Pour les articles homonymes, voirDragonfly.
| Organisation | |
|---|---|
| Constructeur | |
| Programme | New Frontiers |
| Domaine | Étude de la surface et de l'atmosphère de Titan |
| Type demission | Aérobot de typeaérogire |
| Statut | En cours de développement |
| Lancement | juillet 2028 |
| Lanceur | Falcon Heavy |
| Durée | 2,7 ans (sur Titan) |
| Site | dragonfly.jhuapl.edu |
| Distance parcourue | 175km (à la surface de Titan) |
|---|
| Masse au lancement | 2039 kg dont aérobot 875 kg |
|---|---|
| Source d'énergie | MMRTG (aérogire) |
| DraMS | Spectromètre de masse |
|---|---|
| DraGNS | Spectromètre gamma et neutron |
| DrACO | Recueil d'échantillons (foreuse) |
| DragonCam | Suite de caméras |
| DragonMet | Station météorologique |
Dragonfly (enfrançais :« Libellule ») est une mission d'exploration du système solaire de l'agence spatialeaméricaine, laNASA, dont l'objectif est d'étudierTitan, le plus grossatellite naturel de Saturne. Les caractéristiques de cette lune — atmosphère épaisse,lacs deméthane et d'éthane liquides,substances organiques complexes,cryovolcanisme, pluie de méthane — en font un monde d'un très grand intérêt sur le plan scientifique.
La mission spatiale exploite la présence d'une atmosphère dense (1,5 fois la pression à la surface de la Terre) et d'unegravité inférieure à celle de laLune : elle met en œuvre unaérobot de typeaérogire d'une masse de 875 kg, qui effectuera de multiples vols de courte durée pour étudier la basse atmosphère et la surface de Titan. Pour disposer de suffisamment d'énergie pour fonctionner et survivre à une température moyenne de−180 °C, l'engin spatial dispose d'ungénérateur thermoélectrique à radioisotope.
Dragonfly est un des deux finalistes retenus en pour la quatrième mission duprogrammeNew Frontiers, qui regroupe des sondes spatiales chargées d'explorer lesystème solaire avec un coût plafonné à un milliard de dollars. La NASA sélectionne cette mission en. Celle-ci doit décoller en 2028 et se poser sur Titan en.
La missionCassini-Huygens, qui a étudiéTitan entre 2004 et 2017, a révélé un monde d'un grand intérêt scientifique. Une chimie complexe et diversifiée reposant sur lecarbone se déroule à la surface de cette lune deSaturne. On retrouve les mêmes processus que sur Terre mais le cycle duméthane remplacecelui de l'eau. C'est un laboratoire naturel unique pour étudier lachimie prébiotique et pour rechercher des signatures de formes de vie basées sur leshydrocarbures. Il se peut que les matières organiques interagissent avec de l'eau liquide à la surface ou non loin de la surface accroissant la possibilité de l'apparition d'une chimie prébiotique. Des échanges pourraient avoir lieu avec unocéan intérieur. Les mesures effectuées par les instruments de la mission ont laissé beaucoup d'inconnues sur la composition des matériaux en surface. Par contre, les scientifiques ont la certitude que celle-ci est très variable selon les lieux. Il est donc essentiel de collecter des données sur différents sites pour déterminer dans quelle mesure la chimie prébiotique a pu progresser dans des environnements géologiques différents. Compte tenu de cet objectif, la mobilité d'un engin spatial est essentielle pour pouvoir effectuer les mesures sur les différents sites[1].

