Les films de science-fiction sont souvent utilisés pour aborder des questions politiques ou sociales et pour explorer des questions philosophiques telles que lacondition humaine, le rapport au réel, la conscience, le progrès, les rapports à soi, l'autre ou la société[1].
Comme tout autre support, le cinéma et sa version télévisée, ont permis l'expansion du genre auprès d'un plus large public. Si la sagaStar Wars y est aujourd'hui pour beaucoup, il est à noter que la SF dans tous ses sous-genres a été exploitée par la télévision et le cinéma très tôt. De grandes réussites sur ces deux médias ont très rapidement trouvé un public et assuré la pérennité du genre. On ne compte plus aujourd'hui le nombre de séries ou de films ayant influencé lapop culture et ce bien avantStar Wars (La Quatrième dimension,Flash Gordon,Star Trek,Rollerball,Soleil vert, etc.).
Que ce soit sous forme deblockbuster ou de petites productions (sans effets spéciaux et gros budgets), le cinéma a donné à la SF la possibilité de marquer la culture populaire de son empreinte bien plus que ses supports de bases que sont la littérature et la bande dessinée[2], car le cinéma est bien plus accessible au grand public que certaines autres formes d'art.
Genèse du cinéma de science-fiction (de 1900 jusqu’à la fin des années 1950)
Dès l'origine du cinéma, lascience-fiction (SF) s'est imposée comme une nouvelle forme d'expression à la fois visuelle et intellectuelle.
Certainement influencés par les précurseurs de ce genre initialement littéraire (Jules Verne,Mary Shelley) ainsi que par le père fondateur de la SF moderne,Herbert George Wells[3],[4], les premiers cinéastes se sont rapidement approprié les thématiques futuristes propres au style.
Le cinéma de science-fiction est né. Il exploitera dès lors plusieurs facettes de ce que peut être la SF en mélangeant l'anticipation et lascience fiction horrifique.
S'il est bien un film qui marque le cinéma, il faut remonter jusque dans les années 1920 avec le célèbre et déroutantMetropolis (1927) deFritz Lang, qui amène la science-fiction cinématographique à un nouveau niveau[9],[8]. Avec son ambiance sombre, sa lecture politique et sociologique, ladystopie de Lang apporte un souffle novateur qui influencera énormément la SF des années à venir, tout en introduisant des notions et thématiques quasi indissociables du genre telles que l’oppression du système, lesandroïdes ou l’opulence technologique.
Les années 1940, marquées par laseconde guerre mondiale et l'immédiat après-guerre, ne sont pas propices à l'élaboration d'œuvres majeures en science-fiction[10],[4].
Affiche publicitaire du film de SF horrifiquePlanète interdite (1956).
Numéro d’octobre 1933 d'Amazing Stories, magazine « Pulp » spécialisé dans la science-fiction. Dans ses pages ont été publiés bon nombre d’auteurs classiques et d'incontournables du genre.
Le cinéma suit le mouvement et la production va se lancer dans le spectaculaire et l’horrifique, cherchant constamment à innover en termes de technique. Le genre devient le terrain de jeu de la recherche d’effets spéciaux, maquettes, marionnettes, montages, jeux de lumières, costumes, maquillages, le tout mélangé dans une atmosphère deguerre froide, omniprésente dans les propos et donnant un réalisme pour l’époque à l’anticipation[18],[1],[4].
Ainsi, jusqu'au début des années 1960, le genre devient une sorte de niche populaire mais peu assujettie au respect de la critique qui voit en lui une « pseudo forme artistique », s’appuyant sur le fait que peu de grands réalisateurs de l’époque plébiscitent la science-fiction, la laissant aux productions à petit budget[4].
SF sur petits et grands écrans (des années 1960 à la fin des années 1970)
Les années 1960 commencent à peu près comme avait fini la décennie précédente pour la réalisation d’œuvres de science-fiction.
Mais 1960 marque la première grande adaptation sur grand écran d’une œuvre majeure :La Machine à explorer le temps (1960) de l'AméricainGeorge Pal, tirée du roman éponyme — premier véritable livre de SF moderne — deH. G. Wells. Apportant un souffle nouveau, prenant les thématiques plus aux sérieux en les mettant en scène de façon très professionnelle avec un budget relativement conséquent pour l’époque, le cinéma de SF se veut plus proche de ce qui fait l’essence même du genre, à la manière de la série américaineLa Quatrième dimension (diffusée à la télévision entre 1959 et 1964).
