Douaire est un terme de droit ancien désignant la portion de biens ou de revenus réservés à uneépouse en cas de veuvage, la bénéficiaire étant appeléedouairière. Dans le droit ancien, le douaire peut être soitcoutumier (défini par la coutume locale), soit conventionnel (défini par le contrat de mariage). Élément fondamental du droit du mariage sous l'Ancien Régime, notamment dans les catégories sociales fortunées, le douaire disparaît du droit civil français en 1804 (Code Napoléon). Mais on le trouve encore dans certains droits de l'époque contemporaine, par exemple au Québec jusqu'en 1993.
Par ailleurs, le terme « douaire » est aujourd'hui utilisé enanthropologie de laparenté pour désigner les biens attribués à une épouse par son époux lors d'un mariage.
« Douaire » vient du verbe « douer » signifiant « doter ».Malgré cette proximité étymologique, le douaire doit être distingué sur le plan juridique de ladot de l'épouse.
Le douaire trouve son origine dans ladot, mais, alors que la dot est une pleine propriété, le douaire est l'usufruit des biens ou d'une portion des biens de l'époux décédé.[pas clair]
Le douaire n'existe pas dans ledroit romain[1]. Il a son origine dans les coutumes des peuples germaniques qui s'installent dans l'Empire romain à partir duVe siècle et se dotent alors de codes de lois écrits (loi des Burgondes,loi des Francs saliens, etc.).
Durant lehaut Moyen Âge, le douaire passe dans les coutumes qui s'établissent dans les différentes régions de l'ex-Empire romain.
Dans les coutumes duroyaume de France, le douaire consiste en unusufruit attribué à la veuve sur les biens de son mari défunt.
Mais il est aussi possible d'inclure dans uncontrat de mariage un douaire conventionnel, pratique qui existedepuis longtemps[pas clair].
En 1214, le roiPhilippe-Augustedéfinit un douaire légal, en ordonnant que la veuve reçoive la moitié de la fortune de son défunt époux[réf. nécessaire][2]. Mais les textes ne remplacent pas les coutumes présentes dans certaines provinces[3], qui ne font pas partie dudomaine royal.
Le roiHenri II, qui règne à partir de 1154, fixe le douaire à la jouissance du tiers des biens[4].
Le douaire n'est pas unedonation[5],libéralité faite à quelqu'un sans y être obligé ; il s'agit de l'obligation imposée à un homme épousant une femme de pourvoir à sa subsistance, même après sa mort. L'homme peut préciser par un contrat ce qu'il laisse, sinon la coutume s'applique.
La condition principale du douaire est lemariage. Dans certaines provinces, le douaire s'applique à toutes les femmes, nobles ou roturières, dans d'autres (par exemple enSaintonge), seulement aux femmesnobles.
Laquotité du douaire varie suivant les provinces entre le tiers et la moitié des biens propres du mari[1]. Elle peut également varier suivant la nature des biens. Le douaire ne porte pas de façon égale sur les biens suivant leur provenance : dans le cas le plus fréquent (Paris par exemple), le douaire concerne les biens possédés au moment du mariage, augmentés de ceux reçus parlegs ou successions au cours du mariage.
Lorsque le mari meurt avant l'épouse, la jouissance des immeubles devient commune entre la douairière et les héritiers de l'époux (dont leurs enfants communs), auxquels appartient le surplus du douaire. Cela suppose une évaluation des biens et de leur revenu, estimation effectuée par les parties, puis, si elles ne sont pas d'accord, par des experts qu'elles choisissent.
Une femme peut être privée de son douaire. La principale cause est l'adultère, mais il faut que la faute ait été déclarée par une sentence judiciaire, à la suite d'une plainte intentée par le mari.
Le douaire s'éteint par la mort naturelle de la douairière, mais aussi par sa mort civile, par exemple, dans le cas d'unbannissement hors du royaume.
