Eulogie, dugrec ancien « εὐλογία » (« louange », « éloge ») composé des motslogia (« paroles ») eteu (« bien [sur quelqu'un] », soit littéralement « dire du bien », est unebénédiction,eucharistie ou formule d'action de grâce[1]. Une eulogie est ainsi une formule, une phrase de bénédiction ou de louange prononcée après un nom ou une prière dans plusieursreligions.
Cet article en aborde quelques-unes et traite d'objets qui portent ce nom parce qu'ils ont été en contact avec le sacré.
Anatole Bailly indique que « eulogie » vient du grec ancienεὐλογία, au sens de « bon langage » d'où viennent trois traductions : 1) « langage agréable, beau », 2) « langage honnête et raisonnable », 3) « langage bienveillant ». Ce dernier sens se trouve par exemple chezPindare,Euripide,Thucydide etPlaton[2].
À cela viennent s'ajouter dans laSeptante[Note 1] les sens suivants : a) « bénédiction » et de là b) « bienfait », sens que l'on trouve dans l'Ancien Testament (plus ou moins l'équivalent de la Bible hébraïque) mais aussi dans leNouveau Testament[2]. Dans ce même livre, le sens du mot va passer de « bienfait » à « don », dans laDeuxième épître aux Corinthiens, 9:5 : προκαταρτίσωσιν τὴν προεπηγγελμένην εὐλογίαν ὑμῶν (prokatartisosin tèn proéopèngelménon eulogian humon), c'est-à-dire, littéralement, « ils préparent d'avance la promise bénédiction de vous »[2],[Note 2].
Toutefois, selon le théologien et homme d'égliseArthur Barnes (en), ce sens vient probablement de laPremière épître aux Corinthiens, 10:16 : Τὸ ποτήριον τῆς εὐλογίας ὃ εὐλογοῦμεν (to poterion tes eulogias ho eulogoumen), c'est-à-dire, littéralement, « la coupe de la bénédiction que nous bénissons »[3],[Note 3].
On trouve dans différentes religions l'idée de dire du bien sur une personne ou sur Dieu.
Le nom despharaons était suivi d'une eulogie, par exemple : « qu'il soit vivant à jamais » .
Dans lejudaïsme, le culte consiste à lire des textes de laBible et à réciter des prières. Ces prières débutent et se terminent par l'eulogie « Béni sois-tu,Adonaï, notre Dieu »[4]
Lesmusulmans ont l'habitude, à chaque fois qu'ils prononcent le nom de leur dernier prophète (« Muḥammad »), de le faire suivre par une eulogie — appeléetaṣliya[Note 4] ou encorela prière sur le prophète, enarabe :ّالصَلاةُ عَلى النَبِي (aṣ-ṣalātu ʿala-n-nabī) : « que le salut et la bénédiction deAllah soient sur lui [sc. le prophète] », enarabe :صَلَّى ٱللَّٰهُ عَلَيْهِ وَآلِهِ وَسَلَّمَ (ṣallā -l-lāhu ʿalay-hī wa-sallam), ou parfois par une formule dans laquelle on ajoute la famille deMahomet: « que le salut et la bénédiction de Dieu soient sur lui et sur sa famille ». La mention du nom des autresprophètes de l'islam est aussi traditionnellement suivie d'une eulogie, mais simplifiée : en général, « que la paix (ou le salut) soit sur lui » (arabe :عَلَيْهِ ٱلسَّلَامُ (`alay-hi as-salām)).
LaConférence des évêques de France définit ainsi l'eulogie[5]:« Formule de bénédiction ou de louange. Ce mot indique aussi un objet béni ramené en souvenir d’un lieu depèlerinage. Dans l’Ancien Orient chrétien il représentait l’Eucharistie mais aujourd’hui, ne désigne plus que le pain bénit non consacré distribué aux assistants à la fin de lamesse. »
Les eulogies sont des pains nonconsacrés (en particulier dans lecatholicisme, au cours de laconsécration durant l'eucharistie), maisbénis par le prêtre que l'on distribue aux participants à la fin de lamesse[3],[1]. Autrefois, on appelait également eulogies des miettes du pain consacré lors de l'eucharistie[6] (dans ce sens, le mot eulogies est toujours au pluriel[réf. nécessaire]). Il peut encore s'agir d'offrandes depain bénit chez les catholiques (des gâteaux que les fidèles portaient à l'église pour les faire bénir)[6] ;
Au cours des premiers siècles du christianisme déjà, lespèlerinages sont des déplacements vers un lieu saint qui permettent de participer à la sainteté dudit lieu. En général, le pèlerin souhaite ramener un objet imprégné de cette sainteté: un fragment de larelique qui fait l'objet du pèlerinage ou, le plus souvent, un objet lié d'une manière ou d'une autre à cette relique, ce que l'on appelle une « eulogie », c'est-à-dire, selon l'expression dePierre Maraval des reliques secondaires[7]. Il peut s'agir d'objets ayant été en contact avec la relique (par exemple un vêtement, un collier ou un bracelet afin, ditSévère d'Antioche,« qu'ils aient et reçoivent leur part et leur bénédiction de sainteté du saint ». Ces objets tirent leur valeur et leur qualité de la personne qui les donne ou de leur lieu d'origine. Pendant longtemps, il s'agira aussi des choses demoines vivant dans des lieux eux-mêmes saints (Sinaï,Mont Nebo...), ce dont témoigne auIVe siècle la pèlerineÉgérie: il peut s'agir d'un peu de nourriture ou d'objets fabriqués par les moines[8].

Avec le développement des pèlerinages, les moines et leclergé liés à un lieu saint ont commencé à produire des objets que l'on pouvait facilement distribuer. Parmi les plus fréquents, de l'huile sainte, provenant des lampes du sanctuaire ou que l'on a fait couler sur les reliques — mais il peut aussi s'agir d'huile exsudant des reliques elles-mêmes, et elles sont bien sûr particulièrement précieuse. Ce peut être de l'eau, soit de l'eau bénite, soit de l'eau de la fontaine du lieu saint ou encore d'un fleuve comme leJourdain. On distribue aussi la poussière qui se trouvait proche de la relique, ou encore de la cire descierges. Toutefois, ces eulogies peuvent aussi être des faux, comme l'indiquent des textes, par exemple laChronique deMichel le Syrien qui évoque le cas de faussaires[9].
Dans certains cas, on pouvait aussi voir se développer une petite industrie de l'eulogie, comme par exemple à proximité du tombeau desaint Ménas, àAbou Mena, en Égypte. On fabriquait en effet de petites fioles enterre cuite, ressemblant à des gourdes plates et appelées « ampoules à eulogie » destinées à recevoir l'huile ou l'eau bénites et à l'emporter avec soi. Pareille activité se retrouve enPalestine (où les ampoules pouvaient aussi être en verre), mais aussi en Syrie, en particulier dans le sanctuaire qui s'était développé autour du culte deSiméon le Stylite[10]. Ces objets apparaissent auIVe siècle et perdurent jusqu’auXIIe siècle. On en a retrouvé jusqu'en France[11].
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