Le mêmeDictionnaire de la langue espagnole indique que lorsqu'il estadjectif, le mot « flamenco » renvoie d'abord à ce qui est originaire desFlandres (ouflamand), mais qu'il sert aussi à qualifier« une manifestation culturelle, ou son interprète, [pour désigner] son caractère populaire andalou, et souvent lié au peuple gitan » (sans que le lien entre ces deux acceptions de « flamand » et de « flamenco » soit précisément établi). Utilisé commesubstantif, le mot renvoie augenre artistique qui regroupe toutes ces manifestations culturelles, aux artistes qui le portent, ainsi qu'aux traditions sociales communes et aux styles dont elles relèvent ou se réclament. Le dictionnaire en donne pour exemple« un flamenco à la voix déchirée »[b].
À l'origine, le flamenco consistait en un simplecante (chant)a cappella, établi dans le triangle formé parTriana àSéville,Jerez etCadix. Le motcante s'applique essentiellement au chant flamenco, car le mot habituel enespagnol pour dire « chant » estcanto. L’appellation traditionnelle du flamenco est d'ailleurs lecante jondo (ou « chant profond », varianteandalouse de l'espagnolhondo). LeDictionnaire de la langue espagnole définit encore lecante jondo comme le« chant andalou le plus authentique, de profond sentiment »[c]. Les chanteurs et chanteuses de flamenco sont appeléscantaor oucantaora (variante andalouse de l'espagnolcantador / -ra : « chanteur / -teuse », qui connaît aussi le motcantante pour « chanteur lyrique »).
Les claquements des mains pour accompagner ce chant s'appellentpalmas, et la danse se nommeel baile (bailaor : « danseur » ;bailaora : « danseuse », termes réservés aux danseurs de flamenco, car le terme générique en espagnol pour « danseur » estbailarín au théâtre oudanzante dans uneprocession). Lapercussion, en plus despalmas polyrythmiques, se fait souvent avec les pieds : lezapateado, une sorte declaquettes inspirée de la danse de groupe de type traditionnel ditechacarera, toujours pratiquée dans certains pays d'Amérique latine. Comme percussion, lescastagnettes, héritage de l'antiquité romaine, sont encore parfois utilisées, suivies du mouvement des poignets. Les mains et les doigts proposent aussi des figures très travaillées et expressives appeléesfloreos[4]. La danse représente une fusion stylistique entre lachacarera, le mouvement artistique dutoreo de salon, et ladanse du ventre ; elle relève aussi probablement, comme source lointaine, de certainesdanses indiennes et arabes, peut-être apportées en Andalousie par le peuplegitan, lequel se trouve au cœur de la construction culturelle que représente le flamenco, lui-même partie prenante intime de l'âme espagnole.
Laguitare classique, dite aussi « guitare espagnole », s'apparente[d] à laguitare flamenca, même si cette dernière est plus fine, plus légère et rend un son plus clair, métallique, brillant et moins velouté. La musique qui accompagne le chant ou la danse, ou qui joue seule, est nomméeel toque (jeu de guitare essentiellement, même si aujourd'hui, dans lenouveau flamenco, on trouve aussi du piano et d'autres instruments[e]). Le musicien de flamenco est appelétocaor, par déformationdialectale andalouse de l'espagnoltocador (joueur de guitare, musicien). À l'époque contemporaine, lapercussion se fait souvent aussi avec lecajón, instrument desmusiques traditionnelles péruviennes depuis leXVIIIe siècle ; celui-ci fut rapporté duPérou parPaco de Lucía.
Exhibition de chant et de musique flamenca dans untablao.
Il existe de nombreuses théories concernant la genèse exacte du terme « flamenco ».Blas Infante, dans son livreOrígenes de lo Flamenco y Secreto del Cante Jondo (1929-1933)[5], défendait l'hypothèse que le mot « flamenco » dérivait des termesarabesfelah-menkoub, qui, associés, signifient« paysan errant ». Il reprenait une terminologie déjà proposée à partir du motfallah, et déclinée aussi enfelahikum oufelagmenku. Cependant, les flamencologues ont rejeté cette thèse, remarquant que le mot « flamenco » n'est apparu qu'auXIXe siècle à une époque où l'influence arabe sur la langue espagnole avait disparu[6].
L’hypothèse selon laquelle le nom avait été donné au genre pour l’oiseau appeléflamenco (flamant rose) est due à Rodríguez Marín. Il justifia sa position en argumentant que les chanteurs interprétaient le chant avec une veste courte, qu’ils étaient grands et brisés à la taille. C’était la raison majeure pour laquelle ils ressemblaient à l’échassier du même nom.
De même que les précédentes, l'hypothèse émise par des experts tels que Hipólito Rossy ou Carlos Almendro dans laquelle on affirme que nous devons le motflamenco à la musiquepolyphonique de l’Espagne auXVIe siècle qui se serait développée sous l'influence desPays-Bas, c’est-à-dire, avec lesanciennes Flandres (« Flamenco » étant la traduction espagnole de « Flamand »), n’a toujours pas été vérifiée. Cette théorie fut également défendue, bien que nuancée, par le voyageur romantiqueGeorge Borrow et parHugo Schuchard, entre autres. Selon ces écrivains, on croyait dans le passé que les Gitans étaient d’originegermanique. Cela explique la raison pour laquelle ils auraient pu être appelésFlamencos. Ce surnom deFlamencos pourrait venir aussi de ce que nombre deGitans ont servi dans l'armée des Flandres[8].
Enfin, il existe deux hypothèses moins engagées.Antonio Machado Álvarez, surnommé Demófilo, écrit que« les Gitans appellent les Andalousgachós et que ceux-ci appellent les Gitans ironiquementflamencos (flamands en français), le prototype des blonds, selon eux, en opposition à leur couleur de peau « noiraude[9] ».
Danseuse dekathak, une des danses indiennes possiblement aux origines du flamenco.
Le flamenco, selon certains auteurs, trouverait son origine dans trois cultures :arabo-musulmane,juive etandalouse chrétienne. En dépit de la préconisation par les conquérantsberbèresalmohades de l'orthodoxiereligieuse musulmane, ils ont importé avec eux l'art du flamenco. L'origine de cette musique doit aussi être recherchée dans l'ethnologie du peuple qui l'a conservée et transmise, c'est-à-dire le peuple gitan. Les Gitans ont conservé de larges franges de leur culture d'origine, à savoir la langue (lecaló) et la musique[réf. nécessaire]. Une étude comparative de ladanse indienne (bharata natyam,mudrā et surtoutkathak) et de la danseflamenca (par exemple celle deCarmen Amaya) permet de dégager des similitudes exactes[11].
Selon certains musicologues, les Gitans intégrèrent les diverses sonorités musulmanes, telles que nous pouvons encore les entendre de nos jours avecAbdelkrim Raïs, tout en en modifiant lerythme. Mais il se pourrait que le mimétisme ait opéré en sens contraire, et que le flamenco, devenu populaire en Espagne, ait influencé laculture arabe qui en a reproduit lesintonations. Il est en effet connu que lemonde arabe a exercé une vive influence en Espagne, à la fois par ses auteurs, penseurs et musiciens : les meilleurs locuteursarabophones auXVIe siècle étaient, du moins l'affirme l'historienIbn Khaldoun, les Andalous. Ainsi, c'est en Espagne que le monde musulman a eu ses meilleursphilosophes et penseurs. La musique flamenca, produit typique de la terre d'Espagne, exerça son influence enterre d'islam lors desexils dus audécret de l'Alhambra[15]. Il convient donc légitimement de s'interroger : qui influence qui dans l'élaboration d'un art, et ne point passer sous silence l'influence indienne directe qui conditionne la culture gitane.
Par ailleurs, « et sans vouloir entrer dans la polémique sur les origines gitanes du flamenco », écrit Fanjul[21], ni dénier aucunement l’apport considérable des Gitans au flamenco, il s’interroge sur la question de savoir pourquoi - si cette musique était le produit de la culture gitane - les Gitansbalkaniques ne chantent et ne dansent pas de la même façon que les Gitans andalous ou encore que les Gitans d’Europe du Nord ne chantent et ne dansent pas du tout[22].
À côté des instruments traditionnels utilisés, un seul d'entre eux semble ne pas avoir changé. Il s'agit durabâb, anciennevièle à deux cordes enboyau de mouton, dont on tire les sons avec unarchet encrin de cheval. Le son mélodieux de cet instrument peut, sans autres précisions, d'après le musicologue Garcia Matos, avoir été utilisé pour accompagner ceux que nous pouvons nommer les « premiers »cantaores (en espagnol, le mot « chanteur » se dit normalementcantante ; mais pour le flamenco, on utilise le terme spécifique decantaor. Voirsupra). Il semblerait que lamandoline ait pu être utilisée, mais ce, sans autre forme de précision notable, si ce n'est quelques photographies anciennes datées desannées 1900.[réf. souhaitée]
C'est àTriana, que s'ouvriront les premiers cafés cantantes, ancêtres descafés-concerts. En1881,Silverio Franconetti ouvre àSéville le premier café chantant consacré au seul flamenco. Mais le succès du flamenco a aussi son revers. Il perdra dans lesannées 1920, jusque vers 1950 — date de son renouveau — son âme. Mêlé à un pseudo folklore de « bas étage », il ne servira qu'à plaire à un public toujours plus nombreux, à la recherche de trivialités[réf. souhaitée].
Il faudra attendre lesannées 1950 afin que soit entrepris un travail important pour faire découvrir aux amateurs les plus belles et vibrantes pages du flamenco passé, notamment par la première grandeanthologie éditée parDucretet-Thomson qui obtint leprix Charles-Cros en1956.Mario Bois propose en 1985 auChant du monde de créer une anthologie. Les archives discographiques des plus grands interprètes couvrent une vingtaine de volumes. Pour ce dernier, le travail a été très difficile :« Comment trouver cette musique dans le labyrinthe de l'édition ? On peut dire que 80 % de ce que l'on entend est médiocre,15 % est de « bonne volonté », mais le reste, rarissime, est d'une force, d'une flamboyance fascinantes[réf. souhaitée]. »
Le flamenco peut être pratiqué dans les terrasses de cafés ou bars espagnols (Illa d'Or, Puerto Pollensa)[25]. Il existe aussi de nombreuses initiations pour enfants, ce qui n'était pas le cas auparavant, cela étant plus ou moins réservé aux adultes en tant que « danse de l'amour », en raison du mouvement collé et de la vivacité des gestes effectués.
