Frederik Willem de Klerk est né à Johannesbourg en 1936. Il est le fils deJan de Klerk (1903-1979) et Hendrina Cornelia de Klerk (1904-2001) — morte à peine quatre mois avant son ex-belle-filleMarike Willemse —, et le frère deWimpie de Klerk (1928-2009). Sa famille, dont le nom dérive du patronyme français « Le Clerc », « Le Clercq » ou « de Clercq » est d'originehuguenote. Elle s'est installée dans le pays en 1686, quelques mois après larévocation de l’édit de Nantes, et a participé à plusieurs évènements de l'histoire afrikaner[1].
Ses ancêtres ont notamment pris part auGrand Trek dans le convoi mené parPiet Retief afin d'échapper à la domination britannique. En 1838, trois membres de la famille de Klerk sont tués avec Retief dans leKraal du roi zoulouDingane. Plus tard, durant laseconde guerre des Boers (1899-1902), le grand-père de F. W. de Klerk est fait prisonnier à deux reprises par les Britanniques avant de devenir l'un des membres fondateurs duParti national en 1914 au côté deJames Barry Hertzog. Selon le généalogiste Keith Meintjies — avec confirmation de l'intéressé —, de Klerk s'inscrit également dans la lignée deKrotoa — ou Eva —, une femmekhoï qui a servi comme interprète pour les colons néerlandais lors de la fondation de lacolonie du Cap[2],[3].
C'est durant ses études universitaires qu'il adhère auParti national et devient membre duBroederbond.
Avocat àVereeniging dans le sud duTransvaal, il refuse en 1972 lachaire dedroit public à l'université de Potchefstroom pour se présenter aux élections générales.
En, Frederik Willem de Klerk est élu à l'occasion d'une élection partielle député deVereeniging au siège de l'ancien ministreBlaar Coetzee, nommé opportunément ambassadeur àRome par le Premier ministreJohn Vorster. En fait, F. W. de Klerk bénéficie dans sa promotion politique rapide de l'appui de Vorster, lequel est un ami de longue date deJan de Klerk.
Parallèlement, en mars 1982, il est élu président de la fédération du Parti national dans le Transvaal, à la suite de la scission menée par l'ancien président,Andries Treurnicht.
Le, il devient le président du conseil des ministres au Parlement et chef de la Chambre blanche du Parlement le.
En 1989, Frederik Willem de Klerk est ministre de l'Éducation nationale dans le gouvernement dePieter Willem Botha. Chef du Parti national au Transvaal, il se présente pour assumer la même fonction partisane mais cette fois au niveau national. Opposé àChris Heunis,Barend du Plessis etPik Botha, il est élu chef du parti national le au troisième tour de scrutin par69 voix contre 61 à Barend du Plessis. Il succède alors àPieter Willem Botha, qui se maintient encore à la tête de l'État.
Soutenu par le parti et le cabinet, il entre pour plusieurs mois en crise ouverte avec le président Pieter Willem Botha, qui finalement démissionne de la présidence le.
Frederik Willem de Klerk assure l'intérim de la présidence à partir du et organise desélections générales anticipées le. Le Parti national remporte ces élections sur un programme réformiste mais est sérieusement accroché sur sa droite par leparti conservateur d'Andries Treurnicht.
Connu pour son goût de la négociation,« la rigidité est mauvaise (…) je crois à la persuasion », il va assurer en douceur la fin du régime de l'apartheid. Il lève l'état d'urgence en place depuis 1985[4]. Dès le, il se rend enZambie pour discuter avec le présidentKenneth Kaunda, dont le pays abritait l'état-major et plusieurs camps de l'ANC (Congrès national africain). Il y rencontre en secret les représentants de l'ANC, mais aussi des diplomates soviétiques.
Après de multiples négociations confidentielles, et l'intervention des représentants des pays africains dits de la « ligne de front », il annonce en la légalisation duCongrès national africain (African National Congress, ANC) ainsi que la libération de son chef historique,Nelson Mandela[4].
Il entame également une tournée internationale qui le conduit, entre autres, en France où il rencontre le présidentFrançois Mitterrand, lequel n'avait pas reçu en 1986 le présidentPieter Willem Botha qui était venu commémorer les soldats sud-africains morts en France pendant laPremière Guerre mondiale[5].
Ses négociations suivies avec Nelson Mandela leur valent conjointement, en 1993, l'obtention duprix Nobel de la paix[4].
En, à la suite des coups de boutoir des mouvements suprémacistes blancs et à une succession de défaites lors d'élections partielles, il fait entériner parréférendum la poursuite des négociations constitutionnelles par la population blanche (68 % d'approbation).
Les négociations aboutissent à l'établissement d'une constitution provisoire et aux premières élections multiraciales en, à la suite desquelles le nouveau Parlement élit Nelson Mandela à la présidence de la République[4].