Un douaire des enfants[5] existe dans quelques provinces (Paris,Chartres...). Dans la coutume de ces provinces, le douaire des enfants consiste dans la propriété des biens dont la veuve a l'usufruit. Le douaire des enfants et celui de la veuve sont en fait un seul et même douaire, dont la femme a l'usufruit et les enfants la propriété.
Le douaire conventionnel, « douaire préfix » selon l'usage de l'époque, qui est stipulé par contrat de mariage, présente certains avantages par rapport au douaire coutumier :
Le douaire préfix est une clause que l’on rencontre dans presque tous les contrats de mariage. Les stipulations contractuelles sont de deux types :
La clause de douaire la plus courante est rédigée de la façon suivante : « Le futur époux a doué et doue la future épouse de (tant de) livres une fois payées (ou : de (tant de) livres de rente) de douaire préfix à prendre sur tous les biens présents et à venir du futur époux, et dont elle jouira sitôt qu’il aura lieu, sans être obligée d’en faire demande en justice. Le fonds duquel douaire,sur le pied du denier 20, sera propre aux enfants du mariage.»
Il est facile de calculer l’importance du montant du douaire par rapport à la fortune du futur époux.[pas clair] Les quotités les plus utilisées (tiers, moitié, trois-quarts) se rapprochent sensiblement de la règle coutumière locale.
Le douaire est abrogé en 1804[7], par leCode Napoléon (article 1390) : « Les époux ne peuvent plus stipuler d'une manière générale que leur association sera réglée par l'une des coutumes, lois et statuts locaux qui régissaient ci-devant les diverses parties du territoire et qui sont abrogées par le présent code ».
Cette disposition entraîne des difficultés financières pour les veuves.
En1849[8], sous la Deuxième République, une proposition de loi tendant à permettre à l'époux survivant de réclamer des « aliments à la succession » n'aboutit à rien.
Un dispositif est mis en place par une loi du (modifiant l'article 767 du Code civil) : « Si le défunt ne laisse aucun parent au degré successible, le conjoint survivant succède à la pleine propriété de ses biens. Si au contraire, il laisse des héritiers le conjoint recueille l'usufruit d'une partie des biens : un quart de la succession s'il n'y a que des enfants nés de mariage ».
Le douaire est une pratique reconnue par leCode civil du Bas-Canada, en vigueur de 1866 à 1993.
L'article 2216 C.c.B.c.[9] prévoit notamment que :
« Le droit au douaire coutumier légal n'est conservé, que par l'enregistrement de l'acte de célébration du mariage avec une description des immeubles alors assujettis au douaire.
Quant aux immeubles qui subséquemment pourraient échoir au mari et devenir sujets au douaire coutumier, le droit au douaire sur ces immeubles n'a d'effet que du jour de l'enregistrement d'une déclaration à cet effet, indiquant la date du mariage, le nom des époux, la description de l'immeuble, la charge du douaire, et comment l'immeuble y est devenu sujet.
Les enregistrements mentionnés dans cet article se font par dépôt. »
Le douaire n'est pas conservé par leCode civil du Québec entré en vigueur en janvier1994.
En ce qui concerne la situation des veufs ou des veuves, ce code prévoit dans ses règles dedévolution légale que lorsqu'un défunt décède sans testament, le conjoint marié doit obligatoirement recevoir un tiers de la succession et les descendants les deux autres tiers (art. 666 C.c.Q.)[10]. S'il décède avec un testament, rien ne l'oblige à léguer quoi que ce soit à son épouse, en raison du principe de laliberté de tester[11], mais l'épouse peut néanmoins bénéficier de la survie de l'obligation alimentaire en réclamant l'équivalent de douze mois d'aliments (art. 688 C.c.Q.)[12] et elle va aussi bénéficier du partage du patrimoine familial (art. 416 C.c.Q)[13] et du partage de la société d'acquêts (465-484 C.c.Q.)[14] le cas échéant.
Ledroit musulman contient une notion analogue, lemahr, qui présente quelques différences dans sa définition juridique, puisqu'il s'agit d'un don (généralement monétaire) remis au moment du mariage par le mari à son épouse.[réf. souhaitée]