Cet article concerne l'utilisation du mot feuille en botanique. Pour l'utilisation du mot en papeterie, voirFeuille de papier. Pour les autres significations, voirFeuille (homonymie).
Pour accomplir son rôle, une feuille est généralement formée d'une lame plate et fine aérienne, lelimbe, qui lui permet d'exposer à la lumière un maximum de surface. Mais il existe aussi des feuilles transformées, pour lesquelles le limbe est très réduit et ne joue plus de rôle photosynthétique ; elles sont transformées envrilles,cataphylles, écailles sur les bourgeons, aériens (épines,aiguilles deconifères) ou souterrains (comme dans lesbulbes,cormes),feuilles succulentes. C'est leparenchyme palissadique, un type particulier detissu de la feuille, qui effectue la photosynthèse grâce à ses cellules contenant leschloroplastes, et donne à la feuille sa couleur verte.La feuille présente une grande variété de formes, de tailles, de teintes, de textures ou encore d'ornementations dans le règne végétal. Ces particularités de la feuille sont souvent caractéristiques d'uneespèce, ou au moins d'ungenre.
Les feuilles de certainslégumes, tel lenavet, sont appelés « fanes » ; d'autres feuilles comestibles sont desbrèdes.
Lefeuillage est constitué par l'ensemble des feuilles d'un arbre.
La figure 1 montre les différentes parties de la feuille : unlimbe plan (a) parcouru denervures (b), avec souvent unpétiole (c) qui rattache la feuille à la tige, parfois élargi engaine (d). Celle-ci peut« embrasser » la tige comme chez lespoacées. Le pétiole peut être absent, la feuille est alors dite sessile. Il peut parfois être ailé, ou muni à sa base destipules plus ou moins développés.Au point d'insertion du pétiole et de la tige, se trouve unbourgeon axillaire.
À la différence du reste de l'appareil végétatif de la plante (racine ettige), la feuille présente en général une symétrie bilatérale et non axiale.
La feuille est dite simple si le limbe est entier, ou composée s'il est découpé en plusieurs petites feuilles : lesfolioles. Selon la disposition des folioles sur l'axe principal de la feuille ourachis, il est dit que la feuille est :
pennée, si les folioles sont disposées comme les barbes d'une plume ;
imparipennée si leur nombre est impair (il y a une foliole terminale) ;
palmée oudigitée si elles sont disposées comme les doigts de la main. Cependant lespalmes, feuilles dupalmier, qui sont en fait des feuilles entières (Chamaedorea metallica), qui ont parfois une formepennée en forme de plume (dattier), ou encorecostapalmée (Sabal palmetto) si la structure est intermédiaire entre la forme palmée et pennée (soit l'aspect général d'un éventail mais avec un axe central assez marqué);
pédalée si chaque foliole est insérée sur la foliole voisine (hellébore) ;
La feuille peut être doublement composée ;
bipennée si les folioles sont composées defoliolules, c'est le cas des palmiersCaryota ;
tripennée si les folioles sont elles-mêmes composées.
La forme de la feuille (fig. 2) :
cordiforme, en forme decœur (a) ;
ovale (b) ;
lancéolée (c) ;
palmée, en forme de paume (de main).
Les formes sont très diversifiées :
falciforme (en forme de faux) ;
auriculée (avec des oreillettes à la base du limbe :laiteron) ;
sagittée (en forme de flèche) ;
peltée (lorsque le pétiole s'insère au milieu du limbe :capucine,taro) ;
décurrente le limbe se prolonge sur la tige par des ailes (ex. :bouillon blanc) ;
perfoliée quand les oreillettes se soudent donnant l'impression que la tige traverse le limbe ;
connée quand deux feuilles opposées sont soudées par le limbe (chèvrefeuille) ;
Le limbe peut être uni ou entier (comme fig. 1 et 2) ou plus ou moins profondément découpé (fig. 4). Dans ce dernier cas (fig.4), la feuille peut être :
lobée (a), lorsque les lobes sont peu profonds et atteignent environ 1/8 de la largeur de la feuille,pennatilobée (b), lorsque les lobes sont disposés en peigne,palmatilobée lorsque les lobes ont une disposition palmée.
pennatifide oupalmatifide, lorsque les divisions atteignent 1/4 de la largeur de la feuille et en tout cas moins de la moitié de celle-ci ;
pennatipartite (c), oupalmatipartite lorsque les découpures dépassent le milieu de la feuille ;
pennatiséquée (synonyme de composé pennée) oupalmatiséquée (composée palmée) si les divisions atteignent le rachis ;
laciniée si le limbe est divisé en lanières étroites (plantes aquatiques).
