Il termina brillamment sa formation militaire et on lui proposa dans l'armée impériale un poste qu'il refusa. En1912 Rydz fut l'un des fondateurs de l'organisation polonaise para-militaire des « Fusiliers » (Związek Strzelecki). À la même époque, il acheva ses études artistiques ; on lui voyait des talents très prometteurs dans la peinture de paysages et de portraits ; professeurs et critiques le complimentaient et lui prédisaient un grand avenir en la matière.
Mobilisé dans l'armée austro-hongroise enjuillet 1914, Rydz passa en août dans laLégion polonaise et combattit dans la célèbre1re brigade deJózef Piłsudski. Il participa à de nombreuses batailles contre les Russes dans le secteur sud de laVistule et monta rapidement en grade. En1916, il était déjà colonel. Mais il n'oubliait pas pour autant sa vocation artistique et exposait ses œuvres dans une galerie de Cracovie. En1917, après avoir refusé de prêter serment aux Austro-Allemands, la Légion polonaise fut dissoute, ses membres internés et Piłsudski emprisonné à la forteresse deMagdebourg. Sur recommandation de Piłsudski, Rydz échappa à la prison pour raison de santé, devint chef de l'Organisation militaire polonaise (POW) et adopta le nom de guerre deŚmigły (enfrançais :le rapide ou l'agile) qui devint ensuite partie intégrante de son patronyme.
Enoctobre 1918, Rydz entra dans le gouvernement socialiste d'Ignacy Daszyński àLublin en tant que ministre de la Guerre. Promubrigadier-général (général à 1 étoile dans les grades polonais), il insista sur le fait qu'il n'acceptait le poste qu'en tant que représentant de Piłsudski. C'est à cette époque qu'il commença à utiliser le double nom de Rydz-Smigly. Le, le gouvernement accorda les pleins pouvoirs à Piłsudski qui devint chef de l'État provisoire. Après une courte hésitation, Piłsudski (à qui la collaboration de Śmigły-Rydz avec les socialistes déplaisait, ayant lui-même« quitté la grande route du socialisme à l'étape appelée indépendance ») confirma son grade de brigadier général.
Après la guerre de 1919-1921, il fut nommé inspecteur général de l'armée polonaise dans le secteur de Vilna/Wilno (maintenantVilnius), puis àVarsovie. En 1926, lors du coup d'État de Piłsudski (lecoup de Mai), il prit parti pour le maréchal et lui envoya des troupes de Vilna/Wilno en renfort des révoltés de Varsovie. Piłsudski n'oublia jamais cette fidélité, et en 1929 Śmigły-Rydz devint représentant du maréchal pour tout ce qui concernait l'est. Le 13 mai 1935, conformément aux dernières volontés deJózef Piłsudski, Śmigły-Rydz fut nommé par le président et le gouvernement de la Pologne inspecteur général des armées polonaises ; le 10 novembre 1936 enfin, il devint maréchal de Pologne. C'est alors qu'il inversa son nom et se fit appeler « Śmigły-Rydz ».
Le général Śmigły-Rydz et le général françaisMaurice Gamelin (à droite),Varsovie, août 1936.
C'était alors l'un des personnages les plus puissants de Pologne avec le titre de « Second homme de l'État après le Président », sa réputation étant entretenue par le partiObóz Zjednoczenia Narodowego(pl). Le gouvernement tourna vers l'autoritarisme et leconservatisme, le pouvoir de Śmigły-Rydz étant malgré tout limité par celui d'Ignacy Mościcki, plus modéré, qui restait président. Pendant quelque temps, Śmigły-Rydz envisagea une alliance avec les libéraux duparti paysan (PSL) mais, après leur refus, se tourna vers l'extrême-droite. Après1938, il se réconcilia avec le président mais l'équipe gouvernementale se trouva alors divisée entre « Hommes du Président » (ou « Ceux du Château ») — presque tous civils — et « Hommes du Maréchal », presque tous anciens compagnons d'armes de Piłsudski et militaires de carrière.
En août 1939, il fut le seul membre du gouvernement à voir clairement le danger imminent représenté par l'Allemagne nazie et l'Union soviétiquestalinienne. Pourtant, à l'occasion des discussions d'août 1939 àMoscou entre Alliés occidentaux et Soviétiques, il rejeta, au grand dam des Franco-Britanniques, les propositions deStaline de faire transiter l'Armée rouge par la Pologne, au motif« qu'il n'est pas du tout sûr que lesSoviétiques prennent réellement part à la guerre ; de plus, une fois entrés en Pologne, ils n'en partiront jamais. »
On discute encore pour savoir si la signature dupacte germano-soviétique, dont les protocoles secrets prévoyaient le démembrement de la Pologne, le est un effet de ce refus ou bien une confirmation de ses craintes, mais dès lors la Pologne se trouve encerclée de tous côtés, à la seule exception de l'étroite frontière roumaine au sud-est.
Le, quand l'Allemagne nazie envahit la Pologne, Śmigły-Rydz devint commandant en chef des forces polonaises. Le, avec presque tout le gouvernement, il quittaVarsovie menacée. Peu après, la défense polonaise perdit toute cohésion à la suite de la rupture des communications, ce qui empêcha Śmigły-Rydz de commander en réalité. ÀBrest-Litowsk, alors ville polonaise, le, il ordonna à Varsovie de se défendre à tout prix.