De plus, la perpétuelle recherche dans le domaine des effets spéciaux pour les films futuristes permet à cette adaptation de Wells de remporter en 1961 l’Oscar des meilleurs effets spéciaux. Ce qui deviendra avec les années la marque de fabrique du genre[19].
Les années suivantes marquent un tournant. Une démocratisation vers le grand public se met petit à petit en place. Dans la lignée deLa Quatrième dimension, les sujets abordés se veulent plus sombres tout en étant plus terre-à-terre.
La grande révolution visuelle a lieu en 1968 avec la sortie du film2001, l'Odyssée de l'espace[20],[21],[22],[8] réalisé parStanley Kubrick, en parallèle à la sortie du roman éponyme d'Arthur C. Clarke, auteur à succès et scénariste sur le long métrage. C'est un carton commercial, le film devient très rentable et l'engouement du public, bien que parfois mitigé, propulsera l’œuvre au rang de classique du 7e art ; de même, la critique, même si plus tempérée à l'époque de la sortie, est aujourd'hui unanime sur la qualité du rendu final. C'est une véritable avancée, tant sur la manière de raconter une histoire que par les progrès des techniques d'effets spéciaux. Avec2001, l'Odyssée de l'espace, la critique élitiste commence à admettre que la science-fiction peut être un sujet intéressant, bien que ce monument du cinéma fait presque office « d'exception » dans les écrits de la presse de l'époque. De nos jours, la presse élitiste ne manque pas d'éloges à son égard[23].
Les acteurs William Shatner et Leonard Nimoy, respectivement dans leurs rôles du capitaine Kirk et de Spock dans la première sérieStar Trek.
Ces années sont également marquées par un grand nombre de sorties d’œuvres devenues cultes aujourd'hui. Il en est ainsi deLa Planète des singes (1968)[8],[10] deFranklin Schaffner, film tiré du roman du françaisPierre Boulle avec en vedette l'une des plus grandes stars hollywoodiennes de la décennie :Charlton Heston. C'est aussi l'arrivée à la télévision de séries incontournables du genre avec notammentLes Envahisseurs (1967)[8] et surtoutStar Trek (1966)[8] qui devient un des premiers phénomènes de masse lié à la SF. Cette dernière série deviendra en effet une des principales références du cinéma de fiction. Elle sera aussi au fur et à mesure des décennies dérivée en suites, spin-offs, reboots et remakes sur grands comme petits écrans, la franchise devenant unefigure de proue qui aura une influence considérable sur les réalisateurs et scénaristes en devenir et ce, jusqu'à nos jours. AvecStar Trek, la SF, bien que toujours pointée du doigt, s'est vue devenir de plus en plus communautaire en unissant des milliers (des millions aujourd'hui) de personnes à travers le monde sous la même bannière, le mouvementtrekkie était né, rassemblant des légions de fans sur toute la planète lors de conventions ou d'évènements communautaires consacrés à la culture et l'univers de licence[24],[4].
Cet engouement pour la naissance de grandes licences SF se fait également ressentir au cinéma, notamment avecLa Planète des singes (1968), avec pour vedetteCharlton Heston, qui fut un très grand succès à sa sortie et qui amorce la notion des grandes sagas du genre en devenir. Cette série de films, qui connaîtra des suites tout au long des années 1970, marquera la culture populaire de son empreinte, à tel point que l'on ne compte plus le nombre d'hommages et de clins d'œil faits au titre[25]. Soixante ans après, Hollywood tourne encore des films de la licence comme c'est le cas pourStar Trek (cité plus haut), montrant l'impact qu'ont eu les années 1960 sur la science-fiction[26].
Les années 1970 sont le grand tournant pour la science-fiction sur pellicule.