En 1994, à la suite des élections générales remportées par l'ANC, Frederik Willem de Klerk occupe avecThabo Mbeki l'un des deux nouveaux postes de vice-président[4].
Lors de ces élections, le Parti national de De Klerk recueille 20 % des suffrages au niveau national, la majorité des voix et la direction de la nouvelle province duCap-Occidental.
En 1996, de Klerk démissionne de la vice-présidence et met fin à la participation du Parti national aux fonctions gouvernementales. Il considère en effet que les intérêts de la minorité blanche ne sont plus assurés[4].
Le, Frederik Willem de Klerk quitte la direction duParti national (National Party) et se retire définitivement de la vie politique. L'ancien parti de l'apartheid, rebaptiséNouveau Parti national (New National Party – NNP), s'effondre aux élections de 1999, concurrencé par un parti d'opposition plus pugnace, leParti démocratique.
Frederik Willem de Klerk s'est, entre-temps, retiré dans sa ferme près dePaarl avec sa nouvelle conjointe, Elita[4], qu'il a épousée en 1998.
En 1999, la fondation F. W. de Klerk est créée par l'ancien président avec pour objectif la promotion de la paix dans les États multi-communautaires, que ce soit en Afrique du Sud ou dans d'autres pays[4].
Le,Marike de Klerk, l'ancienne épouse de Frederik Willem de Klerk, est assassinée à son domicile au Cap. Elle devient l'un des symboles de la criminalité galopante dans le pays.
En 2004, de Klerk participe à la Global Leadership Foundation, dont l'objectif est de venir en aide aux chefs d'État et de gouvernement[4] afin de promouvoir la paix, ladémocratie et le développement. En politique intérieure sud-africaine, il dénonce le sabordage du New National Party résiduel et sa fusion dans l'ANC.
En 2005, il dénonce l'activisme révisionniste et la trahison de ses promesses par l'ANC concernant le respect des minorités. Pour lui, la procédure visant à débaptiserPretoria pour l'appelerTshwane, sans consultation préalable des habitants de la ville, est un abus de majorité d'autant plus que ses habitants, majoritairement blancs, y sont hostiles.
En, à l'occasion de ses70 ans, Nelson Mandela lui rend hommage pour avoir évité un bain de sang à l'Afrique du Sud en acceptant la négociation et le principe d'une Afrique du Sud multiraciale.
Le, de Klerk fait sensation dans un article duSunday Independent en réponse à l'archevêqueDesmond Tutu, qui regrettait que la« communauté blanche sud-africaine n'était pas assez reconnaissante envers les Noirs sud-africains pour la générosité que ceux-ci ont eue à leur égard ». Pour Frederik Willem de Klerk,« les citoyens noirs devraient être reconnaissants envers les Blancs pour leur avoir laissé le pouvoir et avoir ainsi surmonté leurs peurs »[6]. Il répète que le système d'apartheid était moralement indéfendable mais refuse de qualifier le régime blanc de « criminel » ; les Blancs eux aussi avaient fait des sacrifices :« Ne serait-il pas aussi judicieux pour les Sud-Africains noirs de reconnaître la contribution que les Blancs ont apporté à l'Afrique du Sud nouvelle (…) Car ça demande du courage de surmonter ses peurs et mettre sa confiance dans les mains de ses ex-ennemis ». Il invoque particulièrement l'histoire mouvementée des Afrikaners qui ont, à ses yeux, sacrifié plusieurs siècles de révoltes et de quêtes de liberté pour construire une Afrique du Sud non raciale.
En, De Klerk est opéré, dans une clinique du Cap, de deux métastases cancéreuses malignes situées dans son dos. À la suite de bulletins de santé évasifs ou contradictoires,des rumeurs sur sa mort circulent, provoquant l'hospitalisation de son épouse[réf. souhaitée].
Frederik Willem de Klerk en 2012.
En, dans un entretien àCNN durant lequel il évoque sa jeunesse, ses motivations de l'époque et son évolution sur la politique d'apartheid, il refuse de condamner d'emblée le principe de séparation entre les Noirs et les Blancs mais récuse toute nostalgie. Regrettant les injustices et les atteintes envers lesdroits de l'homme commises durant l'apartheid tout en revendiquant la paternité de son abolition au nom du Parti national, Frederik de Klerk compare le principe desbantoustans avec la formation des États tchèque et slovaque, qu'il définit comme un concept visant à créer un État marqué par une unité ethnique avec une culture et une langue, où chacun peut être heureux et combler ses aspirations démocratiques. Pour Frederik Willem de Klerk, les habitants de ces bantoustans (ouhomelands) n'étaient pas privés du droit de vote au sein de leur propre État, il soutient qu'ils étaient justifiés du point de vue historique et compare le montant des sommes dépensées en Afrique par le monde développé pour lutter contre la pauvreté avec celles dépensées dans ces bantoustans par les anciens gouvernements blancs. Ses propos provoquent de nombreuses polémiques et des réactions indignées en Afrique du Sud, alimentant les discussions surTwitter, plus généralement Internet et sur les ondes radio-télévisées[7],[8],[9].