LesGitans, après avoir été chassés d’Inde, fuient vers laPerse, laSyrie et l’Arabie. Cet exode les conduit donc sur lacôte méditerranéenne par l’Égypte et l’Afrique du Nord d’où ils gagnent l’Espagne auXVe siècle. Ils y arrivent en1425, et le roiAlphonse V d‘Aragon se montre magnanime. Cependant, lesRois catholiques vont adopter envers eux une politique différente. Comme lesJuifs et lesMorisques, les Gitans connaissent unepersécution implacable[26], mais ils ne seront pas chassés d’Espagne. Ils cohabitent alors dans le sud avec Morisques et Andalous, échangeantcoutumes et chants, partageant la misère et le mépris dont ils sont victimes. Ils ont l’obligation impérieuse de s’adapter aux lois du pays et de s’intégrer aumilieu chrétien, mais cetteintégration ne sera que sélective et partielle. Après des lois créées dans le but d’expulser les Gitans d’Espagne à partir de1484, par le Conseil de Castellón et par la pragmatique deMedina del Campo desRois catholiques, en1499, qui officialise et systématise lamarginalisation du Gitan[27], le roiCharles III va promulguer, en1783, une « amnistie » dont les effets réels resteront cependant bien limités[f]. Le but est de tenter une assimilation des Gitans afin d’effacer, à terme, leuridentité. L’État interdira que les Gitans soient appelés ainsi et fera tout pour qu’eux-mêmes cessent de se sentir Gitans. En dépit des contraintes qui perdurent, à partir duXIXe siècle, le flamenco et latauromachie ont aidé ce peuple à survivre en lui offrant un domaine d’expression et d’affirmation de ses valeurs, de sa liberté et de son honneur. Les Gitans cessent ainsi progressivement de vivre ennomades et s’établissent peu à peu dans les foyers urbains deSéville, dans le quartier deTriana, àGrenade, dans le quartier de Sacromonte àJerez, dans les quartiers de Santiago et Santa María. Se trouvent ainsi associés en Andalousie, les Gitans, le flamenco et letoreo.
Aujourd’hui, qu’il s’agisse de simpleexotisme ou deprise de conscience véritable, la culture populaire andalouse est en voie de réhabilitation aux yeux de l’Espagne moderne. Elle est même revendiquée comme élément constitutif de l’identité nationale. C’est dans lesannées 1920 que se produit cette forte évolution desmentalités. En effet, les intellectuels espagnols cessent alors progressivement de vouloir édicter les normes d’une culture pour le peuple. Tout au contraire, ils se mettent à son écoute et s’en inspirent.Federico García Lorca revalorisera même cette culture populaire andalouse qui peut servir alors d’élément contestataire dans une nouvelle époque de répression et de censure des libertés, comme le fut plus tard l’ère du franquisme. Le flamenco a également été intégré dans lecinéma, en particulier dans la trilogie deCarlos Saura etAntonio Gades :Noces de sang[Lequel ?],Carmen,L'Amour sorcier. On passe ainsi à une véritablesublimation d’une culture qui cesse d’être cantonnée au cadre purement local pour être revendiquée sur le plan national, voire universel. Dès lors, le flamenco est intégré dans le circuit production/consommation, ou encore dans lestar system, qui n’ont rien à voir avec sa philosophie de base et ses finalités. L’altération des valeurs originelles a été le prix à payer pour la survie de ce qu’Unamuno appelle encore auXXe siècle « une sombre religion ». Le chanteur ou le danseur, intégrés eux aussi dans la société qui les avait marginalisés, ne peuvent plus être que les dépositaires plus ou moins authentiques d’unpatrimoine culturel ancestral. Le professionnalisme, la demande et la mode, le besoin d’exotisme ontbanalisé l’expression. C’est tout un mode d’être, une vision du monde, une culture donc, qui s’est transformée avec le temps et l’Histoire et qui doit obstinément protéger son identité et son intégrité[28].
L’histoire de l’Andalousie, et celle du flamenco, c’est aussi, jusqu’à maintenant, l’histoire d’une tentative partiellement manquée de passage du local à l’universel. Empêtrés dans le local, lesAndalous ont sacrifié à la demandetouristique qui leur était faite : du local, de la couleur locale, encore et toujours. Depuis leXVIIIe siècle et jusqu’en1960, peuple de faible émigration, les Andalous sont souvent restés chez eux, à la différence desBasques, desGaliciens ou desCatalans ; leur confrontation avec le monde extérieur est restée faible. La vie andalouse s’était ralentie. Lagracia ne se nourrissait plus d’apports étrangers. Derrière le sang vif, derrière l’œil vif des Andalous[non neutre], peu d’échanges. Alors, l’ouverture se fait par aspiration de cultures étrangères. Selon Frédéric Deval[29], c’est parfois à l’étranger que les créateurs andalous sont, depuis 1936, allés renouveler leur inspiration : Lorca àNew York,Rafael Alberti àBuenos Aires puis àRome,Manuel Angeles Ortiz àParis,Manuel de Falla enArgentine,Pablo Picasso enFrance[30]…
Au carrefour de l’Orient et de l’Occident, le flamenco est le fruit d’unsyncrétisme qui dépasse le cadre purement culturel pour atteindre le domaine de laphilosophie. Il est un formidable moyen de communication et d’expression de l’essence et de l’existence de l’homme andalou, il constitue l’affirmation d’un mode d’être, de penser et de voir le monde.
« Être flamenco » devient en soi unmode de vie. Le monde qui s’offre à l’expression flamenca est fait de tensions et de violences, de passion et d’angoisses, de forts contrastes et d’oppositions qui engendrent le cri du retour aux origines, cri primal et cri de la mémoire. Lecante jondo n’est pas un folklore ordinaire mais un art populaire, une expression à dimension universelle accessible à tous en dépit de son hermétisme apparent. Au-delà de sa complexité réelle, il représente le chant en soi, vrai, dépouillé ; une expression musicale à vivre de très près, avec le cœur, loin des artifices et des opérations intellectuelles. Art populaire, lecante jondo obéit à une esthétique qui est celle de la vie dans ce qu’elle a de plus authentique. Toutefois, dans le flamenco, seul lecante jondo atteint véritablement ce registre de l’art qui va au-delà dufolklore. Le reste du répertoire n’atteint pas les catégories du fondamental et de l’universel. Hétérogène par ses origines, son développement et ses finalités, le flamenco possède une dimension à la fois individuelle et collective : parcours initiatique lié à la quête identitaire personnelle, il est aussi l’acte social qui réintroduit l’individu dans le groupe. À ce titre, l’art populaire andalou, qu’il s’agisse du flamenco ou de latauromachie, met en exergue ce paradoxe de l’Andalou jaloux de son indépendance et de sa liberté dans une société où tout acte pourtant est communiel et communautaire. En fait, le flamenco, et tout spécialement lecante jondo, celui des origines, permet de se situer « au-delà » : à l’extérieur du « moi », dans le passé tout en restant « en deçà » : à l’intérieur, dans l’intimité du « moi », dans le présent. Cette dialectique permet de recréer une unité projetable sur un futur et un avenir sans cesse à conquérir[28].
L’art partage avec lesacré d’être une permanente passerelle entre le dedans de soi et l’au-dehors, entre notre for intérieur et le forum extérieur du monde sensible. Tropintroverti, notre regard nombrilisé ne voit plus les autres ; trop extraverti, notre œil papillonnant nous rend sourds aux voix profondes de notre conscience et de notreintuition[30], voire auxpresciences émergeant furtivement de notre inconscient par éclats desymboleschiffrés[g] conférant au flamenco, par le truchement de l'expériencepoétique duduende, son statut véritablementanthropologique selon le psychanalyste espagnolIgnacio Gárate Martínez[34]. Frédéric Deval exprime ainsi le risque paradoxal que son grand succès fait courir au flamenco, dans la tension continue entre le flamenco comme spectacle et comme culturemondialisée en quête d'authenticité d'un côté, et le flamenco commeart de vivre de l'autre, seul garant de cette authenticité menacée justement par la quête (non enracinée) dont elle fait l'objet :
« Le flamenco vit depuis quelques décennies un paradoxe, que connaissent nombre de musiques detradition orale : plus le public international en vient à apprécier la spécificité de la culture flamenca, plus l’énergie que le flamenco est capable de projeter va diminuant en Andalousie et en Espagne, et plus se raréfient les conditions sociologiques de sa transmission comme façon d’être (forma de ser). Or, laforma de ser du flamenco, en musique et hors musique, est précisément ce qui intéresse le plus, à l’extérieur de l’Espagne, les musiciens, les compositeurs, les musicologues, les essayistes. Peut-être parce que les sociétés industrielles parviennent si peu à créer desformas de ser et des valeurs similaires à celles que la culture flamenca est parvenue à créer. Ces sources profondes de l’esthétique flamenca ont été perçues par des gens commeGeorges Hilaire comme le vrai trésor, par delà la richesse formelle des musiques et des danses flamencas ; Pedro Bacán disait que le flamenco était un moyen, et non une fin : que sa plus haute finalité était un être-ensemble d’une qualité hors pair. On retrouve ici la contradiction entre le flamenco commecommunauté, et le flamenco commemusique. Le marché international, lui, ne s’y trompe pas : il fait pression pour que le flamenco soit avant tout un matériau musical et une finalité en tant que matériau musical. Sur la question du matériau musical, il y a en partie convergence entre le marché et les musiciens-passeurs. Là où ils vont différer, c’est sur la question de l’être-ensemble. Mais les métamorphoses esthétiques sont imprévisibles. L’une des clefs, dans le cas du flamenco, réside dans le nouveaupublic international : car il existe aujourd’hui un public exigeant en Europe, en Amérique, au Japon, qui recherche précisément ce que le flamenco a de spécifique ; c’est ce qui pourrait indiquer que le flamenco continuera à livrer sa déploration tragique et festive à une communauté d’un nouveau type, en dépit de la distance, et avec un langage qui assimile davantage qu’il ne se laisse assimiler, ceux-là auront raison. Si, au contraire, la totalité de l’identité flamenca se dilue dans d’autres matériaux, alors on devra considérer qu’en s’incorporant comme simple ingrédient à d’autres réalités musicales, le flamenco aura disparu comme tel[1],[2]. »
Les Andalous et les Gitans partagent quelquefois les mêmes valeurs et présentent un certain nombre de traits particuliers communs, parmi lesquels on peut détacher la générosité, l’hospitalité, une religiosité — ou une forme de paganisme — particulière, le culte de l’honneur, ducourage, voire d’un certain machisme, la faculté de vivre au présent et le sens de la fête. Ces points communs ont facilité une sorte d’osmose gitano-andalouse et provoqué l’apparition d’une sorte de philosophie flamenca. Ils s’appliquent aussi à un art de vivre, à une façon de se comporter dans toutes les circonstances de l’existence, à un ensemble de réactions ou d’attitudes parmi lesquelles dominent la prodigalité, la sensibilité à fleur de peau, l’amour effréné du paroxysme, le mépris des contingences et des valeurs matérielles[35].
