Elasmosaurus platyurus · Élasmosaure
Elasmosaurus,franciséélasmosaure (littéralement « reptile à plaque mince »), est ungenrefossile de grandsplésiosaures ayant vécu durant l'étageCampanien duCrétacé supérieur dans ce qui est aujourd'hui l'Amérique du Nord, il y a entre 80,6 et 77 millions d'annéesavant notre ère. L'uniqueespèce connue estElasmosaurus platyurus, initialement décrite et nommée en 1868 parEdward Drinker Cope à partir defossiles découverts un an plus tôt près deFort Wallace, dans l'État duKansas, auxÉtats-Unis. Cope reconstruit à l'origine lesquelette d’Elasmosaurus avec lecrâne mis au bout de laqueue, une erreur vite remarquée parOthniel Charles Marsh, ce qui conduit par la suite à une partie de leur rivalité lors de laguerre des os. Seul un unique spécimen d’Elasmosaurus est actuellement connu, consistant en unsquelette incomplet composé d'uncrâne fragmenté, de lacolonne vertébrale ainsi que de laceinture scapulaire et dubassin, ces deux derniers éléments étant depuis 1906 considérés comme perdus. Un possible second spécimen, consistant en un squelette fragmentaire, est néanmoins connu d'Allemagne. Plusieurstaxons ont été proposés comme provenant d'autres espèces supplémentaires, mais ils sont maintenant considérés commeinvalides ou ont été déplacés vers d'autres genres.
D'une longueur maximale estimée à 10,3 m,Elasmosaurus possède un corps profilé disposant depalettes natatoires, d'une queue courte, d'une petitetête et d'uncou très allongé. Avec ses72vertèbres cervicales et son cou à lui seul ayant une taille estimée à 7,1 m de long, il figure parmi les animaux ayant les plus longs cous connus. Il est également le deuxièmevertébré disposant du plus grand nombre de vertèbres cervicales identifié à ce jour, juste derrière son proche parentAlbertonectes. Le crâne d’Elasmosaurus apparaît mince et triangulaire, disposant de grandesdents en forme decrocs situées à l'avant et de dents plus petites vers l'arrière. Il possède six dents dans chaqueprémaxillaire, pouvant avoir14 dans lesmaxillaires et jusqu'à19 lamâchoire inférieure. La plupart des vertèbres du cou sont comprimées latéralement et portent une crête longitudinale le long des côtés.
Lafamille desElasmosauridae est basée sur le genreElasmosaurus, étant le premier membre connu de ce groupe de plésiosaures à long cou. Les élasmosauridés sont justement bien adaptés à la vie aquatique et utilisent leurs palettes natatoires pour nager. Contrairement à ce que laissent suggérer les représentations antérieures, leur cou n'est pas très flexible et ne peut donc pas être maintenu au-dessus de la surface de l'eau. Les chercheurs ignorent à quoi servent précisément leurs longs cous, mais ils peuvent avoir joué un certain rôle dans l'alimentation. Les élasmosauridés chassent alors très probablement de petitspoissons et desinvertébrés marins, les saisissant avec leurs longues dents, et utilisent peut-être desgastrolithes pour aider à les digérer.Elasmosaurus est connu desschistes de Pierre, qui présentent des dépôts marins de lavoie maritime intérieure de l'Ouest.
Début 1867, le chirurgien de l'armée américaine Theophilus Hunt Turner et l'éclaireur de l'armée William Comstock explorent des rochers situés autour deFort Wallace, auKansas, où ils sont stationnés depuis la construction de l'Union Pacific Railroad. À environ 23 km au nord-est de Fort Wallace, près de laville fantôme deMcAllaster, Turner découvre les ossements d'un grandreptile marin fossile au sein d'unravin desschistes de Pierre et, bien qu'il n'ait aucune expériencepaléontologique, il reconnaît les restes comme appartenant à un « monstre disparu ». En juin, Turner donne trois vertèbres fossiles au scientifique américainJohn LeConte (en), membre de l'enquête ferroviaire, pour qu'il les ramène vers l'est afin de les faire identifier. En décembre, LeConte livre une partie des vertèbres au paléontologue américainEdward Drinker Cope à l'Académie des sciences naturelles de Philadelphie (connue sous l'acronyme ANSP, renommée depuis 2011 sous le nom d'Académie des sciences naturelles de l'université Drexel). Reconnaissant que les restes proviennent d'unplésiosaure, plus grand que tout ce qu'il a vu enEurope, Cope écrit à Turner pour lui demander de livrer le reste du spécimen, aux frais de l'ANSP[1],[2],[3].
En, Turner et d'autres membres de Fort Wallace retournent sur le site et récupèrent une grande partie de lacolonne vertébrale, ainsi que desconcrétions contenant d'autresos, le matériau collecté ayant un poids combiné de 360 kg. Les fossiles sont extraits duschiste relativement mou à l'aide de pioches et de pelles, chargés sur un chariot tiré par deschevaux et transportés à Fort Wallace. Cope envoie des instructions sur la façon d'emballer les os, qui sont ensuite envoyés dans des caisses rembourrées de foin sur un wagon militaire à l'est du chemin de fer, qui n'avait pas encore atteint le fort. En, le spécimen est transporté par voie ferroviaire àPhiladelphie, où Cope l'examine par la suite à la hâte ; il nomme l'animalElasmosaurus platyurus durant la réunion de l'ANSP organisée ce mois-là. Lenom génériqueElasmosaurus signifie « reptile à plaques minces », en référence aux os en forme de plaques présents dans les régionssternale etpelvienne. L'épithète spécifiqueplatyurus signifie « à queue plate », en référence à la « queue » comprimée (qui était en fait lecou) et aux lames desvertèbres[2],[3],[4],[5],[6].
Par la suite, Cope demande à Turner de rechercher d'autres parties du spécimen d’Elasmosaurus et reçoit des fossiles supplémentaires vers le mois d'août ou septembre 1868. L'ANSP remercie Turner pour son« cadeau très précieux » lors de leur réunion en, ce dernier visitant même le musée au printemps de l'année suivante, à un moment où Cope est absent. Cependant, Turner meurt subitement à Fort Wallace le, sans voir l'achèvement du travail qu'il avait commencé, bien que Cope continue à lui envoyer des lettres, ignorant sa mort jusqu'en 1870. Les circonstances entourant la découverte par Turner du spécimen type ne sont pas couvertes dans le rapport de Cope et sont restées inconnues jusqu'à ce que les lettres de Turner soient publiées en 1987.Elasmosaurus est la première découverte majeure de fossiles faite au Kansas (ainsi que la plus grande à partir de cet emplacement à l'époque), et marque le début d'une ruée vers lacollecte de fossiles qui en envoie des milliers de ce territoire à de grands musées de lacôte est des États-Unis[2]. À cette époque,Elasmosaurus est l'un des rares plésiosaures connus duNouveau Monde, et le premier membre reconnu de lafamille des plésiosaures à long cou desElasmosauridae[1].
Copedécrit scientifiquementElasmosaurus en 1869, la version pré-imprimée du manuscrit contenant une reconstitution squelettique antérieurement présentée durant son rapport lors d'une réunion de l'ANSP organisée en. La reconstitution montreElasmosaurus avec un cou court et une longue queue, contrairement aux autres plésiosaures, Cope n'étant pas sûr non plus si l'animal avait des membres postérieurs. Lors d'une réunion de l'ANSP menée un an et demi plus tard, en, le paléontologue américain etmentor de Cope,Joseph Leidy, note que la reconstitution d’Elasmosaurus montre le crâne placé au mauvais bout de la colonne vertébrale, à l'extrémité de la queue au lieu du cou. Cope a apparemment conclu que les vertèbres de la queue appartenaient au cou, puisque lesmâchoires ont été trouvées à cette extrémité du squelette, même si l'extrême opposé se termine par les os de l'axis et de l'atlas, qui se trouvent pourtant dans le cou. Leidy conclut également qu’Elasmosaurus serait identique àDiscosaurus, un plésiosaure qu'il a précédemment nommé en 1851[6],[7],[8],[2].
