
Latypologie biblique (du grectupos, archétype, modèle) est une doctrine de lathéologie chrétienne qui opère un rapprochement entre une personne ou un événement de l'Ancien Testament avec un personnage ou un événement duNouveau Testament.
L'interprétation typologique est explicitée dans leNouveau Testament lui-même, et pour cette raison, est admis depuis toujours dans le christianisme, sans être exclusif d'autres principes interprétatifs.
Cette méthode d'herméneutique biblique relève de l'apologétique chrétienne. Elle consiste à définir ce qui, dans l'Ancien Testament, est annoncé, afin de s'accomplir pleinement dans le Nouveau Testament. Ces événements et ces personnages sont alors considérés comme des « préfigurations ».
Lefigurisme désigne des développements propres aucatholicisme.
L'interprétation typologique se développe selon deux principes différents[1]. Le premier est strictement biblique, le second vient d'influences philosophiques hellénistiques.
La typologie est à l'origine de ce que l'on appelle l'allégorie médiévale. Elle remonte aux premiers temps de l'Église primitive : c'est une façon de réconcilier les ruptures entre laBible hébraïque (l'Ancien Testament) et le Nouveau Testament. Les chrétiens étudiaient ces deux parties de la Révélation, et elles avaient pour eux une valeur similaire, mais l'Ancien testament leur posait des problèmes ; c'est le cas, par exemple, des lois juives sur laCacherouth (les prescriptions alimentaires).
L'Ancien Testament était vu en certains endroits non pas comme un récit littéral, mais comme uneallégorie ou une préfiguration des événements du Nouveau Testament. Certains événements de l'Ancien Testament étaient vus comme une préfiguration de la vie du Christ. Le nom technique pour discerner le Nouveau Testament dans l'Ancien est latypologie.
Un bon aperçu de ce mode de pensée est donné parPaul dans l'Épître aux Colossiens 2, 16-17 :« Toutefois, ne laissez personne vous juger sur ce que vous buvez ou mangez, ou en raison du respect de fêtes religieuses, la célébration de la Nouvelle Lune ou des Shabbats. Ce sont des empreintes de choses à venir ; la réalité est à trouver dans le Christ ».
Le développement de cette approche de laBible hébraïque était influencée par la pensée desjuifs hellénistiques d'Alexandrie, oùPhilon et d'autres la considérait comme essentiellement allégorique, en se fondant sur la pensée dePlaton. Le système fut christianisé parOrigène, et répandu par de grandes figures commeHilaire de Poitiers etAmbroise de Milan.
Augustinpensait souvent à l'enseignement d'Ambroise[réf. nécessaire]« la lettre tue mais l'esprit donne la vie »[5] et à son tour fut un partisan très influent de ce système, même s'il insista également sur la vérité littérale historique de la Bible[6].Isidore de Séville etRaban Maur, dans leur travail de compilation et de synthèse du savoir antérieur, établirent les interprétations standardisées des correspondances et leurs significations[7].
L'historien de l'AntiquitéHenri-Irénée Marrou, dans son essaiDécadence romaine ou Antiquité tardive ?, présente brièvement cette typologie des Pères de l'Église :« Cette façon, au premier abord si déconcertante pour nous, de repenser l'histoire a de fait nourri tout un secteur très important de la réflexion des Pères de l'Église sur les textes de la Bible : c'est l'aspect de l'exégèse spirituelle qu'on désigne proprement par le terme de typologie – "type" et "antitype" sont des expressions empruntées au Nouveau Testament qui désignent, tour à tour selon les cas, les deux épisodes historiques qui se correspondent comme la préfiguration et l'accomplissement ; la typologie s'oppose à l'allégorie au sens étroit du mot, en tant que celle-ci met en parallèle des mots et des choses – ainsi chez les païens interprétant Homère, des mythes et des thèses philosophiques – et non, comme dans la typologie chrétienne, des événements historiques bien réels, mis en rapport avec d'autres faits historiques, "discernant, sous une histoire vraie, une histoire plus vraie encore" »[8].
Le mot, dérivé du français « figure », vient dulatinfigura traduction dugrec bibliquetypos (τύπος). Ainsi, le figurisme est spécifique aux théologies en langue latine, c'est-à-dire essentiellement le Catholicisme, tandis que la typologie est le terme général car le Nouveau Testament est écrit en grec.
AuXVIIe siècle, un courant de penséejésuite s'appuyant sur le « figurisme » s'est constitué, au sein de laMission jésuite en Chine. Il est l'un des éléments importants de la célèbreQuerelle des Rites entre 1611 et 1742[12]. Ce courant, animé par le pèreJoachim Bouvet prend comme hypothèse que les classiques chinois, comme leYijing (Classique des Mutations) comprennent des traces de la tradition primitive du christianisme, sous forme d'allégories ou de symboles, établissant une parenté entre les textesconfucéens et lasainte Écriture[13].
