Feta ouFéta (engrec moderne :φέτα) désigne unfromagecaillé ensaumure originaire deGrèce. Le nom de ce fromage est un emprunt à l’italien « fetta » (tranche) qui daterait duXVIIe siècle. L’appellation « feta » associée au fromage est attestée auXIXe siècle. Elle caractérise un fromage produit selon des techniques précises. Ce type de fromage est traditionnellement fabriqué à partir delait de brebis, parfois en association avec dulait de chèvre.
Les fromages blancs en saumure, dont la feta est l’une des variétés, existent probablement depuis des millénaires. Ils sont traditionnellement produits desBalkans aux confins de laTurquie actuelle[2],[3]. Certains situent l’origine de ce fromage sur le territoire de l’actuelleBulgarie ou enMacédoine mais il semble impossible de l’affirmer concrètement[4].
Dans les œuvres de l’antiquité grecque, on trouve de nombreuses références à un fromage, comme dans le chant IX de l'Odyssée[5]. Le cyclopePolyphème passe même pour être un des premiers producteurs de fromage[6]. Après avoir trait ses brebis, il mit le lait dans une outre en peau d’animal et réalisa quelques jours plus tard, que le lait était devenu une masse solide, savoureuse et préservable. Cependant, il est impossible de savoir avec précision à quel type de production il est fait référence ici[2].
Le fromage caillé en saumure n’est réellement attesté qu’à l’époque byzantine, sous le terme de « prosphatos » (πρόσφατος), et est alors principalement associé à laCrète. Un visiteur italien àCandie, en1494, décrit très clairement son stockage dans la saumure[7].
Le mot « feta » est un emprunt à l’italienfetta (« tranche »)[8] qui date duXVIIe siècle, et qui est vraisemblablement dû à la façon de couper le fromage en tranches. La première mention écrite connue du motfeta date duXIXe siècle, dans le magasin de l’usurier Grec, Stefanos D. Rigas, originaire de l’île deSyros[9].
À partir desannées 1930, une production de fromages se nommant également « feta » commence à se développer en dehors de Grèce, et plus particulièrement, après lesannées 1960, avec l’apparition d’une importante industrie de la « feta » au Danemark, en France et enAllemagne. À la fin duXXe siècle, les fromages s’assimilant à lafeta sont produits dans le monde entier, de l’Iran à l’Australie en passant par l’Afrique de l’Est[10].
Le mot « feta » est protégé pour la première fois par une convention signée le entre la république d’Autriche et le royaume de Grèce ; convention qui vise à protéger les indications de provenance, d’origine et les appellations des produits agricoles, artisanaux et industriels. Dans cette convention, il n’est pas précisé à partir de quel type de lait la feta peut être produite. En 1981, quand la Grèce entre dans la Communauté Européenne, le nom feta n’est pas protégé par la loi. Entre 1987 et 1994, la Grèce adopte des lois à portée nationale permettant de réguler la production et la vente de la feta. Ces lois excluent le recours au lait de vache pour produire la feta et définissent des zones géographiques de production de la feta[2].
À partir de 1994 s’engage une bataille juridique en Europe pour déterminer si l’appellation feta peut être protégée ou si elle est au contraire devenue générique. Une décision définitive en faveur de la protection de l’appellation feta est finalement prise en 2002, accorde à la Grèce la protection de l’appellation feta et fixe les règles permettant d’obtenir cette appellation[11]. Enjuillet 2022, laCour de Justice de l'Union européenne confirme que la protection accordée à la feta grecque s'applique également aux produits destinés à l'exportation hors de l'Europe, réfutant ainsi les pratiques de certains producteurs danois qui vendaient leur fromage dans des pays extra-européens sous l’appellation « feta »[12].
En Grèce, la feta est traditionnellement produite de janvier à mai dans des fermes ou de petites laiteries à partir de lait cru, sans additif. Dans les usines, la feta est produite à partir de lait pasteurisé additionné deyaourt frais[13].
En Grèce, la feta est confectionnée à partir de lait de brebis, ou en combinaison avec du lait de chèvre (le lait de chèvre doit alors représenter au maximum 30 % du total). La « feta » produite par l’Allemagne et le Danemark était le plus souvent confectionnée à partir de lait de vache. Dans ce dernier cas, le lait de vache est filtré par un procédé spécifique, qui a un coût moindre que la méthode traditionnelle de filtrage dans un tissu[3].
Valeurs depH, d’humidité et de concentration en sel pendant le mûrissement de la Feta
À partir duXIXe siècle, le motfeta désigne, en Grèce, le fromage produit à partir de lait de brebis ou d’un mélange de lait de brebis et de lait de chèvre, en utilisant des méthodes traditionnelles de coagulation du lait[3]. D’autres pays, en particulier dans les Balkans et dans le bassin oriental de la Méditerranée, produisent des fromages analogues à la feta : leTelemea enRoumanie, leBjalo Salamureno Sirene enBulgarie, leBeyaz peynir enTurquie, leHalloumi àChypre, leDomiati enÉgypte, l’Akkavi enSyrie et auLiban ou encore leBeli sir u kriskama dans l’ex-Yougoslavie.