Ce mot s'écrit parfois aussi en espagnol :¡Olé! ce qui a pour effet de déplacer l'accent tonique sur la dernière voyelle, sinon c'est habituellement le « o » qui est accentué (les deux prononciations et les deux orthographes se rencontrent fréquemment, en alternance). Le mot est souvent traduit dans les dictionnaires par « Bravo ! », maisole a une acception plus large que cet équivalent français, si bien qu'il est généralement repris directement en français comme une expressionintraduisible donnant lieu à unemprunt lexical, à l'instar duduende (voir section suivante), duspleen anglais, dublues, duswing et dufeeling afro-américains, ou de lasaudade luso-brésilienne[36],[37].
Cetteinterjection expressive espagnole est utilisée pour manifester l’enthousiasme et l’admiration ou tout simplement pour encourager les artistes lors d’un spectacle. Elle est utilisée pendant lescorridas ainsi que dans l’univers du flamenco, où la participation du public, et notamment desaficionados, anime le spectacle selon lejaleo, terme consacré à ces manifestations de partage (voir leglossaire du flamenco pour sa définition). Selon Adolfo Salazar, l’interjection expressive¡ole!, avec laquelle on encourage lescantaores (chanteurs),tocaores (musiciens) etbailaores (danseurs) andalous, peut provenir du verbe hébreuoleh, qui signifie « tirer vers le haut », mettant en évidence que lesderviches tourneurs deTunis dansent eux aussi en faisant des tours au son répété deole oujoleh. Dans le même sens, il paraît pointer l’usage du vocablearza, qui est la manière dialectale andalouse de prononcer le mot à l’impératifAlza (« Lève-toi ! »), avec l’égalisation andalouse caractéristique des /l/ et /r/ en position implosive et finale. L’emploi indifférencié des termes¡arza! et¡ole! au moment d’acclamer et de stimuler les chanteurs et les danseurs de flamenco, permet de les considérer comme synonymes.
Mais l’origine la plus évidente de ce mot semble se trouver dans lecaló (le parler gitan) avec l’interjection :Olá, qui signifie : « Viens » (à ne pas confondre avec le salut espagnol :¡hola!, ni avec le vocable directement passé en français de « la ola », la vague). De même, ce mot deolá est connu en Andalousie comme signal de la battue lors de la chasse, c’est-à-dire l’action de « faire lever et rabattre » qui consiste à« mettre en fuite le gibier par des cris, des tirs, des coups ou du bruit, pour qu’il lève ».
En marge de l’origine et du sens de l’expression¡ole!, il existe un type de chanson populaire andalouse ainsi appelée en raison de la répétition caractéristique de ce mot.Manuel de Falla s’est inspiré de ce type de chanson dans certains passages du second acte de son opéraLa vida breve (La Vie brève).
Une autre hypothèse pour l’origine et le sens de cette interjection,¡ole!, est proposée par M. Agalarrondo[38] : selon lui l’Espagne, et particulièrement l’Andalousie, ont été fortement marquées par la civilisation arabe lors de laReconquista de 711 à 1492, et de nombreux mots de la langue espagnole trouvent ainsi leur origine dans la langue arabe. Pour lui, c’est le cas deole qui viendrait en fait dewallah qui veut dire « Par Allah » et qui est la démonstration de l’émerveillement, de l’étonnement, et même de l'enthousiasme ressenti à l'approche du divin, comme lorsqu'on est touché par laGrâce (au sens du concept théologique appartenant à la symbolique chrétienne). Cette hypothèse étymologique pour le motole est d'ailleurs reprise parGarcía Lorca dans sa conférence sur le thème duduende, dont il sera question dans les deux sections suivantes (cf. notamment la section :¡Ole! et leduende sont liés dans la « liturgie » flamenca).
Federico García Lorca en 1914. Le poète et dramaturge andalou a consacré une conférence célèbre au thème du duende dans les années 1930 :Juego y teoría del duende[39].
La notion de« duende » trouve sa source dans la culture populaire hispanique (d’abord dans les anciennes traditions relevant de la superstition domestique) puis, plus récemment et plus précisément, dans lecante flamenco et latauromachie qui la lui a empruntée.
Selon leDictionnaire de l’Académie royale d’Espagne (en 1956), le duende en Andalousie est un « enchantement (un charme) mystérieux et ineffable », un « charisme » que les Gitans désignent par ce terme de« duende ». « Charisme » aux deux sens, premier (biblique) et second (psycho-social), du terme : 1.charisme :« Grâce imprévisible et passagère accordée par Dieu en Jésus-Christ, donnant le pouvoir temporaire de réaliser des exploits miraculeux », et aussi 2.charisme :« Inspiration donnant un prestige et un ascendant extraordinaire à un chef, un artiste, un performeur. » Dans l’imaginaire du flamenco, leduende va donc bien au-delà de la technique et de l’inspiration.
Quand un artiste flamenco fait l’expérience de la survenue de ce mystérieux enchantement, on emploie les expressionstener duende (avoir du duende, ou posséder le duende) ou biencantar, tocar o bailar con duende (chanter, jouer ou danser avec le duende). On est proche ici des notions d'envoûtement, de possession, de transe. Initialement, le terme« duende » évoquait le lutin, désignant dans la mythologie populaire les démons domestiques outrasgos (pour leDictionnaire de l'Académie royale espagnole en 1732). Le mot à l'époque, dans son sens premier donc, provenait dudominus latin (maître, seigneur [de la maison :domus] étymologie qu'on retrouve dans le français « dominer ») lequel a donné en espagnol :dueño de la casa, puisduen de la casa : maître de la maison.
Federico García Lorca, dans sa conférenceTeoría y juego del duende (Théorie et jeu du duende, reprise parIgnacio Gárate Martínez) réunit les deux sens du terme (le lutin et la transe) et confirme ce caractère ineffable du duende, mais aussi quasiment surnaturel, magique, vers l'envoûtement et la possession chamanique, le définissant ainsi selon le mot deGoethe :« Pouvoir mystérieux que tous ressentent et qu’aucun philosophe n’explique[40]. » Selon Lorca,« pour trouver leduende, il n'existe ni carte ni exercice ». Personnifié en esprit malicieux, leduende semble être celui qui se produit, lors des représentations flamenco, drapé dans les gestes des danseuses et les voix des chanteurs. García Lorca nous invite à pénétrer cet état comme on pénètrerait l'âme espagnole. En parlant duduende, García Lorca veut, en fait, nous« donner une leçon simple sur l’esprit caché de la douloureuse Espagne », cette« Espagne qui est le seul pays où la mort est le spectacle national, où la mort souffle dans de puissants clairons pour l’éclosion des printemps, et [dont] l’art reste toujours régi par ceduende à l’esprit perçant qui lui a donné sa différence et sa qualité d’invention ».
En prolongement du sens actuel du duende, il existe d'autres termes et expressions caractéristiques du flamenco comme genre artistique et comme mode de vie :cuadro flamenco (groupe de flamenco),tablao flamenco (cabaret flamenco),juerga flamenca (faire la noce en flamenco),tercio (un set ou une performance flamenca, sachant que letercio est un « tiers » soit l'une des trois phases ou actes de la corrida),quejío (variante andalouse de l'espagnolquejido : gémissement, plainte, pour caractériser certains passages ducante),aflamencar (enflammer, enflamenquer),aflamencamiento (enflammement, enflamenquement),flamencología (flamencologie, la musicologie du flamenco),flamenquería (flamenquerie, le monde du flamenco),flamencura (flamencure ou caractère inimitable de ce qui est flamenco, par exemple dans l'expression :« La Lupi (bailaora) a un style inimitable et uneflamencura à fleur de peau[41]). »
En effet, l'interjection « olé! », exprime une jubilation plutôt calme et souriante (contrairement à l'image qu'on s'en fait ici à partir de la corrida), de la part du public ou des partenaires de l'artiste qui propose une performance en soliste à son tour. Elle survient souvent pour saluer justement le surgissement du duende dans l'interprétation de l'artiste, ou pour l'appeler de tous ses vœux.
Au cœur de ce qu'on pourrait appeler lecérémonial du flamenco, voire sa liturgie, cette interjection joue presque le rôle duAmen! (ansi soit-il) qui ponctue les transes dugospel. La fameuseDanza ritual del fuego (Danse rituelle du feu) ainsi que laCanción del fuego fatuo (Chanson du feu follet), extraites du ballet-pantomime deManuel de FallaEl Amor brujo (L'Amour sorcier), manifestent bien cette dimension mystique et liturgique du flamenco, particulièrement dans la mise en scène qu'en a faiteCarlos Saura pour son filmL'Amour sorcier en 1986[42].