En plein contexte de changements sociaux, le cinéma de science-fiction, bien qu'étant toujours un divertissement, se rapproche de la critique sociétale et politique, explore la théologie, cherche à percer l'essence de l'être humain. La violence n'y est plus représentée uniquement de façon guerrière, aventurière ou apocalyptique. Elle devient crue, réaliste, saignante et macabre s'inspirant dufilm noir créant un courant appeléNeoNoir (mélange du cinéma noir et de la SF). La SF devient une démonstration de ce qu'est la folie humaine, de ce qu'elle peut engendrer, de ce vers quoi nous pourrions aller[27]. Ainsi naissent quelques grands classiques tel queSoleil vert (1973)[28],[1],[8],[9] deRichard Fleischer avecCharlton Heston, adapté du roman du même nom deHarry Harrison ; le sanglantRollerball (1975) deNorman Jewison; le très violent et dérangeantOrange mécanique (1971) deStanley Kubrick[8],[10] ; ou encore, sans entrer dans le NeoNoir,Mad Max (1979) deGeorge Miller avecMel Gibson où la folie humaine, poussant chacun de plus en plus vers les atrocités, finit par déclencher l'Apocalypse.
La science-fiction devient une forme d'expression puissante permettant d'expérimenter à l'écran de nouvelles manières d'aborder des idées, en rendant le visuel, l'image, source d'interrogation.
Plus qu'un simple film,Star Wars et devenu en quelques mois un véritable phénomène de société. Plus que rentable, l'univers deGeorge Lucas touche toutes les tranches d'âges, toutes les couches de la société. Merchandising, produits dérivés, suites, etc. Très vite, l’œuvre devient l'un des plus grands classiques du cinéma de science-fiction. Aujourd'hui encore le phénomène ne cesse de prendre de l'ampleur au point que même unereligion s'est développé autour des films.
Développement et consommation du genre (les années 1980)
La décennie 1980 restera comme la plus marquante pour lesoft power américain[32]. Centrée sur la jeunesse et l'innovation, elle est pour le cinéma en général, mais surtout pour la science-fiction l'époque de toutes les possibilités[33].
On ne compte plus le nombre de classiques du genre parus dans ces années-là. Tantôt légère, tout public et humoristique, tantôt sombre, oppressante et déshumanisée, la SF en séries comme en longs métrages des années 1980 est un carrefour à la croisée des chemins de l'infiniment possible[34].
Dans un contexte où la télévision est maintenant dans quasiment tous les foyers, les productions — notamment américaines pour les séries et les films, et japonaises pour les séries d'animation — ont commencé à se multiplier. Ainsi, très rapidement, le genre est grandement représenté, facilitant ainsi l'approche du public.
Les feuilletons télévisés de SF se veulent souvent mêlés avec l'aventure. Les scénarios n'y sont pas toujours développés autour du genre, mais l'esprit y est davantage bon enfant que lors de la décennie précédente, qui était plus ferme, plus terre-à-terre dans l'ensemble.
Une des DoLorean utilisées pour le tournage des films de la sagaRetour vers le futur.
Il en va de même pour la diffusion sur grand écran.
En effet, beaucoup de sorties témoignent de cette orientation tirant de plus en plus vers le divertissement, où le propos n'est pas de questionner le spectateur, mais de l'embarquer dans une histoire plaisante.C'est dans cette optique que des films culte ayant marqué l'histoire d'Hollywood et du cinéma en général voient le jour[36].
Bien que la lignée des films des années 1970 soit tout de même assurée avec, par exemple, les suites deMad Max,Mad Max 2 : Le Défi (1982) etMad Max 3 : Au-delà du dôme du tonnerre, ou encoreAlien II (1986) deJames Cameron, ceux-ci dénotent d'une influence et d'une émergence de plus en plus forte d'un point de vue commercial pour le genre.
LaTechNoir (également écriteTech-noir et aussi connue sous le nomcybernoir et souvent confondue avec lascience-fiction noir, leNeoNoir) est un sous-genre du cinéma de SF, mélange de film NeoNoir et de science-fiction d'anticipation montrant le progrès technologique comme un danger une fois poussé à son paroxysme[34],[37].
Le terme vient du filmTerminator (1984) deJames Cameron — dans lequel la boîte de nuit porte ce nom — et définit des films dans lesquels la technologie est présentée comme une force néfaste, destructrice, dangereuse, à l'image de ses créateurs, habitée par le goût et le désir de destruction[38],[39].