Pour cacher son erreur, Cope tente de rappeler toutes les copies de l'article pré-imprimé et rédige une version corrigée avec une nouvelle reconstitution squelettique plaçant la tête sur le cou (bien que l'orientation des vertèbres individuelles soit inversée), suivi d'une formulation différente en 1870. Dans une réponse à Leidy, Cope affirme qu'il a été induit en erreur par le fait que son mentor avait disposé les vertèbres deCimoliasaurus dans l'ordre inverse au sein de sa description de 1851 de ce genre, et souligne que sa reconstitution est corrigée. Cope rejette également l'idée qu’Elasmosaurus etDiscosaurus sont identiques, et ajoute que ce dernier etCimoliasaurus n'ont aucun trait distinctif. Bien que Cope ait tenté de détruire les pré-impressions, une copie attire néanmoins l'attention du paléontologue américainOthniel Charles Marsh, qui fait la lumière sur l'erreur. Cela conduit à un antagonisme entre Cope, gêné par l'erreur, et Marsh, évoquant l'erreur à plusieurs reprises pendant des décennies. Marsh revient sur la question lors de leur controverse dans leNew York Herald dans lesannées 1890 (Marsh affirmant qu'il avait immédiatement signalé l'erreur à Cope), lorsque leur différend attire l'attention du public. L'argument fait partie de la rivalité de laguerre des os entre les deux hommes, et est bien connu dans l'histoire de la paléontologie[2],[7],[9],[10],[11],[12].
En raison de la réputation de Cope en tant que paléontologue brillant, de nombreux auteurs se sont interrogés sur l'origine d'une erreur anatomique aussi évidente. En 1868, il est suggéré que le spécimen original aurait pu être difficile à interpréter sur la base des connaissances disponibles de l'époque. De plus, Cope pense initialement que les fossiles se composent de deux spécimens d'animaux différents, une lettre de 1868 envoyée par Cope à LeConte référant un supposé « petit spécimen » à l'espèce proposéeDiscosaurus carinatus. Durant cette époque, Cope n'est qu'à la fin de la vingtaine et n'a pas reçu une formation formelle en paléontologie, pouvant avoir été influencé par l'erreur de Leidy qui a inversé la colonne vertébrale deCimoliasaurus. En 2002, l'historienne de l'art américaine Jane P. Davidson note que le fait que d'autres scientifiques aient signalé très tôt l'erreur de Leidy va à l'encontre de cette explication, ajoutant que Cope n'est alors pas convaincu qu'il avait commis une erreur. Toujours selon Davidson, l'anatomie des plésiosaures est suffisamment connue à cette époque pour que Cope ne fasse pas l'erreur[7]. Cope effectua d'ailleurs peu de travail sur le spécimen après sa description de 1870, les fossiles ayant été conservés sous stockage durant une trentaine d'années[2], avant que letaxon ne soit redécrit en détail en 2005 par le paléontologueallemand Sven Sachs[1].
Actuellement, le spécimen holotype incomplet, depuis catalogué ANSP 10081, est le seul spécimen clairement défini d’Elasmosaurus. Ayant longtemps été exposé, il est maintenant stocké dans une armoire avec d'autres fragments attribués. Le spécimen se compose desprémaxillaires, d'une partie de la section postérieure dumaxillaire droit, de deux fragments de maxillaire avec des dents, de la partie avant des dents, de trois autres fragments de mâchoire, de deux fragments crâniens indéterminés, de 72vertèbres cervicales, incluant l'atlas et l'axis, 3 vertèbres pectorales, 6vertèbres dorsales, 4vertèbres sacrées, 18vertèbres caudales, ainsi que des fragments decôtes[13],[1]. En 2013, une vertèbre cervicale absente chez l'holotype, mentionnée à l'origine par Cope mais par la suite notée comme perdue, est redécouverte en stockage par Sachs, le nombre de vertèbres cervicales étant par conséquent révisé de 71 à 72[13]. Les vertèbres du cou ont été déforméestaphonomiquement (c'est-à-dire que des changements sont survenus lors de ladécomposition et de la fossilisation du spécimen), certaines parties étant comprimées ou déplacées de manière anormale[14]. En 1986, une reconstitution tridimensionnelle du squelette holotype est achevée ; elle est depuis exposée à l'ANSP. Ce moulage est ensuite copié par la sociétéTriebold Paleontology Incorporated (en), et des répliques sont fournies à d'autres musées. La réplique du Fort Wallace Museum mesure environ 12,8 m de longueur[2].
Bien que Cope décrive et fasse figurer les ceintures scapulaire et pelvienne d’Elasmosaurus en 1869 et en 1875, ces éléments sont notés comme absents de la collection par le paléontologue américainSamuel Wendell Williston en 1906. Cope avait prêté ces éléments au sculpteur anglaisBenjamin Waterhouse Hawkins pour aider à les sortir de leurs concrétions environnantes. À cette époque, Hawkins travaille sur lePaleozoic Museum (en) dans leCentral Park deNew York, où devait apparaître une reconstitution d’Elasmosaurus, un équivalent américain de sesdinosaures de Crystal Palace grandeur nature àLondres. En, une grande partie du matériel d'exposition de l'atelier d'Hawkins est détruite par desvandales pour des raisons peu claires et leurs fragments enterrés. Il est possible que les éléments scapulaires et pelviens d’Elasmosaurus se soient trouvés à l'atelier et aient également été détruits. Rien n'a été mentionné par la suite sur leur perte par Hawkins ou Cope[1],[2],[15],[16],[17]. En 2018, Davidson et Michael J. Everhart documentent les événements qui ont conduit à la disparition de ces éléments fossiles et suggèrent qu'une photo et un dessin de l'atelier de Waterhouse datant de 1869 semblent montrer des concrétions sur le sol qui pourraient avoir contenu les ceintures non préparées d’Elasmosaurus. Ils notent également que les croquis conceptuels du Paleozoic Museum montrent que le modèle d’Elasmosaurus était à l'origine envisagé avec une longue « queue », bien que plus tard mis à jour avec un long cou. Davidson et Everhart concluent que les fossiles des ceintures ont très probablement été détruits dans l'atelier d'Hawkins[16].
Des fossiles pouvant appartenir à l'holotype ont été découverts par le géologue américainBenjamin Franklin Mudge (en) en 1871, mais ont probablement été perdus depuis[2]. Des fossiles de plésiosaures supplémentaires sont récupérés près de lalocalité d'origine en 1954, en 1991, en 1994 et en 1998, les trouvailles concernant des vertèbres dorsales, des côtes, descôtes abdominales et desgastrolithes. Comme aucun de ces éléments ne chevauche avec ceux du spécimen holotype, Everhart conclut en 2005 qu'ils appartiendraient au même individu et que les parties auraient été séparées avant l'enterrement de lacarcasse de l'animal. Il note également qu'une petite pierre coincée dans lecanal neural de l'une des vertèbres caudales de l'holotype pourrait être un gastrolithe, en raison de son aspect poli[18]. En 2007, les paléontologuescolombiens Leslie Francis Noè et Marcela Gómez-Pérez expriment des doutes quant à l'appartenance des éléments supplémentaires au spécimen holotype, voire àElasmosaurus, faute de preuves. Ils expliquent que les éléments manquants de l'holotype peuvent avoir été perdus par les intempéries, pendant les transports ou les préparations des fossiles, ou tout simplement non collectés. Les gastrolithes peuvent également ne pas avoir été reconnus comme tels lors de la collecte, car de telles pierres n'ont été signalées sur un plésiosaure que dix ans après la découverte du spécimen holotype[19].
En 2017, Sachs et Joachim Ladwig décrivent un squelette fragmentaire d'un élasmosauridé datant du Campanien supérieur et découvert àKronsmoor, dans leSchleswig-Holstein, enAllemagne. Sur la base de sa morphologie vertébrale et de la distribution transcontinentale déjà documentées chez d'autres élasmosauridés, les auteurs notent que le spécimen appartiendrait peut-être àElasmosaurus. Une importante partie du squelette est hébergée depuis 2016 aumuséum d'histoire naturelle de Bielefeld (en), tandis que des parties supplémentaires de ce même squelette sont conservées à l'Institut de géologie de l'université de Hambourg, ainsi que dans des collections privées. Une fois ces éléments fossiles réunis, le spécimen se compose des vertèbres du cou, du dos et de la queue, dephalanges, d'unedent, d'éléments de membre, de110 gastrolithes et de fragments non identifiables[20].