Federico García Lorca dans la même conférenceTeoría y juego del duende (Théorie et jeu du duende), reprenant pour sa part une des hypothèses étymologiques de ce fameux « olé », insiste lui aussi sur cet aspect religieux du flamenco, et relie l'interjection à l'inspiration divine sous la figure du duende :
« La venue du duende a toujours été préparée par un changement radical de toutes les formes. Sur des dessins anciens elle apporte une sensation de fraicheur neuve, qui aurait la qualité d’une rose tout juste épanouie, d'un miracle faisant surgir un enthousiasme quasi religieux. Dans toute la musique arabe, danse, chanson ou élégie, l'irruption du duende est saluée par d'énergiques « Allah ! Allah ! » ; « Dios ! Dios! » si proches du « Olé ! » des corridas qu'il est possible que ce soit le même cri, et dans tous les chants du sud de l'Espagne l'irruption du duende est suivie de cris sincères : « Viva Dios ! », appel tendre, profond, humain à une communication avec Dieu par le biais des cinq sens, grâce au duende qui habite la voix et le corps de la danseuse ; évasion réelle et poétique de ce monde, aussi pure que celle qui fut réussie par Pedro Soto de Rojas[43], poète duXVIIe siècle au talent rare, au travers de ses sept jardins, ou par Juan Calimaco[44] grâce à une fragile et tremblante échelle de pleurs. Bien sûr quand cette évasion est réussie, tous en ressentent les effets, l'initié qui voit comment le talent l'emporte sur la pauvreté du matériau, et le profane, par le « je ne sais quoi » d'une émotion authentique. Il y a de cela des années, lors d'un concours de danse de Jerez de la Frontera, le premier prix fut attribué à une vieille de quatre-vingts ans plutôt qu'à de belles femmes ou de jeunes hommes aux hanches fluides, simplement pour sa façon de lever les bras, de dresser la tête, et de frapper du pied sur le plancher ; au milieu de ces muses et de ces anges réunis là (beauté des formes et beauté des sourires) devait gagner, et gagna, ce duende moribond qui trainait ses ailes de couteau oxydées sur le sol[45],[46] »
Lecante flamenco consiste en un certain nombre de formes traditionnelles (et d'autres plus modernes), ayant des structuresrythmiques etharmoniques différentes. Lepalo est un terme utilisé en flamenco pour désigner chacune des variétés traditionnelles ducante (chant) flamenco, selon la définition de l'Académie royale espagnole :« Cada una de las variedades tradicionales del cante flamenco[47]. »
Le rythme, appelécompás en espagnol, est sans doute la caractéristique la plus importante pour distinguer les différentes formes du flamenco. Les pièces sont composées de plusieurs « phrases », oufalsetas en espagnol, dont la sensation intense, rythmique est définie par la forme principale du morceau accompagné de laguitare flamenca. Certaines formes sont chantées sans accompagnement, alors que d'autres utilisent une guitare, voire un autre accompagnement. Certaines formes ne s'expriment que par la danse. En outre, certaines danses ou chants sont traditionnellement le privilège des hommes, et d'autres sont réservés aux femmes. Cependant, de nombreux aspects traditionnels perdent de leur rigidité. Lafarruca par exemple, traditionnellement une danse masculine, est aujourd'hui également pratiquée par les femmes. Enfin, certaines pièces sont jouées à la guitare seule, avec ou sans accompagnement.
Une évolution dans l'utilisation de la percussion a été initiée par Paco de Lucia. Dans lesannées 1970, ce guitariste flamenco mondialement connu, lors d’une tournée à Lima accompagnée par son percussionniste brésilienRubem Dantas, fut touché par la sonorité et le rythme queCaitro Soto faisait sortir de soncajón ; ce dernier en a alors vendu un à Paco de Lucía, lequel, revenant en Espagne, l’a introduit dans ses prestations et ses enregistrements de flamenco[48]. Pour timbrer le son, ils ont rajouté à l'intérieur de la caisse de résonance ducajón des cordes de guitare. Par la suite, Rubem Dantas a aussi utilisé avec Paco de Lucía dans la musique flamenca des percussions brésiliennes comme leberimbau et lacuíca, mais seul lecajón s'est pour l'instant largement répandu dans le flamenco[49].
La classification des formes du flamenco fait l'objet de débats, mais une approche classique et pratique est de les séparer en trois groupes. Les formes les plus profondes et les plus « sérieuses » sont connues sous le nom decante jondo (oucante grande), alors que les formes relativement plus légères et frivoles sont nomméescante chico ou mineur. Les formes intermédiaires sont appeléescante intermedio. De nombreux artistes de flamenco parmi les plus grands se sont spécialisés dans une forme unique.
Aujourd'hui[Quand ?], cette classification n'a plus la même signification. Le caractèrejondo (profond) ouchico (mineur) est moins fonction du style de compas (soleá,bulería,tiento) que de l'interprétation qu'en fait le chanteur. Par exemple, de nombreux chanteurs interprètent lefandango libre, ou labulería, comme ducante jondo.
Par ailleurs, on peut ajouter à cette liste d'autres styles plus folkloriques, plus modernes, ou certains styles hybrides. Les styles hybrides comprennent :soleá por bulería,jaleo,zambra,liviana,serranas, etbulería. Les styles folkloriques comprennentseguidilla,colombiana,garrotín,farruca,malagueña etrumba flamenca. Styles auxquels il faut encore ajouter les sous-catégories propres à certains styles. Il existe ainsi plusieurs variantes traditionnelles desoleá,bulería,tango, cantiña,fandango (qui est le style le plus riche en termes de sous-catégories : il existe quasiment un fandango par village, et par interprète spécialiste des fandangos). Enfin, latoná[50], proche dumartinete, et qui s'interprète égalementa cappella, constitue quasiment un style en soi, et que lessaetas sont également très flamencas dans le sud de l'Espagne.
Danseuse au musée de la danse flamenca deSéville, portant une robe à gros pois parée de volants et dansant avec un grand châle à franges.
La tenue traditionnelle de labailaora, oucostume de danseuse de flamenco, se compose de chaussures à talons hauts (pour letaconeo) et d'une robe colorée (généralement rouge, blanche ou noire, et souvent à grospois), longue jusqu'à la cheville et parée de volants (sur la jupe, ainsi que parfois sur les manches). Les épaules sont souvent recouvertes d'un grand châle de soie à franges. Les cheveux sont traditionnellement attachés enchignon. Mais aujourd’hui[Quand ?], de nombreuses danseuses gardent les cheveux lâchés (pelo suelto), et utilisent les mouvements de leur chevelure flottante comme un élément de leur chorégraphie (voir les films deCarlos Saura, notamment lacantaora etbailaoraEstrella Morente).
La tenue traditionnelle dubailaor, ou danseur de flamenco, est lecostume court andalou, également appelé costumecampero (rustique, de la campagne). Il se compose de chaussures cirées à talon, souvent ferrées (pour letaconeo), d'un pantalon noir à taille montante, d'une large ceinture en tissu rouge, d'une chemise (souvent blanche), d'unboléro (veste courte ou gilet) noir et d'un chapeau cordouan.
Le flamenco a été inscrit par l'UNESCO aupatrimoine culturel immatériel de l'humanité le, à l'initiative des Communautés autonomes d'Andalousie, d'Estremadure et de Murcie. De plus, il est patrimoine culturel immatériel ethnologique andalou et il est inscrit à l'Inventaire général de biens meubles de la région de Murcie établi par la Direction générale des Beaux-Arts et Biens culturels[51],[52],[53].
En France, le ministère de la Culture intègre cette pratique à l'inventaire du patrimoine culturel immatériel français en 2012[54]. Dans la région Sud-ouest du pays où de nombreuses familles d'origine andalouse et espagnole se sont installées, le flamenco est une pratique culturelle courante transmise de génération en génération et appréciée par le grand public lors de festivals régionaux tels que le Festival Arte Flamenco à Mont-de-Marsan[55] et le Festival Flamenco de Toulouse[56].
Les noms retenus ici sont seulement ceux des artistes généralement considérés comme les plus célèbres ou les plus importants dans l’histoire ou sur la scène mondiale actuelle, soit pour la diffusion soit pour l’évolution du flamenco. Cette liste ne saurait être exhaustive, et doit être mise à jour sur le long terme. Son utilité principale est de servir de tremplin de navigation en regroupant les liens internes ; l'un des critères de sélection est donc la présence d'un lien interne, de ce fait cette liste est par définition évolutive. L'article consacré à la liste d'artistes de flamenco propose une liste beaucoup plus complète mais moins détaillée. Les noms sont ici classés par ordre alphabétique du premier mot composant chaque nom (c'est-à-dire le plus souvent le prénom,nombre en espagnol, ou parfois le surnom,apodo, ou nom de scène), la lettre en gras justifiant l'indexation. Ils sont regroupés selon sept rubriques (chant, guitare, basse, danse, percussions, cinéma, écrits documentaires). Les trois rubriques principales (chant, guitare, danse) sont elles-mêmes subdivisées en deux catégories : les « artistes historiques » (décédés avant l'an 2000), et les « artistes contemporains » (toujours vivants, ou décédés après l'an 2000). On a aussi indiqué à chaque fois, lorsque c'est possible, leurs dates et lieux de naissance, de décès et leur filiation, la localisation géographique étant souvent un élément caractéristique du style en flamenco. Enfin, pour les plus connus d'entre eux, on a ajouté quelques éléments résumant leurs collaborations ou leur apport à l'histoire de leur art.
Camarón de la Isla (José Monje Cruz,San Fernando,province de Cadix, 1950 – Badalone, province de Barcelone, 1992),cantaor considéré comme une des principales figures du flamenco moderne, des plus influentes et des plus populaires, notamment en raison de son talent expressif et de son amitié, de sa longue collaboration avecPaco de Lucía (9 albums co-réalisés de 1969 à 1977, puis 5 albums où Paco apparaît de 1981 à 2006, dont un posthume) ; en compagnie de Paco, il a fortement contribué à faire évoluer le flamenco ; son surnomCamarón signifie « crevette » (en raison de sa sveltesse, sa taille et ses cheveux roux) ; il est un des rarescantaores à avoir obtenu en 2000, à titre posthume, laclef d'or du chant, prestigieuse distinction de l'univers flamenco.
