Beaucoup d’extrémophiles appartiennent autaxon desArchaea ou desBactéries et bien qu'il existe aussi des extrémophileseucaryotes unicellulaires etmétazoaires, (insectes,crustacés, poissons…), on réserve toutefois l'usage de ce terme pour les organismes unicellulaires.
Parfaitement adaptés à ces conditions très spéciales, les extrémophiles sont rares dans les conditions plus ordinaires. En effet, même lorsqu'ils sont capables de supporter ces conditions (car dans bien des cas leurmétabolisme spécial nécessite les conditions extrêmes), ils supportent mal la concurrence d'organismes banals. Il arrive que l'on distingueextrémophile etextrémotolérant, selon que l'organisme a besoin des conditions exceptionnelles, ou bien qu'il les supporte mais qu'on le trouve dans des conditions plus ordinaires.
Il faut bien distinguer le cas des extrémophiles-vrais (qui vivent normalement ou exclusivement en conditions extrêmes), des cas relativement banals d'organismes capables de provisoirement prendre une forme résistante aux conditions défavorables (en suspendant leurs fonctions vitales, en se protégeant par la formation d'unkyste ou d'unespore). Certaines bactéries commeDeinococcus radiodurans sont capables de s'autoréparer en conditions extrêmes, mais ne les exigent pas pour vivre.
Psychrophile oupsychrotolérant : organisme vivant dans des environnements froids (abysses, glaciers, voire réfrigérateur où ils peuvent affecter l'hygiène alimentaire en rendant moins efficace la chaine du froid).
Piézophile oubarophile : organisme vivant dans des environnements soumis à des pressions élevées (fonds océaniques profonds jusqu'à −11 000 mètres ;fosse des Mariannes)
Radiorésistant : organisme pouvant survivre à des radiations ionisantes élevées.
Thermophile : organisme vivant dans des environnements chauds avec des optimums de croissance proche de60 °C.
Les extrémophiles sont un sujet d'étonnement et d'étude à plusieurs titres :
Leurs particularités offrent des perspectives technologiques variées (protéinesthermostables, enzymes de lessives à l'eau froide, par exemple) et un vaste champ d'études biologiques. Lesprotéines etenzymes extrêmes constituent un marché en plein essor (biotechnologie et industrie chimique). L'exemple le plus spectaculaire est laTaq polymérase provenant deThermus aquaticus qui est largement employé pour les réactions dePCR.
L'apparition de la vie a peut-être eu lieu dans un environnement extrême. L'atmosphère primitive de l'époque, sans oxygène et sansozone, laissait passer les UV du soleil qui pouvait entraîner la formation deradicaux libres toxiques pour les cellules. Le chimisteGünter Wächtershäuser pense que la vie est apparue dans un milieu chaud sulfuro-ferreux en absence d'oxygène. Ce milieu est proche de celui descheminées hydrothermales où vivent de nombreux micro-organismes hyperthermophiles. Cependant, les preuves fossiles de l'existence d'une forme de vie au niveau de site hydrothermaux fossilisés ne sont pas encore confirmées.
Ils illustrent les capacités étonnantes d'adaptation de la vie aux milieux les plus divers et les plus hostiles, ce qui crédibilise l'idée que des formes de vie semblables se trouvent sur des planètes en apparence non viables.
L'appellationpolyextrémophile regroupe l'ensemble des micro-organismes extrémophiles capables de résister à différents types d'agents agressifs ou de survivre dans des conditions extrêmes très variées. Quelques polyextrémophiles connus sont :
Kineococcus radiotolerans, découvert en 1996, est un micro-organisme encore plus résistant queD. radiodurans ; en plus de sa radiorésistance, il est capable de survivre en présence de substances chimiques trèstoxiques[réf. nécessaire].
Pyrolobus fumarii, isolée dans des cheminées hydrothermales sous-marine, se multiplie encore à113 °C.
Une souche surnomméeStrain 121, proche desArchaea des genresPyrodictium etPyrobaculum, a été isolée sur des échantillons hydrothermaux et serait capable de survivre à121 °C.
Sulfolobus acidocaldarius isolé de sources chaudes acides, est à la fois acidophile (croissance à un pH de 2-3) et hyperthermophile (optimum de croissance vers80 °C).
Thermococcus gammatolerans, radiotolérante (son organisme, lorsqu'il est exposé à un rayonnement ionisant se répare en permanence, et efficacement) trouvée à grande profondeur dans certaines sources chaudes[1]
Deinococcus radiodurans, radiorésistant de 1 500 à 3 000 fois la tolérance humaine. Les grands fonds marins, certains lieux radioactifs ou certains déserts (exposés aux UV, parfois sursalés abritent aussi des extrémophiles radiorésistantes dont deinococcus[4].
Lessnottites (notammentAcidithiobacillus) tirent leur énergie de chimiosynthèse de composés de soufre d'origine volcanique, leur pH se rapproche de 0, avec des propriétés similaires à l'acide de batterie.
Alvinella pompejana, ditver de Pompéi vit sur certaines cheminées hydrothermales sous-marines. Des capacités de thermorésistance exceptionnelles pour un eucaryote pluricellulaire (tolère une température de 20 à plus de80 °C chez l’adulte).
Précédemment on connaissaitPyrolobus fumarii qui mourait après une heure d'incubation à121 °C.