À la suite de la description de l'espèce typeE. platyurus, un certain nombre d'autres espèces attribuées àElasmosaurus sont décrites par Cope, Williston et d'autres auteurs. Cependant, aucune de ces espèces ne peut encore aujourd'hui être définitivement rattachée àElasmosaurus, et la plupart d'entre elles ont depuis été déplacées vers des genres qui leur sont propres ou sont considérées comme desnoms douteux, c'est-à-dire sans caractéristiques distinctives, et donc d'unevalidité incertaine[1],[21],[22].
Accompagnant sa description de 1869 d’E. platyurus, Cope nomme une autre espèce d’Elasmosaurus,E. orientalis, sur la base de deuxvertèbres dorsales provenant duNew Jersey[23]. Il distingue alorsE. orientalis d’E. platyurus par lesprocessus plus fortement développés sur les vertèbres, connus sous le nom de parapophyses, qu'il considère se rapprochant plus de ceux deCimoliasaurus. Cependant, il attribue quand même l'espèce àElasmosaurus en raison de sa grande taille et de ses côtés inclinés. La première de ces vertèbres fut utilisée comme butée de porte dans un atelier detailleur, tandis que l'autre a été trouvée dans une fosse par Samuel Lockwood, un surintendant. Cope érige l'épithète spécifiqueorientalis à ce taxon, pensant que l'espèce avait peut-être une répartition située plus à l'est qu’E. platyurus[6]. L'année suivante, Leidy déplaceE. orientalis vers le genre désormais douteuxDiscosaurus[24]. En 1952, le paléontologue américainSamuel Paul Welles considère l'espèce comme unnomen dubium étant donné son caractère fragmentaire[25].
En 1869, Cope publie également un article sur les reptiles fossiles du New Jersey, dans lequel il décritE. orientalis comme un animal avec un « long cou ». Pourtant, dans une illustration d'accompagnement, Cope montre unElasmosaurus au cou court confronté à unDryptosaurus (alors connu sous le nom deLaelaps), avec unMosasaurus ressemblant à unplésiosaure, suivi d'autres animaux montrés en arrière-plan[26]. Selon Davidson, il est incertain de savoir quelle espèce d’Elasmosaurus y est représentée ; mais s'il s'agit d'unE. orientalis, le cou court contredit le propre texte de Cope, et s'il s'agit d’unE. platyurus, il montre l'animal avec un cou court après avoir reconnu que cela était incorrect. Davidson suggère que même si Leidy avait souligné l'erreur de Cope en 1868, ce dernier ne l'aurait peut-être pas accepté[7]. Dans une réponse à Leidy publiée en 1870, Cope lui-même déclare que le placement générique d’E. orientalis est incertain et qu'il l'avait illustré ainsivia un cou court, pensant que cela serait le cas chezCimoliasaurus. Si davantage de restes montrent qu’E. orientalis a un long cou comme chezE. platyurus, il déclare que l'image pourrait plutôt mieux représenter unCimoliasaurus[27].
Dans la même publication de 1869 dans lequel il nommaE. platyurus etE. orientalis, Cope attribue une espèce supplémentaire,E. constrictus[6], sur la base d'unevertèbre cervicale partielle ayant été trouvée dans des dépôts d'argiles datant duTuronien àSteyning,Sussex, auRoyaume-Uni. Il est d'abord décrit par le paléontologue britanniqueRichard Owen sous le nom dePlesiosaurus constrictus en 1850, ayant nommé l'espèce ainsi d'après la largeur extrêmement étroite de la vertèbre entre les pleurapophyses, c'est-à-dire les processus s'articulant entre les côtes. Il considère qu'il s'agirait en partie d'un artefact de préservation, mais qu'il ne peut comprendre comment la compression affecte uniquement la partie centrale et non les extrémités articulaires du corps vertébral[28]. Cope reconnaît cela comme une condition naturelle et considère ce taxon comme« une espèce d’Elasmosaurus ou un allié »[6]. En 1962, Welles considèreP. constrictus comme unnomen dubium, compte tenu de sa nature fragmentaire[29],[30]. Per Ove Persson le conserve pourtant comme valide en 1963, notant la crête longitudinale sur les côtés du corps vertébral comme un trait présent chez les élasmosauridés[31]. En 1995, Nathalie Bardet etPascal Godefroit le reconnaissent également comme un élasmosauridé, quoiqu'indéterminé[32].
En 1876, Cope découvre le squelette d'un autre élasmosauridé, le nommantE. serpentinus l'année suivante, en 1877. Cope le différencie des autres espèces par le manque de compression dans les vertèbres arrière du cou, la présence de quelques côtessessiles parmi les premières vertèbres dorsales et la présence d'« angles faibles » sous les vertèbres antérieures de laqueue. Cope découvrit également un autre grand squelette ressemblant beaucoup aux restes connus d’E. orientalis provenant des schistes noirs du « lit du Crétacé n° 4 », l'ayant fouillé avec l'aide de George B. Cledenning et du capitaine Nicholas Buesen[33]. En 1943, Welles retireE. serpentinus d’Elasmosaurus et le place dans un nouveau genre,Hydralmosaurus[34]. Par la suite, tous les spécimens d’Hydralmosaurus sont déplacés versStyxosaurus en 2016, faisant du premier nom unnomen dubium[35]. Williston publie une figure d'un autre spécimen d’E. serpentinus en 1914[36], avant qu'Elmer S. Riggs (en) ne le décrive officiellement en 1939[37]. Welles déplace ce spécimen vers le nouveau genre et espèceAlzadasaurus riggsi en 1943[34]. En 1999,Kenneth Carpenter le réaffecte àThalassomedon haningtoni[21]. En 2016, Sachs, Johan Lindgren et Benjamin Kear notent que les restes représentent unjuvénile et sont considérablement déformés, et préfèrent les conserver commenomen dubium[38].
Par la suite, une série de 19 vertèbres cervicales et dorsales provenant de la région deBig Bend dans leMissouri – une partie desschistes de Pierre – est découverte par John H. Charles. Cope, après avoir reçu les os à l'Académie des sciences naturelles, considère qu'ils proviennent d'une autre espèce d’Elasmosaurus. Les vertèbres sont, selon les dires de Cope, les plus courtes parmi les membres du genre (se rapprochant deCimoliasaurus dans cet état), mais il les considère toujours comme appartenant àElasmosaurus en raison de leur forme comprimée, le nommantE. intermedius en 1894[39]. Cependant, dans sa révision de 1906 sur les plésiosaures nord-américains, Williston considère les vertèbres comme« toutes plus ou moinsmutilées » et ne trouve aucune différence distinctive entre les restes d’E. intermedius et d’E. platyurus[15]. En 1952, Welles est d'avis que siE. intermedius est valide,« il doit être référé à un genre depliosaures »[25], mais ce dernier le qualifie denomen dubium dix ans plus tard, en 1962[40]. Trois vertèbres plus courtes trouvées aux côtés d’E. intermedius, attribuées par Cope au nouveau genre et espèceEmbaphias circculosus[39], sont également considérées par Welles commenomen dubium en 1962[40].