Le bord du limbe (ou la marge) peut êtreuni ouentier (fig. 1 et 2),ondulé,sinué,scié (fig. 3a),serrulé (finement scié),denté (fig. 3b) oucrénelé (fig. 3c).
opposées et disposées à angle droit par rapport au nœud précédent ou suivant (exemple :lamier blanc)
Organisation spontanée desbranches et des feuilles, en « nappes » optimisant par le dessus le captage de l'énergie solaire, et par le dessous avec laréverbération sur l'eau, caractéristique desripisylves.
Au sein d'une même espèce (chez les arbres notamment), les feuilles et les branches peuvent s'agencer de manière différente selon leur position dans l'arbre et leur exposition à la lumière. Ce phénomène participe de la morphologie générale des arbres, propre à chaque espèce.
Les feuilles excitées par levent font scintiller et murmurer le feuillage. Les plantessciaphiles desous-bois et de forêts qui présentent généralement unindice foliaire élevé, donc un ombrage mutuel des feuilles très important, ont un feuillage qui forme un couvert discontinu, avec des trouées et destaches de soleil. Elles sont certainement adaptées à l'utilisation optimale des taches de soleil par le feuillage au vent, la disposition des feuilles et l'ouverture différentielle desstomates[1],[2]. Cette optimisation de la photosynthèse évite de saturer les feuilles de la partie supérieure de la canopée et de maintenir les feuilles de la partie inférieure dans l’ombre[3].
La forme des feuilles peut varier sur une même plante, c'est ce que l'on appelle l'hétérophyllie.C'est un phénomène assez courant dans le règne végétal.
C'est le cas chez lelierre grimpant où la forme des feuilles provenant de rameaux fertiles est différente de celle des feuilles appartenant aux rameaux stériles (polymorphisme vrai).
Le polymorphisme peut aussi résulter des conditions environnementales : chez lasagittaire à feuilles en flèche les feuilles immergées sont rubanées, les feuilles nageantes sont cordiformes, les feuilles aériennes sagittées.
Lescotylédons et les feuilles juvéniles qui leur succèdent immédiatement peuvent fréquemment être différentes de celles de l'âge adulte.
Plus généralement chez de nombreux végétaux, on retrouve des feuilles différentes (taille, forme) en fonction de la position de celles-ci sur l'individu. C'est par exemple le cas chezMorus alba.
Les plantesaphylles sont marquées par une forte réduction de la taille des feuilles, voire leur quasi-disparition ou leur disparition totale. À l'opposé, les grands pommiers ont de 50 à 100 000 feuilles, lesbouleaux 200 000 en moyenne, les chênes à maturité 700 000 (mises côte à côte, ces 700 000 feuilles couvriraient une surface de 700 m2). Certainsormes d'Amérique ont à leur maturité jusqu'à cinq millions de feuilles. On estime que l'ensemble des feuilles des arbres du monde entier produisent parphotosynthèse 65 000 à 80 000 millions de m3 dematière sèche par an, ce qui correspond aux deux tiers de la production mondiale desplantes terrestres[4].
La coloration principale verte provient de la chlorophylle. Les feuillesjuvéniles présentent parfois une teinte rougeâtre car le jeune tissu contient desanthocyanes de jeunesse, pigments bloquant les rayons ultraviolets, ce qui protège les petites feuilles des dommages de laphoto-oxydation[5]. Lechangement de couleur des feuilles montre l'existence de pigments complémentaires, lescaroténoïdes, qui participent à la collecte des photons aux côtés desphotosystèmes chlorophylliens. Les grandes variations dans la coloration des feuilles,pétioles et tiges, sans compter les fleurs et les fruits, ont une fonctionaposématique : elles annulent le camouflage potentiel (i.e. l'homochromie) de certains insectes envers les oiseaux, par exemple[6].
