Ledesign[1] est une activité de création souvent à vocation industrielle ou commerciale ; le but premier du design est d’inventer, d’améliorer ou de faciliter l’usage ou le processus d’un élément ayant à interagir avec un produit ou un servicematériel ouvirtuel[2].
Un des rôles du design est derépondre à des besoins, derésoudre des problèmes, deproposer des solutions nouvelles ou d’explorer des possibilités pour améliorer la qualité de vie des êtres humains, que ce soit dans lessociétés industrielles occidentales (où le design est né) ou dans lespays en voie de développement (design humanitaire). Lapluridisciplinarité est au cœur du travail du designer, dont la culture se nourrit aussi bien desarts, destechniques, dessciences humaines ou dessciences de la nature.
Le design est à distinguer desarts décoratifs, expression apparue dans les années 1870 comme pendant aux beaux-arts dans la création d'objets d'art. Son but premier n'est pas la création d'oeuvres d'art.
Le design est lié à l'innovation technique, à la production en série, et à l'esthétique contemporaine, tandis que les arts décoratifs relèvent de l'artisanat d'art, c'est-à-dire de techniques traditionnelles, à l'esthétique souventornementale et figurative et d'une production à l'unité ou en petite série. Cependant, les frontières ne sont pas étanches : un réverbère parisien en fonte duXIXe siècle relève du même processus que le design car même s'il présente des ornements, il est issu d'une technique innovante pour l'époque et il est produit en nombre ; de même, certainsdesigners signent des pièces en petite série, pour le marché de l'art notamment, surtout depuis les années 1970. Sollicité par lemarketing depuis les années 2000, le design est peu à peu devenu un argument publicitaire. « Design » est devenu, à tort, un adjectif qualifiant un style aux formes simples et d'une apparence épurée. Il succède ainsi à l'aspect traditionnel des modèles de style.
Dans sa part artistique, il repose sur un travail desformes qui rappelle celui de lacréation artistique et qui peut concerner aussi bien des formes spatiales (design d’espace, architecture intérieure), volumiques (design de produits,design industriel), textiles (design de mode, stylisme), graphiques (design graphique,graphisme) ou interactives (design interactif,design d’interaction,design numérique). Ce travail sur les formes explique l’importance des considérationsesthétiques dans le champ du design, mais ne doit pas masquer l’importance tout aussi grande des considérations fonctionnelles, techniques, environnementales, biologiques, juridiques, économiques, sociales et politiques, voire philosophiques, qui sont au cœur du travail du designeur, considéré comme l’un des grands métiers de la conception, avec ceux de l’architecte ou de l’ingénieur.
En anglais, le moyen français devientdeseign et conserve le double sens de dessiner et concevoir en fonction d’un plan, d’une intention, d’un dessein ; il ne perdra que sa seconde voyelle, comme en français. À partir duXVIIe siècle, le mot design sera l’équivalent de plan, de représentations ou d’une esquisse, d’une tâche à accomplir[5].Le dictionnaire anglaisRobert Cawdrey’s Alphabetic Table of Hard Words (1604) décline même un nouveau terme à partir dedesseign qui estdeseignment, « thing shall be done » (la chose doit se faire, s’accomplir). En 1712,Shaftesbury introduit dans la théorie anglaise de l'art[6] le concept dedesign fidèle au sens dedisegno. Ainsi, nous avonsdrawing pour le dessin en tant que tracé etdesign signifiant l'idée et sa représentation, le projet et son graphisme.
Le sens du mot « design » tel qu'on le connaît aujourd'hui en français (un projet dessiné) a été popularisé parHenry Cole en 1849 dans le premier numéro duJournal of Design and Manufactures.
Étant un mot de la langue anglaise, bien qu'étant d'origine franco-latine, le mot design ne se prononce pas comme il s'écrit mais à la manière anglaise (« disaïne »). Longtemps considéré comme un anglicisme, il ne s'est imposé que tardivement dans la langue française. Un équivalent français peut, si le contexte le permet, être trouvé dans le mot « concevoir ».
