Le territoire de l'actuel Eswatini a régulièrement été habité depuis laPréhistoire, mais les plateaux étaient peu peuplés lorsque les Dlamini (issus du peuple nguni)[12],[13] y trouvèrent refuge. De nos jours, ses habitants appartiennent presque tous à l'ethnieswazi, dont la langue est le swati.
Une guerre oppose, en 1815, les Ngwane-Dlamini du roiSobhuzaIer aux Ndwandwe menés parZwide. En conflit pour les terres de la vallée de laPongola, Zwide repousse les Ngwane vers le nord ; ils se réfugient sur les hauts-plateaux de ce qui deviendra l'Eswatini[15],[16]. À la mort de Sobhuza, son fils Mswazi (ou Mswati) lui succède ; c'est à ce moment que le peuple Ngwane-Dlamini prend le nom de Swazi[17]. Un peu plus tard, les premiers Blancs commencent à pénétrer dans cette région.
Après laseconde guerre des Boers, l'Eswatini devient une colonie britannique sous le nom de Swaziland.
L'indépendance est accordée au pays le. C'estSobhuza II qui est à la tête de cette monarchie : de chef suprême des Swazi pendant la domination britannique, il est devenu roi. L'Eswatini reste membre duCommonwealth et intègre l'ONU. En avril 1973, jugeant la constitution rédigée par les Britanniques, et faisant de ce pays unemonarchie constitutionnelle, en inadéquation avec les traditions swazies, Sobhuza II dissout le parlement (le Libandla) élu, et abolit cette Constitution, s'appuyant pour ce faire sur une armée privée qu'il a formée et équipée en secret. Ceci lui permet de s'arroger les pleins pouvoirs. À partir de ce moment, les partis politiques sont interdits. Le Swaziland devient unemonarchie absolue de fait en 1973 et de droit en 1978[18],[19]. Le roi meurt en août 1982. LeLiqoqo (Conseil intérieur royal) nomme alorsDzeliwe, une de ses épouses parmi soixante-dix, comme reine régente, en raisona priori de son niveau d'éducation, en attendant qu'un autre prince que son fils, le princeMakhosetive, désigné par le Conseil royal comme successeur, ait atteint l'âge de vingt-deux ans[20]. C'est le point de départ d'une période d'intrigues au sein de la Cour, avec également l'influence de puissances étrangères, notamment l'Afrique du Sud voisine. Finalement, elle est poussée, par ce même conseil, à renoncer à la régence au profit deNtfombi Tfwala, la mère du prince héritier Makhosetive[21].
Le prince héritier devient roi, sous le nom deMswati III en 1986. C'est le dernier monarque absolu du continent africain, appuyant son pouvoir sur les traditions. Il nomme le premier ministre, les ministres, les juges, et une partie des parlementaires, une autre partie étant toutefois élue. Il y a des élections législatives pour élire 55 des 65 députés. Pour faire candidature, un candidat doit lever la main lors d'une assemblée de tous les habitants de la région, et patienter jusqu'à obtenir que quinze personnes se rangent derrière lui, en présence du chef, pour valider son inscription. Les partis politiques sont interdits. Par ailleurs, chaque année, à la fin août, tous les parents doivent s'assurer que leurs filles encore vierges participent à ladanse des roseaux, qui s'effectue devant le roi. C'est l'occasion pour celui-ci de choisir éventuellement une nouvelle épouse (il en a une quinzaine)[22].
Le, le roi Mswati III annonce que le pays reprend son nom d'origine d'avant la colonisation : Eswatini[7],[23], pour les50 ans de l'indépendance du pays.Eswatini signifiant « le pays des Swazis » en langueswati, Swaziland était donc un nom hybride entre l'anglais et la langue nationale. Le roi Mswati III a déclaré : « Nous étions le seul pays d'Afrique à avoir conservé son nom de l'époque coloniale »[24].
Le royaume est secoué en 2019 par une vague de grèves des fonctionnaires, accusant le monarque de vider les caisses du pays au détriment de la population. En 2021, de grandes manifestations en faveur de la démocratie conduisent le pouvoir à imposer un couvre-feu à sa population[25].
Les partis politiques sont interdits dans le pays depuis 1973[26].
Le, le roiMswati III annonce que le pays va changer deconstitution. Les organisations de défense desdroits de l'homme et les groupes d'opposition dénoncent le projet proposé de constitution, puisqu'elle continue à interdire lespartis politiques et renforce les pouvoirs du roi. En dépit des résistances des groupes d'opposition, la nouvelle constitution du Swaziland est ratifiée par le roi le et entre en vigueur le. Le pays demeure unemonarchie absolue. Les partis politiques ne sont perçus que comme des associations et la Cour suprême ne peut juger d'affaires pouvant impliquer la monarchie.
En, ce pays de 1,1 million d'habitants reste le dernier pays africain à avoir des relations diplomatiques avecTaïwan, alors que l'ensemble des autres pays du continent reconnaissent larépublique populaire de Chine[27].
Le pays est la dernièremonarchie absolue d'Afrique[28].
En, le pays est bouleversé par des mouvements de protestation contre le régime. Le prince Simelane Dlamini, ministre des Travaux publics, déclare que les manifestations sont interdites dans le pays[29].