En contraste avec la SF tout public très développée de l'époque, la TechNoir reprend les codes de la violence propres à la décennie précédente en venant lui greffer des éléments de films d'actions (très populaires dans les années 1980) et en rendant la brutalité moins malsaine afin de la rendre plus spectaculaire ou de la détourner en gêne par blocage vis-à-vis de nos normes sociales.
Le véritable pionnier du genre estBlade Runner (1982) deRidley Scott, première adaptation du romancierPhilip K. Dick — d'après son romanLes androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?, renommé plus tard avec le titre du film[37]. Son universcyberpunk, son ambiance depolar, ses décors étouffants et ses androïdes fugitifs et tueurs donnent à la science-fiction une dimension nouvelle ; l'homme y est écrasé par le système, la technologie y est dangereuse et la violence quasi omniprésente. Dans cette lignée, sortiront alors des titres marquants, pas forcément rattachés au cyberpunk, mais tous issus des sous-genres les plus sinistres de la SF (dystopie,utopie malsaine,SF militaire,SF horrifique…). On peut citer parmi les plus connus : le premier filmTerminator,Tron (1982) deSteven Lisberger,Maximum Overdrive (1986) deStephen King,La Mouche (1986) deDavid Cronenberg ou encore le très violentRoboCop (1987) dePaul Verhoeven.
Le style TechNoir continuera de se développer durant la décennie suivante et perdure aujourd'hui encore bien qu'il soit toujours confondu avec le NeoNoir (style qui lui a donné naissance).
Plus qu'aucune autre période, les années 1980 ont une influence très importante sur la culture populaire ; des décennies plus tard, ses séries, films et autres univers ont marqué les générations. On pourrait aller jusqu'à parler d'unenostalgie des années 1980[40].
La plupart des films de SF de ces années ont créé un engouement fort et influencé les gens dans tous les domaines[41]. En science-fiction, cette influence se ressentira énormément dans les années 1990 et même jusque dans les années 2010 ou 2020, où les 80's fascinent et restent comme une tendance[34] ; on peut citer par exemple la sérieStranger Things (2016) des frèresDuffer, une des plus regardées sur la plate-formeNetflix et considérée par la critique[42] comme l'une des meilleures séries, toutes générations confondues — son principe reposant sur le contexte, le cadre et le décor des années 1980[43],[44].
Déferlante des films de SF (des années 1990 à la fin des années 2000)
Les années 1990 restent une période relativement ambiguë pour le genre SF, à la fois dans la continuité de la décennie précédente et, en même temps, dans une optique de modernité. Ces années ont vu arriver énormément de projets.
D'un côté, certains réalisateurs sont restés dans le chemin déjà tracé par les années 1980, notamment la TechNoir dont une bonne partie des sorties du genre ressemblait à s'y méprendre à celles déjà existantes : les deux suites deRocoCop, très proches de lasérie B[45], montrent ce lignage, à l'instar de films commePlanète hurlante (1995) deChristian Duguay ou deGhost in the shell (1995) deMamoru Oshii, ainsi queTotal Recall (1990) dePaul Verhoeven. Ceci étant l'un des résultats de l'influence du cinéma américain et de l'impact des œuvres de SF sur les auteurs, scénaristes et réalisateurs en devenir.
Cette influence des années passées se retrouve également dans les films SF en général. Que ce soit par le côté film d'action comme dansDemolition Man (1993) deMarco Brambilla, avec pour vedetteSylvester Stallone, star du cinéma d'action des 80's, ou par le côté décalé et familial comme dansConeheads (1993) deSteve Barron, deOpération Alf (1996) deDick Lowry ou de la conclusion de la sagaRetour Vers le futur avec sontroisième volet.
À la télévision, on assiste plus rapidement à une émancipation vis-à-vis de la génération précédente. Des séries davantage dans l'air du temps voient le jour, certaines devenant même des références incontestées du cinéma de science-fiction. Ce sont, par exemple,Stargate SG-1 (1997), adaptée du filmStargate, la porte des étoiles (1994) deRoland Emmerich avecKurt Russell ;Sliders (1995) ; le réaliste et effrayantX-Files (1993) ;Futurama (1999) ;SeaQuest (1993) ;Cowboy Bebop (1998) ; ou la passionnante et inventive aventureFarscape (1999) qui deviendra une des références en matière de science-fiction, toutes générations confondues[46],[47].