Ainsi vidé de son sens de représentation, le mot dessein n'a jamais pu traduire le mot design qui, lui, a conservé les deux notions. À la fin duXVIIIe siècle, le design était appelé en français « arts industriels» puis « arts appliqués »[7]. Dans l'après-guerre, un équivalent est trouvé àindustrial design popularisé parRaymond Loewy et le design américain : « esthétique industrielle »[8]. On doit cette tentative àJacques Viénot, qui peut être considéré comme le pionnier de la discipline en France. Suivront plusieurs tentatives de même sorte, comme « Création industrielle » dans les années 1980 (en témoigne encore l'École nationale supérieure de création industrielle créée à cette époque), « stylique » proposé dans une liste de vocabulaire lié à l’audiovisuel et à la publicité publiée dans un arrêté duMinistère de la Communication dans leJournal officiel de la République française du après avis de l’Académie française[9] ou, en 2010, l’initiative de l’INSEE visant à supprimer le terme design de sa nomenclature afin de le traduire par « concept[10] ». En 2000, laCommission d'enrichissement de la langue française révise l’arrêté de 1983 et recommande l'emploi du terme « stylisme » (à la place de « stylique »), qui désigne également la création de mode, pour remplacer le mot « design » en français[11].
Le design tel qu'on l'entend dans son acception de projet dessiné utilisant des techniques innovantes pour une diffusion large, existe depuis l'Antiquité. Les châsses-reliquaires limousines au Moyen Âge étaient réalisées avec des décors stéréotypés à l'aide de la technique de l'émail champlevé plus efficace que celle du cloisonné et ont été produites à des milliers d'exemplaires pour être exportées dans toute l'Europe. LesLumières puis la révolution industrielle introduisent tous les aspects qui seront caractéristiques du design : rationalisation, reproduction à bas coût/bon marché, interchangeabilité, motorisation/mécanique, coque/emballage, démontable/kit, etc., en plus de domaines générateurs de nouveaux usages (communication, bureautique, transports aérien, ferroviaire et automobile, tourisme, industrie du luxe…) et de nouvelles technologies.
Quelques objets catalysent déjà le design industriel tel qu'on le connaîtra auXXe siècle. À partir des années 1840, le ViennoisMichael Thonet développe un procédé de fabrication, lecintrage de bois de hêtre massif, courbé sous pression à vapeur. Sachaiseno 14 dite chaise « bistrot » devient une référence, vendue à cinquante millions d´exemplaires entre les années 1859 et 1914. Cependant, il s'agit encore là de réalisations exceptionnelles.
Une nouvelle dimension apparaît dans le design au milieu duXIXe siècle : l'originalité (ou créativité). Si les aspects constitutifs du design sont en place, il en va alors tout autrement des formes, qui restent pour la plupart du temps attachées à la copie de style du passé ouéclectisme. Cette copie confine souvent à l'amalgame de mauvais goût. C'est en réaction contre cette dérive que naît le mouvementArts & Crafts en Angleterre au milieu duXIXe siècle sous l'égide du critique d'artJohn Ruskin et de l'écrivain, peintre, décorateur et théoricienWilliam Morris. En 1888, commencent les premières expositions du groupe. Morris et ses amis veulent créer des formes nouvelles en accord avec la fonction des objets et prônent le retour au Moyen Âge et aux motifs inspirés par la nature : à la culture médiévale, ils empruntent la notion de travail collectif issu des corporations, le rationalisme gothique qui offre une simplification des lignes, et l'union des artisans et des artistes ; dans la nature, ils puisent des nouvelles sources d'inspiration et des principes de stylisation. La création d'une entreprise et la commercialisation sont un succès. D'autres groupes Arts and Crafts se créent en Angleterre et de par le monde, qui n'entreprennent pas pour autant de dénoncer le côté aliénant et inhumain de l'industrie comme le fait William Morris. Bien que la notion de design chez William Morris reste encore liée aux arts décoratifs, il apparaît comme une figure fondatrice du design en raison de l'importance de la recherche d'une créativité dans ses produits.
La créativité quitte la figuration pour l'abstraction des formes avec le Second Art Nouveau, dans les premières années duXXe siècle. Entre 1905 et 1911,Josef Hoffmann élève lepalais Stoclet, somptueuse villa urbaine conçue à Bruxelles comme uneœuvre d'art totale pour le compte d'un financier belge.Charles Rennie Mackintosh etFrank Lloyd Wright, à la même époque, posent les bases des lignes épurées et simplifiées qui vont devenir le synonyme de « design », en construisant villas et mobilier pour une bourgeoisie libérale américaine ou écossaise avide de nouveautés.
