Latopologie générale est une branche desmathématiques qui fournit un vocabulaire et un cadre général pour traiter des notions delimite, decontinuité, et devoisinage.
Lesespaces topologiques forment le socle conceptuel permettant de définir ces notions. Elles sont suffisamment générales pour s'appliquer à un grand nombre de situations différentes :ensembles finis,ensembles discrets, espaces de lagéométrie euclidienne, espaces numériques àn dimensions,espaces fonctionnels plus complexes, mais aussi engéométrie algébrique. Ces concepts apparaissent dans presque toutes les branches des mathématiques ; ils sont donc centraux dans la vision moderne des mathématiques.
La topologie générale ne tente pas d'élucider la question très complexe de la « composition du continu » : elle part d'une approcheaxiomatique, en utilisant le vocabulaire de lathéorie des ensembles ; autrement dit, elle suit une approche fondée sur la notion destructure (en l'occurrence, ici, une structure topologique), en faisant usage d'une axiomatiqueensembliste. Les axiomes sont minimaux, et en ce sens, c'est la structure la plus générale pour étudier les concepts cités.
La topologie générale définit le vocabulaire fondamental, mais permet aussi la démonstration de résultats non triviaux et puissants, tels que lethéorème de Baire. Elle possède deux prolongements importants, permettant une analyse plus approfondie encore de la notion générale de « forme » : latopologie différentielle, généralisant les outils de l'analyse classique (dérivée,champs de vecteurs, etc.) et latopologie algébrique, introduisant desinvariants calculables tels que lesgroupes d'homologie.
Cet article est technique ; une vision générale et historique est ébauchée dans l'article « Topologie ».
Deux définitions équivalentes sont souvent données : la définition par lesouverts, et la définition par lesvoisinages d'un point. La première est plus ramassée, la seconde souvent plus intuitive. Le passage d'une définition à l'autre est direct.
Un espace topologique est un couple (E,T), oùE est unensemble etT une topologie surE, à savoir un ensemble departies deE — que l'on appelle lesouverts de (E,T) — vérifiant les propriétés suivantes :
touteréunionquelconque d'ouverts est un ouvert, c'est-à-dire que si(Oi)i∈I est unefamille d'éléments deT, indexée par un ensembleI quelconque (pas nécessairement fini, ni mêmedénombrable) alors
;
touteintersectionfinie d'ouverts est un ouvert, c'est-à-dire que siO1, … ,On sont des éléments deT alors
Il résulte de la théorie élémentaire des ensembles qu'une topologie surE peut aussi être définie par l'ensemble de ses fermés, cet ensemble de parties deE devant vérifier :
les ensemblesE et vide sont des fermés ;
toute intersectionquelconque de fermés est un fermé ;
Dans un espace topologique, les adhérences vérifient les propriétés :
.
Inversement, étant donné un ensembleE, toute application de l'ensembleP(E) des parties deE dans lui-même qui vérifie ces quatre propriétés (appeléesaxiomes de fermeture deKuratowski) permet de définir surE une topologie dont est l'application adhérence[1], en décrétant que les fermés de cette topologie sont lesX tels que.
En effet, les axiomes 1 et 3 de la définition par les fermés ci-dessus sont alors trivialement satisfaits, et l'axiome 2 l'est aussi car l'application est unopérateur de préclôture donc croissant, ce qui permet de montrer que l'intersectionX de toute famille de fermésXi est fermée : pour touti, deX ⊂Xi on déduitX ⊂Xi =Xi, d'où l'inclusion deX dansX et donc l'égalité. Ainsi, on a défini une topologie, dont est bien l'application adhérence (d'après la croissance et le deuxième axiome de Kuratowski).
Par ailleurs, les axiomes de fermeture de Kuratowski sont équivalents à[2],[3] :
.
Définir une topologie par une application adhérence revient[4],[note 2] à se donner unerelation « adhère à » entre les points deE et ses parties, telle que, pour touta deE et toutes partiesX,Y deE,
aucun élément deE n'adhère à l'ensemble vide,
tout élément deX adhère àX,
sia adhère àX ∪Y alorsa adhère àX ou àY,
sia adhère àX et si tout élément deX adhère àY, alorsa adhère àY.
Un espace topologique est un couple, oùEest un ensemble et une application deE vers l'ensembleP(P(E)) obéissant aux cinq conditions ci-après[note 3], dans lesquelles les éléments de, poura∈E, sont appelés « voisinages dea », la justification de cette appellation venant juste après cette liste.
Pour tout pointa deE :
tout sur-ensemble d'un voisinage dea est lui-même voisinage dea ;
l'intersection de deux voisinages dea est elle-même un voisinage dea ;
E est un voisinage dea ;
tout voisinage dea contienta ;
pour tout voisinageV dea, il existe un voisinageW dea tel queV soit voisinage de chacun des points deW[note 4].
Il existe alors une et une seule topologie surE (au sens de la définition ci-dessus par les ouverts) telle que pour tout pointa deE, soit égal à l'ensemble des voisinages dea pour cette topologie, c'est-à-dire à l'ensemble des parties deEincluant un ouvert qui contienta.