Avant même l'arrivée de Cassini-Huygens dans lesystème saturnien, des groupes de travail préparant pour la NASA leplan décennal d'exploration du système solaire de 2003 avaient identifié à la fois l'importance scientifique de la chimie à l’œuvre à la surface de Titan et le potentiel d'une mission exploitant la mobilité d'un aéronef. Les premiers scénarios de mission reposant sur des engins plus lourds que l'air et sur des hélicoptères datent de cette époque. Depuis la réception des premiers résultats fournis par Cassini-Huygens, plusieurs projets aux caractéristiques et aux coûts variables ont été proposés sans qu'aucun soit retenu[2] :
Après une pause d'un an imposée par des contraintes budgétaires, leprogrammeNew Frontiers de la NASA, qui rassemble des missions d'exploration du système solaire à coût intermédiaire, est réactivé début 2015. Un appel à propositions est lancé fin 2016. Il est prévu à l'époque qu'une présélection débouchant sur des études approfondies soit finalisée en puis que la sélection finale soit effectuée en. Les propositions de mission doivent porter sur un des six thèmes énoncés dans le plan stratégique et le plan scientifique de la NASA de 2014[3] :
Douze projets sont proposés.Dragonfly est le fruit des travaux d'une équipe du laboratoireApplied Physics Laboratory (APL) de l'Université Johns-Hopkins dans leMaryland dirigée par laplanétologueElizabeth Turtle. Le laboratoire APL joue un rôle de pointe dans la réalisation des satellites scientifiques et des sondes spatiales d'exploration du système solaire lancées par la NASA avec des missions commeMESSENGER (2004), première sonde spatiale à s'être placée en orbite autour de la planèteMercure,New Horizons (2006) première sonde spatiale à avoir étudié in situ la planète nainePluton l'observatoire solaireSolar Probe Plus lancé en 2018,Europa Clipper (2023) (partenariat avec leJet Propulsion Laboratory) chargée d'étudier la luneEurope de la planète géanteJupiter etDART (2020)[4].
Dragonfly est avecCAESAR (Mission de retour d'échantillons de lacomète67P/Tchourioumov-Guérassimenko) une des deux missions retenues en pour la sélection finale qui doit avoir lieu en 2019[5],[4]. La missionDragonfly est finalement sélectionnée le bien que Titan ne fasse pas partie des destinations retenues par le dernierrapport décennal sur les sciences planétaires sur lequel la NASA doit normalement baser son choix. En sélectionnant cette mission l'agence spatiale a voulu réagir rapidement aux dernières découvertes effectuées sur cette lune par la missionCassini Huygens et letélescope Hubble sans attendre la prochaine actualisation de ce rapport[6].
Le lancement de la mission est programmé initialement en 2026 mais en la date est repoussée en 2027 puis en 2028 pour prendre en compte des facteurs exogènes comme l'épidémie deCOVID en cours. Malgré ces reports l'arrivée à la surface de Titan reste programmée pour 2034[7],[8]. En, la NASA sélectionne le lanceurFalcon Heavy de la sociétéSpaceX pour le lancement de sa sonde spatiale qui doit décoller depuis lecomplexe de lancement 39A ducentre spatial Kennedy. La prestation est facturée un montant de256,6 millions de dollars. Lafenêtre de lancement s'ouvre le et se referme le[9]. En le cout du projet qui avait été estimé initialement à 2,2 atteint désormais3,5 milliards de dollars () ce qui alimente les rumeurs d'annulation compte tenu des dépassements que connait à la même époque le projetMars Sample Return. Mais la NASA confirme à cette date la poursuite des développements en annonçant par ailleurs que le projet a franchi avec succès larevue de conception critique (enanglais :Critical Design Review ou CDR) qui fige la conception du véhicule et confirme son coût de fabrication[10],[11].