Carmen Amaya (Carmen Amaya Amaya, Barcelone, 1918 – Bagur, Gérone, 1963) chanteuse, danseuse et actrice (voir aussi le chapitreBaile : artistes historiques).
El Planeta ou Planeta tout court (Antonio Fernández? ou bien Antonio Monge Rivero?, Cadix, 1789 ? – Malaga 1856?). Chanteur, auteur et guitariste historique précurseur, l'un des plus anciens jamais répertorié avecTío Luis el de la Juliana. Il serait aussi l’arrière grand-père deManolo Caracol.
Fillo ou El Fillo (Francisco Ortega Vargas, Puerto Real, Cadix, vers 1810 ? – Triana, Séville, 1878) époux de La Andonda, oncle de Tomás el Nitri, découvreur de Silverio.
Lola Flores ou La Faraona (María Dolores Flores Ruiz,Jerez de la FronteraCadix, 1923 – La Moraleja, Alcobendas [Madrid] 1995), chanteuse, danseuse et actrice, compagne un temps du chanteurManolo Caracol, puis épouse du guitariste El Pescaílla.
Manolo Caracol (Manuel Ortega Juárez, Séville, 1909 – Madrid, 1973)cantaor célèbre et primé entre les deux guerres et aussi acteur, ses enregistrements des années 50 avec son guitariste attitréMelchor de Marchena sont considérés comme des références historiques ; chaînon décisif d'une longue lignée d'artistes de flamenco (les Ortega), arrière-petit-fils d'El Planeta, petit-fils d'El Águila, son arbre généalogique comprend aussiFillo,Tomás el Nitri ; compagnon un temps de la chanteuse et actriceLola Flores (avec qui il a tourné) ; il avait hérité son surnom, Caracol (escargot, mais aussi accroche-cœur) de son père, et l'a donné à l'un de ses fils, eux aussicantaores.
Manuel Torre (Manuel Soto Loreto, quartier de San Miguel,Jerez de la Frontera (Cadix), 1878 –Séville 1933)cantaor et auteur de cantes, surnommé Torre (la tour) en raison de sa grande taille et de ses prestations impressionnantes ; disciple d'El Mellizo, il est considéré comme l'un des plus influentscantaors gitans du début duXXe siècle et ducante jerezano (style de chant de Jerez) ; les enregistrements de ses œuvres (quarante-neuf cantes flamenco en 78 tours), de 1909 à 1931, accompagné de grands guitaristes : tour à tour Habichuela el Viejo, El Hijo de Salvador, Miguel Borrull, Javier Molina, sont de précieux témoignages duCante du début duXXe siècle.
Niña de Antequera (María Barrus Martínez,Antequera, 1920 –Séville, 1972) tant par sa participation à des spectacles prestigieux à partir desannées 1940 (notamment avecLa Niña de La Puebla) que par sa remarquable discographie, elle est devenue populaire à travers toute l’Espagne et fut surnommée « la voix d'or de l'Andalousie ».
La Niña de La Puebla (Dolores Jiménez Alcántara,La Puebla de Cazalla,1908 –Malaga,1999)cantaora, guitariste et actrice (aveugle) parmi les plus renommées duXXe siècle, elle a créé et fait tourner en Espagne et en Europe de nombreux spectacles thématiques de flamenco avec de prestigieuses collaborations.
Niño de Marchena (premier surnom de Pepe Marchena).
Pastora Pavón Cruz, voir La Niña de los Peines.
Pepe Marchena ou Niño de Marchena (José Perea Tejada Martín, Marchena, province de Séville 1903-1976), ne pas confondre avec le danseur Pepe Marchena (1941-2007), aussi de Séville et de même surnom.
Silverio Franconetti (Séville, 1823 ou 1831-1889), « inventeur » descafés cantantes et des premiers spectacles publics professionnels de Flamenco, remarqué par ElFillo, il a fait connaîtreAntonio Chacón.
Terremoto de Jerez (Fernando Fernández Monge,Jerez de la Frontera 1934-1981) ne pas confondre avec son fils Fernando Terremoto (Fernando Fernández Pantoja), lui aussicantaor célèbre.
Tío Luis el de la Juliana ou bien Tío Luis de la Geliana ? (Luis Montoya Garcés?, Jerez de la Frontera, vers 1760 – Jerez de la Frontera ?, vers 1830),cantaor historique précurseur presque mythique, considéré comme le premier de tous, mais son existence et son œuvre sont peu attestées.
Antonio Carmona (Antonio Carmona Amaya, Grenade 1965), chanteur deNouveau flamenco, fils de Juan (et neveu de Pepe) Habichuela, membre du groupeKetama avec son frère Juan José Carmona Amaya, et son cousinJosemi Carmona.
Duquende (Juan Rafael Cortés Santiago, Sabadell, 1965), a été accompagné par les plus grands guitaristes, pratique aussi le flamenco-fusion, notamment avec les musiques orientales: arabes, indienne (par exemple :Qawwalî Flamenco en 2006, collectif).
Diego el Cigala (Diego Ramón Jiménez Salazar, Madrid, 1968) pratique aussi le flamenco-fusion, notamment avec les musiques latines (salsa, tango, milonga, jazz latino, son cubain, musique des Andes argentines, etc.).
El Agujetas de Jerez, voir Manuel Agujetas.
El Lebrijano (Juan Peña Fernández, Lebrija, Séville, 1941-2016), fils de María La Perrata, elle aussicantaora.
Enrique Morente Cotelo (quartier d'Albaicín, Grenade 1942-Madrid 2010) compositeur et chanteur de flamenco moderne des plus influents, enraciné dans la tradition (albumHommage à Antonio Chacón en 1977) et innovateur infatigable, il a mené le flamenco à la confluence de nombreux autres styles de musique (du chant grégorien et de la musique classique au jazz et au punk-rock, de la musique arabe à la musique cubaine); disciple dePepe el de la Matrona, il a su imposer son style particulier, sa façon de pratiquer lemélisme (plusieurs notes pour une seule syllabe ou un son voyelle, style qu'on retrouve chez d'autrescantaores et aujourd'hui parfois bien illustré par sa filleEstrella Morente, style qui accentue la parenté entre le flamenco et la musique arabo-andalouse) ; il a été accompagné par les plus grands guitaristes flamencos de l'époque :Sabicas,Pepe Habichuela,Manolo Sanlúcar,Tomatito,Vicente Amigo, mais aussi par le groupe rock alternatif Lagartija Nick ; il a collaboré avec des artistes internationalement connus commeLeonard Cohen etKhaled, et a mis en musique les plus grands poètes espagnols ; il apparaît, comme sa fille Estrella Morente, dans certains des films deCarlos Saura consacrés au flamenco.
Fosforito ou Fosforito del Genil (Antonio Fernández Díaz, Puente Genil, Córdoba, 1932) ; ne pas confondre avec Francisco LemaFosforito, chanteur historique (sans parenté).
Manuel Agujetas (surnommé aussi parfois « El Agujetas de Jerez » ou encore : « Agujetas Hijo »; de son vrai nom : Manuel de los Santos Pastor, Las Tablas, Jerez de la Frontera, 1939-2015), fils d'Agujetas el Viejo.
Miguel Poveda (Miguel Ángel Poveda León,1973Barcelone) chanteur multi-primé, il a collaboré avec d'innombrables artistes. Partant du flamenco le plus traditionnel, il l'a ouvert, avec ses partenaires, à d'autres musiques comme le fado, la musique orientale (Qawwalî Flamenco en 2006, collectif), le tango (album :Diálogos. De Buenos Aires a Granada en 2013 avec Rodolfo Mederos).
Montse Cortés (Montserrat Cortés Fernández, Barcelone, 1963), elle a collaboré avec La Paquera de Jerez, Sara Baras, Joaquín Cortés, Miguel Poveda, Javier Limón, Diego El Cigala, Paco de Lucía, etc.
Pepe de Lucía (José Sánchez Gómez, Algeciras 1945)cantaor et producteur musical, frère dePaco de Lucía et père de la chanteuse de variétésMalú; il a fait partie, avec leur frère aîné Ramón, du fameux sextet flamenco de Paco.
Rocío Jurado (María del Rocío Trinidad Mohedano Jurado, Chipiona, Cadix, 1946 – La Moraleja, Alcobendas, Madrid, 2006)cantaora et actrice, nommée en Espagnela más grande (« la plus grande »), elle apparaît dans de nombreux films, et chante pour les films de Carlos Saura autour du flamenco.
Aniya la Gitana (ou Anilla la de Ronda, Ana Amaya Molina, Ronda, 1855 – Barcelone, 1933) guitariste, ce qui est relativement rare pour une femme, surtout à l'époque, mais aussi chanteuse et danseuse.
Carlos Montoya (Carlos García Montoya, Madrid, 1903 – Wainscott [USA], 1993) neveu de Ramón Montoya, l'un et l'autre étant parfois considérés, avecSabicas, comme les fondateurs de la guitare flamenca moderne, notamment comme instrument soliste voire seul, s'émancipant peu à peu du rôle d'accompagnateur descantaores, empruntant certains traits virtuoses à la guitare classique espagnole, dans la poursuite d'un chemin peut-être initié par Paco El Barbero, Miguel Borrull, et bien sûr son oncleRamón Montoya.
El Pescaílla (ouEl Pescadilla, Antonio González Batista, Barcelone, 1925 – Madrid, 1999). Guitariste et chanteur de flamenco et derumba. Il est considéré comme le créateur de la rumba catalane, genre musical développé par la communauté gitane de Barcelone. Époux de la danseuse Dolores Amaya Moreno, puis de la chanteuseLola Flores.
Habichuela el Viejo (Juan Gandulla Habichuela, 186?-1956) grand-père de Juan et Pepe Habichuela, il a notamment accompagné lecantaorManuel Torre.