Williston nomme un certain nombre d'autres nouvelles espèces d’Elasmosaurus dans sa révision de 1906[41]. En 1874, ce dernier et Mudge découvrent un spécimen à Plum Creek, au Kansas[15]. Alors qu'il l'avait initialement attribué en 1890 à une nouvelle espèce deCimoliasaurus, à savoirC. snowii[42], il reconnaît par la suite la nature d'élasmosauridé de l'humérus ainsi que de sescoracoïdes. Ainsi, il renomme l'espèce enE. snowii. Un deuxième spécimen, découvert par Elias West en 1890, est également attribué par lui àE. snowii[15]. En 1943, Welles transfèreE. snowii dans son propre genre érigé,Styxosaurus[34], taxon toujours reconnu depuis. Cependant, le spécimen occidental est attribué àThalassiosaurus ischiadicus (voir ci-dessous) par Welles en 1952[25], Carpenter le ramenant àS. snowii en 1999[21],[41]. Williston réaffecte également l'espèceE. ischiadicus du genrePolycotylus, où il l'avait initialement placée lorsqu'il nomme le taxon en 1903. Les restes types ont été découverts par lui lors de la même expédition de 1874 avec Mudge. Williston attribue un autre spécimen découvert par Mudge et H. A. Brous en 1876[15]. En 1943, les deux spécimens sont attribués au nouveau genreThalassiosaurus par Welles[34], qui attribua ensuite ce dernier au nouveau genre et espèceAlzadasaurus kansasensis en 1952[25]. Glenn Storrs considère les deux comme des élasmosauridés indéterminés en 1999[43], avant que Carpenter ne mette en synonymie les deux taxons àS. snowii la même année[21],[41].
En 1889, un spécimen d'élasmosauridé est découvert par Handel Martin dans lecomté de Logan, toujours au Kansas, Williston l'érigeant comme une nouvelle espèce sous la désignation d’E. (?) marshii. Il émet des réserves quant à son attribution au genre, et il reconnait que ce taxon appartiendrait peut-être à un autre[15]. En 1943, Welles déplaceE. (?) marshii vers un genre qui lui est propre,Thalassonomosaurus[34], avant que Carpenter mette en synonymie ce dernier avecS. snowii en 1999[21]. Une autre espèce,E. nobilis, est nommée par Williston à partir de très grands restes découverts par Mudge en 1874 dans lecomté de Jewell, toujours au Kansas[15]. Welles déplaceE. nobilis comme une espèce deThalassonomosaurus,T. nobilis, en 1943[34], mais est également mis en synonymie àS. snowii par Carpenter en 1999[21]. Enfin, deux vertèbres dorsales exceptionnellement grandes collectées parCharles H. Sternberg en 1895 sont nomméesE. sternbergii par Williston, mais sont alors considérées comme indéterminées par Storrs[41],[43]. Williston mentionne trois espèces supplémentaires d’Elasmosaurus, qu'il figurerait et décrirait ultérieurement[15], avant de faire à nouveau référence à une nouvelle espèce d’Elasmosaurus, originaire du Kansas, en 1908[44].
Plusieurs espècesrusses basées sur des restes vertébraux mal conservés sont attribuées àElasmosaurus par Nikolaï N. Bogolubov en 1911. L'un d'entre eux estE. helmerseni, qui est décrite pour la première fois par W. Kiprijanoff en 1882 dans la localité de Maloje Serdoba,Saratov, sous le nom dePlesiosaurus helmerseni. Du matériel provenant deScanie, enSuède, est aussi attribué àP. helmerseni en 1885 par H. Schröder[45]. Des restes vertébraux et de membres[46] provenant deKoursk initialement attribués par Kiprijanoff àP. helmerseni sont également déplacés par Bogolubov vers la nouvelle espèceE. kurskensis, qu'il considèrent comme« identique àElasmosaurus ou apparentée à celui-ci ». Il nomme égalementE. orskensis sur la base de « très gros » restes de vertèbres cervicales et caudales provenant de Konopljanka,Orenbourg ; etE. serdobensis, basé sur une unique vertèbre cervicale découvert à Maloje Serdoba[47]. Cependant, la validité de toutes ces espèces est par la suite remise en question. Welles considèreE. kurskensis comme un plésiosaure indéterminé en 1962[48]. Persson note dans une revue de 1959 du matériel suédois d’E. helmerseni qui, bien que l'espèce soit probablement étroitement liée àElasmosaurus proprement dit, est trop fragmentaire pour que cette hypothèse puisse être évaluée[49], remarquant en 1963 que, concernant les trois dernières espèces,« leur définition générique et spécifique est discutable », bien qu'il refusa de les qualifier spécifiquement d'invalides car n'ayant pas pu voir le matériel fossile[50]. De même, en 1999, Evgeniy Pervushov, Maxim Arkhangelsky et Alexander Ivanov considèrentE. helmerseni comme un élasmosauridé indéterminé[51]. En 2000, Storrs, Archangelsky et Vladimir Efimov sont d'accord avec Welles surE. kurskensis et désignentE. orskensis etE. serdobensis comme des élasmosauridés indéterminés[52].
Deux autres espèces russes sont décrites ultérieurement. En 1915,Anatoly Riabinine décrit une unique phalange d'une nageoire sous le nom d’E. (?) sachalinensis, l'espèce étant nommée en référence à l'île deSakhaline, où N. N. Tikhonovich l'a découverte en 1909[53]. Cependant, ce spécimen ne peut être identifié plus spécifiquement qu'à un élasmosauridé indéterminé, affirmation suivie par Persson en 1963[54] et par Pervushov et ses collègues en 1999[51]. Storrs, Arkhangelsky et Efimov sont moins spécifiques, le qualifiant de plésiosaure indéterminé[52], une classification suivie par Alexander Averianov et Vasilii Popov en 2005[53]. En 1916,Pavel Pravoslavlev (en) nommeE. amalitskii de la région dufleuve Don, sur la base d'un spécimen contenant des vertèbres, des ceintures et des os de membres. En 1963, Persson le considère comme une espèce valide et comme un membre relativement grand des élasmosauridés[55], cependant, commeE. (?) sachalinensis, Pervushov et ses collègues considèrentE. amalitskii comme un élasmosauridé indéterminé en 1999[51].
Dans un examen de 1918 de la répartition géographique et de l'évolution d’Elasmosaurus, Pravoslavlev attribue provisoirement trois autres espèces précédemment nommées à ce dernier[46], mais ses opinions taxonomiques ne sont pas largement suivies. L'une d'entre elles estE. chilensis, originellement nomméePlesiosaurus chilensis, sur la base d'une vertèbre caudalechilienne parClaude Gay en 1848[56]. Dans un ouvrage publié en 1889,Richard Lydekker attribue cette espèce au genreCimoliasaurus[57]. En 1895,Wilhelm Deecke déplace cette espèce versPliosaurus[58], une classification qui fut reconnue par Pravoslavlev.Edwin Colbert attribue ensuite la vertèbre type en 1949 à unpliosauroïde, et réfère également d'autres restes attribués à des élasmosauridés indéterminés[59],[60] ; la vertèbre type ayant été reconnue comme appartenant potentiellement àAristonectes parvidens par José P. O'Gorman et son équipe en 2013[61]. Une autre estE. haasti, à l'origineMauisaurus haasti, tel que nommée parJames Hector en 1874 sur la base de restes trouvés en Nouvelle-Zélande[62]. Bien que sa validité soit soutenue durant longtemps,M. haasti est désormais considérée comme unnomen dubium depuis une étude publiée en 2017[63]. Pravoslavlev reconnait une autre espèce provenant de Nouvelle-Zélande,E. hoodii, nommée par Owen en 1870 sous le nom dePlesiosaurus hoodii sur la base d'une vertèbre cervicale[64]. Welles la reconnait commenomen dubium en 1962[65],Joan Wiffen et William Moisley partageant son point de vue dans une revue de 1986 sur les plésiosaures de Nouvelle-Zélande[66].
En 1949, Welles nomme une autre espèce d’Elasmosaurus,E. morgani. Il doit son nom à un squelette bien conservé ayant été découvert dans lecomté de Dallas, auTexas[67]. Cependant, une partie du spécimen a été accidentellement jetée lors du déménagement des collections paléontologiques de l'université méthodiste du Sud[68]. Welles reconnait la similitude d’E. morgani avecE. platyurus dans sa ceinture scapulaire, mais le maintient comme une espèce distincte en raison de son cou plus court et de ses vertèbres cervicales arrière plus robustes[67]. En 1997, Carpenter reconsidère les différences entre les deux espèces et les trouve suffisantes pour placerE. morgani dans son propre genre, qu'il nommeLibonectes[69]. Malgré sa réaffectation et la perte de son matériel,L. morgani est souvent considérée comme un archétype des élasmosauridés. Les données basées sur ces éléments perdus ont été incontestablement acceptées dans lesanalyses phylogénétiques ultérieures, jusqu'à ce qu'une nouvelle description des éléments retrouvés soit publiée par Sachs et Benjamin Kear en 2015[68].