Le développement de l'aérobot qui doit pouvoir fonctionner dans une atmosphère très particulière à des températures extrêmement basses (−180 °C) fait face à de nombreuses difficultés. Pour vérifier le fonctionnement des composants dans cet environnement le laboratoireAPL dans ses locaux met en service fin 2023 une chambre cubique de plus de 4 mètres de côté, réalisée en acier inoxydable, dans laquelle est reproduite la température et la pression que subiraDragonfly[12]. Le spectromètre de masse DraMS devait initialement analyser la composition des échantillons de sol prélevées mais également celle de l'atmosphère. Mais les ingénieurs ne parviennent pas à concevoir une ouverture du fuselage qui ne compromettrait pas la sécurité de l'engin (chute de la température interne) et ils doivent renoncer à cette fonctionnalité. La conception des lubrifiants qui subissent des températures anormalement basses constituent une autre difficulté. Certaines caractéristiques de l'aérobot évoluent durant la phase de conception comme l'utilisation de rotors à trois pales (au lieu de deux) et la modification de l'emplacement de certains instruments[10].
Durant sa mission,Dragonfly doit collecter les données suivantes[13]. :
Le site d'atterrissage retenu est un champ de dunes situé près ducratère d'impactSelk (7° N, 199° O) de90 kilomètres de diamètre. La région fait partie de l'immense champ de dunes deShangri-La où s'était déjà posé l'atterrisseur européenHuygens. La sélection de ce site résulte d'un ensemble de contraintes[14],[15] :
Comme toutes les sondes spatiales de la NASA destinées à se poser sur un corps planétaire doté d'une atmosphère,Dragonfly est composé d'un étage de croisière qui prend en charge le transit de la Terre jusqu'au voisinage de Titan de l'aérobot. Ce dernier est encapsulé dans un véhicule de rentrée qui doit le protéger de l'échauffement thermique subie par la sonde spatiale durant sa rentrée atmosphérique à grande vitesse. Une fois que la vitesse a suffisamment décrue, les deux moitiés dubouclier thermique sont éjectés et des parachutes sont déployés pour réduire la vitesse jusqu'à l'arrivée au sol[10].
Le véhicule de rentrée comprend unbouclier thermique de4,5 mètres de diamètre qui reprend les technologies mises en œuvre par lesastromobiles martiensCuriosity etPerseverance. Le bouclier comprend un ensemble de capteurs DrEAM (enanglais :Dragonfly Entry Aerosciences Measurements), développés conjointement par lecentre de recherche Ames de la NASA et l'Agence spatiale allemande, qui doivent collecter des données sur les conditions rencontrées (pression, température), sur les caractéristiques de la haute atmosphère (abondance du méthane, etc.) et sur les performances du bouclier thermique[16].

Pour pouvoir explorer plusieurs sites à la surface de Titan distants de 10 à 100 km entre eux, différents scénarios ont été étudiés. Le recours à plusieurs atterrisseurs nécessite de développer plusieurs copies des instruments scientifiques et du système d'acquisition avec un impact fort en termes de masse et donc de coût. L'approche la plus favorable consiste à utiliser un seul ensemble instrumental et à le déplacer d'un site à un autre. Plusieurs architectures d'aéronef ont été étudiées : hélicoptère, ballon gonflé à l'hélium ou à l'hydrogène,montgolfière (ballon à air chaud) et avion. La solution retenue exploite le fait que Titan a une gravité sept fois plus réduite que celle de la Terre et dispose d'une atmosphère1,45 fois plus épaisse. Ces deux caractéristiques sont favorables à la mise en œuvre d'un engin volant plus lourd que l'air, puisque les deux combinés font qu'il est presque11 fois moins énergivore de faire voler un drone sur Titan que sur la Terre. Les ingénieurs ont choisi la formule de l'octorotor, aéronef équipé de huit rotors à trois pales de1,85 mètres de diamètre (deux à chaque coin de sa structure). C'est l'équivalent d'unquadrirotor mais la présence de paires de rotors fournit une redondance essentielle dans un contexte où aucune réparation ne peut être envisagée. Les déplacements de l'aéronef sont obtenus uniquement en faisant varier la vitesse de rotation d'un ou plusieurs rotors. Cette architecture, rendue possible par les progrès de l'électronique chargée du pilotage de la vitesse des rotors, permet d'obtenir un ensemble mécanique plus simple que celle d'un hélicoptère. La facilité de sa mise en œuvre est illustrée par la multiplication récente desdrones de ce type. Cette formule permet de mieux contrôler les phases de vol et d'atterrissage. Par ailleurs un engin de ce type peut être facilement testé sur Terre. Son encombrement est compatible avec le volume disponible dans le module de descente chargé de le protéger durant larentrée atmosphérique dans l'atmosphère de Titan[1].
