duthorium, dupotassium et duchlore à la surface de Mars par le spectromètre gamma (GRS) de la sondeMars Odyssey[218], aboutit au même résultat.
Par ailleurs, l'étude détaillée des traces laissées dans le paysage martien par de supposéscours d'eau et étendues liquides a conduit à proposer l'existence d'un véritable océan couvrant près du tiers de la surface de la planète au niveau de l'actuelVastitas Borealis. Dans un article de 1991 devenu classique[219], Bakeret al. allaient jusqu'à identifier certaines structures aux traces d'un ancien rivage. Les lignes côtières ainsi identifiées se trouvaient de surcroît correspondre aux courbes d'altitude constante corrigées des déformations ultérieures déduites du volcanisme et d'estimations quant au changement d'axe de rotation de la planète[220]. Ces projections, parfois assez hardies, n'ont cependant pas convaincu tout le monde, et d'autres théories ont également été proposées pour rendre compte de ces observations, notamment en se fondant sur la possible origine volcanique des structures ainsi interprétées[221].
Dans le même ordre d'idées, l'existence dulac Eridania au cœur des hautes terres deTerra Cimmeria a été suggérée pour expliquer notamment la genèse deMa'adim Vallis à partir de l'observation de certaines formations topographiques interprétées comme d'anciens rivages fossilisés[222],[223].
Alors que lePhyllosien semble avoir été plutôt dépourvu d'activitévolcanique, l'analyse détaillée des données recueillies par l'instrumentOMEGA deMars Express, conçu pour l'analyse minéralogique de la surface martienne, a conduit à identifier, à la fin de cetéon, une période de transition, s'étendant d'environ 4,2 à 4,0 milliards d'années avant le présent, marquée par l'apparition d'une activité volcanique significative[224] alors que la planète connaissait vraisemblablement encore des conditions tempérées et humides sous une atmosphère plutôt épaisse.
De surcroît, l'exploration par dessondes de la surface desplanètes telluriques — à commencer par laLune — à la fin duXXe siècle a conduit à postuler un épisode dit de « grand bombardement tardif » (appeléLate Heavy Bombardment en anglais) s'étendant sur une période datée approximativement de 4,0 à 3,8 milliards d'années avant le présent, à plus ou moins 50 millions d'années près. C'est au cours de cet épisode que se seraient formés les grandsbassins d'impact aujourd'hui visibles sur Mars, tels qu'Hellas,Argyre ou encoreUtopia.
Survenu à la fois surTerre et surMars, ce cataclysme serait peut-être également à l'origine de la différence de concentration enoxyde de fer (plus du simple au double) observée entre lemanteau de laTerre et celui deMars[225]. Les impacts cosmiques auraient en effet liquéfié le manteau terrestre sur peut-être 1 200 à 2 000 km d'épaisseur, portant la température de ce matériau jusqu'à3 200 °C, température suffisante pour réduire leFeO enfer et enoxygène[226]. Lenoyau terrestre aurait ainsi connu un apport supplémentaire en fer issu de la réduction dumanteau à l'issue de ce bombardement météoritique, ce qui expliquerait la teneur pondérale résiduelle d'environ 8 % deFeO dans le manteau terrestre. Sur Mars, au contraire, la température dumanteau fondu n'aurait jamais dépassé2 200 °C, température insuffisante pour réduire l'oxyde de fer(II) et laissant donc inchangée la teneur enFeO du manteau martien à environ 18 %. Ceci expliquerait pourquoi Mars est aujourd'hui extérieurement plus de deux fois plus riche enoxydes de fer que la Terre alors que ces deux planètes sont supposées avoir été originellement similaires.
