Pour les articles homonymes, voirFonte.
Lafonte brute est le métal obtenu en sortie dehaut fourneau. Cette appellation prend en compte le fait que la qualité de cettefonte, qui est utilisée à l'état liquide, n'est pas caractérisée par des considérationsmétallurgiques oumécaniques, mais uniquement par sacomposition chimique[note 1].
La fonte brute s'apparente à unematière première plus qu'à un produit fini ou semi-fini ; ce n'est qu'un état intermédiaire de lafabrication de l'acier ou de la fonte de moulage.
La fonte brute étant destinée aumazéage ou à l'affinage, sa composition est optimisée pour assurer une meilleure efficacité aux procédés situés en aval du haut fourneau. En effet, pour l'ensemble de lafilière,« des raisons économiques s'opposeront, en effet, à ce qu'on multiplie assez les opérations de l'affinage pour tirer d'une mauvaise fonte un fer parfait[1] ».
Distinguer les fontes en fonction de leur finalité (fonte pour affinage auconvertisseur ou fonte de moulage), au lieu de leurfaciès de rupture (fonte blanche, grise, truitée, etc.) s'est généralisé au cours duXXe siècle, avec l'utilisation de l'acier au détriment dufer puddlé et de la fonte moulée[2]. Ainsi :
« En fonction de leurs utilisations, les fontes peuvent être séparées en deux grandes catégories. Premièrement celles qui vont subir une conversion complète en un autre type de produit ferreux et, deuxièmement, celles qui ne changeront pas de composition ou de nature[2].… »
— Robert Forsythe, The blast furnace and the manufacture of pig iron,p. 287
Finalité | Nom / Nuance | Si (%) | S (%) | P (%) | Mn (%) |
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Fontes deconversion[note 2] | |||||
Fonte grise pour forges (ie fonte àpuddler) | < 1,5 | < 0,1 | < 1,0 | < 1,0 | |
FonteBessemer | 1,0 - 2,0 | < 0,050 | < 0,1 | < 1,0 | |
FonteSiemens Martin acide (ie bas phosphore) | < 2,00 | < 0,030 | < 0,03 | < 1,0 | |
Fonte Siemens Martin basique | < 1,00 | < 0,050 | < 1,0 | < 1,0 | |
FonteThomas | < 1,00 | < 0,050 | 2,0 - 3,0 | 1,0 - 2,0 | |
Fontes demoulage[note 3] | |||||
Fonte de moulage, nuance 1 | 2,5 - 3,0 | < 0,035 | 0,5 - 1,0 | < 1,0 | |
Fonte de moulage, nuance 2 | 2,0 - 2,5 | < 0,045 | 0,5 - 1,0 | < 1,0 | |
Fonte de moulage, nuance 3 | 1,5 - 2,0 | < 0,055 | 0,5 - 1,0 | < 1,0 | |
Fonte ductile | 0,75 - 1,5 | < 0,050 | < 0,2 | < 1,0 |
Pendant le soufflage réalisé par leconvertisseur Bessemer, le caractèreexothermique des réactions d'oxydation dusilicium,manganèse, ducarbone et dufer sont utiles à la conversion en fer, dont lepoint de fusion est plus élevé que celui de la fonte[note 4]. L'obtention d'un fer complètement affiné nécessite donc une fonte d'une composition bien précise. Or, pour le procédé Bessemer, le silicium est le principal contributeur thermique : la combustion du silicium présent à la teneur de 1 % élève la température du bain de300 °C[4]. C'était la teneur visée par les sidérurgistes américains duXIXe siècle, alors que les Anglais utilisaient généralement, à la même époque, des fontes à 2 % de silicium[5].
Une teneur minimum en silicium est donc nécessaire pour que le soufflage puisse s'achever : cette nécessité a accéléré la disparition deshauts fourneaux à vent froid. Mais produire des fontes très riches en silicium est économiquement coûteux car cela demande une forte consommation de combustible au haut fourneau[4]. De plus, trop de silicium prolonge la durée du soufflage, oxyde davantage le fer, et entraîne une forte consommation de fer par le laitier[5].