L'observation à l'œil nu d'une feuille éclairée sous différents angles par le soleil laisse apparaître des taches brillantes blanches sur un fond vert. Cet effet optique, dû à laréflexion spéculaire de la lumière visible à la surface foliaire indépendante de lalongueur d'onde, est plus ou moins marqué selon les espèces : certaines feuilles recouvertes d'une épaisse couche de cire apparaissent luisantes alors que d'autres tapissées de poils semblent plus ternes[7].
La feuille s'avère un critère relativement fiable pour identifier uneplante ligneuse inconnue (arbre, arbrisseau ou grimpant ligneux).
Récemment en 2020, Régis Petit a proposé une méthode d'identification des arbres principalement par leurs feuilles. Les 8 critères principaux sont les suivants :
plante (port) : arbre, arbrisseau ou grimpant ligneux ;
feuilles (disposition sur tige) : isolées alternées, isolées opposées, groupées gainées ou groupées touffées ;
feuille plate (squelette) : palmé ou penné ;
feuille plate (bord) : denté ou lisse ;
feuille plate (forme) : cœur, ronde, ovale, triangulaire/losangique, lancéolée, lobée ou à foliole composée.
Régis Petit a classé selon ces critères les 300 plantes ligneuses d'Europe les plus communes. Cette base de données est accessible gratuitement en ligne sous forme d'un fichier Excel multi-critères. L'identification d'une plante ligneuse inconnue en est ainsi facilitée (voir site référencé en Liens externes).
Lepanachage des feuilles dans les strates inférieures des forêts tropicales serait unestratégiede défense contre les herbivores[8].Phénomène deconvergence évolutive en milieu tropical, les feuilles développent unecuticule épaissie qui a plus decire épicuticulaire (effet lotus qui fait glisser les gouttes d'eau), d'où leur aspect vernissé, ainsi que des bords très lisses et unenervure centrale se prolongeant par unacumen favorisant l'écoulement des eaux de pluie qui, en leur absence, briseraient les branches sous leur poids[9].Piqûres de nutrition de lamouche du houx et ancienne mine de sa larve. L'épiderme déchiré marque certainement le trou de bec de lamésange bleue, principale espèce prédatrice de la larve, qui entend le bruit qu'elle fait lorsqu'elle s'agite dans sa loge.Feuille attaquée par des larves deDoryphore.
La fonction première des feuilles est laphotosynthèsechlorophyllienne[10]. L'évolution des feuilles en organes de la photosynthèse s'est réalisée selon trois axes principaux[11] : l’exploitation de la lumière grâce aulimbe plat qui présente une grandesurface réceptrice[12], ce qui en fait un capteur solaire efficace[13] ; l’échange de gaz (CO2, O2 etévaporation d'H2O[14]) ; le transport de lasève brute et de lasève élaborée via un réseau très étendu denervures. Selon le principe de l'allocation des ressources, les relations entre différentstraits foliaires (forme, nervation, longueur du pétiole) reflètent l'existence decompromis évolutifs associés à des contraintes structurales et fonctionnelles des plantes en relation avec leurécologie[15].