Javier Molina[58] (Javier Molina Cundí, Jerez de la Frontera 1868-1956) l'un des créateurs de l'école dutoque (jeu de guitare) de Xérès (Jerez), dans la lignée probable de José Patiño et de Paco el Barbero, et professeur de Rafael del Águila. Il a été surnommé El brujo de la guitarra (le sorcier de la guitare), et fut le premier accompagnateur de DonAntonio Chacón ; il accompagna aussiManuel Torre dans ses derniers enregistrements.
Melchor de Marchena (Melchor Jiménez Torres, Marchena, Séville, 1907 – Madrid, 1980), comme soliste il est représentatif avec Diego del Gastor de ce qu'on a appelé leToque Gitano (style gitan à la guitare); il a aussi accompagné entre autrescantaores connus : Manolo Caracol, Juanito Valderrama, La Niña de los Peines, Antonio Mairena, Diego El Clavel…
Miguel Borrull (Miguel Borrull Castelló, Castellón de la Plana, 1866 – Barcelone, 1926), élève du grand compositeur espagnol, père de la guitare classique moderne :Francisco Tárrega, il fut le premier à introduire dans le jeu du flamenco des éléments (mélodiques entre autres) empruntés à la guitare classique, et à ce titre eut une grande influence sur tous ceux qui l'ont suivi, à commencer par ses disciples :Ramón Montoya ou José Sirera Prats ; sa carrière s'est développée entre les époques appeléesEdad de oro del Flamenco (Âge d'or du flamenco) etÓpera flamenca ; il ouvrit aussi à Barcelone en 1916 lecafé cantante Villa Rosa ; enfin, il a participé dans les années 1900 aux premiers enregistrements (sur cylindres de cire) d'Antonio Chacón.
Niño Ricardo (Manuel Serrapí Sánchez, Sevilla 1904-1972) initiateur d'un nouveau style à la guitare flamenca qu'on a appelé le « ricardisme », il a été le maestro avoué de nombreux guitaristes de la génération suivante, dont Paco de Lucía, Enrique de Melchor, Serranito…
Paco El Barbero[59] (Francisco Sánchez Cantero, dit El Barbero, [le barbier], son premier métier, Cadix, 1840 – Séville, 1910) élève du maestro de Cadix : José Patiño ; Fernando El de Triana le distingue comme le premier soliste de l'histoire de la guitare flamenca. Probable professeur de Javier Molina.
Rafael del Águila[61],[62] (Rafael del Águila y Aranda, Jerez de la Frontera, 1900-1976,) disciple direct de Javier Molina et professeur reconnu de l’école de Jerez pour de nombreux guitaristes dontGerardo Núñez etParrilla de Jerez(es).
Ramón Montoya Salazar (Madrid, 1879-1949), oncle de Carlos Montoya et guitariste de référence pour tous ceux qui l'ont suivi; il est le premier « concertiste classique », seul en scène, de la guitare flamenca.
Sabicas (Agustín Castellón Campos, 1912-1990), un des guitaristes parmi les plus reconnus de la seconde moitié duXXe siècle, souvent considéré, avecRamón etCarlos Montoya, comme l'un des fondateurs de la guitare flamenca moderne, notamment comme instrument soliste.
Diego del Morao (Diego Moreno Jiménez, Jerez de la Frontera, Cadix, Andalousie, 1978) héritier de l'école et du style de sa famille des Morao de Jerez, fils deMoraíto Chico, lui-même guitariste très reconnu.
Gerardo Núñez (Gerardo Núñez Díaz, Jerez de la Frontera, Cadix, 1961) guitariste et compositeur de flamenco et de jazz flamenco. Il a été l'élève de Rafael del Águila, dans la grande lignée dutoque de Jerez (jeu de guitare de Xérès): José Patiño, Paco el Barbero, Javier Molina. Il est considéré comme l'un des guitaristes contemporains de flamenco parmi les plus saillants.
Gipsy Kings : célèbre groupe français derumba flamenca, fondé dans les années 70 par deux familles gitanes (Abott) deMontpellier et d'Arles, les Baliardo et les Reyes, cousins de Manitas de Plata, et dont fit partie un temps le guitariste françaisChico Bouchikhi (Arles, 1954) avant de fonder son propre groupe,Chico and the Gypsies.
Josemi Carmona Machuka (José Miguel Carmona, Madrid, 1971) fils du guitaristePepe Habichuela et de la danseuse Amparo Bengala, il a fondé avec ses cousins (les fils de Juan Habichuela) le groupe de flamenco-fusion :Ketama.
Juan Carmona (Lyon, 1963), guitariste plusieurs fois primé et compositeur français (famille gitane) de flamenco, deNouveau flamenco et de flamenco-fusion (avec la musique arabe et arabo-andalouse, avec l'opéra…); ne pas le confondre avec le suivant ni avec Juan José Carmona Amaya El Camborio, fils de Juan Habichuela.
Juan Habichuela (Juan Carmona Carmona, Granada, 1933 – Madrid, 2016). [Ne pas confondre avec le précédent du fait de la proximité des patronymes]. Frère du guitaristePepe Habichuela et père descantaores : Juan José Carmona Amaya El Camborio (né en 1960) etAntonio Carmona Amaya (né en 1965) du groupe de flamenco-fusion :Ketama.
Juan Manuel Cañizares (Sabadell,Barcelone,1966) guitariste primé tant dans le domaine du flamenco que dans le domaine classique, il a notamment accompagné Paco de Lucía dans ses disques de musique classique (sur Albéniz).
Manitas de Plata (littéralement « petites mains d'argent », correspondant à l'expression en français « doigts de fée »), (Ricardo Baliardo,Sète, 1921 –Montpellier,2014). Guitariste gitan français.
Manolo Sanlúcar (Manuel Muñoz Alcón, né àSanlúcar de Barrameda dans laprovince de Cadix en1943), fils d'Isidro Muñoz Sanlúcar, frère d'Isidro Muñoz Alcón et de José Miguel Évora, tous guitaristes. Il est un des guitaristes contemporains de flamenco parmi les plus reconnus, et compositeur éminent. On peut l'écouter et le voir dans au moins deux films deCarlos Saura :Flamenco en 1995, et sa suiteFlamenco, Flamenco quinze ans après, ce qui permet d'illustrer l'évolution de son jeu.
Manuel Moreno Jiménez, ou Manuel Morao (quartier de Santiago,Jerez de la Frontera 1929) fils d'El Morao (Manuel Moreno de Soto y Monje), frère de Juan Morao et oncle deMoraíto Chico, il est l'un des représentants les plus marquants dutoque jerezano (jeu de guitare de Xérès), puisqu'il a été l'élève de Javier Molina (voir ci-dessus), lui ajoutant une touche personnelle, typique du style de la saga des Morao, et qu'il appelle les « chocs rythmiques ».
Moraíto Chico (Manuel Moreno Junquera, quartier de Santiago,Jerez de la Frontera,1956-2011), fils de Juan Morao (lui aussi surnommé Moraíto Chico), neveu de Manuel Morao et père de Diego del Morao, tous guitaristes éminents. Représentant peut-être le plus saillant de la « dynastie » et du style des Morao de Jerez (voir ci-dessus Manuel Morao), il a été primé « pour la maîtrise » à la biennale de flamenco de Séville 2010. Soliste hors pair, il a aussi été un accompagnateur recherché par de grandscantaores :Manolo Caracol,José Mercé,La Paquera de Jerez,Camarón de la Isla, Diego Carrasco,Agujetas Hijo, FernandoTerremoto, Rancapino,Miguel Poveda, Luis el Zambo,el Torta,La Macanita,Carmen Linares, etc.
Paco de Lucía (Francisco Sánchez Gómez, Algésiras [province de Cadix], 1947 – Playa del Carmen [Mexique], 2014), frère cadet du guitaristeRamón de Algeciras et ducantaorPepe de Lucía, il est souvent considéré comme le plus grand guitariste et compositeur de flamenco de l’époque contemporaine, et il est certainement le plus connu dans le monde. Solidement enraciné dans la tradition flamenca la plus pure, il a aussi ouvert le flamenco à tous les vents de la fusion avec les musiques du monde : jazz, jazz-rock, pop, musiques d’Amérique Latine, musique indienne (etc.) ; mais aussi avec la musique classique espagnole elle-même marquée par le flamenco, en un extraordinaire « va-et-vient » de fusion (Manuel de Falla,Joaquín Rodrigo,Isaac Albéniz). Il a connu des duos et des collaborations marquantes avec de nombreux artistes mondialement connus, tant au sein du flamenco qu'au dehors de lui et dans tous les arts : ses frères, bien sûr, mais aussiCamarón de la Isla,John McLaughlin,Larry Coryell,Al Di Meola,Carlos Santana,Antonio Gades,Carlos Saura, etc. Il a introduit dans le flamenco des instruments non traditionnels dans cet univers comme la flûte traversière, le saxophone, la basse électrique ou lecajón, percussion andine rapportée d’une tournée au Pérou et aujourd’hui incontournable dans le flamenco. Avec les tournées de son fameux sextet, il a inventé le concept actuel, emprunté au jazz, de « groupe de flamenco ». Enfin il a élargi l’audience du flamenco à l’horizon-monde, et montré la voie auNouveau flamenco. C'est donc peut-être lui qui a le plus ouvert le flamenco tant qualitativement que quantitativement. Entre autres distinctions, il a reçu en 2004 la prestigieuse distinction duPrix Princesse des Asturies qui est accordée aux artistes de toutes disciplines et de toutes nationalités dont l’expression et l’œuvre représentent un apport décisif au patrimoine culturel de l’humanité ; il est le seul artiste de flamenco à l’avoir jamais reçue.
Paco Peña (Francisco Peña Pérez, Córdoba 1942) considéré comme l'un des guitaristes de flamenco parmi les plus remarquables de l’époque contemporaine.
Pedro Soler (Narbonne, 1938) guitariste de flamenco français; nombreuses collaborations avec des artistes flamencos, de world music et de jazz[63].