Le design industriel apparaît en Allemagne au début duXXe siècle. Dès 1907, l'architectePeter Behrens est engagé comme consultant artistique pour la firme d'électricitéAEG. Directeur d'une agence de design « intégrée » au sein de la firme, il réalise le premier design industriel global : usine de turbines, catalogue des produits, objets électriques, logo, etc. Il établit la profession de designeur comme profession libérale, au même titre que celle d'ingénieur, d'architecte, d'artiste, etc. Véritable pionnier, son bureau de style attire l'attention de créateurs et d'architectes, dont le jeune Le Corbusier. Behrens met en place un langage des formes efficace, à la fois simple, moderne et esthétique, qui adapte les conceptions artistiques du Second Art Nouveau à l'univers du produit industriel. Il jette ainsi les principes du fonctionnalisme.
Bien que le concept fonctionnaliste paraisse très simple, il y a eu beaucoup de divergence sur les interprétations et en particulier sur la définition de la fonction. C'est ainsi que rationalistes (« la fonction, c'est ce qui est utile ») et expressionnistes (« les émotions sont aussi une fonction ») se revendiquent également fonctionnalistes.
Le fonctionnalisme domine le design moderne jusqu'à sa remise en cause par certains post-modernes à partir de 1968.
En 1919,Walter Gropius, dans leManifeste duBauhaus, annonce le but de ce mouvement en ces termes :« Le but final de toute activité plastique est la construction ! […] Architectes, sculpteurs, peintres ; nous devons tous revenir au travail artisanal, parce qu’il n'y a pas d'art professionnel. Il n’existe aucune différence essentielle entre l’artiste et l’artisan. […] Voulons, concevons et créons ensemble la nouvelle construction de l’avenir, qui embrassera tout en une seule forme : architecture, art plastique et peinture […] »[14] Le Bauhaus a été une formidable pépinière de talents et un extraordinaire outil de la promotion d'unmodernisme « progressiste »[15] qui, contrairement au modernisme conservatif, n'hésite pas à utiliser l'industrie et des matériaux innovants, tel que l'acier tubulaire, pour un design de masse. Ce modernisme passe par un nouvel enseignement basé sur des cours théoriques et pratiques qui permettent de mettre à contribution artiste, ingénieur et designeur[16].
Citons, parmi les designeurs de premiers plans qui relèvent ou se réclament de ce mouvement moderniste,Ludwig Mies van der Rohe,Marianne Brandt,Marcel Breuer,Le Corbusier etCharlotte Perriand, le néerlandaisGerrit Rietveld, créateur de laRed and Blue Chair de 1918-1923, inspirée du mouvementDe Stijl. Les régimes totalitaires (rappelons que l'un des premiers gestes des nazis une fois arrivés au pouvoir, est de fermer le Bauhaus de Dessau en 1933) ne sont pas antithétiques avec le design :Giuseppe Terragni pour l'Italie,Lazar Lissitzky etAlexandre Rodtchenko[17] pour la Russie, illustrent le versant « social » du design : offrir des beaux objets au plus grand nombre de consommateurs possibles.
Plus au nord, la Scandinavie fait preuve d'un extraordinaire regain de créativité illustré parAlvar Aalto en Finlande etBruno Mathsson en Suède ouWilhelm Kage en Norvège. Le terme dedesign scandinave est parfois employé.
Avec les années 1930, la créativité et la théorisation du design traversent l'Atlantique.Raymond Loewy écrit « la laideur se vend mal » et propose de donner une valeur esthétique et symbolique forte aux objets manufacturés pour relancer l'économie. Outre la Cadillac, la bouteille pour Coca-Cola, il dessine aussi le paquet decigarettes desLucky Strike et fait apparaître lamarque déposée et lelogo publicitaire sur les deux faces du paquet. La marque sera identifiable sur tous les paquets jetés dans la rue.
Lafoire internationale de New York ouvre ses portes en avril 1939 pour célébrer la confiance regagnée après des années de crise, les designeurs américains sont à l'honneur dans cette exposition universelle qui accueille — avec un sens du temps malheureux — « le monde de demain ». Lorsqu'elle ferme ses portes, la Seconde Guerre mondiale a éclaté et les efforts des designeurs pour rendre le monde un peu plus beau, un peu meilleur, sont relégués au second plan.