À l'issue de cesimpacts géants, les conditions à la surface de la planète ont vraisemblablement été sensiblement altérées. En premier lieu, Mars aurait perdu une fraction importante de son atmosphère, dispersée dans l'espace sous l'effet de ces collisions. Le climat général de la planète aurait été bouleversé par les poussières et les gaz injectés dans l'atmosphère lors de ces collisions, ainsi que par un possible changement d'obliquité lors de tels impacts. Mais il est également possible que l'énergie cinétique desimpacteurs, en injectant de l'énergie thermique dans lemanteau martien, ait modifié legradient thermique dont on suppose qu'il entretient, dans lenoyau planétaire, les mouvements deconvection à l'origine de l'effet dynamo générant le champ magnétique global, ce qui aurait fait disparaître lamagnétosphère martienne dès la fin duNoachien[37].
Lesimpacts à l'origine des grandsbassins martiens ont peut-être initié le plus grand épisode volcanique de l'histoire de la planète, définissant l'époque qu'on appelle l'Hespérien. Celle-ci est caractérisée, d'un point de vuepétrologique, par l'abondance desminéraux contenant dusoufre, et notamment desulfateshydratés tels que lakiesérite MgSO4•H2O[227] et legypse CaSO4•2H2O[228].
Les principales formations volcaniques martiennes seraient apparues à l'Hespérien, peut-être même, pour certaines, dès la fin duNoachien ; c'est notamment le cas des plaines de laves telles queMalea Planum,Hesperia Planum etSyrtis Major Planum.Alba Mons aurait peut-être également commencé son activité à ce moment, à la suite de l'impact à l'origine du bassin d'Hellas Planitia situé auxantipodes. Lerenflement de Tharsis et les volcans d'Elysium Planitia, en revanche, remonteraient au milieu de l'Hespérien, aux alentours de 3,5 milliards d'années avant le présent, date qui correspondrait à la période d'activité volcanique maximum sur la planète rouge ;Alba Mons aurait ainsi connu sa plus grande activité dans la seconde moitié de l'Hespérien jusqu'au début de l'Amazonien.
Ce volcanisme aurait libéré dans l'atmosphère de Mars de grandes quantités dedioxyde de soufre SO2 qui, en réagissant avec l'eau dans les nuages, aurait formé dutrioxyde de soufre SO3 donnant, en solution dans l'eau, de l'acide sulfurique H2SO4. Cette réaction aurait sans doute été favorisée surMars par laphotolyse à haute altitude des molécules d'eau sous l'action du rayonnementultraviolet duSoleil, qui libère notamment desradiauxhydroxyle HO• et produit duperoxyde d'hydrogène H2O2, un agent oxydant. La comparaison avec l'atmosphère de Vénus, qui possède des nuages d'acide sulfurique dans une atmosphère dedioxyde de carbone, souligne également le rôle de la dissociationphotochimique dudioxyde de carbone par lesultraviolets de moins de 169 nm pour initier l'oxydation dudioxyde de soufre :
L'eau martienne aurait donc été chargée d'acide sulfurique à l'Hespérien, ce qui aurait à la fois pour conséquence d'abaisser sensiblement sonpoint de congélation — l'eutectique du mélange H2SO4•2H2O – H2SO4•3H2O gèle ainsi un peu en dessous de−20 °C, et celui du mélange H2SO4•6,5H2O – H2O gèle autour de210 K, température légèrement inférieure à−60 °C[229], qui est la température moyenne actuelle sur Mars — et de conduire à la formation desulfates plutôt que decarbonates. Ainsi s'expliquerait pourquoi, alors que Mars possédaita priori une atmosphère deCO2 et de grandes étendues d'eau liquide, on n'y trouve quasiment pas de carbonates, alors que les sulfates semblent, au contraire, particulièrement abondants[230],[81]: la formation des carbonates est inhibée par l'acidité — que la présence de sulfates laisse supposer (lasidérite FeCO3,a priori le carbonate le moins soluble, neprécipite qu'àpH > 5[231]) — et la libération continue deSO2 par l'activité volcanique à l'Hespérien aurait déplacé leCO2 descarbonates qui auraient pu s'être formés auNoachien pour les remplacer par dessulfates, comme cela se produit par exemple àpH faible avec lemagnésium :
Lachronostratigraphieminéralogique proposée par l'équipe deJean-Pierre Bibring, responsable de l'instrumentOMEGA de la sondeMars Express, fait correspondre, à l'Hespérien, l'éonstratigraphique appelé « Theiikien, » terme forgé —via l'anglais — à partir dugrec ancienθεῖον /theīon signifiant « soufre » —la racine exacte serait plutôt l'adjectif *θειικον dans le sens de « sulfurique »[réf. souhaitée] — qui serait cependant daté de 4,0 à 3,6 milliards d'années avant le présent, c'est-à-dire avec un décalage de 300 à 400 millions d'années vers le passé par rapport à l'échelle de Hartmann & Neukum.