Mais les années 1990 sont aussi la période de la modernisation, tant sur le plan technologique que sur celui des effets spéciaux. De nouvelles techniques sont expérimentées, notamment les images numériques (ou images de synthèse) et vont rapidement se développer avant de réellement se démocratiser avec la décennie qui suivra. Ainsi naîtront des visuels jamais explorés pour l'époque, comme dansStar Wars, épisode I : La Menace fantôme (1999) qui, d'une main de maître, impose une fois encore la saga comme maîtresse du genre[48]
La TechNoir aussi fait peau neuve, évoluant sur de nouvelles idées scénaristiques et de nouveaux concepts avecVirus (1990) deJohn Bruno ouTerminator 2 : Le Jugement dernier (1991) deJames Cameron, moins sombre que son prédécesseur mais plus moderne, plus entraînant et plus dramatique que celui-ci. Elle s'émancipe vraiment avecMatrix (1999) desWachowski où la Machine dangereuse et impitoyable devient notre société entière. Ce film deviendra un pilier du genre et provoquera un véritable engouement, tant dans la culture pop que dans les cultures internet et complotistes[49].
Les années 2000 marquent un point de transition dans la conception de la science-fiction à l'écran.
Si quelques standards du genre font de la résistance en restant sur les codes des années 1990, commeÀ l'aube du sixième jour (2000) deRoger Spottiswoode, un style propre à ce début de siècle s'impose très rapidement.
Maquettes de modélisation utilisées par les studiosPixar pour la réalisation du filmWALL-E.
En figure de proue de cette évolution de l'image de synthèse se voulant de plus en plus détaillée et réaliste, viennent les deux derniers films de la saga deGeorge Lucas :Star Wars, épisode II : L'Attaque des clones (2002) etStar Wars, épisode III : La Revanche des Sith (2005)[48], conclusion de son œuvre commencée en 1977, bien que l'on ait déjà pu les voir en évolution dans la décennie précédente. Mais l'an 2000 va en faire une de ses principales ressources. D'autres films s'essayent rapidement aux images de synthèse et vont ainsi influencer et faciliter leur utilisation par Hollywood et le reste du monde. S'y retrouvent par exemple :Mission to Mars (2000) deBrian De Palma ;I, Robot (2004) d'Alex Proyas, inspiré d'Isaac Asimov et avecWill Smith ; ou bien, dans une autre façon de faire,A Scanner Darkly (2006) deRichard Linklater. L'incrustation d'images numériques via la post-production atteint une nouvelle dimension avecAvatar (2009) deJames Cameron, repoussant les limites de leur utilisation. Même si le genre a déjà eu droit à ses propres longs métrages d'animation en images numériques —Les Indestructibles (2004),Robots (2005),WALL-E (2008) —, c'est avecAvatar — et avec leTransformers (2007) deMichael Bay — que les images de synthèse acquièrent davantage de réalisme et deviennent une norme dans les blockbusters de plus en plus populaires.
Ces années sont celles de la génération internet et le désir de modernisation se fait ressentir, on assiste donc dans cette optique à la sortie de remakes et reboots plus ou moins réussis de chefs-d'œuvre du cinéma de SF, dontLa Planète des singes (2001),Rollerball (2002),Battlestar Galactica (2004),Invasion (2007) ouV (2009).
Enfin, cette décennie est également le berceau de l'émergence dufilm de super-héros, dont énormément d'histoires sont de la science-fiction. Ce style sera annonciateur de l'évolution de la SF pour la décennie suivante. Les films majeurs concernant les super-héros de SF de cette époque sont leSpider-Man (2002) deSam Raimi et ses deux suites en 2004 et 2007 ; lasaga desX-Men, débutée en 2000 avec le filmX-Men deBryan Singer et toujours en cours aujourd'hui[51] ; ou encoreDareDevil (2003) deMark Steven Johnson etIron Man (2008) deJon Favreau, qui ouvrent la voie à l'une des plus longues sagas cinématographiques de l'histoire — et surtout l'une des plus rentables —, laSaga Avengers, elle aussi toujours en cours de nos jours[52].