La période d'après-guerre que Penny Sparke[15] appelle lenéomodernisme présente une large adoption par les designeurs des deux bords de l'Atlantique de formes fluides, rondes, souples : il va être qualifié de design organique.
Parmi les designeurs de cette époque phare - lesfifties américaines battent leur plein - mentionnons les AméricainsCharles etRay Eames ouGeorge Nelson.Eliot Noyes, actif auprès d'IBM, donne une forme organique et sympathique aux machines à écrire produites pour la bureautique - on lui doit aussi le pavillon IBM lors de l'Expo 1964 à New York.
Au Royaume-Uni,Ernest Race crée un style « moderne », l'équivalent pour le design duNew Look deChristian Dior, immédiatement repris dans toute l'Europe.Robin Day et sa femme Lucienne, nous ont laissé des textiles au stylefifties immédiatement reconnaissables.Douglas Scott dessine lebus rouge à impériale, devenu depuis l'une des icônes anglaises.
Le Japon, autre puissance industrielle de cette époque, ne nous a pas laissé de designeur de premier plan, mais le design, anonyme, produit par les équipes de sociétés commeSony témoigne d'un fort professionnalisme dans ce pays.
Dans son livre100 ans de design[15], Penny Sparke crée cetoxymore à propos de ces grands artistes de l'entre-deux-guerres, certes producteurs de lignes épurées et adeptes dumodernisme, mais qui ne sont pas, pas plus hier qu'aujourd'hui, considérés comme des designeurs. Ce qui les rassemble ? Ils créent des pièces uniques mariant des matériaux modernes et matières luxueuses traditionnelles, pour une clientèle richissime.
Citons parmi ces modernistes conservatifs largement célébrés lors de l'Exposition des Arts Décoratifs, les décorateurs-ensembliers françaisJacques-Émile Ruhlmann etJean Dunand, ce dernier surtout célèbre pour ses laques, ouEileen Gray, Anglaise active essentiellement à Paris. Ailleurs, l'AutrichienJosef Frank ou l'AméricaineSylvie Maugham font, dans leurs pays respectifs, envie aux classes moyennes qui voient dans les premiers magazines de décoration, leurs réalisations.
Cet exemple nous rappelle qu'il y a toujours eu une controverse sur la définition de designeur, en particulier en France. Tout d'abord, parce que le terme n'est pas protégé, ce n'est ni un statut ni un métier officiellement reconnu par l'administration.
1960-1980, autocritique du design et réinvention poétique
Entre 1961 et 1974, le mouvement anglaisArchigram, mené entre autres parPeter Cook, développe une architecture sans fondation, purement théorique, et édite une revue d’architecture. Ses membres réagissent à l'ère de la consommation et développent un travail portant sur le pop art, lesmass media et l'électronique.
À la fin des années 1960, parallèlement au mouvement d'architecture radicale (oudesign radical), l’antidesign, porté par les œuvres deJoe Colombo, repense l'habitat à partir du design et contre les formes hiérarchiques de l'architecture.« La capsule insiste sur sa stupéfiante concordance avec l'émancipation disciplinaire du design à la fin des années 1960 quand il tente de se libérer de ces tutelles historiques pour s'imposer comme une discipline idoine de l'habitat. Cette position est notamment illustrée par l'œuvre de Joe Colombo. Il invente les conditions d'une vie quotidienne moderne en correspondance avec le monde dans un rapport harmonieux espace-temps et invite ses pairs à repenser complètement l'habitat à partir du design. »[18]
L’agence italienneArchizoom, est fondée en 1966 à Florence en Italie parAndrea Branzi, Gilberto Corretti, Paolo Deganello, Massimo Morozzi, Dario Bartolini etLucia Bartolini. Le groupeSuperstudio est fondé en 1966 à Florence en Italie par Adolfo Natalini et Cristiano Toraldo di Francia. Natalini écrit en 1971 :« si le design est plutôt une incitation à consommer, alors nous devons rejeter le design ; si l'architecture sert plutôt à codifier le modèle bourgeois de société et de propriété, alors nous devons rejeter l'architecture ; si l'architecture et l'urbanisme sont plutôt la formalisation des divisions sociales injustes actuelles, alors nous devons rejeter l'urbanisation et ses villes… jusqu'à ce que tout acte de design ait pour but de rencontrer les besoins primordiaux. D'ici là, le design doit disparaître. Nous pouvons vivre sans architecture. »
Droog Design est découvert auSalon international du meuble de Milan en 1993 dans l'exposition off de laDesign Academy d'Eindhoven. Caractérisé par une impertinence, une approche critique et décalée, les productions font souvent figure de manifeste. C'est une fondation dirigée par l'historienne d'artRenny Ramakers et le designeurGijs Bakker, tous deux originaires des Pays-Bas. Droog Design se définit comme un label et regroupe des designeurs internationaux convergents sur cette même approche (Jan Konings,Jurgen Bey,Marcel Wanders,Tejo Remy, Piet Hein Eek...) Ce mouvement est avant tout un pied de nez au design institutionnalisé, aux formes fluides et fonctionnelles. Ce groupe est très lié aux idées des années 1960-1970, notamment ledesign radical. Le phénomène a véritablement ouvert une brèche dans les enjeux de la discipline et dans nos références culturelles.