Le figurismejanséniste, est particulier car il a transposé à son époque les principes de la typologie biblique afin de justifier une rénovation de l'Église catholique, alors que la vision classique n'utilise le figurisme que pour justifier une rénovation du culte hébraïque.
En première approximation, le figurisme janséniste est un mode d'interprétation desSaintes Écritures poussé jusqu'à son paroxysme, dans le cadre général de la multiplicité des sens que peuvent prendre ces mêmes Écritures.
La pratique du figurisme est ancienne. Cependant le mot lui-même n'est formellement attesté qu'en 1729[14], sous la plume de l'abbé Débonnaire « ardent défenseur des partisans de Port-Royal »[15]. Le terme est donc lié au jansénisme dès ses origines, même si par la suite (par exemple dans le domaine de l'art) il peut désigner une réalité complètement indépendante.

Pour Hervé Savon[16], c'est avec lesRègles pour l'intelligence des Saintes Écritures publiées à Paris en1716, sans doute par l'abbéDuguet en collaboration avecJacques-Vincent Bidal d'Asfeld, que les jansénistes ont trouvé les références exégétiques qu'ils recherchaient. L'abbé Duguet se plaçait résolument dans la filiation desPères de l'Église pour soutenir l'explication allégorique de l'Ancien Testament. Il prend résolument partie contre l'exégèse critique de l'oratorienRichard Simon qui avait fait paraître en 1685, son maître ouvrageHistoire critique du vieux testament en Hollande, déclenchant la fureur d'Arnauld.
En fait, puisque l'on a du mal à définir le jansénisme lui-même, à plus forte raison est-il difficile de définir le figurisme janséniste. Sur l'interprétation de l'Écriture, les jansénistes n'étaient pas unifiés, et parfois en opposition les uns avec les autres. Toujours sur la défensive, ils n'ont pas eu le loisir d'asseoir une théorie de l'interprétation biblique qui leur serait propre. Il existe toutefois une sensibilité commune, des manières de faire, dont il est possible de déterminer quelques traits caractéristiques :
« Nous en trouvons [du figurisme] une formulation commode — à titre de définition provisoire — chez un représentant de la deuxième génération figuriste,Nicolas Legros, ancien chanoine de Reims, réfugié en Hollande depuis 1726. Être figuriste, selon Legros, c'est sentir que le triste état où se trouve l'Église nécessite un remède extraordinaire : « la future conversion des Juifs » et « la venue d'Élie » qui en sera le prélude ; c'est aussi faire sienne « la doctrine commune des saints Pères et Théologiens sur l'obligation de chercher Jésus-Christ et l'Église dans toutes les Écritures de l'Ancien comme du Nouveau Testament ». À ce tableau, Legros ajoute […] : être figuriste, c'est « applaudir aux vues de M. Duguet sur l'Écriture »[17]. »
Dans la perspective de ce figurisme, les événements de celui qui pratique cette lecture sont lus comme une reproduction de l'histoire biblique et évangélique. Plus qu'un interprétation des Saintes Écritures, c'est la vie du lecteur qui est interprétée ainsi[18].
Ainsi l'abbéDuguet, au séminaire parisien deSaint-Magloire, développe une interprétation des vicissitudes des jansénistes fondée sur les écrits de la Bible, et principalement sur ceux de l'Apocalypse deJean.
À sa suite, l'abbéd'Étemare etLouis Basile Carré de Montgeron multiplient les écrits liant les persécutions des jansénistesappelants et desconvulsionnaires aux épisodes tragiques de la Bible. Comparant leur sort à celui des premiers chrétiens persécutés, ils favorisent une analogie qui se retrouve fortement dans les actions des convulsionnaires, qui prennent des noms bibliques, représentent dans leurs séances de convulsions des épisodes des Écritures[19], etc.
Le figurisme touche également le clergé jansénisant au moment de laRévolution française. Certains, comme l'abbé Grégoire, ont tendance à voir dans la Révolution un accomplissement des écrits bibliques.

La typologie était fréquemment exprimée dans les arts ; beaucoup d'appariements typologiques sont remarqués dans la sculpture des cathédrales et des églises, et sur d'autres supports. Des œuvres illustrées populaires mettant en scène des paires typologiques furent parmi les ouvrages les plus répandus auMoyen Âge tardif, comme les manuscrits illuminés, et lesincunables.
Les deux compilations les plus connues étaient leSpeculum humanae salvationis et leBiblia pauperum, deNicolas de Hanapes.
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