Ne doit pas être confondu avecMonisme et dualisme dans le régime parlementaire.
Le débat sur ledualisme et le monisme en droit international est persistant et oppose deux conceptions antagonistes du rapport entre les ordres juridiquesnationaux et l'ordre international : ledualisme tend à affirmer que lesnormes du droit international n'acquièrent de force juridique qu'en étant réceptionnées en droit interne, tandis que lemonisme tend à affirmer que le droit international prévaut de façon immédiate en droit interne.
CertainsÉtats tendent à favoriser l'une ou l'autre des doctrines. Le dualisme est par exemple préféré auRoyaume-Uni, auCanada, enAllemagne ou encore enItalie, où les traités internationaux signés et ratifiés doivent être formellement repris par une loi interne (principe de lasouveraineté parlementaire) et ont donc l'autorité de la loi qui les a intégrés dans l'ordre juridique interne. À l'inverse, enFrance, les traités sont applicables dès leur ratification[1] : ils ont une position spécifique, qui est en l'occurrence supérieure aux lois internes. Cette position moniste est également adoptée auxPays-Bas, enSuisse ou auLuxembourg. LesÉtats-Unis ont unsystème mixte, selon que les traités soient ou non considérés comme étant d'application directe par les tribunaux ; dans tous les cas, les traités n'y sont pas applicables s'ils entrent en conflit avec une loi fédérale postérieure.
Au niveau des rapports entredroit communautaire et droit interne, laCour de justice des communautés européennes (CJCE) a adopté une position moniste avec l'arrêt Costa contre ENEL de 1964.
Bien que l'usage de ces termes soit complexe et équivoque, on peut dire, d'une façon générale, que le dualisme tend à considérer ledroit international et le droit interne comme des ordres juridiques distincts, le droit interne devant déterminer à quelles conditions les règles internationales sont transposées en droit interne. La séparation est possible parce que ledroit international public a pour sujet lesÉtats et lesorganisations internationales, tandis que le droit interne concerne lespersonnes physiques etmorales (entreprises, etc.).
À un sens plus technique, on peut dire qu'un système est dualiste lorsqu'il n'admet lavalidité d'une règle du droit international qu'à la condition expresse qu'elle ait été transposée. Selon cette optique, soit le droit internationaldevient du droit national (par transposition), soit il n'existe pas. Une telle position a par exemple été défendue parLord Atkin (en) (1867-1944)[2],Heinrich Triepel (1866-1946) etDionisio Anzilotti (1867-1950).
La conception inverse a été défendue, par exemple, parHans Kelsen (1881-1973), s'appuyant sur la conception de lahiérarchie des normes,Georges Scelle (1878-1961) ou, plus récemment,Pieter Kooijmans, magistrat à laCour internationale de justice de 1997 à 2006[3]. Elle affirme que les règles du droit international, tout comme du droit interne, s'appliquent aux juridictions nationales et par conséquent aux justiciables. La transposition n'est alors pas considérée comme condition nécessaire de la validité du droit international, un magistrat pouvant écarter unenorme nationale si elle contredit une norme internationale ratifiée par l'État en question. Le monisme distingue néanmoins, en général, entre lestraités et lesrègles impératives dujus cogens.
Une conception dualiste tendrait à favoriser une certainemarge nationale d'interprétation ausouverain (pouvoir exécutif etlégislatif). Au contraire, une conception moniste tendrait à favoriser une marge d'interprétation laissée à la discrétion dujuge. Ainsi, si un juge d'un « État moniste » effectue une interprétation « erronée » (ou considérée comme telle) du droit international, le droit interne contredira le droit international tout autant que si le législateur d'un « État dualiste » s'était abstenu de transposer la norme[4]. Le dualisme peut ainsi être défendu en mettant en avant l'ignorance relative des règles du droit international par les juges nationaux.
Ces distinctions sont cependant assez relatives: on peut en effet arguer, dans une perspectiveréaliste (opposée aulégicentrisme), que de toute façon la marge d'interprétation laissée au juge dans les deux cas est la même, c'est-à-dire maximale.
Par ailleurs, en vertu du principelex posterior derogat legi priori, dans un régime dualiste, si une loi ultérieure venait à contredire la loi ayant transposé des règles internationales (donc « nationalisées »), celle-ci deviendrait nulle. Un tel régime requiert donc un contrôle pointilleux des nouvelles lois afin de vérifier leur conformité aux lois antérieures.
Il n'est pas impossible de lier ces choixthéoriques semblant relever exclusivement d'options méthodologiques à desconvictionspolitiques plus profondes, par exemple en spéculant sur la nature du lien entre une position dualiste et une conceptionpluraliste dusystème international qui ne croirait guère à la possibilité d'édifier une communauté mondiale homogène, tandis qu'au contraire le monisme pourrait se rapprocher davantage d'une conceptioncosmopolitique.
Endroit canadien, le dualisme est la règle en matière de droit international des traités, tandis que le monisme avec prépondérance du droit interne est la règle pour le droit international coutumier[5]. Concrètement, cela signifie que le juge canadien va refuser de donner effet en droit interne à un traité qui n'a pas fait l'objet d'une loi de mise en œuvre. Il faut une loi de mise en œuvre pour que le traité international soit applicable, sauf s'il s'agit d'un traité n'ayant absolument aucun effet en droit interne comme un traité d'entraide internationale par exemple. Quant audroit international coutumier, il est automatiquement disponible au juge canadien, il n'a pas besoin de faire l'objet d'une loi de mise en œuvre, car en vertu de lathèse volontariste, le droit coutumier est accepté implicitement par la pratique des États et par l'opinio juris. Cela dit, bien qu'il soit automatiquement disponible conformément au monisme, le droit international coutumier n'est pas automatiquement applicable en droit canadien, car en cas de conflit entre le droit interne et le droit international, le juge canadien doit appliquer le droit interne.
La Suisse adopte traditionnellement une position moniste[6],[7],[8] et est considéré parAstrid Epiney comme partie intégrante duprincipe de légalité en Suisse[9]. Toutefois, laConstitution fédérale suisse ne s'exprime pas sur la relation entre le droit interne et le droit international[10].D'autres auteurs se montrent plus critiques et affirment que l'approche suisse est à la limite du dualisme[11].
Une certaine difficulté d'application se manifeste en1973 avec le début de lajurisprudence Schubert. Néanmoins, leTribunal fédéral a tranché qu'en cas de conflit irréductible entre unenorme constitutionnelle ou uneloi fédérale et laCEDH, celle-ci prime toujours les dispositions de droit interne (ATF 139 I 16 et 149 I 41)[12].