Promu notamment par l'essayisteJulian Bleecker dansDesign fiction: A Short Essay on Design, Science, Fact and Fiction (2009), par l'écrivain de science FictionBruce Sterling, ou encore par des théoriciens tels qu'Alexandra Midal etNicolas Nova, ledesign fiction imagine les usages et les objets du futur en fonction de paramètres prospectifs, spéculatifs, lorsqu'ils ne sont pas résolument utopiques. Des institutions telles que leRoyal College of Art de Londres, l'école d'architecture et de design de l'Université de Greenwich, laHaute école d'art et de design de Genève, l'École de recherche graphique à Bruxelles avec le master Design et Politique du Multiple[19] ou encore le MIT accueillent des enseignants et des étudiants intéressés par le design-fiction.
Le designer se différencie de l'artisan par le fait qu'il n'est pas spécialiste d'une matière (bois, métal, plastique, etc.), du technicien par le fait qu'il n'est pas spécialiste d'une technique et de l'ingénieur par le fait qu'il traverse les domaines du savoir de façon transversale. En cela, on peut le rapprocher du chef d'orchestre ou du réalisateur aucinéma.
Le design se conçoit comme une navigation permanente entre l'unité et le global, entre la pensée (dessein) et la pratique (dessin). En cela, on peut rapprocher cette démarche de celle de lapensée complexe et de lasystémique.
Le design ne consiste pas à accumuler des savoirs, mais plutôt à créer, par la compréhension, des liens logiques entre des choses (flux, concepts, images, symboles, etc.).
Bien que le design soit par essence non spécialisé et recouvre des domaines très variés, une tendance à la séparation en sous-disciplines s'est progressivement imposée :
du fait de la réalité professionnelle en entreprises, qui exige une spécialisation par domaines ; d'où la tendance qu'ont les écoles professionnalisantes à sectoriser leurs formations ;
parce que le « design » anglo-saxon définit des métiers déjà existants : scénographie se nomme de plus en plus design d'espace ;game design est préféré à infographie ; le but étant de valoriser ces métiers[20] ;
par une certaine confusion : initialement[réf. nécessaire], il existait une distinction entre ledesign graphique (pratiqué par un designer pour servir un design global) et legraphisme, discipline autonome dont l'histoire propre remonte aux premières traces laissées par l'homme dans les grottes de Lascaux[réf. nécessaire] ;
finalité typologique : design d'espace, design produit,motion design, designgraphique,design sonore,web design,design transport. Ce sont les sous-disciplines classiques fondées sur la spécialisation, et l'acquisition de savoir et d'outils propres à chaque domaine. La finalité de ces sous-disciplines est essentiellement de l'exécution.
Le design graphique consiste à concevoir des éléments visuels permettant de transmettre des messages, en utilisant des images, des textes ou des formes[21].Le design graphique consiste aussi à exploiter l'esthétique pour faciliter la compréhension d'un contenu parfois complexe par le public. Pour illustrer cela, voici quelques sous-disciplines courantes et les types d'informations qu'elles transmettent[22] :
L'origine du terme « design graphique » remonte à 1922, grâce aucalligraphe,typographe,illustrateur etmarionnettiste américain William Addison Dwiggins[23]. L'approche de cette figure atypique semble faire un clin d'œil à l'activité créative variée du designer graphique contemporain, soulignant l'évolution de cette discipline auXXIe siècle.