Persson attribue une autre espèce àElasmosaurus à côté de sa description des restes suédois d’E. helmerseni, à savoirE. (?) gigas. Le taxon est basé surPliosaurus (?) gigas, nommé en 1885 par Schröder à partir de deux vertèbres dorsales ; l'une ayant été trouvée enPrusse, l'autre enScanie. Bien qu'elles soient incomplètes, Persson reconnaît que leurs proportions et la forme de leurs extrémités articulaires diffèrent grandement de celles des pliosauroïdes et s'accordent plutôt bien avec les élasmosauridés. Au moment de sa description, Persson écrit alors qu'« il n'y a [rien] qui contredise le fait qu'ils soient les plus proches parents d’Elasmosaurus », les assignant à ce dernier avec hésitation. Un certain Theodor Wagner avait déjà attribué ce taxon proposé àPlesiosaurus en 1914[70]. Depuis 2013, cette attribution douteuse reste inchangée[71]. Une autre espèce de Russie,E. antiquus, est nommée par Dubeikovskii et Ochev en 1967[52] à partir de fossiles venant de la carrière dephosphorite de Kamsko-Vyatsky, mais Pervushov et son équipe en 1999, suivis par Storrs et ses collègues en 2000, le réinterprètent comme un élasmosauridé indéterminé[51],[52].
Bien que l'unique spécimen formellement connu d’Elasmosaurus soit fragmentaire et manque de nombreux éléments, lesélasmosauridés apparentés montrent qu'il a un corps compact et profilé, de longsmembres en forme depagaie, unequeue courte, unetête proportionnellement petite et uncou très allongé[72],[1]. La longueur du cou d’Elasmosaurus est estimée à 7,1 m[73], faisant de ce dernier, avec son proche parentAlbertonectes, l'un des animaux au cou le plus long à avoir vécu, ces deux dernierstaxons disposant d'ailleurs du plus grand nombre devertèbres cervicales identifié parmi tous lesvertébrés connus[72],[13]. Cependant, malgré leurs nombreuses vertèbres cervicales, le cou des élasmosauridés fait moins de la moitié de ceux desdinosauressauropodes au cou le plus long[73]. Initialement, dans sa description de 1869 d’Elasmosaurus, Cope estime la longueur de l'animal en additionnant les longueurs vertébrales et les estimations des parties manquantes, donnant une longueur de 13,1 m. Pensant que l'animal vivant est alors légèrement plus gros en raison ducartilage présent entre lescorps vertébraux, il estime sa taille maximale à environ 13,7 m[6]. Cependant, en 1952,Welles réduit l'estimation à 10,3 m[25], une proposition qui est réaffirmée par O'Gorman en 2016[74].
Comme chez les autres élasmosauridés,Elasmosaurus a certainement eu un crâne de forme mince et triangulaire. Lemuseau est arrondi et forme presque un demi-cercle vu de dessus, tandis que lesprémaxillaires, qui forment l'avant de la mâchoire supérieure, portent une crête basse à la ligne médiane. En raison de l'état fragmentaire des fossiles, il est incertain de savoir combien de dentsElasmosaurus possédait. Néanmoins, les chercheurs suggèrent que l'animal avait probablement six dents dans les prémaxillaires, les dents préservées ayant la forme de grandscrocs. Le nombre de dents présentes dans les prémaxillaires distingueElasmosaurus desplésiosauroïdes primitifs et de la plupart des autres élasmosauridés, qui en ont généralement moins. Les deux dents à l'avant sont plus petites que les suivantes et sont situées entre les deux premières dents desos dentaires, dans la partie principale de la mâchoire inférieure. Les dents connues de la partie avant de la mâchoire inférieure sont de gros crocs et les dents à l'arrière des mâchoires semblent avoir été plus petites. La dentition des élasmosauridés est généralementhétérodonte, c'est-à-dire de formes différentes sur toute la mâchoire, les dents devenant progressivement plus petites d'avant en arrière. Chez ce groupe de plésiosaures, lesmaxillaires (les plus grands os portant les dents dans la mâchoire supérieure) contiennent généralement 14 dents, tandis que les os dentaires en contiennent généralement 17 à 19. Les dents s'emboîtent et leurscouronnes dentaires sont minces et arrondies ensection transversale. Lasymphyse mandibulaire (là où les deux moitiés de la mâchoire inférieure se connectent) est bienossifiée, sanssuture visible[72],[1].
Bien que lesceintures scapulaire etpelvienne du spécimen holotype sont notées comme manquantes depuis 1906, des observations sur ces éléments ont néanmoins été réalisées sur la base des descriptions et desfigures originales datant la fin duXIXe siècle. Lesomoplates sont fusionnées et se rejoignent sur la ligne médiane, ne portant aucune trace de barre médiane. Lesprocessus supérieurs des omoplates sont très larges et les « cous » des omoplates sont longs. La ceinture pectorale a une longue barre au milieu, une caractéristique supposément avancée précédemment admise comme absente des plésiosauresjuvéniles. L'ischion est jointe au milieu, de sorte qu'une barre médiale est présente sur toute la longueur dubassin, une caractéristique généralement introuvable chez les plésiosaures[1]. Comme chez les autres élasmosauridés et les plésiosaures en général,Elasmosaurus aurait eu degrands membres en forme de pagaie ayant de très longsdoigts. Chez ces animaux, les palettes pectorales (situées à l'avant) sont plus longues que les palettes pelviennes (situées à l'arrière)[72].
Contrairement à celles de nombreux autres animaux à long cou, les vertèbres cervicales individuelles ne sont pas particulièrement allongées, la longueur extrême du cou étant plutôt obtenue grâce à un nombre beaucoup plus élevé de vertèbres[73].Elasmosaurus diffère de tous les autres plésiosaures en ayant 72 vertèbres cervicales ; d'autres peuvent avoir été présents, mais ont ensuite été perdus à cause de l'érosion ou après des fouilles. SeulAlbertonectes possède plus de vertèbres cervicales, en ayant 76, et les deux genres incarnent les seuls plésiosaures actuellement connus ayant un nombre supérieur à 70. La présence de plus de 60 vertèbres est une caractéristique vue comme trèsdérivée chez les plésiosaures[13],[1].
Le complexe osseux de l'atlas et de l'axis, qui constituent les deux premières vertèbres cervicales et qui s'articulent à l'arrière du crâne, est long, bas et rectangulaire horizontalement en vue latérale. Chez ces vertèbres, les corps vertébraux, oucentra, sont co-ossifiés dans le spécimen holotype, indiquant qu'il s'agit là d'unadulte. Les arcs neuraux de ces vertèbres sont très fins et plutôt hauts, ce qui donne au canal neural (l'ouverture passant par le milieu des vertèbres) un contour triangulaire vu de dos. La partie inférieure du canal neural est étroite vers l'arrière par l'axis, où elle fait la moitié de la largeur du corps vertébral. Il s'élargit vers l'avant, où il a presque la même largeur que le corps de l'atlas. Les arcs neuraux y sont également plus robustes que dans l'axis, et le canal neural est plus haut. L'épine neurale est basse et dirigée vers le haut et vers l'arrière. Les corps de l'atlas et de l'axis sont de longueur égale et ont une forme de carré en vue latérale. La surface (ou facette) où l'axis s'articule avec la vertèbre suivante a un contour ovale et une cavité pour le canal neural au milieu de son bord supérieur. Une crête distincte court le long du milieu inférieur de l'atlas et de l'axis[1].