Il déclenche une controverse en affirmant en :« L’idée que l’apartheid ait été un crime contre l’humanité était et reste un projet de propagande lancé à l’initiative desSoviétiques, de leurs alliés de l’ANC et duParti communiste pour stigmatiser les Sud-Africains blancs en les associant à de réels crimes contre l’humanité. » Les parlementaires du parti des Combattants pour la liberté économique (EFF) ont dénoncé la présence de De Klerk dans l’hémicycle, le, lors du discours annuel de la nation du présidentCyril Ramaphosa[10].
En, Frederik de Klerk annonce souffrir d'unmésothéliome[11]. Il meurt à85 ans de ce cancer le à son domicile deFresnaye au Cap.
Quelques heures après sa mort, la Fondation FW de Klerk diffuse un message vidéo posthume de sept minutes que l'ancien président avait enregistré en tant que son« dernier message adressé au peuple d'Afrique du Sud »[11]. Dans cette vidéo, il présente« sans réserve », à titre personnel et en sa qualité d'ancien dirigeant, ses regrets pour les douleurs et les dégâts causés aux populations noires, métisses[11] (coloureds) et indiennes par l’apartheid, affirmant qu'après l'avoir défendu dans sa jeunesse, il avait complètement changé d’avis dès le début des années 1980, que l'apartheid était une erreur et que« nous étions arrivés à un point moralement injustifiable »[11],[12],[13].
Une période de deuil de quatre jours est proclamée par le gouvernement et les drapeauxmis en berne en marque de respect pour l'ancien président. La famille décline l'organisation de funérailles d’État et annonce qu'il n'y aura qu'une cérémonie funéraire privée, limitée à la famille, suivie d'unecrémation. Un hommage officiel est organisé le à laGroote Kerk du Cap au cours duquel le présidentCyril Ramaphosa prononce l'éloge funèbre de l'ancien chef de l'État[14],[15],[16],[17].
Les réactions au décès de l'ancien président sont très diverses dans la classe politique et les médias, et en fonction des groupes de population[18],[19]. Le présidentCyril Ramaphosa souligne cependant« le rôle vital » qu’il a joué dans la transition vers l'Afrique du Sud post-apartheid ainsi que son courage et ses qualités d'homme d’État qui s'est élevé au-delà des intérêts politiciens[20]. La plupart des partis politiques diffusent des communiqués respectueux, mentionnant notamment qu'il avait évité un bain de sang à l'Afrique du Sud, ainsi que des messages de condoléances à la famille[21]. Le princeMangosuthu Buthelezi, longtemps dirigeant de l’Inkatha Freedom Party, etJohn Steenhuisen, le nouveau chef de l'Alliance démocratique, soulignent tous deux son rôle et sa contribution à la transition démocratique[21]. À l'inverse, le partiEconomic Freedom Fighters ne souligne que son rôle dans l'application de l'apartheid, les exactions commises à l'encontre des populations noires, qu'il n'avait été élu que par une minorité et menace de réagir dans les rues si des funérailles d'État étaient accordées à l'ancien président sud-africain[22]. Pour leCongrès panafricain d’Azanie, son corps devrait être jeté à la mer (mais pas dans une mer africaine)[22]. SiDesmond Tutu, l'ancien archevêque du Cap, salue le courage de Frederik de Klerk[11], il déplore que celui-ci ait ensuite« érodé sa stature et [soit] devenu un petit homme, manquant de magnanimité et de générosité d’esprit », en allusion à leur confrontation dans la presse en 2006[20].
À l'étranger, le Premier ministre britannique,Boris Johnson, salue« le courage et le réalisme » de l'ancien président qui« a changé le cours de l'histoire en libérant Nelson Mandela et en travaillant avec lui pour mettre fin à l'apartheid »[11].
place en or dans l'ordre de Mapungubwe remis par le président Thabo Mbeki.
Frederik Willem de Klerk était également président d'honneur de la Société praguoise pour la coopération internationale, membre de l'assemblée des parlements de la culture d'Istanbul et membre deForum 2000, unlaboratoire d'idées fondé par le président tchèqueVáclav Havel et le prix NobelElie Wiesel.
(en)Biographie sur le site de lafondation Nobel (le bandeau sur la page comprend plusieurs liens relatifs à la remise du prix, dont un document rédigé par la personne lauréate — leNobel Lecture — qui détaille ses apports)