Dragonfly est un engin de 875 kg long de3,85 mètres pour une largeur de3,85 mètres et une hauteur de1,75 mètres. Il avait été envisagé initialement de munirDragonfly d'un système de flottaison pour que l'aérobot puisse se poser sur les lacs de méthane de Titan. Mais cette option a été abandonnée au profit d'un système d'atterrissage constitué par deux patins ne permettant de se poser que sur le sol ferme. La forme et la taille de l'aéronef ont dû prendre en compte le volume disponible dans le module de descente[Note 4] chargé de protéger l'engin durant la rentrée atmosphérique sur Titan. En position de stockage dans le module de descente, les patins sont repliés. Le corps de l'aéronef est de forme rectangulaire avec leMMRTG (système de production d'énergie) fixé à l'arrière en position inclinée dans une configuration analogue à celle du MMRTG du rover Curiosity. Uneantenne parabolique grandgain, utilisée pour les communications avec la Terre, est fixée sur la partie supérieure de l'aérobot. Lorsqu'elle n'est pas utilisée, elle est repliée. Deux systèmes de prélèvement d'échantillons du sol de Titan (un par patin), de conception très simple, permettent d'alimenter lespectromètre de masse. Il s'agit d'uneforeuse disposant d'unactuateur avec un seuldegré de liberté. La densité de l'atmosphère de Titan permet de convoyer pneumatiquement l'échantillon de sol prélevé, quelle que soit sa nature, par un système d'aspiration jusqu'à l'instrument effectuant son analyse[17],[18].
Dragonfly peut effectuer des vols de quelques heures en pilotage automatique en utilisant une batterie électrique comme source d'énergie. Celle-ci, d'une capacité de 135 Ah, est rechargée au sol à l'aide d'ungénérateur thermoélectrique à radioisotope embarqué. Durant la phase de vol, le drone analyse la composition de l'atmosphère et établit le profil vertical de celle-ci. Lorsqu'il est au sol, il étudie la composition des matériaux organiques et des glaces de la surface en utilisant unspectromètre de masse et un spectromètre gamma à neutrons actifs. Le drone dispose également d'instruments pour étudier la météorologie et effectuer des études sismiques[19],[18].

L'énergie constitue la principale contrainte à laquelle doit faire face unaérobot sur Titan. L'énergie solaire disponible au niveau de l'orbite de cette lune est100 fois moins importante que surTerre[Note 5]. Par ailleurs, l'atmosphère épaisse et brumeuse de Titan filtre le rayonnement du Soleil divisant encore par 10 cette faible quantité d'énergie solaire. Les besoins en énergie sont accrus par la température particulièrement basse[Note 6] qui nécessite de produire de la chaleur pour maintenir en fonctionnement de nombreux composants de l'aérobot. Dans ces conditions le recours à ungénérateur thermoélectrique à radioisotope (MMRTG), produisant de l'énergie électrique par conversion de l'énergie thermique résultant de ladésintégration radioactive deplutonium 238 constitue la seule option disponible. LeprogrammeNew Frontiers met à disposition de la mission qui sera retenue trois MMRTG analogues à celui utilisé par le rover Curiosity sur Mars. Chaque MMRTG fournit en début de vie 2 000 watts thermiques convertis en120 watts électriques. Compte tenu de leur masse unitaire, il ne peut pas être envisagé d'utiliser plus d'un MMRTG surDragonfly. La durée du transit entre la Terre et Titan (environ9 ans) qui entraînera une diminution sensible de l'énergie produite et le retour d'expérience pour l'instant limité à5 ans sur Curiosity, ont incité les concepteurs deDragonfly à tabler sur la production de70 watts électriques. L'énergie thermique non convertie en électricité sera utilisée pour maintenir l'intérieur de l'aéronef et en particulier les batteries à des températures suffisamment élevées. D'épaisses couches d'isolant thermique envelopperont le corps de l'aéronef. Seul le capteur de l'instrument DraGNS qui, dans des conditions normales nécessite uncryoréfrigérateur, sera exposé sans aucune protection thermique[20].