Chez les plantes terrestres, les racines sont de loin la première source de nutriments (et parfois de contamination), mais les feuilles peuvent aussi absorber des nutriments autres que le CO2, voire le cas échéant des produits toxiques (ex : molécules de certains pesticides systémiques, particules métalliques fines et ultrafines issues de la pollution de l'air, dontmétaux lourds et desmétalloïdes) déposés à partir de l'air ou des pluies[16]. Ce transfert, qui semble se faire lentement au travers de lacuticule et/ou plus rapidement via lesstomates est parfois un facteur déterminant du transfert des métaux de l'air vers la plante (Ceci a notamment été montré pour leplomb qui après s'être déposé sur les feuilles, est retrouvé dans les cellules situées sous la surface de la feuille)[17]. La morphologie des feuilles est l'un des facteurs qui favorise ou non le dépôt puis l'adsorption ou l'absorption et l'internalisation des particules atmosphériques. Il peut poser des problèmes desanté environnementale par exemple quand il concerne deslégumes ou autrescultures alimentaires humaine ou à destination animale (fourrages...), surtout si le toxique est principalement stocké dans les partiescomestibles (feuilles,fruits,graines,tubercules...). Bien comprendre ces processus est important pour le développement de l'agriculture urbaine (ou en zone polluée)[17]
Les feuilles présentent toute une variété de spécialisation[18], dont par exemple :
chez de nombreusesplantes aquatiques, les feuilles absorbent les nutriments dissous dans l'eau, parfois plus que les racines qui servent principalement à l'ancrage ;
chez les plantes épineuses, les feuilles sont souvent transformées enépines issues de la modification des folioles, ou desstipules, ou simplement des poils. Comme les plantesxérophiles, il s'agit d'un mécanisme de défense contre la sécheresse, ou bien de défense contre le broutage des animauxherbivores. Certaines épines très fines, ainsi que des cils, permettent à la plante de collecter de larosée (effet de pointe) ;
chez les plantes carnivores, elles prennent des formes très spécialisées, enurne chez lesNepenthes, en piège chez lesDionées qui ont un limbe en deux parties munies d'aiguillons et capables de se replier l'une sur l'autre pour emprisonner des insectes ;
chez les plantes grasses ou succulentes, les feuilles sont souvent transformées en organes de réserves ;
chez les plantes grimpantes, les feuilles ou les folioles se transforment envrilles leur permettant de s'accrocher à leur support. Parfois c'est lepétiole qui remplit cette fonction (Clématite) ;
chez les plantes aquatiques, les feuilles peuvent se transformer en flotteurs (Jacinthe d'eau) ;
chez les plantesxérophiles (adaptées à lasécheresse), les feuilles peuvent se réduire à des écailles (elles sont dites « squamiformes ») ouaiguilles (conifères). La plante diminue sa surface foliaire afin de limiter l'évapotranspiration. Ainsi lechêne vert peut avoir plusieurs formes de feuilles : en milieu favorable, où l'humidité de l'air n'est pas limitante, il aura des feuilles à limbe presque ovale, tandis qu'en milieu sec, les feuilles seront pour la plupart dentées.
chez lesépiphytes, certaines espèces se servent de leurs feuilles pour collecter et stocker de l'eau (Broméliacées par exemple)
Le lycopodeIsoetes porte des feuilles simples ayant une seule nervure.Les ramifications des nervures des feuilles composées trahissent peut-être une origine sous forme de branches.Limbe foliaire à nervation pennée. Cette architecture des feuilles apparut probablement de nombreuses fois chez les plantes
Il est possible qu'avant l'évolution des feuilles, les plantes aient développé laphotosynthèse dans leurstiges[note 2]. Les feuilles, actuellement, sont dans presque tous les cas une adaptation destinée à accroitre la quantité de lumière solaire utilisable pour la photosynthèse. La dichotomiemicrophylle/mégaphylle est aujourd'hui abandonnée pour expliquer l'histoire évolutive des feuilles qui sont certainement apparues une dizaine de fois indépendamment, et étaient probablement à l'origine des excroissances épineuses destinées à protéger les plantes primitives contre les herbivores[note 3], ce qui en ferait un exemple d'exaptation[19].
Leschampignons endophytes sont une règle générale chez les feuilles (notion de mycophylle, feuille à endophyte fongique), cette stratégie symbiotique ayant certainement joué un rôle majeur dans le développement des feuilles au cours de l'évolution (rôle encore mal compris : amélioration de la résistance au stress hydrique, augmentation de la croissance et de la teneur en azote, réduction du broutage par les herbivores ?)[20].
Les feuilles sont actuellement les organes primaires de la photosynthèse chez les plantes. Elles sont classées en deux types : les feuilles simples, irriguées par une seule nervure et le plus souvent petites, et les feuilles composées, plus grandes et ayant unenervation complexe. Il a été suggéré que ces structures soient apparues indépendamment[21]. Les feuilles composées, selon lathéorie du télome, auraient évolué à partir de branches présentant une architecture tridimensionnelle, à travers trois transformations : laplanation, « aplatissant » cette architecture ; letissage, formant des réseaux entre ces branches, et lafusion, regroupant ces réseaux pour former unlimbe complet. Ces trois étapes auraient eu lieu à de multiples reprises dans l'évolution des feuilles modernes[22].
Les feuilles composées modernes sont probablement devenues majoritaires il y a 360 millions d'années, environ 40 millions d'années après la colonisation des terres auDévonien inférieur par des plantes dépourvues de feuilles[23].