La science-fiction et ses nouveaux modes de consommation (des années 2010 à aujourd'hui)
La décennie 2010 est la concrétisation de ce qui a été amorcé durant les dix années qui l'ont précédée : la technologie est partout. Smartphones, ordinateurs, internet, le monde ressemble à ce que la science-fiction des cent dernières années avait décrit avec tant de méfiance et de fascination[53],[54],[55].
L'accès et l'approche de la culture, les méthodes de la consommer ont, de ce fait, évolué également. Tout le monde peut désormais écouter de la musique ou regarder un film depuis son téléphone portable[53],[56]. Le cinéma se consomme de plus en plus sous forme de séries, notamment grâce au développement des plate-formes d'hébergement de vidéos payantes permettant à chacun de regarder un long métrage lors d'un trajet en train ou en bus, par exemple[56].
Le cinéma de science-fiction est lui aussi soumis à cette nouvelle forme de consommation additive et dématérialisée. Des créations originales dans le genre ont rapidement vu le jour[57].
Parmi les séries de SF, on retiendra, entre autres : Black Mirror (2011), une anticipation de TechNoir terrifiante ; Le Maître du Haut château (2015), adaptée du roman éponyme de Philip K. Dick ;Philip K. Dick's Electric Dreams (2017), à la croisée des deux univers cités précédemment ;The Mandalorian (2019) deJon Favreau, tiré de l'universStar Wars après le rachat de la licence parDisney auprès deGeorge Lucas[58] ; ou encore le passionnantStranger Things (2016), mélangeant les influences en plaçant à la fois son cadre dans les années 1980 et en faisant des clins d'œil rendant hommage à la science-fiction et la pop culture dans sa globalité[43],[44]. Des longs métrages sont également sortis via les plateformes d'hébergement, apportant quelques nouveautés à la SF, dont notamment : Annihilation (2018) d'Alex Garland, ou l'effroyable et sanglantLa Plateforme (2019) deGalder Gaztelu-Urrutia.
Le cinéma ne se cantonne pas seulement à ces plateformes de streaming, les sorties en salles liées à la SF continuent dans la lancée de la fin des années 2000, en continuant de surfer sur la mode des films de super-héros, mais pas seulement : la nouvelle trilogieStar Wars créée par Disney, bien qu'ayant reçu une réception très mitigée par la critique, remporte un grand succès commercial. D'autres films, telsInception (2010) etInterstellar (2014), tous deux deChristopher Nolan ;Ready Player One (2018) deSteven Spielberg ;Mad Max: Fury Road (2015) deGeorge Miller ; Logan (2017) deJames Mangold ; ou la saga Hunger Games (2012-2015), pour ne citer qu'eux, ont connu un succès fort auprès du public, et parfois même de la critique[59]. La tendance reste cependant dans une idée de recyclage dans le sens où la plupart des grands succès naissent en tant que projet gravitant autour de films déjà existant, suites, reboot, remake, spin-off, prequel, etc. jouant indéniablement sur le spectaculaire pour attirer le public. La plupart du temps ces démarches sont finalement des déceptions pour le public malgré les retombées économiques des sorties en salle comme ce fut le cas pourStar Wars notamment[60]. Cependant, quelques exceptions ont émergées comme la saga prequel deLa Planète des singes commencée en 2011 vouée à continuer dans les années 2020[61].
Une fois n'est pas coutume, le cinéma hollywoodien a dominé le marché de cette décennie, proposant des blockbusters comme des sorties plus intimes via les plateformes, cette évolution de la consommation faisant écho à ce qu'écrivaient des auteurs de science-fiction des années 1950-1960 commeIsaac Asimov,Robert A. Heinlein,Philip K. Dick ou encoreBrian Aldiss[54],[55].
Les années 2020 commencent comme se termine la décennie précédente, dans la continuité de ce qui avait été commencé à la fin des années 2000, avec des prévisions pour la suite notamment de la sagaAvengers, ou encore l'annonce de Disney d'une nouvelle trilogieStar Wars et de nouvelles séries tirées de cet univers[62].