La plupart des vertèbres cervicales sont comprimées latéralement, notamment au milieu du cou. Une crête s'étend longitudinalement le long du côté des vertèbres cervicales (une caractéristique typique des élasmosauridés), visible de la troisième à la55e vertèbre, à la partie postérieure du cou. Cette crête est positionnée au milieu du corps vertébral dans les vertèbres antérieures et dans la moitié supérieure du corps vertébral à partir de la19e vertèbre. La crête aurait servi à ancrer la musculature du cou. La forme du corps vertébral diffère en fonction de la position des vertèbres dans le cou ; celle de la troisième vertèbre est à peu près aussi longue que large, mais le corps vertébral devient plus long que large à partir de la quatrième vertèbre. Le corps vertébral devient plus allongé au milieu du cou, mais redevient plus court à lanuque, la longueur et la largeur étant à peu près égales à la61e vertèbre, et celles des vertèbres les plus postérieures étant plus larges que longues. Les surfaces articulaires des vertèbres situées à l'avant du cou sont larges, ovales et modérément approfondies, avec des bords arrondis et épaissis, avec une cavité sur les côtés supérieur et inférieur. Plus en arrière dans la partie antérieure du cou, autour de la25e vertèbre, le bord inférieur des facettes articulaires devient plus concave et la facette a la forme d'un carré aux angles arrondis. À la63e vertèbre, la facette articulaire est également en forme de carré avec des bords arrondis, tandis que le corps vertébral de la vertèbre la plus postérieure a un large contour ovale[72],[13],[1].
Les arcs neuraux des vertèbres cervicales sont bien fusionnés dans les corps vertébraux, ne laissant aucune suture visible, et le canal neural est étroit dans les vertèbres antérieures, devenant plus développé dans les vertèbres postérieures, où il est aussi large que haut et presque circulaire. Les pré-zygapophyses et post-zygapophyses des vertèbres cervicales, desprocessus qui articulent les vertèbres adjacentes pour qu'elles s'emboîtent, sont de longueur égale ; les premiers atteignant entièrement le niveau du corps vertébral tandis que les seconds n'atteignant que leur moitié arrière. Les épines neurales des vertèbres cervicales semblent avoir été basses et presque semi-circulaires à la20e vertèbre. Les facettes où les côtes du cou s'articulent avec les vertèbres du cou et sont placées sur les côtés inférieurs du corps vertébral, mais ne sont pas placées plus haut dans les trois dernières vertèbres, atteignant les parages du milieu des côtés. Les côtes du cou sont semi-circulaires à quadratiques (en forme de carré) en vue latérale et sont dirigées plutôt vers le bas. Le bas de chaque vertèbre cervicale présente des paires deforamens nutritifs au milieu, séparés par une crête, qui devient progressivement plus proéminente et épaissie vers la nuque[1].
Les vertèbres qui font la transition entre les vertèbres du cou et du dos dans la région pectorale des plésiosaures, près du bord avant de la ceinture des membres antérieurs, sont souvent appelées vertèbres pectorales.Elasmosaurus a trois vertèbres pectorales, ce qui est un nombre courant chez les élasmosauridés. Les facettes des côtes des vertèbres pectorales sont de forme triangulaire et situées sur les apophyses transverses, et les corps vertébraux portent des paires de foramens nutritifs au milieu des côtés inférieurs. Les vertèbres postérieures ont des facettes costales au niveau du canal neural, et les parties avant et arrière des apophyses transverses présentent ici des crêtes distinctes sur leurs marges. À cet endroit, les facettes des côtes sont placées plus haut que les apophyses transverses, séparant les deux, et ont un contour ovale à rectangulaire. Les pré-zygapophyses sont ici plus courtes que celles du cou et des vertèbres pectorales, et n'atteignent au-dessus du niveau du corps vertébral qu'avec le tiers avant de leur longueur. Les post-zygapophyses atteignent le niveau du corps vertébral avec la moitié arrière de leur longueur. Les vertèbres postérieures ne sont pas utiles pour distinguer les élasmosauridés, car elles ne sont pasdiagnostiques au niveau dugenre[13],[1].
Elasmosaurus a quatrevertèbres sacrées, un nombre typique chez les élasmosauridés. Les apophyses transverses sont ici très courtes et les facettes des côtes augmentent en taille de la première à la quatrième vertèbre sacrée. Une crête court le long du sommet de ces vertèbres, et les côtés inférieurs des corps vertébraux sont arrondis et portent des paires de foramens nutritifs, séparés par des crêtes basses. La première vertèbre caudale pourrait être distinguée de la vertèbre sacrée précédente en ayant des facettes costales plus petites et en étant positionnée dans la moitié inférieure du corps vertébral. Ces vertèbres sont de forme presque circulaire et les deux premières portent une crête étroite au milieu de la face supérieure. Les facettes des côtes des vertèbres caudales sont situées sur la face inférieure du corps vertébral et leur forme ovale devient plus grande et plus large à partir de la troisième vertèbre et au-delà, mais devient plus petite à partir de la14e vertèbre. Ici, les pré-zygapophyses dépassent également le niveau des corps vertébraux sur la majeure partie de leur longueur, tandis que les post-zygapophyses dépassent ce niveau sur la moitié de leur longueur. La partie inférieure des corps vertébraux est arrondie de la première à la troisième vertèbre caudale, mais concave de la quatrième à la 18e. Le nombre habituel de vertèbres caudales chez les élasmosauridés est de 30[1]. Étant donné que les dernières vertèbres caudales des élasmosauridés sont fusionnées en une structure similaire aupygostyle desoiseaux, il est possible que celle-ci supporte unenageoire caudale, mais la forme qu'elle pourrait afficher est inconnue[72].
Bien que Cope reconnaît initialementElasmosaurus comme un plésiosaure, dans un article de 1869, il le place, avecCimoliasaurus etCrymocetus (en), dans un nouvelordre dereptilessauroptérygiens. Il nomme le groupe Streptosauria, ou « lézards inversés », en raison de l'orientation de leurs vertèbres individuelles censée être inversée par rapport à ce qui est observé chez d'autres animauxvertébrés[12],[75]. Il abandonne par la suite cette idée dans sa description d’Elasmosaurus la même année, où il déclare qu'il s'est basé sur l'interprétation erronée deLeidy deCimoliasaurus. Dans cet article, il nomme également la nouvellefamille desElasmosauridae, contenantElasmosaurus etCimoliasaurus, sans commentaire. Au sein de cette famille, il considère que le premier se distingue par un cou plus long avec des vertèbres comprimées, et le second par un cou plus court avec des vertèbres carrées et déprimées[6].
Au cours des années suivantes, les Elasmosauridae deviennent l'un des trois groupes dans lesquels les plésiosaures sont classés, les autres étant lesPliosauridae et lesPlesiosauridae (qui sont à l'époque parfois fusionnés en un seul groupe)[76].Charles Andrews développe les différences entre les élasmosauridés et les pliosauridés en 1910 et en 1913. Il caractérise les élasmosauridés par leur long cou et leur petite tête, ainsi que par leursomoplates rigides et bien développées (mais avec des clavicules etinterclavicules atrophiées ou absentes) pour la locomotion entraînée par lesmembres antérieurs. Cependant, les pliosauridés ont un cou court, une grosse tête et utilisent la locomotion entraînée par les membres postérieurs[77],[78]. Bien que le placement d’Elasmosaurus parmi les Elasmosauridae ne soit pas controversé, les opinions sur les relations au sein de la famille sont devenues variables au cours des décennies suivantes. En 1925,Williston crée une taxonomie révisée des plésiosaures[79].
En 1940,Theodore White publie une hypothèse sur les relations entre les différentes familles de plésiosaures. Il considère les Elasmosauridae comme étant les plus proches parents des Pliosauridae, notant leurscoracoïdes relativement étroites ainsi que leur manque d'interclavicules ou de clavicules. Sondiagnostic des Elasmosauridae note aussi ces traits : un crâne mésocéphalique (c'est-à-dire un crâne d'une longueur moyenne) ; les côtes du cou ayant une ou deux têtes ; l'omoplate et le coracoïde étant en contact sur la ligne médiane ; l'angle externe et arrière émoussé du coracoïde ; et la paire d'ouvertures dans le complexe omoplate-coracoïde étant séparée par une barre osseuse plus étroite que celle des pliosauridés. La variabilité citée dans le nombre de têtes sur les côtes du cou découle de son inclusion deSimolestes parmi les Elasmosauridae, puisque les caractéristiques« du crâne et de laceinture scapulaire se comparent plus favorablement à celles d’Elasmosaurus qu'à celles dePliosaurus ou dePeloneustes ». Ainsi, l'auteur considèreSimolestes comme un ancêtre possible d’Elasmosaurus[80].Oskar Kuhn adopte une classification similaire en 1961[81].