Dans lesannées 1980 avant d'enfouir des armes etdéchets nucléaires à grande profondeur, ledépartement de l'Énergie des États-Unis (DOE) a voulu vérifier s'il pourrait exister des microbes susceptibles d'interférer avec les joints ou matériels enfouis. Les géologues et biologistes américains ont alors été surpris de trouver dans des forages exploratoires faits sous des installations de traitement nucléaire existantes (Savannah River,Caroline du Sud) des bactéries et archéobactéries vivant jusqu'à500 mètres sous la surface[7]. D'autres études ont confirmé que la vie était également fréquente à grande profondeur, avec lagrotte de Movile en Roumanie en 1986, puis en 1992, quand John Parkes a découvert que même à500 m sous le plancher océanique de lamer du Japon vivaient environ11 millions de microbes par centimètre cube de sédiment[8] Desmicrobes-Mathusalem dotés d'un métabolisme extrêmement ralenti pourraient peut être survivre durant des milliers voire millions d'années quasiment en l'absence de nourriture. Des chercheurs[9] ont trouvé en 2011 des cellules vivantes dans des sédiments datés de 460 000 ans prélevés à220 m sous le plancher de l'océan Pacifique près du Japon. Elles ressemblaient à des cellules mortes mais, mises en présence d'une source de nourriture marquée par des radioisotopes stables du carbone et de l'azote, les trois quarts de ces cellules se sont montrées capables de s'en nourrir[10].
Un écosystème bactérien profond a été découvert sous le pacifique avec des bactéries actives et les archées dans les sédiments datés de86 millions d'années (formés environ20 millions d'années avant l'extinction des dinosaures. Dans les milieux les plus extrêmes, les individus sont plus rares, avec néanmoins environ mille cellules par centimètre cube de sédiments[11].
Dans les roches minérales chaudes et radioactives, ces bactéries utilisent la désintégration radioactive de l'uranium qui hydrolyse certaines molécules d'eau (en hydrogène libre et dioxygène parradiolyse pour se procurer de l'hydrogène qu'elles combinent à des ionssulfate de leur substrat rocheux pour produire assez d'énergie pour se maintenir en vie, tout en exploitant au mieux les quantités infimes de carbone de leur environnement[12].
On a cru que seules des bactéries pouvaient vivre dans les milieux si hostiles, mais des nématodes de0,5 mm de long ont été récemment découverts (2011), nageant dans l'eau de fissures à très grande profondeur (1,3 km), dans lamine d'or de Beatrix[7]. Ils ont été nommésHalicephalobus mephisto en référence auMephistopheles de Faust carlucifuges et vivant dans les profondeurs de la terre. Puis, dans la mine deTautona (la plus profonde du pays), un autre nématode a été découvert à3,6 km sous la surface (l'animal terrestre le plus profondément trouvé dans le monde[13]. De nombreux microbes peuvent vivre sans oxygène, mais c'est la première fois qu'on trouve un animal pouvant le faire ; les cellules de ces vers ont un génome différent des autres espèces, ils n'ont pas demitochondries (organites qu'on pensait universels chez les animaux)[7]. Ils tirent leur énergie - comme de nombreuses bactéries extrêmophiles - de l'hydrogène sulfuré grâce à des organites spécifiques diteshydrogénosomes[14].
C'est donc à tort que les hommes ont longtemps cru que les grands fonds marins étaient stériles. De même pour les profondeurs du sous-sol qui semblaient l'être plus encore. On connaît encore très mal cette biodiversité et sa biomasse est évaluée selon les estimations entre 1 % et 10 % de la biomasse de toutes les espèces vivantes[7]. Deux projets visent à recenser ces espèces :« Census of Deep Life » et « Center for Dark Energy Biosphere Investigations »[7].
Ces espèces pourraient nous aider à préciser l'origine de la vie. L'idée dominante est qu'elle serait apparue dans les sources chaudes, mais elle pourrait aussi être née dans les fissures du sous-sol, à l'abri des UV et autres rayons cosmiques non-encore filtrés par lacouche d'ozone et protégée des bombardements d'astéroïdes[7]. Ceci permet d'imaginer d'autres formes de vie, d'évolution ou d'adaptations que celles que nous connaissons, qui pourraient exister sur d'autres planètes, avoir existé ou exister dans le futur voire être les dernières à survivre[7].
De nouvelles questionsbioéthiques se posent aussi. Comme la pêche dans les grands fonds, l'exploitation minière ou océanographique profonde pourraient aussi affecter et modifier ou menacer une part de la biodiversité encore inconnue, notamment avec l'utilisation de techniques telles que lafracturation hydraulique profonde associée à des injections de matières organiques et de produits chimiques. De même pour les projets de stockage profond de CO2.
↑Fred A.Rainey, KerenRay, MargaridaFerreira et Bridget Z.Gatz, « Extensive Diversity of Ionizing-Radiation-Resistant Bacteria Recovered from Sonoran Desert Soil and Description of Nine New Species of the Genus Deinococcus Obtained from a Single Soil Sample »,Applied and Environmental Microbiology,vol. 71,no 9,,p. 5225–5235(DOI10.1128/AEM.71.9.5225-5235.2005,résumé,lire en ligne, consulté le).