Son plan consistait à faire de Varsovie et de la proche forteresse deModlin les bastions d'un réduit central polonais capable de résister plusieurs mois, et la plupart des forces polonaises tiendraient lesKresy méridionales (Galicie orientale etPocoutie, au contact de laBucovine roumaine) en attendant la contre-attaque promise par les Français et les Britanniques via la Roumanie (c'est ce que l'on appelle la « tête de pont roumaine »). Ce qu'ignorait Rydz-Smigly, c'était que laFrance et leRoyaume-Uni n'avaient aucune intention de ce genre mais prévoyaient la chute de la Pologne. Ce plan devenait de toute façon inexécutable dès l'instant oùStaline prit la Pologne à revers le. Conscient du fait que toute défense contre ses deux voisins était impossible, Śmigły-Rydz ordonna aux forces polonaises de reculer vers la Roumanie et d'éviter tout combat contre les attaquants soviétiques.
Après avoir évité d'être capturé par les Soviétiques et les Allemands, Śmigły-Rydz passa la frontière roumaine le en même temps que le gouvernement, l'or polonais et les restes de l'armée, qui embarquèrent àConstanța sur les bateaux duService maritime roumain et sur le navire britannique HMSEocene du commandant Robert E. Brett[1], rejoignant ainsi àAlexandrie, enÉgypte britannique, ce qui deviendra l'Armée polonaise de l'Ouest, qui combattra ensuite enFrance, puis auRoyaume-Uni. Le gouvernement polonais évita ainsi la capitulation de la Pologne et permit aux combattants polonais de continuer la lutte contre l'Allemagne, mais Śmigły-Rydz resta en Roumanie, ce qui suscita certaines polémiques, étant donné qu'il était quand même général en chef. De leur côté, de nombreux groupes de soldats et d'aviateurs polonais traversèrent lesBalkans (la Roumanie, la Hongrie, la Yougoslavie, la Bulgarie et la Grèce étant encore neutres) et parvinrent en France puis, après, en Angleterre.
Photo de 1939. Le salut avec deux doigts signifie "Honneur (ou Dieu selon une autre origine) et patrie". Il remonte à l'époquenapoléonienne et n'a jamais été supprimé même pendant la période communiste.
En tant que commandant en chef des forces polonaises, Ridz-Śmigły endosse toute la responsabilité du désastre militaire de septembre 1939. Rydz était un chef de premier ordre sur des front limités mais n'avait pas l'expérience stratégique d'un conflit majeur. En 1922, évaluant les généraux polonais, Piłsudski l'avait ainsi noté :« Dans les opérations d'envergure limitée, il montre un grand bon sens et beaucoup de vigueur. Je le recommande sans réserve pour commander une armée mais je lui vois moins bien les capacités nécessaires à un commandement suprême dans une guerre entre deux États. »
Parvenu en Roumanie, qui, sous lerégime carliste, était neutre, mais encore favorable auxAlliés occidentaux, et surtout liée à la Pologne par des traités, Śmigły-Rydz fut officiellement interné dans la villa de l'un de ses amis, l'ancien premier ministre roumainArmand Călinescu, à Dragoslavele, au nord-ouest de Bucarest, mais laissé libre. Il commença à organiser une résistance polonaise qui rassemblait des officiers fidèles au souvenir de Piłsudski. Encore en Roumanie le, il abandonna ses fonctions de commandant en chef et d'inspecteur général des armées.Wladyslaw Sikorski en hérita, agissant alors enFrance puis passant enGrande-Bretagne en juin1940, et présidant le nouveaugouvernement polonais en exil. Śmigły-Rydz quitta la Roumanie le et passa clandestinement enHongrie pour rejoindre larésistance polonaise. Cela déplut fortement à Sikorski, opposé à Śmigły-Rydz et à Piłsudski depuis le coup d'Etat du.
Sikorski avait refusé toute affectation militaire venant de Śmigły-Rydz en septembre 1939 et télégraphia au généralStefan Grot-Rowecki, chef de l'Armia Krajowa [AK], la résistance en Pologne :« Le gouvernement polonais considère tout séjour du maréchal en Pologne comme un sabotage à son action dans le pays. Le maréchal doit le plus vite possible passer dans un territoire anglais. » Mais Śmigły-Rydz quitta la Hongrie le et, via laSlovaquie, passa en Pologne. Le suivant, dans le plus grand secret, Śmigły-Rydz arriva àVarsovie pour s'engager comme simple soldat dans la résistance polonaise en abandonnant volontairement son rang de maréchal de Pologne. Il contacta Grot-Rowecki mais ne participa à aucune action car il mourut d'une crise cardiaque le, à peine cinq semaines après son arrivée à Varsovie. Il fut enterré à Varsovie sous son nom de guerre d'« Adam Zawisza ». Sa pierre tombale du cimetière Powazki garda ce nom jusqu'en1991. La population de Varsovie lui érigea une nouvelle pierre tombale plus imposante peu après la chute durideau de fer et dubloc de l'Est, en1994.
Rydz avait épousé Marta (née Thomas) (Zaleska dans un premier mariage), morte en France àNice dans un accident de la route en1951. Le couple n'eut aucun enfant.
Rydz fut nommédocteurhonoris causa des universités de Varsovie etVilnius (alors ville polonaise) et de l'École polytechnique de Varsovie. Il fut aussi citoyen d'honneur de plusieurs villes polonaises.
Après la Seconde Guerre mondiale, sa réputation est mitigée. Les communistes polonais et soviétiques ne lui pardonnent ni son rôle dans laguerre soviéto-polonaise des années1919-1920, ni la répression menée par le gouvernement militaire avant1939. En Occident, conséquence de l'influence des milieux anti-Piłsudski,Władysław Sikorski étant le représentant le plus connu, on lui reproche sa fuite en 1939, mais sans tenir compte des circonstances de la défaite polonaise face aux Allemands et aux Soviétiques. Après la chute du communisme (1990), on voit plutôt en lui un patriote héroïque, même si les critiques de fond demeurent.