Welles conteste la classification de White dans sa révision des plésiosaures de 1943, notant que les caractéristiques citées par White sont influencées à la fois par la préservation des fossiles et par l'ontogenèse. Il divise les plésiosaures en deuxsuper-familles, lesPlesiosauroidea et lesPliosauroidea, en fonction de la longueur du cou, de la taille de la tête, de la longueur de l'ischion et de la finesse de l'humérus ainsi que dufémur (propodiums). Chaque super-famille est subdivisée en fonction du nombre de têtes sur les côtes et des proportions des épipodes. Ainsi, les élasmosauridés ont un long cou, de petites têtes, des ischions courts, des propodiums trapues, des côtes à tête unique et desépipodiales courtes[34]. Pierre de Saint-Seine en 1955 etAlfred Romer en 1956 adoptent tous deux la classification de Welles[81]. En 1962, Welles subdivise les élasmosauridés selon qu'ils possèdent ou non des barres pelviennes formées à partir de la fusion des ischions,Elasmosaurus etBrancasaurus étant réunis dans lasous-famille des Elasmosaurinae par leur partage des barres pelviennes complètement fermées[82].
L'analyse phylogénétique des plésiosaures réalisée parCarpenter en 1997 remet en question leur subdivision traditionnelle sur la base de la longueur du cou. Alors que lesPolycotylidae faisaient auparavant partie des Pliosauroidea, Carpenter les déplace en tant quetaxon-frère des élasmosauridés sur la base de quelques similitudes crâniennes, impliquant que les polycotylidés et les pliosauroïdes ont évolué indépendamment avec leur cou court[69]. Le contenu des Elasmosauridae fait également l’objet d’un examen plus approfondi. Depuis son attribution initiale aux Elasmosauridae, les relations deBrancasaurus sont considérées comme bien étayées et une position en tant qu'élasmosauridé est récupérée par l'analyse d’O'Keefe en 2004[83] et de Franziska Großmann en 2007[84]. Cependant, l'analyse de Ketchum et Benson l'inclut plutôt dans lesLeptocleidia[85], et son inclusion dans ce groupe est restée cohérente dans les analyses ultérieures[86],[87],[35]. Leur analyse déplace égalementMuraenosaurus vers lesCryptoclididae, etMicrocleidus etOccitanosaurus vers les Plesiosauridae[85], Benson et Druckenmiller isolant les deux derniers dans lesMicrocleididae en 2014 et mettant ensynonymieOccitanosaurus en tant qu'espèce deMicrocleidus[87]. Ces genres furent tous auparavant considérés comme faisant partie des élasmosauridés par Carpenter, Großmann et d'autres chercheurs[21],[84],[88],[89].
Au sein des Elasmosauridae,Elasmosaurus lui-même est considéré comme un « taxon générique » ayant des relations très variables[90]. L'analyse de Carpenter en 1999 suggère qu’Elasmosaurus est plusbasal (moinsdérivé) que d'autres élasmosauridés à l'exception deLibonectes[21]. En 2005, Sachs suggère qu’Elasmosaurus est étroitement lié àStyxosaurus[1], et en 2008, Druckenmiller et Russell le placent dans le cadre d'unepolytomie avec deux groupes, l'un contenantLibonectes etTerminonatator, l'autre contenantCallawayasaurus etHydrotherosaurus[91]. L'analyse de Ketchum et Benson en 2010 inclutElasmosaurus dans le premier groupe[85]. En 2013, Benson et Druckenmiller retire encoreTerminonatator de ce groupe et le place comme un peu plus dérivé[86]. Dans son analyse de 2016 basée sur une modification du même ensemble de données, Rodrigo Otero placeElamosaurus en tant quetaxon frère d’Albertonectes, formant les Styxosaurinae avecStyxosaurus etTerminonatator[35]. Danielle Serratos, Druckenmiller et Benson ne résolvent pas la position d’Elasmosaurus en 2017, mais notent que les Styxosaurinae seraient un groupesynonyme des Elasmosaurinae siElasmosaurus fait partie du groupe[90]. En 2020, O'Gorman met formellement en synonymie les Styxosaurinae avec les Elasmosaurinae sur la base de l'inclusion d’Elasmosaurus au sein du groupe, et fournit également une liste de caractéristiques diagnostiques les définissant[92].
Topologie A : Bensonet al. (2013)[86] :
| Topologie B : Otero (2016)[35], avec des noms de clade suivant O'Gorman (2020)[92] :
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Lesélasmosauridés sont des animaux adaptés à la vie dans l’océan, disposant de corps profilés et de longuespalettes natatoires montrant qu’ils sont des nageurs actifs[72]. Leur structure corporelle inhabituelle limite sûrement la vitesse à laquelle ils peuvent nager, et leurs palettes natatoires peuvent certainement se déplacer d'une manière similaire au mouvement des rames, sans donc pouvoir se tordre, et justement tenues de manière rigide[93]. On suppose aussi que les plésiosaures sont capables de maintenir une température corporelle constante et élevée (homéothermie), permettant ainsi une nage soutenue[94].
Une étude de 2015 conclut que la locomotion est principalement effectuée par les nageoires antérieures, tandis que les nageoires postérieures assurent la maniabilité et la stabilité[95]. Une autre de 2017, affirme que les nageoires postérieures des plésiosaures produisent 60 % de poussée en plus et étaient 40 % plus efficaces lorsqu'elles se déplacent en harmonie avec les nageoires antérieures[96]. Les palettes natatoires des plésiosaures sont si rigides et spécialisées pour la nage qu’ils n'ont pas pu venir sur terre pourpondre comme lestortues marines. Par conséquent, ils donnent probablement naissance à des petits vivants (viviparité), comme certaines espèces deserpents marins[97]. La preuve de cette viviparité chez les plésiosaures est fournie par le fossile d'un spécimen adultePolycotylus ayant un uniquefœtus en son sein[98].
Les restes d'élasmosauridés fournissent des preuves qui suggèrent qu'ils sont alors très probablement des proies. Un humérus provenant d'un élasmosauridésubadulte non identifié présente des marques de morsure correspondant aux dents du grandrequinlamniformeCretoxyrhina[99], tandis qu'un crâne écrasé d’Eromangasaurus[100] présente des marques de dents correspondant à celles dupliosaureKronosaurus[101].
En 1869, Cope, compare la constitution et les habitudes d’Elasmosaurus à celles d'unserpent. Bien qu'il suggère que la colonne vertébrale du tronc ne permette pas beaucoup de mouvements verticaux en raison des épines neurales allongées qui forment presque une ligne continue avec peu d'espace entre les vertèbres adjacentes, il envisage que le cou et la queue seraient beaucoup plus flexibles :« La tête en forme de serpent était élevée dans les airs ou abaissée au gré de l'animal, tantôt arquée comme uncygne en préparation à un plongeon après un poisson, tantôt étendue au repos sur l'eau ou défléchie pour explorer les profondeurs en contrebas »[6].
Bien que suivies par de nombreuses représentations médiatiques courantes, des recherches plus récentes montrent qu’Elasmosaurus est en fait incapable de lever autre chose que sa tête hors de l'eau. Le poids de son long cou place le centre de gravité derrière les palmes avant. Ainsi,Elasmosaurus ne peut lever la tête et le cou au-dessus de l'eau que lorsqu'il se trouve dans des eaux peu profondes, où il peut reposer son corps sur le fond. De plus, le poids du cou, la musculature limitée et le mouvement limité entre les vertèbres a peut-être empêchéElasmosaurus de lever la tête et le cou très haut. La tête et les épaules d’Elasmosaurus font probablement office degouvernail. Si l’animal déplace la partie antérieure du corps dans une certaine direction, le reste du corps se déplace dans cette direction. Ainsi,Elasmosaurus est incapable de nager dans une direction tout en bougeant sa tête et son cou horizontalement ou verticalement dans une direction différente[102].