Le 21 janvier 2023, le principal opposant au roi et avocat de nombreuses victimes des manifestations de 2021,Thulani Rudolf Maseko est assassiné à son domicile de deux balles dans la tête, sa veuve qui vit en exil depuis accuse le régime d'en être le commanditaire[30].
L'Eswatini offre une grande variété de paysages : desmontagnes le long de la frontière avec le Mozambique (monts Lebombo), dessavanes d'altitude à l'est avec lehighveld (qui fait partie duDrakensberg) et desforêts tropicales dans le nord-ouest. Plusieursfleuves traversent le pays, tel que leUmbeluzi ou leLusutfu. L'Eswatini n'a pas d'accès à la mer.
Avec 62 000 habitants[31], la capitaleMbabane est la deuxième plus grande ville du pays derrièreManzini ;Lobamba (capitale royale et législative) ouSiteki sont de moindre importance.
La production est surtout agricole. Le secteur primaire emploie 80 % des actifs mais ne représente que 16,4 % du PNB. Le pays cultive lacanne à sucre, lecoton, letabac, leriz et lemaïs. Depuis lesannées 1980, l'industrie se développe, en particulier dans l'agroalimentaire et letextile. L'activité des services atteint plus de 40 % du PNB. La culture de la canne à sucre, principale ressource du pays, asservit cependant une partie de la population : expulsions forcées de communautés rurales pour aménager les plantations, travail des enfants, semaines de travail allant jusqu'à 60 heures, etc. LaConfédération syndicale internationale évoque « des conditions de travail ardues et malsaines, des salaires misérables et une répression violente de toute tentative de syndicalisation »[28]. En 2018, le pays est le quatrième producteur de canne à sucre du continent[28].
L'économie de l'Eswatini dépend pour partie des échanges avec l'Afrique du Sud, son voisin, et de ceux avec l'Europe. En 2006, les importations depuis l'Afrique du Sud représentaient les 9/10e des importations totales et les exportations vers ce pays les 3/4 des exportations. L'Union européenne est son second partenaire commercial avec 14,2% des exportations. Les échanges commerciaux avec l'UE se sont renforcées depuis la signature d'un partenariat économique en 2016. Les produits manufacturés sont tous importés d'Afrique du Sud mais du minerai defer, dukaolin, dubois, dusucre sont exportés en Angleterre ou au Japon. Des entreprises étrangères implantées dans le pays, commeCoca-Cola, bénéficient d'un taux d'imposition très faible[28].
Pagnes traditionnels de l'Eswatini.
L'Eswatini doit faire face à des problèmes de développement importants. Le pays est au144e rang mondial pour l'IDH[4], malgré une aide internationale en 2001 de 104 millions de dollars. Les deux tiers des habitants vivent en effet sous leseuil de pauvreté[33].
Dans le même temps, 10 % de la population détient 50% des richesses du pays[33]. Les difficultés sont réelles dans les dépenses étatiques : ledéficit budgétaire atteignait 101 millions de dollars en 2003. L'inflation atteignait 7,3%, devant celle que connaît laNamibie. Les services publics sont très peu développés : le pays ne dispose que de douze ambulances publiques, les écoles primaires n'assurent généralement plus la cantine et les pharmacies disparaissent[28].
Un cercle économique de 15 000 hommes d'affaires s'octroie l'essentiel desrichesses du pays. Ce cercle comprend des investisseurs sud-africains venus trouver à l'Eswatini une main-d’œuvre trois fois moins chère et un groupe de chefs d'entreprises blancs héritiers des colons britanniques[28].
La monnaie de l'Eswatini est lelilangeni (7,67 emalangeni pour1 dollar en 2009, env. 12 pour 1 dollar[34] et 17 pour 1 euro[35] en 2021). Les sommes allouées au roiMswati III pour ses dépenses de fonction représentent 8% dubudget national. Les forces depolice reçoivent 5% du budget, tout comme les forces armées[28].
En2018, la population de l'Eswatini est estimée à 1 159 250 habitants[37]. Les principales aires urbaines sontManzini (154 763 habitants en 2018) etMbabane, la capitale administrative et judiciaire (106 709 habitants).Lobamba, la capitale royale et législative, ne compte que 12 372 habitants[37].
Évolution de la démographie entre 1950 et 2021 (chiffre de la division de la population duDAES). Population en milliers d'habitants.
L'Eswatini est l'un des pays du monde où l'espérance de vie est la plus faible (51,6 ans, estimation 2016[38]), principalement[39] parce que c'est le pays du monde où le taux deprévalence chez les adultes duVIH/SIDA est le plus élevé, avec 25,9%[40].
L'Eswatini a deux langues officielles, leswati (unelangue nguni de la famille deslangues bantoues), la langue maternelle de près de 90% de la population, et l'anglais (0,6 %). D'autres langues sont parlées dans le pays et appartiennent essentiellement à la famille des langues bantoues.
Aliette de Coquereaumont-Gruget,Le royaume du Swaziland : un État dans l'Afrique du Sud, Paris, L'Harmattan,, 286 p.(ISBN2-7384-1456-7)
Jérôme Vialatte,Swaziland, un royaume en Afrique australe : bibliographie thématique commentée (1886-2000), Bordeaux, CEAN, Institut d'étude politique de Bordeaux,, 211 p.
↑Beatriz Pavon, « Crise du développement : le sida réduit l'espérance de vie dans 23 pays africains »,Chronique de l'ONU,vol. XLI,no 3,,p. 54(lire en ligne)