La consommation électrique générée par la collecte et l'analyse chimique des échantillons du sol est importante mais porte sur des durées relativement brèves. Ce sont les activités de collecte continue de données (données météorologiques et sismiques) qui, bien que nécessitant une puissance électrique faible, demandent le plus d'énergie en ce qui concerne lacharge utile. Pour les télécommunications réalisées par l'intermédiaire d'uneantenne parabolique à grandgain, 5millijoules d'énergie sont nécessaires pour transmettre 1bit d'information à la Terre. La transmission de 10gigabits de données[Note 7] nécessite donc 140 kWh soit environ80 jours de production du MMRTG. Le jour sur Titan dure384 heures (16 jours terrestres). Au niveau de Titan, la Terre se trouve pratiquement dans la même direction que le Soleil[Note 8]. Les communications avec la Terre se font donc uniquement de jour et la nuit est donc consacrée à la recharge des batteries. Malheureusement, du fait de sa durée (192 heures), il faudrait disposer d'une batterie de 140 kg pour stocker toute l'énergie produite ce qui dépasse largement les contraintes de masse de la mission. Les concepteurs de la mission ont donc accepté qu'une partie de l'énergie produite durant la nuit ne soit pas stockée pour son utilisation dans la journée. Les communications avec la Terre se font via uneantenne parabolique grandgain et une antenne moyen gain utilisant unTube à ondes progressives de100 watts enbande X[21],[18].
L'atmosphère de Titan est beaucoup plus dense (4,4 fois) et plus froide que celle de la Terre. Elle est composée à 95 % d'azote ce qui abaisse sa viscosité. En conséquence, lenombre de Reynolds deDragonfly sur Titan est plusieurs fois plus élevé que s'il volait sur Terre. Le profil des pales des rotors est adapté pour optimiser son efficacité et il est proche de celui adopté par les pales deséoliennes terrestres ce qui présente l'avantage d'accroitre sa robustesse. Dans l'atmosphère de Titan, lavitesse du son est de194 m/s, contre340 m/s sur Terre, ce qui limite à la fois la vitesse de rotation des rotors et la longueur des pales. En pratique, cette contrainte a un impact réduit sur les performances de l'aéronef. Compte tenu de ces caractéristiques,Dragonfly (masse environ 875 kg) pourra atteindre une vitesse maximale en vol de10 m/s (36 km/h). Pour un vol sur une distance d'environ 40 km, la consommation électrique serait d'environ 2 kWh. Une batterie d'environ 30 kg, avec une densité énergétique de 100 Wh/kg, permettrait donc de franchir 60 km. L'énergie nécessaire pour un vol ne croît pas de manière linéaire par rapport à la masse de l'aéronef mais en portant cette valeur à la puissance 1,5 ce qui constitue une des caractéristiques limitant la masse deDragonfly. Malgré la vitesse maximale modeste envisagée, les concepteurs de l'aéronef ont soigné son aérodynamisme qui constitue un facteur de consommation électrique significatif dans l'atmosphère épaisse de Titan. Pour limiter les forces de trainée, la face avant de l'aéronef présente une forme aérodynamique, un carénage enveloppe les foreuses fixées sur les patins et l'antenne parabolique est repliée à plat pont en vol. L'aéronef pourra être utilisé pour réaliser des sondages verticaux de la basse atmosphère jusqu'à une altitude d'environ 4 km. Le mode de propulsion permet une ascension verticale mais interdit une descente verticale. Le modèle de circulation atmosphérique de Titan établi à l'aide des données recueillies par la sonde spatiale Cassini prédit des vents dont la vitesse atteint au maximum de 1 à2 m/s. Ceux-ci ne devraient donc avoir qu'un impact mineur sur la distance franchissable parDragonfly[22].