Cette évolution a été liée à la diminution de concentration du CO2 atmosphérique à la fin duPaléozoïque, elle-même associée à une augmentation de la densité desstomates à la surface des feuilles pour capter plus de CO2, ce qui assurait une meilleureévapotranspiration, et des échanges gazeux accrus[24]. La photosynthèse consommant moins de 5 % de l'eau apportée par lasève brute, les 95 % restant qui s'évapore favorisait un meilleur refroidissement des feuilles et leur permettait ainsi d'acquérir une plus grande surface[25],[26].
Lesrhyniophytes de laflore de Rhynie n'étaient formés que de tiges minces et sans ornements. Aussi, lestrimérophytes(en) du Dévonien moyen sont les premières plantes à présenter un aspect que l'on puisse qualifier de « feuillu ». Lesplantes vasculaires de ce groupe se reconnaissent à des masses desporanges situées à leurs extrémités, lesquelles peuvent bifurquer ou trifurquer[27]. Certainsmicrophylles pourraient être ainsi deshomologues de ces sporanges devenus stériles[28]. Certains organismes, tels quePsilophyton(en), portent desénations, de petites excroissances de la tige, épineuses ou poilues et dépourvues de vascularisation.
À peu près à la même époque, leszostérophyllophytes prenaient de l'importance. Ce groupe est reconnaissable à des sporanges en forme de rein, poussant sur de courtes branches latérales, à proximité de la tige principale, parfois ramifiées dans des formes en H caractéristiques[27]. La majorité des plantes de ce groupe portaient des épines sur leurs tiges, mais elles n'étaient pas vascularisées. Les premières traces d'énations vascularisées se trouvent dans le genreAsteroxylon. Les épines d'Asteroxylon présentent des traces de vaisseaux partant duprotostèle central et allant irriguer chaque « feuille » individuelle. Un fossile connu sous le nom deBaragwanathia apparait un peu plus tôt, auSilurien supérieur[29] ; dans cet organisme, ces traces de vaisseaux continuent jusqu'au milieu de la feuille[30]. Lathéorie des énations soutient que les feuilles de typemicrophylle se sont développées comme des excroissances du protostèle se reliant à des énations déjà existantes, mais il est également possible que les feuilles simples aient évolué à partir de tiges se ramifiant et formant un réseau[27].
Asteroxylon[31] etBaragwanathia sont généralement considérés comme deslycopodes primitifs[27]. Les lycopodes existent toujours aujourd'hui (par exemple l’Isoète) ; ces lycopodes modernes portent des feuilles simples. Elles pouvaient être assez grandes – lesLepidodendrales avaient des feuilles simples de plus d'un mètre de long – mais elles sont presque toutes irriguées par un seul vaisseau, à l'exception de la ramification observée chezSelaginella.
Les feuilles composées ont sans doute des origines séparées ; elles sont de fait apparues indépendamment à quatre reprises, chez les fougères, les prèles, lesprogymnospermes et les plantes à graines[32]. Elles semblent provenir de branches ramifiées, qui se sont d'abord chevauchées, puis reliées entre elles, jusqu'à évoluer vers la structure typique d'unlimbe foliaire[30]. Cette théorie desmégaphylles explique pourquoi la « lacune foliaire » laissée lorsque lepétiole se sépare de la branche ressemble à une ramification[30]. Dans chacun des quatre groupes où sont apparues des feuilles composées, ces feuilles ont subi une évolution rapide entre la fin du Dévonien et le début du Carbonifère, se diversifiant jusqu'à ce que les formes se stabilisent au milieu du Carbonifère[32].
La fin de cette diversification peut être attribuée à des contraintes de développement[32] mais une question reste ouverte : pourquoi les feuilles ont-elles mis si longtemps à apparaître ? Les plantes avaient conquis le sol depuis au moins 50 millions d'années avant que les feuilles composées apparaissent de manière significative. Cependant, de petites feuilles composées étaient déjà présentes dans le genreEophyllophyton(en) au début du Dévonien – ce n'est donc pas en soi leur complexité qui explique le temps écoulé avant leur généralisation[33]. La meilleure explication donnée jusqu'à présent est que le taux de CO2 atmosphérique diminuait rapidement à cette époque – divisé par 10 durant le Dévonien[34]. Ceci est en relation avec une multiplication par 100 de la densité des stomates. Les stomates permettent à l'eau de s'évaporer des feuilles ; la faible densité des stomates au début du Dévonien avait pour conséquence que des feuilles trop grandes se seraient échauffées, et cette densité ne pouvait augmenter, car les tiges et les systèmes de racines primitifs ne pouvaient apporter d'eau assez vite pour soutenir un rythme d'évapotranspiration accru[35].