Une étude révèle que le cou des élasmosauridés est capable d'effectuer un mouvement ventral de75 à177°, un mouvement dorsal de87 à155° et un mouvement latéral de94 à176°, en fonction de la quantité de tissu entre les vertèbres, qui augmente probablement en rigidité vers lanuque. Les chercheurs concluent que les arcs latéraux et verticaux et les courbes peu profondes en forme de « S » sont réalisables, contrairement aux postures du cou semblable à ceux des cygnes qui nécessitent plus de360° de flexion verticale[103].
La fonction exacte du cou des élasmosauridés est inconnue[72], bien que cela soit important pour la chasse[93]. Il est également suggéré que le long cou des plésiosaures sert à coup sûr de tuba et leur permet ainsi de respirer de l'air pendant que le corps restait sous l'eau. Ceci est contesté car il y a de grandes différences de pressionhydrostatique, en particulier pour les élasmosauridés au cou extrêmement long. L'anatomie du cou des élasmosauridés est capable de former une pente douce pour leur permettre de respirer à la surface, mais les oblige sûrement à se livrer à une nage sous la surface coûteuse en énergie. De plus, le cou plus long aurait également augmenté l’espace mort et les animaux auraient peut-être eu besoin de poumons plus gros. Le cou aurait pu avoir d'autres vulnérabilités, comme par exemple être une cible pour les prédateurs[104].
La simulation de l'écoulement de l'eau sur des modèles 3D montrent que les cous plus allongés, comme ceux des élasmosauridés, n'augmentent pas la force de traînée pendant la nage par rapport aux plésiosaures au cou plus court. D'un autre côté, plier le cou sur le côté augmente la force de traînée, surtout dans les formes à cou très long[105]. Une autre étude révèle que les longs cous des élasmosaures augmenteraient normalement la traînée pendant la nage vers l'avant, mais cela est annulé par leur grand torse, et par conséquent, une grande taille corporelle peut faciliter l'évolution de cous plus longs[106].
En 1869, Cope note que des écailles et des dents de six espèces de poissons ont été découvertes directement sous les vertèbres de l'holotype d’Elasmosaurus, et émet l'hypothèse que ces poissons ont constitué le régime alimentaire de l'animal. À partir de ces restes, Cope n'hésite d'ailleurs pas à identifier une nouvelle espèce debarracuda du nom deSphyraena carinata[6].
Les plages de flexion du cou d’Elasmosaurus permettent à l'animal d'employer un certain nombre de méthodes de chasse, notamment le « pâturage benthique », qui consiste à nager près du fond et à utiliser la tête et le cou pour creuser des proies sur le fond marin. Les élasmosauridés peuvent également être des chasseurs actifs dans lazone pélagique, rétractant leur cou pour lancer une frappe ou utilisant des mouvements de glissement latéral pour étourdir ou tuer leurs proies avec leurs dents projetées latéralement (comme lesrequins-scies)[103]. Il est également suggéré que les capacités prédatrices des élasmosauridés sont sous-estimées. En effet, leurs grands crânes, leurs gros muscles présents dans leurs fortes mâchoires ainsi que leurs longues dents indiquent qu'ils pourraient s'attaquer à des animaux mesurant entre 30 cm et 2 m de long, comme l'indique leur contenu stomacal incluant notamment des restes de requins, de poissons, demosasaures et decéphalopodes[107].
Il est possible qu’Elasmosaurus et ses proches parents traquent des bancs de poissons, se cachant en dessous et remontant lentement la tête à mesure qu'ils s'approchaient. Les yeux de l’animal se trouvent au sommet de la tête et lui permettent de voir directement vers le haut. Cette visionstéréoscopique les a sûrement aidés à trouver de petites proies. La chasse par le bas a également été possible, avec des proies se découpant en contre-jour tandis que le prédateur reste caché dans les eaux sombres en contrebas. Les élasmosauridés mangent probablement de petitspoissons osseux et desinvertébrés marins, car leur crâne de petite taille non cinétique peut limiter la taille des proies qu'ils peuvent manger. De plus, avec leurs dents longues et fines adaptées pour saisir leurs proies et ne pas les déchirer, les élasmosauridés avalent très certainement leurs proies entières[93],[103].
Bien que les élasmosauridés sont couramment trouvés avec plusieursgastrolithes,Elasmosaurus n'a été trouvé sans controverse qu'avec une pierre logée dans l'arc neural de l'une de ses vertèbres caudales les plus postérieures[19]. Un spécimen de l'étroitement apparentéStyxosaurus contient desarêtes de poissons fragmentées et des pierres dans la région abdominale derrière la ceinture pectorale. Les restes de poissons sont identifiés comme étantEnchodus et d’autres poissonsclupéomorphes. Les pierres correspondent à des roches situées à 600 km de l'endroit où le spécimen a été trouvé[108]. Plusieurs fonctions différentes ont été proposées pour les gastrolithes, notamment l'aide à la digestion, le mélange du contenu alimentaire, la supplémentation en minéraux, ainsi que le contrôle du stockage et de laflottabilité[109].
Elasmosaurus est connu dumembre Sharon Springs desschistes de Pierre, une localité datée sur une période s'étendant entre 80,64 et 77 millions d'années dans l'ouest duKansas, soit durant l'étageCampanien duCrétacé supérieur[110]. Les schistes de Pierre représentent une période de dépôt marin provenant de lavoie maritime intérieure de l'Ouest, une mer continentale peu profonde qui recouvrait une grande partie du centre de l'Amérique du Nord au cours du Crétacé[111]. Dans sa plus grande étendue, la voie maritime intérieure de l'Ouest s'étendait à l'est desmontagnes Rocheuses jusqu'auxAppalaches, sur environ 1 000 km de large, le point le plus profond atteignant 800 à 900 m. Deux grands bassins versants continentaux s'y déversent de l'est et à l'ouest, diluant ses eaux et apportant des ressources enlimon érodé qui forment des systèmes dedeltas fluviaux changeants le long de ses côtes basses. Il y a peu desédimentation sur la marge est de la voie maritime ; la marge ouest ayant accumulé un épais tas de sédiments érodés de la masse continentale ouest[112],[113]. La rive ouest est donc très variable, en fonction des variations duniveau de la mer et de l'apport de sédiments[112].
Lefond marin mou etboueux reçoit probablement très peu de lumière duSoleil, mais regorge devie en raison despluies constantes de débris organiques provenant duplancton et d’autres organismes situés plus haut dans lacolonne d’eau. Le fond est dominé par la grandepalourdeInoceramus, couvertes d'huîtres, et il y a donc peu debiodiversité. Lescoquilles de palourdes s'accumulent certainement au fil des siècles en couches sous la surface du fond marin et fournissent un abri aux petitspoissons. D'autresinvertébrés connus pour vivre dans cette mer comprennent diverses espèces derudistes, decrinoïdes et decéphalopodes (incluant lescalmars et lesammonites)[114].
Les grands poissons connus pour habiter la mer comprennent lespoissons osseuxPachyrhizodus,Enchodus,Cimolichthys,Saurocephalus (en),Saurodon (en),Gillicus,Ichthyodectes,Xiphactinus,Protosphyraena etMartinichthys (en)[115] ; et lesrequinsCretoxyrhina,Cretolamna,Scapanorhynchus,Pseudocorax etSqualicorax[116]. En plus d’Elasmosaurus, d'autresreptiles marins présents comprennent les autresplésiosauresLibonectes,Styxosaurus,Thalassomedon,Terminonatator,Polycotylus,Brachauchenius,Dolichorhynchops etTrinacromerum[117] ; lesmosasauresMosasaurus,Halisaurus,Prognathodon,Tylosaurus,Ectenosaurus (en),Globidens,Clidastes,Platecarpus etPlioplatecarpus[118] ; et letortues marinesArchelon,Protostega,Porthochelys etToxochelys[119]. L'« oiseau » aquatique incapable de volerHesperornis y a également élu domicile[120]. LesptérosauresPteranodon etNyctosaurus[121], et l'« oiseau »Ichthyornis[120], sont également connus loin de la terre ferme[110].
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