Pepe Habichuela (José Antonio Carmona Carmona,Grenade, 1944) guitariste parmi les plus saillants de l’époque contemporaine, compositeur, il est un représentant éminent de la « dynastie » des Habichuela : petit-fils de Habichuela el Viejo, fils de José Carmona (Tío José Habichuela), frère deJuan Habichuela, tous guitaristes, et père du guitariste José Miguel Carmona Niño (ouJosemi Carmona Machuka) du groupe de flamenco-fusionKetama. Il a souvent travaillé avec lecantaorEnrique Morente. Il est l’auteur entre autres d’un rapprochement entre le flamenco et les musiques traditionnelles de l’Inde (voir son disque :Yerbagüena /Pepe Habichuela & The Bollywood Strings en 2001, et sa participation àTraveller, album d’Anoushka Shankar, en 2011), mais aussi avec le jazz (voir son disque :Hands avecDave Holland en 2010), et avec la musique baroque (collaboration avecL'Arpeggiata de laluthiste etthéorbiste autrichienneChristina Pluhar).
Rafael Riqueni (Rafael Riqueni del Canto (Sevilla, 1962), guitariste et compositeur reconnu comme soliste, multiprimé, il a aussi accompagné entre autres lecantaor Enrique Morente.
Ramón de Algeciras (Ramón Sánchez Gómez, Algeciras, 1938 – Madrid, 2009) frère aîné ducantaorPepe de Lucía et dePaco de Lucía, guitariste et compositeur comme lui (ils ont enregistré plusieurs fois ensemble).
Tomatito (José Fernández Torres,Almería.1958) guitariste et compositeur, son surnom signifie « Petite Tomate » parce qu'il est le fils du guitariste José Fernández Castro El Tomate (La Tomate). Soliste très reconnu, il a beaucoup joué avecPaco de Lucía dont il est considéré comme un héritier majeur. Il a aussi accompagné de nombreuxcantaores célèbres, dontCamarón de la Isla pendant dix-huit ans, ainsi que de nombreux autres chanteurs et musiciens. On le voit entre autres dans le filmVengo deTony Gatlif en 2000[64].
Aniya la Gitana (ou Anilla la de Ronda, Ana Amaya Molina, Ronda, 1855 –Barcelone, 1933) danseuse, chanteuse, et guitariste historique
Carmen Amaya (Carmen Amaya, Barcelone, 1918 – Bagur, Gérone, 1963)bailaora,cantaora et actrice gitane mondialement connue par ses films, elle a contribué à faire évoluer les styles debaile et le rôle traditionnellement dévolu à la femme dans les chorégraphies flamencas; elle est parfois surnommée La Capitana. Elle est la cousine deLa Chunga et de Dolores Amaya Moreno La Pescaílla.
La Argentina (Antonia Mercé y Luque,Buenos Aires,1890 –Bayonne,1936) danseuse et chorégraphe espagnole quoique née en Argentine (pendant une tournée artistique de ses parents danseurs eux aussi), d'où son surnom. Elle est très renommée pour avoir représenté un trait d'union décisif entre le néoclassicisme et l'avant-garde pour la danse espagnole et andalouse, notamment sur la scène parisienne où elle fut une des plus grandes novatrices de son art pendant la première moitié duXXe siècle. Elle travailla pour l'Opéra de Paris et dirigea les Ballets Espagnols à Paris (héritiers desBallets Russes deDiaghilev). Elle a collaboré avec les grands compositeurs espagnols de l'époque :Manuel de Falla,Enrique Granados,Isaac Albéniz,José Padilla. Mais aussi avecFederico García Lorca, le chanteur Miguel de Molina ou le danseurVicente Escudero, figures du flamenco. Elle était de plus une virtuose du jeu des castagnettes intégrées dans sa danse.
La Argentinita (Encarnación López Júlvez, Buenos Aires, 1895 – New York 1945)bailaora et chorégraphe hispano-argentine, sœur aînée de Pilar López danseuse elle aussi. Elle fut surnomméela Argentinita (la petite Argentine) pour éviter la confusion avec Antonia Mercé, de cinq ans son aînée et déjà surnomméeLa Argentina. Elle a participé aux mouvements artistiques de l'époque, autour de laGeneración del 27, et a collaboré avec des figures comme les poètesRafael Alberti,Federico García Lorca, le cinéaste et dramaturgeEdgar Neville ouIgnacio Sánchez Mejías (le « torero écrivain » qui fut son compagnon). Dans la compagnie de ballet qu'elle avait créée, elle a travaillé avec desbailaores réputés commeJuana la Macarrona,La Malena,José Greco, et avec le grand guitaristeCarlos Montoya, et obtint des triomphes, notamment sur les scènes new-yorkaise, parisienne, berlinoise.
La Macarrona, ouJuana la Macarrona (Juana Vargas de las Heras, Jerez de la Frontera 1870-Sevilla 1947 ; lire l'article en espagnol ou en anglais, plus développé), fille de Juan de Vargas, guitariste de flamenco, et de Ramona de las Heras,cantaora ; considérée avec sa sœur María comme l’une des plus grandes danseuses de l'Âge d'or du flamenco et de l'époque des « cafés cantantes », elles descendaient deTío Vicente Macarrón ou de Tío Juan Macarrón, les deux frèrescantaores historiques (duXVIIIe siècle).
La Malena (Magdalena Seda Loreto, Jerez de la Frontera, 1872 – Séville, 1956)bailaora considérée en son temps comme la seule rivale possible de sa compatrioteLa Macarrona, elle a travaillé aussi avecLa Argentinita.
Pastora Imperio (Pastora Rojas Monje, Séville, 1887 – Madrid, 1979) danseuse, chanteuse et actrice reconnue. Amie deGarcía Lorca et de Falla, c'est pour elle queManuel de Falla a expressément composél'Amour sorcier sous sa forme ballet-pantomime avec dialogues et chants en 1915, sur un livret de María Martínez Sierra.
Antonio Gades, (Antonio Esteve Ródenas ou Rodeñas,Elda, 1936 –Madrid, 2004) danseur et chorégraphe, considéré comme un des plus importants de l’époque contemporaine : par ses chorégraphies, sa collaboration avecPaco de Lucía,Cristina Hoyos, et les films qu’il a créés avecCarlos Saura (dont la« Trilogie flamenca »), il a contribué à la popularisation internationale du flamenco et fut le premier directeur duBallet Nacional de España.
Israel Galván (Israel Galván de los Reyes,Séville1973) danseur et chorégraphe de flamenco expérimental (tendant à l'abstraction), quand sa sœur Pastora Galván, elle aussi danseuse et chorégraphe, est reconnue comme une référence dans le flamenco traditionnel d'aujourd'hui[67]; ils sont les enfants desbailaores et chorégraphes Eugenia de los Reyes Bermúdez etJosé Galván « maîtres de flamenco » traditionnels ; Israel Galván est reconnu en Espagne, mais plus encore en France[68], où il a entre autres participé auFestival d'Avignon en 2009 et 2017.
Joaquín Cortés (Cordoue 1969)bailaor, chorégraphe, acteur, réalisateur et producteur, de famille gitane espagnole d'origine Rom ; on peut apprécier son art dubaile et son jeu d'acteur dans les films :La Fleur de mon secret (notamment un duo avec la grandeManuela Vargas(es) surSketches of Spain deMiles Davis dans ce film) dePedro Almodóvar (1995),Flamenco deCarlos Saura (1995) etGitano de Manuel Palacios et Arturo Pérez-Reverte (2000).
La Chana (Antonia Santiago Amador, Barcelone 1946) danseuse célèbre pour son sens exceptionnel du rythme, la sûreté de soncompás (rythme et mesure), la vigueur enflammée de sontaconeo (claquettes flamencas), la précision et la rapidité virtuose de sonzapateado[69] (danse mettant en œuvre essentiellement lezapateo outaconeo gracieux). La réalisatrice croate Lucija Stojević lui a consacré un documentaire long-métrage en 2016[70] :« La Chana - Le flamenco est ma vie[71] ». Lebailaor et chorégraphe Antonio Canales l'a toujours présentée publiquement comme sa "maestra"[72]).
La Chunga, (Micaela Flores Amaya, Marseille 1938) danseuse, actrice et peintre d'art naïf ;La Chunga peut se traduire en français parLa Craignosse ; elle est la cousine deCarmen AmayaLa Capitana et de Dolores Amaya MorenoLa Pescaílla, nièce ducantaor Rafael « El Tuerto », et apparentée àCamarón de la Isla[73] ; elle fut la muse de nombreux poètes commeBlas de Otero,Rafael Alberti…
María Pagés (María Jesús Pagés Madrigal, Séville 1963) bailaora, costumière, chorégraphe reconnue aux niveaux national et international, elle a fait partie des compagnies d'Antonio Gades et de Mario Maya, avant de créer sa propre compagnie en 1990 ; on la voit notamment dans le filmFlamenco (de Carlos Saura en 1995) ; elle a été primée pour la danse à la biennale de flamenco de Séville 2012, et pour le meilleur spectacle à celle de 2010.
Carlos Saura (Carlos Saura Atarés,Huesca 1932) cinéaste espagnol prolifique et réalisateur parmi les plus reconnus mondialement, multi-primé et certainement l'un des plus influents des soixante dernières années pour le cinéma espagnol ou hispanique avecLuis Buñuel etPedro Almodóvar. Dans sa riche filmographie, la musique et la danse en général, le flamenco en particulier, sont des thèmes récurrents. On retiendra notamment plusieurs films-ballets consacrés au flamenco. D'abord saTrilogie Flamenca (fiction et danse avecAntonio Gades) :Noces de sang (Bodas de sangre) en 1981 inspiré parGarcía Lorca, puisCarmen en 1983 inspiré parMérimée etBizet, enfinL'Amour sorcier (El amor brujo) en 1986 inspiré parManuel de Falla. Puis des films plus documentaires de danse pure :Sevillanas (1992),Flamenco (1995),Iberia (2005),Flamenco, Flamenco (2010). Il a aussi réalisé des films sur l'univers dutango argentin, dufado portugais, du folklore argentin, de lajota aragonaise :Tango (1998),Fados (2007),Zonda folclore argentino (2015),Jota de Saura (2016).