L'aérobot embarque unecharge utile qui reprend par bien des aspects, un sous-ensemble des instruments sélectionnés par la NASA dans le cadre du projet Titan Explorer de 2007. Il permet de recueillir des données géophysiques, de réaliser des photos et de collecter des données météorologiques ainsi que d'étudier les principales caractéristiques de la chimie de la surface. La mesure de l'hydrogène atmosphérique, indice éventuel d'une activité biologique, ainsi que la possibilité de déterminer rapidement les éléments chimiques présents à la surface sans avoir à prélever d'échantillon grâce à une mesure du rayonnement gamma stimulé par un bombardement de neutrons, constitue une nouveauté par rapport à la proposition de 2007[23]. La charge utile comprend quatre suites instrumentales[24] :
Pour retrouver les mêmes conditions atmosphériques que celles rencontrées par la sondeHuygens lors de son atterrissage sur Titan en, la date d'arrivée deDragonfly sur la lune de Saturne a été fixée en 2034 : il se sera alors écoulé une année saturnienne (soit29,5 années terrestres) depuis le premier atterrissage. À l'origine la sonde spatialeDragonfly devait être placée en orbite en 2025 par unlanceur spatial de moyenne puissance (Atlas V-5xx) avec uneénergie caractéristique ou[Note 10] modérée de 20 km2/s2 et effectuer quatre ou cinq survols de la Terre et de Vénus (combinaisons EVEEGA ou VEEGA) qui auraient par des manœuvres d'assistance gravitationnelle permis d'accélérer suffisamment la sonde spatiale pour qu'elle puisse atteindre Saturne et Titan. À la suite du glissement de la date de lancement reportée à 2027 puis à 2028, les responsables de la mission ont dû opter pour une trajectoire réduisant le temps de transit entre la Terre et Titan. Pour y parvenir la sonde spatiale sera lancée par une fusée plus puissante (Vulcan 6S,Falcon Heavy) capable de propulser celle-ci avec une vitesse d'environ 55 km2/s2. La sonde spatiale emportera plus d'ergols car elle devrait effectuer des corrections orbitales plus importantes demandant undelta-V de650 m/s[Note 11]. Grâce à ces changements une seule assistance gravitationnelle de la Terre sera nécessaire ce qui permettra de réduire le temps de transit de 9,9 à6,4 années. Cette nouvelle trajectoire présente par ailleurs deux avantages : la sonde spatiale ne s'approche pas plus de 0,89unité astronomique du Soleil (au lieu de 0,615 UA) ce qui permet de réduire les contraintes thermiques, une antenne hélécoïdale imposée par le séjour dans le système solaire interne (en deçà de l'orbite de la Terre) peut être supprimée et la perte de puissance duMMRTG durant le transi est limitée (puissance à l'arrivée de91 watts au lieu de82 watts) ce qui permet d'allonger la durée de vie opérationnelle de l'aérobot sur Titan[26].