Lafeta est le plus connu des fromages en saumure ; cette reconnaissance internationale étant due à l’émigration des Grecs, qui ont amené avec eux leurs coutumes culinaires dans divers pays[2].
Selon un rapport de l’administration américaine publié en 2005, la demande mondiale de feta représente 450 000 tonnes par an, dont 250 000 sont produites en Grèce[17].
La production de feta a débuté dans lesannées 1930 au Danemark et en France. La production allemande a débuté en1972[1].
Avant 2002, l’Allemagne, le Danemark et la France fabriquaient 10 % de la feta communautaire[19]. Chiffre contesté, par le transformateur industriel françaisLactalis qui estime la part de la Grèce dans la fabrication communautaire de feta à 57,5 %[20]. Toujours selon Lactalis, la part de la Grèce dans la fabrication mondiale de feta serait de 28,75 %. Cette bataille de chiffres vient du fait que le groupe français intègre, dans la fabrication communautaire et extracommunautaire de feta, la « feta » au lait de vache.
La feta est également produite en dehors de l’Union européenne, l’appellation n’étant pas protégée en dehors des États-membres. Les pays producteurs de feta, hors Union européenne, sont, par exemple, l’Australie, leCanada ou lesÉtats-Unis.
Bruce A. Babcock souligne que pour les Américains, « feta » désigne un type de fromage granuleux, salé et généralement utilisé dans des plats grecs. La feta américaine est majoritairement produite dans leWisconsin à partir de lait de vache[25]. La production annuelle de feta aux États-Unis est de 45 000 tonnes. Au Canada, la production annuelle de feta s’élève à 4 000 tonnes[26].
Le, une dénomination d’origine « feta » est créée et protégée en Grèce. Le 21 janvier de la même année, l’administration grecque demande que le nom « feta » devienne uneAppellation d'origine protégée conformément au règlement européen 2081/92, adopté deux ans plus tôt par la Communauté Européenne. La commission chargée d’examiner cette demande établit d’abord que ce nom n’est pas devenu générique, grâce à un sondage qui établit que le mot feta est bien associé par les consommateurs européens à une origine grecque. La commission décide le (règlement N° 1107/96) d’accorder la protection à l’appellation feta, ainsi qu’à dix-neuf autres fromages grecs. En réaction, le Danemark, l’Allemagne et la France, qui produisent des quantités importantes de ce type de fromage sous le nom feta, saisissent la cour de justice des communautés européennes pour annuler l’appellation d’origine protégée établie par la Grèce. Les arguments des trois plaignants sont que la feta ne satisfait pas les conditions nécessaires établies par le règlement européen de 1992 sur les AOP, et que le nom feta est devenu générique. En 1999, la CJCE décide d’annuler l’AOP de la feta parce que la commission n’aurait pas suffisamment examiné les conditions requises par le règlement européen 2081/92. À partir de cette décision de justice, l’appellation feta redevient donc libre en Europe, sauf entre l’Autriche et la Grèce, dont l’accord bilatéral de 1972 est toujours valable[2].
LaCommission européenne ordonne l’ouverture d’une nouvelle enquête scientifique qui aboutit, le, à la réintégration de la feta dans le tableau des AOP en tant que produit grec (règlement européen N°1829/2002). La commission scientifique chargée de réexaminer le dossier de la feta a rassemblé toutes les données sur la production et la consommation de la feta en Europe, afin de déterminer si l’appellation feta était générique ou non. Les recherches de la commission ont montré que l’appellation feta « n’était pas utilisée comme un nom commun synonyme defromage blanc en saumure. Le soin avec lequel les opérateurs [de ce marché] évoquent le pays d’origine et s’efforcent d’éviter la confusion alors qu’ils utilisent la désignation est significatif. Dans la perception des consommateurs, le nom feta évoque toujours une origine grecque et n’est donc pas devenu un nom commun et générique dans la communauté […][1]. »
L’Allemagne et le Danemark (parties requérantes) tentent de faire annuler cette décision. L’épilogue de cette saga juridique se déroule le, lorsqu’est confirmée la décision de 2002. Avec ce règlement, les seuls fromages qui ont droit à l’appellation feta sont ceux « produits en Grèce continentale ainsi que le département de Lesbos, […] le lait servant à l’élaboration de la feta doit provenir de brebis et chèvres de races locales élevées traditionnellement et dont l’alimentation doit se fonder impérativement sur la flore présente dans les aires de pâturage des régions éligibles[1]. »
Les industriels laitiers des pays membres des communautés européennes utilisant le terme « feta » avaient jusqu’à pour éliminer le mot « feta » de leur étiquetage.
Cependant, le règlement européen n’ayant qu’une portée européenne, plusieurs pays membres de l’OMC considèrent encore que le mot « feta » est générique[28]. Les États membres de l’UE avaient toutefois l’intention de défendre les indications d’origine de l’Europe (les AOP) durant lecycle de Doha face aux autres membres de l’OMC[29].
La version du 29 novembre 2007 de cet article a été reconnue comme « bon article », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.