Edgar Neville Romrée (Madrid 1899 - 1967) cinéaste (scénariste et réalisateur), écrivain et dramaturge espagnol : entre de nombreux autres (films de fiction et documentaires), on retiendra le filmDuende y misterio del flamenco (1952), qui concerne le flamenco. Entre de nombreux autres encore (poésie, théâtre, romans, essais) on retiendra les livres :El baile, cuentos y relatos cortos (Madrid, Castalia, 1996), etFlamenco y cante jondo (Madrid, Rey Lear, 2006).
Manuel Palacios[74] écrivain, dramaturge, metteur en scène et cinéaste espagnol ; parmi ses documentaires, fictions télévisées et longs métrages, on retiendra un film musical :Bodas de gloria (1995), et son filmGitano avecLaetitia Casta etJoaquín Cortés en tête d'affiche.
Tony Gatlif (né Michel Boualem Dahmani à Alger en 1948, de père kabyle et de mère gitane) réalisateur, acteur, scénariste, producteur et compositeur français; le peuple rom, la richesse et la diversité de son « univers sonore et musical » (notamment la musique tzigane, la musique manouche et le flamenco) sont souvent au centre de ses films; il a reçu deuxCésar de la meilleure musique écrite pour un film en 1999 pourGadjo dilo, eten 2001 pourVengo), ainsi qu'un prix de la mise en scène auFestival de Cannes 2004 pourExils. Parmi ses films, on retiendra notamment, pour leurs liens avec la musique et le flamenco : la trilogieLes Princes (1983),Latcho Drom (1993),Gadjo dilo (1997), puisSwing (2001) et surtoutVengo (2000) qui contient des scènes où le flamenco tient un rôle de premier plan (dont un intermède musical de flamenco-fusion avec la musique égyptienne mettant à l'honneurTomatito et Sheik Al Tuni[64],[75]).
Luz del flamenco, documentaire en français (RTVE/ARTE 1997) : une histoire du flamenco des origines auxcafés cantantes, aux académies de danse et àPaco de Lucía, avec témoignages, entretiens et images d'archives rares (à écouter et à voir en ligne)
↑La citation originale est :« el cante flamenco [es] el canto andaluz agitanado ». Même si le flamenco est un art plénier appartenant au patrimoine de toute l'humanité et qui ne doit pas être« ethnicisé » sous peine deréductionnisme, il semble que, dès sa définition, l'attribution, aujourd'hui, de la culture flamenca au peuple gitan soit de rigueur et historiquement juste, même si ses origines sont diverses et bien antérieures à l'arrivée des gitans en Andalousie, et même si le « chant andalou profond » ne saurait être entièrement circonscrit à une tradition gitane, ainsi que le notaient déjàFederico García Lorca etManuel de Falla (voir plus loin). Néanmoins, quoique non exclusif, l'apport du peuple gitan à la culture flamenca est indéniable, comme l'affinité intime qui existe aujourd'hui entre les cultures gitane et flamenca, et l'évocation de cet apparentement actuel émane d'un ouvrage de référence linguistiquement incontestable :(es) Diccionario de la lengua española de la Real Academia Española, « cante », surdle.rae.es,(consulté le). Pour autant, des musiciens, des danseurs et des chanteurs de flamenco, d'aujourd'hui comme d'hier, parmi les plus illustres et les plus créatifs, et des plus authentiques aussi, ne sont pas d'origine gitane, et certains ne sont pas même espagnols (français oulatino-américains par exemple), tant il est vrai que le flamenco est aujourd'hui, comme d'autres, une "culture-monde" (plus donc qu'unemusique du monde) ; mais en tant que "culture populaire", en tant que "manière d'être-au-monde" (ou« forma de ser »), en tant que« façon d'être-ensemble et de "faire communauté", d’une qualité hors pair »[1],[2], comme le dit Frédéric Deval (voir ici « Dimension philosophique »), le flamenco fait aujourd'hui partie intégrante de l'identité du peuple gitan… et réciproquement ; ainsi d'ailleurs que le disait aussi García Lorca, à la fois grandaficionado (« amateur ») et grand connaisseur du flamenco, source inépuisable de son œuvre
↑La citation originale est :« adj. Dicho de una manifestación cultural, o de su intérprete: De carácter popular andaluz, y vinculado a menudo con el pueblo gitano : "Cante, bailaor flamenco"(« chant, danseur flamenco »). Aplicado a una persona, usado también como sustantivo(« Peut aussi s'appliquer à une personne, ou s'utiliser comme substantif »): "Un flamenco de voz desgarrada". » :(es) Diccionario de la lengua española de la Real Academia Española, « flamenco, -ca », surdle.rae.es,(consulté le).
↑[ressemblance entre guitare classique et guitare flamenca] : tout au moins du point de vue de l'art de lalutherie sinon tout à fait du jeu — car les différences sont marquantes, même s'il y a des « va-et-vient » entre le jeu « classique » et le jeu « flamenco », et si les musiques classique et flamenca sont sources d'inspiration réciproque —, voir notamment la section « Musique classique » de l'article consacré àPaco de Lucía, la section « Jeu (toque) » de l'article sur la guitare flamenca, ainsi que les articles consacrés aux guitaristes solistesRamón Montoya,Carlos Montoya etSabicas.
↑Notamment, même si la guitare reste l'instrument-roi et souvent exclusif du flamenco, on voit souvent aujourd'hui dans le nouveau flamenco, outre lesclaviers, intervenir laflûte traversière (ou même parfois lakena), tenue par exemple parJorge Pardo dans l'un dessextettes quePaco de Lucía a formés un peu sur le modèle des ensembles de musique classique ou jazz (voir la section « De nouveaux instruments » dans l'article consacré à Paco).
↑Par laPragmática, publiée en 1783, Charles III établit que lesGitans sont citoyens espagnols, à condition de respecter les règles suivantes :
Interdiction de se dire gitan, dans la mesure où tous les citoyens sont égaux,
Les enfants doivent aller à l'école à partir de l'âge de quatre ans,
Les gitans sont libres de s'installer où ils veulent,
Les gitans peuvent exercer n'importe quelle activité,
Les gitans ont droit à la protection de leur personne et de la santé,
Les personnes qui s'opposent à l'entrée ou à l'installation de gitans seront punies,
Les personnes qui s'opposent à l'intégration des gitans seront punies.
En contrepartie, les Gitans qui veulent profiter des conditions de laPragmática doivent : abandonner leur manière de s'habiller, ne pas parler leur langue en public, se sédentariser et abandonner la vie errante.
↑Il s'agit donc aussi, ici, du fragile chemin du processus psychanalytique desymbolisation permettant, ou non, à l'art d'assumer pleinement sa fonctioncathartique, et à l'inconscient individuel d'entrer en résonance avec l'inconscient collectif pour le nourrir et le retremper, le vivifier mais en tant que substrat de l'Anthropos universel comme le suggèreEdgar Morin dansL'esprit du temps[31],[32],[33], à la différence de la vision ethniquement segmentée qu'en donne parfois lapsychologie analytiquejungienne.
↑Serafín Fanjul,Les Maures ont-ils apportés le flamenco ?, chapitre 6 de son ouvrageAl-Andalus, l’invention d’un mythe, L’Artilleur, Paris, 2017, page 354 : métonymie due au couteau (nomméflamenco) porté par les gens des bas-fonds, lieux où s'interprétait initialement leflamenco. Ces personnes auraient alors été nomméesflamencos par extension. Luis Suarez Avila, cité par Serafín Fanjul, documente des exemples et des cas semblables pour d'autres dénominations.
↑« Le Flamenco », surlamediatheque.be(consulté le).
↑Machado Álvarez, Antonio, Collection de chants flamencos recueillis et annotés par Demófilo,Séville,1881.
↑Serafín Fanjul,Les Maures ont-ils apportés le flamenco ?, chapitre 6 de son ouvrageAl-Andalus, l’invention d’un mythe, L’Artilleur, Paris, 2017, pages 317 à 364.
↑En ce sens également, Hipolito Rossy,Teoria del cante jondo, Barcelone, 1966, page 46.
↑L’explication magique, écrit-il, page 327, serait que lesMorisques – expulsés d’Espagne de 1609 à 1614 – auraient transmis aux gitans leurs savoirs et leurs techniques, sans que ne soient précisés les circonstances d’une telle fusion entre deux groupes extrêmement endogames. En réalité, les chants morisques ont survécu, mais en Afrique du Nord où beaucoup de Morisques se sont réfugiés, écrit-il à la page page 335.
↑Michel Matarasso, « Morin Edgar, L'esprit du temps. Essai sur la culture de masse (recension) »,Revue française de sociologie,vol. 4,,p. 80-83(lire en ligne).
↑Pedro Soto de Rojas : poète espagnol 1584 – 1658 il écrivit notamment : « Paraíso cerrado para muchos, jardines abiertos para pocos », (Paradis fermé pour beaucoup, jardins ouvert pour peu) poème hermétique en sept strophes. De ce poète Federico García Lorca écrivit :« Soto de Rojas s’enferme dans son jardin pour décrire des jets d’eau, des dahlias, des chardonnerets et des airs suaves. Airs mi morisques mi italiens, qui agitent encore les branches, les fruits et les fourrés de son poème. » À lire en ligne sur le site du centre culturel virtuel Cervantès, (club de lecture qui nécessite une inscription et un abonnement) :« Club de lecture virtuelle de la Bibliothèque Octavio Paz de Paris », surInstituto Cervantes(consulté le).
↑Peut-être Juan Climaco (575 - 606 ? ou 649 ?) qui écrivit un "Escala al paraiso" (échelle pour le paradis).
↑« La Chana », surCinespaña, site du festival de cinéma espagnol de Toulouse et de sa région,(consulté le). Ce documentaire, entre autres, a fait l'ouverture du festivalCinespaña le 29 septembre 2017 à laCinémathèque de Toulouse, et a été programmé sur la chaîne de télévisionArte le 5 avril 2020.
↑On pourra voir des extraits de ce documentaire ici :Lucija Stojević, « La Chana - Le flamenco est ma vie », surreplay.orange,(consulté le).
↑Voir l'introduction à l'article du Wikipedia en espagnol consacrée à Antonia Santiago.