La manière dont une telle loi ecclésiale estlégiférée, interprétée et parfoisjugée varie considérablement entre ces quatre communions d'Églises. Dans ces trois traditions, un canon (en) était à l'origine[2] une règle adoptée par unconcile d'Église ; ces canons ont formé le fondement du droit canonique.
Le terme vient du grecκανών /kanôn, la règle, le modèle. Le terme a rapidement pris uneconnotation ecclésiastique en désignant auIVe siècle les ordonnances desconciles, par opposition au motνόμος /nómos (la coutume, la loi) utilisé surtout pour leslois des autorités civiles. Du fait de cet usage, le termecanoniste renvoie ordinairement à un expert de ce droitinterne de l'Église, tandis qu'un juriste peut être expert de droitreligieux ouecclésiastique s'il connaît le droit de son pays touchant aux diverses religions.
Dans l'Église catholique, le droit canonique (Jus canonicum enlatin) est l'ensemble deslois et des règlements adoptés ou acceptés par les autoritéscatholiques pour le gouvernement de l'Église et de ses fidèles[3].
Les canonistes duMoyen Âge, par un considérable travail de compilation des sources (ordonnances desconciles, décrets despapes, etc.) parviendront progressivement à l'unifier. Le premier d'entre eux, à la fin duIVe siècle, est le moineDenys le Petit, auteur desDionysiana. Ensuite auIXe siècle apparaîtront les Capitulaires de SaintEnguerrand de Metz (capitula Angilramni), lesFaux capitulaires de Benoît de Mayenne et lesFausses décrétales duPseudo-Isidore de Séville. Lors de laRéforme grégorienne apparaîtront aussi d'autres collections comme leDecretum deBurchard de Worms, ainsi que le fondamentalDictatus papæ deGrégoire VII, définissant, selon le point de vue du pape, la relation entre les pouvoirs temporels et le Saint-Siège.Yves de Chartres a également une importance primordiale grâce à son encyclopédie méthodique, laPanormia. Les collections canoniques se multiplient auxXIe et XIIe siècles[4].
Jusqu'auXIe siècle pourtant, le droit canonique est traité sur un mode avant tout littéraire, sur le mode de la compilation plus que du traité raisonné. Au même moment à l'université deBologne, le droit civil est en train de devenir rationnel. C'est alors que, vers1140, Gratien publie saConcordia discordantium canonum (« Concorde des canons discordants »), un traité méthodique du droit, connu sous le nom deDécret de Gratien, qui servira jusqu'en1917. LeDécret de Gratien n'est pas pensé comme un texte normatif à portée universelle : il s'agit d'un manuel à l'usage des juristes de l’Église catholique, réalisé selon les principes de la scolastique et compilant de manière ordonnée des textes « de référence », éventuellement contradictoires, Gratien formulant ponctuellement des synthèses sous forme dedicta. Quoique connu sous ce nom deDécret de Gratien, le texte a plusieurs rédacteurs, à partir d'une première recension qui serait l'œuvre de cet auteur, complétée et amendée dans les décennies suivantes[5].
En 1234, le papeGrégoire IX publie lesDécrétales qui portent son nom, recueil rédigé par saintRaymond de Peñafort, composé de cinq livres regroupant 185 titres. Venant après le Décret, il sera appelé le Liber Extra (X en abrégé). En 1298, le papeBoniface VIII publie un nouveau recueil, faisant suite aux cinq livres des Décrétales : leSexte (« sixième livre », qui en fait est lui aussi composé de cinq livres).
L'ère du droit canonique contemporain, s'ouvre, sous l'impulsion des Pères du concileVaticanI, lorsqu'en1904Pietro Gasparri (futurcardinal secrétaire d'État) est nommé à la tête de la commission de codification. Encore une fois, les canonistes s'inspirent des avancées réalisées par ledroit civil, en l'espèce leCode Napoléon. En1912, le premier livre du code, qui en comportera cinq, est envoyé aux évêques du monde entier. Le, finalement, le papeBenoît XV promulguele nouveau Code de droit canonique par la constitution apostoliqueProvidentissima mater[7].
Différentes Églises catholiques orientales ont, avec l'approbation de la papauté, adopté des textes reprenant leur droit propre.
En 1929,Pie XI crée une commission cardinalice pour la codification de l'ensemble du droit auxquelles ces Églises orientales sont soumises. En 1948, la commission aboutit à un premier projet, dont certaines parties sont promulguées entre 1947 et 1954. Toutefois, le travail est suspendu pendant leconcileVaticanII. À l'issue du concile,Paul VI décide de constituer une commission pour la révision du code oriental. En 1989, cette dernière propose àJean-Paul II la rédaction définitive.
LeCode des canons des Églises orientales (en latin,Codex canonum Ecclesiarum orientalium, abréviation CCEO en français comme en latin) est promulgué le par laconstitution apostoliqueSacri canones. Il est entré en vigueur le.
Quelques canonistes contemporains français et belges célèbres
Dominique Le Tourneau, économiste et canoniste, juge ecclésiastique à l'Officialité de Lille, professeur au Studium de droit canonique de l'archevêché de Lyon, auteur de près de 80 articles scientifiques, et d'un Manuel de droit canonique[9] ;
Jean-Pierre Schouppe, prêtre, professeur à la faculté de droit canonique de l'Université pontificale de la Sainte-Croix de Rome, nommé Consulteur duConseil pontifical pour les textes législatifs le 21 avril 2011[10] ;
↑Fournier P.,Histoire des collections canoniques en Occident, des Fausses décrétales au Décret de Gratien, Paris, 1931.https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5463100w ; Fransen G.,Les collections canoniques, Turnhout, Brepols, 1973.
↑Winroth A.,The Making of Gratian's Decretum, Cambridge University Press, 2005(ISBN0-521-63264-1)
↑Fransen G.,Les décrétales et les collections de décrétales, Turnhout, Brepols, 1972.
Université de Navarre et Université Saint-Paul,Code de droit canonique bilingue et annoté, Montréal, 1999², très souvent désigné sous le nom de « Code annoté ».