Les arbres à feuillagecaduc sont une réponse à un autre inconvénient des feuilles. La croyance populaire selon laquelle c'est une adaptation au raccourcissement des jours en hiver est erronée : des arbres àfeuillage persistant prospéraient au-delà descercles polaires durant lapériode chaude de la fin duPaléocène[36]. La raison de la perte des feuilles en hiver la plus souvent retenue est la protection contre le vent et la neige, cette perte diminuant la surface totale de l'arbre. Ce mécanisme de perte saisonnière est apparu à plusieurs reprises, et se présente actuellement chez lesginkgoales, lespinophyta et les angiospermes[37]. Il est possible également que ce mécanisme soit une réponse à la pression des insectes : il est peut-être moins coûteux d'abandonner entièrement les feuilles en hiver que de continuer à investir des ressources dans leur réparation[38].
Extrémité d'une feuille d'élodée du Canada montrant la veine centrale et les cellules remplies dechloroplastes. L'image est une pile focale capturée en microscopie à lumière polarisée compensée (voirBiréfringence). Grossissement x100. Octobre 2021.
Lepétiole (du latinpetiolus : petit pied) est le pédoncule de la feuille, reliant son limbe à la tige. Ses faisceaux conducteurs présentent une symétrie bilatérale, ce qui indique la nature foliaire et non caulinaire du pétiole. Lorsqu'il est élargi jusqu'à remplacer la feuille dans sa fonction, il est question dephyllode. Une feuille sans pétiole, ou à pétiole très court, est dite sessile.
Quelques pétioles ont des fonctions spécifiques : chez lasensitive, il permet le mouvement des feuilles ; chez lachâtaigne d'eau, il permet la flottaison de la plante.
Lesnervures d'une feuille sont les prolongements du pétiole dans le limbe foliaire. La nervure principale et les nervures secondaires partent de la première. C'est au niveau des nervures, se détachant par leur relief bombé du reste du limbe, que se situent l'essentiel des tissus conducteurs de sève (xylème etphloème), organisés en faisceaux.
La disposition des nervures (ou nervation) varie selon les espèces ou les familles. Il existe trois grands types de nervation :
les feuilles à nervation pennée (penninerves), dans laquelle une nervure principale, prolongeant lepétiole, partage le limbe en deux parties sensiblement identiques selon l'axe de symétrie et à partir de laquelle les nervures secondaires se détachent selon une disposition alterne ou opposée ;
les feuilles à nervation palmée (palmatinerves) où plusieurs nervures, en nombre impair, se détachent du pétiole au point de contact avec le limbe (exemple : lafeuille de vigne) ;
et les feuilles à nervation parallèle (parallélinerves), dont les nervures sont parallèles, sans anastomoses entre elles. C'est le cas de la plupart des graminées (Poaceae), dont les feuilles sont généralement sans pétiole.
L'épiderme protecteur recouvre les surfaces supérieure et inférieure du limbe (appelées aussi facesadaxiale et abaxiale) ; il est constitué le plus souvent par une couche unique de cellules ne comportant généralement pas dechloroplastes, parfois couverte par une couche protectrice externe, lacuticule. Certaines cellules de l'épiderme peuvent se transformer en poils. Sur l'épiderme inférieur se trouvent lesstomates. Ce sont des sortes de pores, formé par deux cellules en forme de reins, qui laissent entre elles une ouverture variable, l'ostiole.
Lemésophylle, ou parenchyme foliaire, comporte deux couches : sous l'épiderme supérieur, unparenchyme palissadique, tissu formé de plusieurs rangées de cellules allongées perpendiculairement à la surface du limbe et serrées entre elles, sans lacunes. Entre celui-ci et l'épiderme inférieur unparenchyme lacuneux, à cellules plus grandes ménageant entre elles un réseau de lacunes, qui communique avec les stomates et assure les échanges gazeux avec l'extérieur.