Une fois passé l'épisode volcanique majeur de l'Hespérien, Mars aurait progressivement vu son activité interne se réduire jusqu'à nos jours, où elle semble être devenue imperceptible, voire peut-être nulle. En effet, plusieurs épisodes volcaniques, d'intensité décroissante, auraient eu lieu au cours de l'Amazonien, notamment au niveau d'Olympus Mons, et certaines éruptions se seraient même produites il y a seulement 2 millions d'années[10], mais cette activité demeure épisodique et, en tout état de cause, insignifiante comparée par exemple au volcanisme existant actuellement surTerre.
Parallèlement, l'atmosphère de Mars aurait subi une érosion continue depuis le début de l'Hespérien sous l'effet duvent solaire à la suite de la disparition de lamagnétosphère, sans doute dès la fin duNoachien. Une telle érosion, même modérée, mais continue sur plusieurs milliards d'années, aurait sans difficulté dispersé dans l'espace l'essentiel de ce qu'il restait d'enveloppe gazeuse à la surface de Mars après legrand bombardement tardif. Il s'est ensuivi la disparition progressive de l'effet de serre dû auCO2 martien, d'où la baisse continue de la température et de la pression atmosphérique de la planète à partir de l'Hespérien et tout au long de l'Amazonien.
La présence d'eau liquide sur Mars a donc progressivement cessé d'être continue pour ne plus être qu'éparse et épisodique. Les conditions martiennes actuelles permettent en effet l'existence d'eau liquide dans les régions les plus basses de la planète dans la mesure où cette eau est chargée dechlorures et/ou d'acide sulfurique, ce qui semble précisément être le cas sur Mars compte tenu du résultat des analyses effectuéesin situ par les sondes qui ont étudié chimiquement le sol de la planète rouge. Des précipitations significatives semblent également avoir eu lieu jusqu'au milieu de l'Amazonien, à en juger par les arêtes sinueuses identifiées par exemple à l'est d'Aeolis Mensae[232]. Mais, au cours de l'Hespérien et de l'Amazonien, les conditions martiennes globales sont passées d'une atmosphère épaisse, humide et tempérée à une atmosphère ténue, aride et froide.
Ces conditions particulières, exposant, pendant des milliards d'années, les minéraux de la surface martienne à une atmosphère sèche chargée d'ionsoxydants, ont favorisé l'oxydationanhydre dufer sous forme d'oxyde de fer(III) Fe2O3 (hématite) amorphe, à l'origine de la couleurrouille caractéristique de la planète. Cette oxydation demeure néanmoins limitée à la surface, les matériaux situés immédiatement en dessous étant la plupart du temps demeurés dans leur état antérieur, avec une couleur plus sombre. Cette prédominance des oxydes ferriques est à l'origine du termesidérikien désignant l'éonstratigraphique correspondant, forgé par les planétologues de l'Agence spatiale européenne à partir dugrec ancienσίδηρος /sídēros signifiant « fer »— la racine exacte serait plutôt l'adjectif *σιδηρικος dans le sens de « ferrique » —[réf. souhaitée] et qui débuterait dès 3,6 milliards d'années avant le présent.
La transition entreHespérien etAmazonien aurait en fait été assez progressive, ce qui explique l'extrême variabilité des dates définissant la limite entre ces deuxépoques : 3,2 milliards d'années avant le présent selon l'échelle de Hartmann & Neukum, mais seulement 1,8 milliard d'années selon l'échelle standard de Hartmann.