Des sorties comme Les Nouveaux Mutants (2020), deJosh Boone, etDeadpool 3 (annoncé pour 2023) — suites de la sagaX-Men — ; Venom II (2021) deAndy Serkis ; Black Widow (2021) deCate Shortland — suite de la sagaAvengers — sont autant d'exemples de cette volonté de continuer sur la lancée des films de super-héros, battant les records d'entrée depuis une vingtaine d'années[63]. Une logique commerciale qui dénote d'une volonté lucrative sans trop d'effort de la part du cinéma américain. À l'inverse, l'émergence de productions plus petits budgets via les plateformes de diffusions tentent de trancher dans ce marché commençant à tourner sur lui-même.
Des remakes sont également toujours programmés comme Dune (2021) deDenis Villeneuve, ou Invisible Man (2020) deLeigh Whannell. Bien que cette manie de reprendre du vieux pour refaire du neuf soit héritée des 00's, elle renforce l'idée que l'industrie Hollywoodienne en général ne voit qu'un intérêt pécuniaire à contrario des années 1980 et 90 qui, bien que dans une politique de consumérisme et de soft-power, prenait pour intérêts de créer des histoires qui avaient pour but de plaire au public. Le but de ces reboot et remakes étant de relancer des licences cinématographiques dans l'idée de pouvoir en faire des suites et d'ainsi pouvoir surfer sur le succès et ce à long terme. Il en va de même, que de nombreuses œuvres se voient développer des suites, notamment pourAvatar deJames Cameron ou encore pour la série des Jurassic Park commencée en 1993 parSteven Spielberg.
De même, les plateformes de streaming continuent à produire ou coproduire des films et séries de science-fiction, comme c'est le cas deDune — cité plus haut[64] ou de Fondation (2021), une nouvelle adaptation de l'univers littéraire d'Isaac Asimov.
Le ton exprime donc de prime abord une volonté de faire dans la continuité des vingt dernières années. C'est-à-dire viser un public large en naviguant sur des eaux déjà explorées : suites, remakes, adaptations (voir remakes d'adaptations), comme si, encore une fois, certains mondes imaginés par le genre au cours des 120 années précédentes se réalisaient : une fois les concepts les plus percutants, déroutants et sinistres explorés, l'imagination allait péricliter et se contenter de peu, un écho tout particulier au film de science-fiction humoristiqueIdiocracy (2006) deMike Judge.
Dès le début de décennie la SF impose sa marque, une fois de plus, sur sa place en tant que genre auprès du grand public. En dénote l'attente se faisant autour de la sortie du quatrième volet de la sagaMatrix débutée en 1999[65]. Montrant à la fois un véritable attachement du public pour la science-fiction et confirmant le mercantilisme d'Hollywood à son égard.
Cependant, à la suite de l'épidémie mondiale de COVID-19, obligeant les cinémas à fermer leurs portes pendant plusieurs mois, la réouverture des salles n'attira pas le grand public à revenir. On assiste donc à une baisse de fréquentation des cinémas, ce qui impacte le marché — les films rapportant de moins en moins pour leurs sorties en salles, les productions investissent moins dans de nouveaux projets. Face à cette "crise du cinéma", de plus en plus de réalisateurs et producteurs se tournent vers les plateformes de streaming[66].
Cependant, la sortie du second volet de la saga Avatar, avecAvatar 2 (fin 2022), tend à annoncer une reprise de la fréquentation des salles obscures qui serait donc en partie engendrée par le cinéma de science-fiction[67],[68]. De plus, de nouveaux films en production attirent l'engouement du public, par exemple la suite de la saga prequel àLa Planète des singes[61],[26].
En 2011,Ridley Scott réalise et présente une série de reportage nomméeProphètes de la science fiction. Au cours de cette série le cinéaste passe en revue la biographie de grands noms du genre, auteurs et réalisateurs et de leurs impacts sur son évolution propre, immergeant ainsi le spectateur dans l'histoire de la sf littéraire et cinématographique[69].
En 2018, le célèbre réalisateur,James Cameron a créé une série documentaire sobrement intituléeJames Cameron's story of science fiction dans laquelle il part à la rencontre de grands réalisateurs et producteurs hollywoodiens, ainsi que d'auteurs de science-fiction dans le but de comprendre l'impact du cinéma du genre sur le public en s'intéressant à la fois à son histoire et à la fois à son influence sur la culture[70].
En 2020, Lyndy Saville réalise un documentaire qui revient sur toute l'histoire de la science fiction au cinéma, intituléLa science-fiction fait son cinéma[71].