Après deux modifications de trajectoire mineures (TCM-1 et TCM-2), la sonde spatiale doit effectuer une importante manœuvre de correction de trajectoire (TCM-3) générant unchangement de vitesse de543 m/s environ un an et demi après le lancement (mi-2029). Compte tenu de la durée de fonctionnement de la propulsion pour réaliser cette poussée[Note 12], cette manœuvre est décomposée en quatre étapes qui s'échelonnent sur une semaine. Deux petites manœuvres (TCM-4 et 5) réalisées une dizaine de jours plus tard viennent apporter des corrections. L'unique manœuvre d'assistance gravitationnelle de la Terre a lieu en et place la sonde spatiale sur une trajectoire directe vers Titan. Elle est précédée de trois petites corrections (TCM-6, 7 et 8) destinées à placer la sonde spatiale sur la bonne trajectoire. L'engin spatial survole la surface de la Terre à une altitude d'environ450 kilomètres. Cette manœuvre lui permet d'accroitre sa vitesse de6,9 km/s : sonénergie caractéristique atteint ainsi la valeur 145 km2/s2 qui aurait été nécessaire dans le cas d'un lancement direct vers Titan depuis la Terre. La trajectoire obtenue est corrigée par une petite manœuvre (TCM-9) réalisée dix jours après ce survol. Une nouvelle correction est effectuée600 jours avant l'arrivée sur Titan (TCM-10). Dans les jours qui précèdent l'arrivée sur Titan, quatre manœuvres de correction de trajectoire distinctes sont programmées (TCM-11 à TCM-14) de manière à ce que la sonde spatiale pénètre dans l'atmosphère de Titan à 7 800 kilomètres de son centre[27].

Titan dispose d'une atmosphère dense et épaisse qui impose une contrainte réduite sur l'angle d'arrivée de lasonde spatiale lorsqu'elle entame sarentrée atmosphérique. En 2005, l'atterrisseurHuygens a plongé dans l'atmosphère de Titan avec une incidence de 65° (donc plus proche de la verticale que de l'horizontale) alors que les engins spatiaux atterrissant surMars sont obligés de pénétrer dans l'atmosphère peu dense et de faible épaisseur de cette planète avec une incidence rasante (angle d'environ 15°)[28]. Cette caractéristique permet de disposer d'une grande latitude pour sélectionner le site d'atterrissage qui sera situé dans une zone formée d'anneau de grande taille déterminé par le point d'entrée dans l'atmosphère. Pour limiter la vitesse d'arrivée et ainsi réduire l'épaisseur dubouclier thermique du module de descente, le scénario le plus favorable consisterait à atterrir sur la face arrière de Titan[Note 13], toutefois le gain de masse serait relativement faible. Si la sonde spatiale arrive au milieu de la décennie 2030, l'atterrissage devra se faire à une latitude basse pour que les communications avec la Terre puissent se faire dans de bonnes conditions. Compte tenu de la date d'arrivée, la sonde spatiale sera confrontée à des conditions météorologiques similaires à celles rencontrées par l'atterrisseur Huygens (saison et latitude identiques). Un atterrissage non loin de l'équateur est le scénario préféré à la fois des scientifiques et des ingénieurs. Cette région est caractérisée, selon les relevés (notamment radar) deCassini Huygens, par des terrains peu accidentés donc limitant les risques à l'atterrissage. La région est couverte de dunes espacées atteignant une altitude maximale de150 mètres avec des pentes douces (environ 5°) formant un paysage assez analogue à celui de la mer de sables deNamib enAfrique du Sud. Si ces caractéristiques sont complètement similaires, environ 95 % de la surface devrait comporter des pentes inférieures à 6 % laissant donc beaucoup de latitude dans le choix du site d'atterrissage pour un engin conçu pour accepter une pente pouvant atteindre 10°. Par ailleurs, durant la phase finale de l'atterrissage, l'aérobot fera fonctionner ses rotors ce qui lui donnera du temps pour sélectionner le site d'atterrissage le plus propice d'après les analyses de terrain effectuées à l'aide de son radar[29].