Le convertisseurThomas est très semblable à celui de Bessemer. Il s'en distingue par son fonctionnement en milieubasique, alors que le procédé Bessemer est acide, ce qui le rend apte à extraire lephosphore de la fonte.
Pendant la déphosphoration, le phosphore s'oxyde par une réaction très exothermique et migre dans le laitier (extraction liquide-liquide en milieu fondu). En effet, alors que la contribution thermique de la combustion du carbone, du fer et du manganèse n'est que de quelques degrés, la combustion de 1 % de silicium élève la température du bain de300 °C et celle de 1 % dephosphore l'augmente de183 °C[4].
Or, pour rester basique, lelaitier doit contenir un minimum desilice, qui est un oxyde très acide[note 5]. Pour les sidérurgistes, il est donc essentiel de produire une fonte qui contienne un minimum de silicium, pour ne pas acidifier le laitier par sa transformation en silice, et un maximum de phosphore, dont la combustion va garantir la réussite thermique de l'opération et la qualité dulaitier Thomas. Les « fontes Thomas » contiennent donc idéalement moins de 1 % de silicium, alors que celles destinées au procédé Bessemer ont une teneur supérieure[4]. La teneur en phosphore doit être supérieure à 2 %, ce qui exclut les fontes issues de minerais insuffisamment phosphoreux : les minerais américains, trop phosphoreux pour le procédé Bessemer acide et pas assez pour le procédé Thomas basique, entrent dans cette catégorie[note 6] et, jusqu'au milieu duXXe siècle, ne pouvaient être affinés qu'aufour Martin-Siemens basique[8],[9].
Avec la disparition des procédés Bessemer, Thomas et, plus récemment, Martin, les contraintes sur la fonte brute ont changé. Vers 1970, dans 9 usines sidérurgiques sur 10, la fonte destinée au convertisseur est de la « fonte blanche » qui est directement transportée sous forme liquide vers l'aciérie proche dans deswagons-torpilles[10].
La généralisation desconvertisseurs à l'oxygène, qui ont un excellent rendement thermique, amènent la modification des contraintes sur la teneur en silicium ou en phosphore. L'oxydation de ces éléments n'est plus nécessaire au bilan thermique des procédés : leur élimination devient alors une opération coûteuse qu'on évite au maximum.
Par contre, les exigences croissantes sur la qualité desaciers font que même les « fontes non phosphoreuses » doivent être déphosphorées car peu d'aciers modernes acceptent une teneur en phosphore supérieure à 0,02 % (200 ppm). La métallurgie au convertisseur se déroule donc en milieu basique. Par conséquent, la teneur en silicium doit être limitée au maximum. La fonte brute devant contenir initialement le moins possible de phosphore, la valorisation du laitier commeengrais phosphaté disparaît également à cause des trop faibles teneurs en phosphore qu'il contient désormais.
Pour un article plus général, voirFonte (métallurgie).
On distingue parmi les fontes brutes destinées à lafonderie celles qui seront coulées telles quelles (fonte grise) et celles qui seront traitées avant (fonte malléable, àgraphite sphéroïdal, etc.). Le comportement mécanique de la fonte moulée (faciès de rupture,ductilité) étant issu à la fois de la composition chimique et des techniques de mise en œuvre pendant lemoulage, la fonte brute est donc, là aussi, classée uniquement en fonction de sa composition chimique[2] :
« Il est maintenant courant d'acheter des fontes selon leur composition chimique au lieu de leur type de fracture[…]
Les caractéristiques physiques de la fonte [de moulage] sont essentiellement dues à l'état dans lequel se trouve le carbone, et le facteur principal déterminant la condition du carbone est la quantité de silicium. Mais comme le silicium n'est pas le seul agent influent, il arrive qu'il n'agisse pas de manière classique sur le carbone. Le faciès de rupture ne peut alors pas renseigner sur la teneur en silicium, et donc sur la qualité de la pièce moulée. Il est toutefois maintenant plus courant de classer les fontes selon leur teneur en carbone que selon l'apparence de leur cassure[2]… »
— Robert Forsythe, The blast furnace and the manufacture of pig iron,p. 308-309
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