Les ouverts de cette topologie sont les partiesO deE telles que pour tout pointa deO,O appartienne à
La plupart des notions de topologie, comme la continuité ou la limite, peuvent se définir de manière équivalente et aussi élégante par les ouverts, par les fermés ou par les voisinages.
Le premier exemple historique d'espace topologique est l'ensemble ℝ desnombres réels muni desa topologie usuelle. Cet exemple est celui qui est à la base de la théorie des espaces topologiques.
Latopologie induite sur une partieFd'un espace topologiqueEest la topologie surF dont les ouverts sont les intersections des ouverts deE avecF. Cette définition permet par exemple de définir la topologie induite par celle de ℝ sur un intervalle, et ainsi de pouvoir définir les propriétés de continuité et de limite à des fonctions définies sur un intervalle de ℝ. L'ensemble de Cantor, source de nombreux exemples et contre-exemples, est un sous-ensemble particulier de ℝ, muni de la topologie induite.
Latopologie discrète sur un ensembleXest celle pour laquelleT =P(X), l'ensemble des parties deX. Autrement dit : toutes les parties sont ouvertes, ou encore : tous les points sontisolés. C'est latopologie la plus fine surX.
Latopologie grossière surX est la moins fine. C'est celle dont les seuls ouverts sont la partie vide etX lui-même.
Sur l'ensemble vide et sur lessingletons, il n'y a qu'une topologie (à la fois discrète et grossière).
Sikest uncorps, la topologie de Zariski sur l'espace affineknest celle dont les fermés sont tous lesensembles algébriques affines dekn. Pourn= 1, ces fermés sont simplementket ses parties finies, donc la topologie de Zariski sur la droite affine est latopologie cofinie.
Un des premiers intérêts de la notion d'espace topologique est de pouvoir définir lacontinuité des applications. Il existe deux approches, l'approche locale qui définit la continuité en un point, et l'approche globale qui définit la continuité en tout point. Soitf :E →F une application entre deux espaces topologiques.
Définition locale. Soita un élément deE. L'applicationf est dite continue au pointa si l'image réciproque de tout voisinage def(a) est un voisinage dea.
Définition globale. L'applicationf est dite continue si l'image réciproquef−1(U) de tout ouvertU deF est un ouvert deE. (Il existe desdéfinitions équivalentes, en termes de fermés ou d'adhérences.)
Équivalence de la continuité en tout point et de la continuité globale : l'applicationf est continue si et seulement si elle est continue en tout point deE.
SoientX un ensemble etY un espace topologique. La donnée supplémentaire d'une application permet de définir une topologie surX :
pour toute applicationf deX dansY, on peut définir latopologie initiale liée àf. C'est la topologie surX la plus grossière rendantf continue.
de même, pour toute applicationf deY dansX, on définit la topologie finale liée àf. C'est la topologie surX la plus fine rendantf continue. Un exemple est latopologie quotient, lorsqueX est le quotient deY par unerelation d'équivalence etf la projection canonique.
On peut généraliser ces deux définitions en remplaçant l'espaceY par une famille d'espaces (Yi)i∈I, et l'applicationf par une famille d'applications (fi)i∈I.
Intuitivement, la notion de limite d'une fonction en un point permet de dire quelle(s) valeur(s) la fonction « devrait avoir topologiquement » en ce point.
SoientE etF deux espaces topologiques,A une partie deE,f une application deA dansF,a un point deEadhérent àA et ℓ un point deF. On dit que ℓ estune limite def au pointa si pour tout voisinageV de ℓ, il existe un voisinageW dea tel que pour tout pointx deW∩A, l'imagef(x) appartient àV.
Remarques
SiF estséparé alorsf possède au plus une limite au pointa.
Si le pointa est élément de la partieA, alorsf est continue ena si et seulement sif(a) est une limite def au pointa.
Des généralisations de cette notion, permettant par exemple de parler de limites« à l'infini » ou de dire qu'uneintégrale est une limite desommes de Riemann ont été définies ; les plus puissantes utilisent la notion defiltre.
On dit qu'un espace topologique estséparé oudeHausdorff ou T2 lorsque deux points distincts quelconques admettent des voisinages disjoints. C'est le plus courant desaxiomes de séparation.
On dit qu'un espace vérifie lapropriété de Borel-Lebesgue lorsqu'on peut extraire un sous-recouvrement fini de toutrecouvrement ouvert. On parle aussi d'espace quasi-compact.
↑Reformulation deBourbaki,p. I.3, N° 2, proposition 2, où nos conditions 2 et 3 sont regroupées en une seule : « Toute intersection finie de voisinages dea est un voisinage dea », avec la convention — déjà mentionnée dans la note ci-dessus de lasection « Définition par les ouverts » — que l'intersection indexée par ∅ estE.
↑Compte tenu de la condition 1, la condition 5 peut se réécrire : pour tout voisinageV dea, l'ensemble desx dontV est un voisinage est lui-même un voisinage dea.