Une fois au sol,Dragonfly utilisera progressivement sa capacité à se déplacer en augmentant à chaque fois la distance, la durée et l'altitude des vols. Il pourra commencer par des déplacements de quelques mètres vers des emplacements dont les caractéristiques sont connues par les images prises par ses caméras. En fonction de la diversité des sols autour du site, il pourra éventuellement ainsi analyser différents types de sol. Pour valider les performances des capteurs de l'aéronef, les premiers déplacements lointains pourront se faire d'abord en se basant sur des données fournies par les capteurs inertiels avant d'exploiter la navigation optique reposant sur l'analyse des images prises une fois qu'aura été dressé un catalogue de points de repères dans la région alentour[30].
La stratégie d'exploration combinera la prise de photos aériennes de zones d'atterrissage potentielles au cours de vols de reconnaissance et l'analyse des images par les équipes sur Terre pour identifier des sites à la fois intéressants et présentant un risque limité. À chaque fois qu'il atterrit, l'aérobot déploie son antenne parabolique grand gain et commence à transmettre en priorité les photos aériennes effectuées ainsi que ses paramètres de fonctionnement durant le vol. Dès l'atterrissage, la consistance du terrain est analysée à l'aide des capteurs fixés sur les patins. Au bout de quelques heures, le spectromètre gamma a déterminé la composition chimique du sol alentour permettant de classer le terrain dans une des grandes catégories identifiées sur Titan[Note 14]. À l'aide de ces données et des images du site prises par les caméras, l'équipe scientifique au sol déterminera s'il faut effectuer le prélèvement d'un échantillon du sol avec l'une des deux foreuses et son analyse par le spectromètre de masse. Cette activité consommatrice d'énergie pourra être effectuée de nuit si les batteries disposent de l'énergie nécessaire. Les autres activités pouvant être réalisées durant la nuit sont le recueil des données sismiques et météorologiques et la prise d'images du sol en utilisant les projecteurs. Les photos prises de nuit permettront de déterminer avec plus de précision la couleurs des matériaux en surface que les photos de jour éclairées par une lumière solaire filtrée par l'épaisse atmosphère et tirant sur le rouge[31].
La durée de la mission primaire est de2,7 ans (année terrestre) au cours de laquelle l'aérobot devrait parcourir 175 km. La durée de vie deDragonfly est limitée par songénérateur thermoélectrique à radioisotope (MMRTG) dont la capacité à produire de l'énergie électrique diminuera au fur et à mesure de ladésintégration radioactive duplutonium 238. Le MMRTG produira suffisamment d'énergie pour permettre à l'aérobot de fonctionner durant8 ans sur Titan[6].
Sur les autres projets Wikimedia :
| Général | ||
|---|---|---|
| Mers | ||
| Lacs | ||
| Îles | ||
| Faculae | ||
| Maculae | ||
| Cratères | ||
| Fluctus | ||
| Flumina | ||
| Virgae | ||
| Autres formations | ||
| Exploration | ||
Missions spatiales vers Saturne | ||
|---|---|---|
| Survols |
| |
| Orbiteurs |
| |
| Sonde atmosphérique |
| |
| Missions en cours de développement | ||
| Projets à l'étude | ||
| Projets abandonnés | ||
| Voir aussi | Exploration du système saturnien -Saturne | |
| Les dates indiquées sont celles de lancement. | ||
| Lanceurs |
| ||||||||||||||||
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Programme spatial habité |
| ||||||||||||||||
| Satellites scientifiques |
| ||||||||||||||||
| Satellites d'application |
| ||||||||||||||||
| Satellites militaires |
| ||||||||||||||||
| Bases de lancement |
| ||||||||||||||||
| Établissements | |||||||||||||||||
| Programmes |
| ||||||||||||||||
| Articles liés | |||||||||||||||||
| La première date est celle du lancement du lancement (du premier lancement s'il y a plusieurs exemplaires). Lorsqu'elle existe la deuxième date indique la date de lancement du dernier exemplaire. Si d'autres exemplaires doivent lancés la deuxième date est remplacée par un -. Pour les engins spatiaux autres que les lanceurs les dates de fin de mission ne sont jamais fournies. | |||||||||||||||||