Diagramme de l'anatomie de la feuille avec épiderme inférieur et supérieur.
L'épiderme est la couche de cellules externes des feuilles. Cette couche est généralement transparente (ces cellules n'ont pas dechloroplastes) et couverte par unecuticule d'aspect cireux permettant de limiter les pertes en eau lors de trop fortes chaleurs. Chez les végétaux des climats secs cette cuticule est donc plus épaisse. La cuticule est parfois plus fine sur l'épiderme inférieur que sur l'épiderme supérieur.
L'épiderme inférieur est percé de pores appelésstomates. Ceux-ci permettent à l'oxygène et audioxyde de carbone de rentrer et sortir des feuilles. La vapeur d'eau est aussi évacuée par les stomates au cours de la transpiration. Pour conserver de l'eau, les stomates peuvent se fermer pendant la nuit.
Des poils recouvrent l'épiderme de nombreuses espèces de plantes.
La plus grande partie de l'intérieur d'une feuille, entre l'épiderme inférieur et supérieur, est composée d'un parenchyme appelémésophylle. Ce tissu joue un rôle très important dans laphotosynthèse.
Diagramme de l'anatomie de la feuille avec son mésophylle.
Le mésophylle est composé de deux parties : vers la face supérieure, le parenchyme palissadique est constitué de cellules verticales, allongées et serrées, riches enchloroplastes : c'est dans ce parenchyme que se déroule l'essentiel de la photosynthèse. Vers la face inférieure se trouve le parenchyme lacuneux (ou spongieux), aux cellules plus arrondies et moins serrées. Les lacunes entre ces cellules contiennent les gaz échangés entre la feuille et l'atmosphère.
Chez lesmonocotyledones le mésophylle est homogène. Il est composé d'un parenchyme uniforme.
Les feuilles peuvent êtrepersistantes (conservation du feuillage plusieurs années[39]), semi-persistantes (conservation de la majorité des feuilles bien que certaines soient remplacées à la belle saison) oucaduc (les feuilles de la plante ne durent que quelques mois puis tombent ; variante :marcescence) selon les espèces, les conditions climatiques et les saisons. Pour les végétaux non persistants, l'apparition des feuilles est appelé « feuillaison » ou « foliaison ».
La chute du feuillage caduc en automne s’accompagne d'un changement de couleurs variant du jaune au brun rouge et au rouge. En Amérique du Nord, lasaison des couleurs génère une grande activité touristique surtout enNouvelle-Angleterre et dans l'est du Canada.
En novembre 2010, des chercheurs ont avancé l'hypothèse selon laquelle les écosystèmes boisés feuillus seraient capables de mieux dépolluer l’air que ce qui était initialement pensé, pour lescomposés organiques volatils (COV) testés. Les expériences faites en laboratoire laissent penser que les feuilles absorbent même encore plus efficacement les COV et les détruisent (parconversion enzymatique) quand elles sont stressées par des blessures ou par certains polluants (de l'ozone et duméthyl vinyl cétone lors des expériences). Le cycle des COV oxygénés dans l'air devrait donc être revu et mieux incorporé dans les modèles globaux de chimie de l'atmosphère et de transport des polluants[40].
↑Les feuilles et les pétales sont très minces (moins d’un millimètre). Contenant 90 % d'eau, elles devraient être translucides voire transparentes mais les lacunes aérifères facilitent la transmission du rayonnement vert. CfMarc-André Selosse,Petites histoires naturelles. Chroniques du vivant,Actes Sud Nature,,p. 163
↑Celle-ci est aussi assurée, dans une proportion moindre, par la tige, qui est généralement verte, et dont leparenchyme comporte deschloroplastes. Un bon exemple est leGenêt à balais, chez qui toute la tige est dite photosynthétique.
↑William G. Hopkins,Physiologie végétale, De Boeck Supérieur,(lire en ligne),p. 143
Allen J. Coombes, Zsolt Debreczy,The book of leaves, The University of Chicago Press, The Ivy Press limited, 2010, accessible en français par la traduction et l'adaptation de Jérôme Goutier, sous le titre générique assez curieuxArbres. L'encyclopédie des 600 plus beaux arbres du monde, Flammarion, Paris, 2011,(ISBN978-2-0812-5806-8)