D'un côté, il y aurait undesign d'auteur : privilégiant un travail à taille humaine, une proximité avec des artisans ou techniciens très qualifiés de différents métiers. Lesavoir-faire (et donc sa sauvegarde) a une grande importance. Les pièces réalisées en petites séries sont souvent très onéreuses, car le travail (savoir-faire) a un prix. La pièce finale n'aurait pas pu exister indépendamment de l'ouvrier. On peut le rapprocher du mouvementArts & Crafts de William Morris. C'est un design qui est du côté de la réalisation et qui définit le citoyen davantage comme un travailleur[24].
De l'autre, il y aurait undesign industriel : agissant au sein d'une entreprise, ce design collectif se situe en amont du projet, c'est-à-dire dans la phase deconception. les produits sont tirés en grande série pour diminuer les coûts initiaux des moules de fonderies, d'injections, de presses, etc. La quantité de matière et les procédés de fabrication sont optimisés pour aboutir à un produit au plus économique. Au moment de la production, un employé sans qualification est suffisant, pour réduire là aussi les coûts. La pièce existe indépendamment des employés, car ils sont interchangeables. C'est un design qui conçoit, qui projette. C'est un design qui est du côté de la conception et le citoyen se définit davantage comme un client.
Le design a longtemps été défini, en particulier par les académiciens, comme relevant desarts décoratifs, mis au rang desarts mineurs, en raison d'une pratique asservie à quelque chose : au mobilier, à l'espace, à l'industrie, à une fonction, etc.
Les distinctions classiques entre l'art et le design sont encore présentes, comme le souligneStéphane Laurent (historien) dans un article récent, ce qui n'est pas sans poser de problèmes quant à la reconnaissance culturelle du design[25]. On oppose ainsi le design à l'art par l'« utilité », car il est au service d'une fonction et n'est pas contemplation « pure », autrement dit dans une approche intellectuelle qui se situerait hors de contingences matérialistes. Au reste, en tant que concepteur d'objets au service de l'industrie, le design est souvent associé auxintérêts mercantiles et auconsumérisme.
Il y a deux postures face à la technique. On retrouve d'ailleurs ces deux postures dans le monde de la musique avecPierre Boulez pour le premier et Pierre Schaeffer pour le second.
La première consiste à dire quel'esthétique est dissociée de latechnique, que ce sont deux domaines de compétences qui ne doivent pas s'influencer. L'esthétique ayant une prédominance sur l'autre. C'est de loin la plus pratiquée, pour des raisons historiques, car dans cette perspective on considère que l'essence d'un projet se situe dans le concept.
Ce qui donne pour conséquence, une non-légitimité aux designeurs de suivre un projet au-delà des croquis qu'ils proposent. Et dans le même temps de la part de ceux-ci, on obtient des propositions naïves, irréalisables, car ignorant la question de la réalisation.Cependant, dans le cas d'auteurs talentueux, on obtient des réalisations souvent exceptionnelles, qui n'auraient pas pu voir le jour autrement. Le budget nécessaire est supérieur à la moyenne.
pour la seconde, le design (initialement dénommé esthétique industrielle), est une discipline héritière de la pensée esthétique. En ce sens, elle contient forcément la question de la technique. PourSimondon, lapensée esthétique réunit la pensée technique, celle qui fragmente et analyseet la pensée holistique, contemplative de la totalité. Elle prend la place de la pensée magique via la philosophie. En ce sens, la pensée esthétique (le design) est ce qui manifeste l'incomplétude de nos savoirs et l'insatisfaction des divisions.
Tout d'abord, il n'est pas envisageable de créer un objet ou un service qui ne soit pas réalisable dans une perspective industrielle[réf. nécessaire]. Dans certains cas, le designeur peut réaliser lui-même une partie de la conception technique des pièces qu'il dessine en relation avec le fabricant. Notamment, le designeur choisit ses matériaux (bien que n'allant pas nécessairement dans le détail de la gamme d'acier par exemple), les techniques de fabrication qui permettront de réaliser la pièce, etc. Le designeur dispose souvent d'une culture technique étendue qui lui permet de bien appréhender les aspects fabrication.
Il est aussi assez courant de voir le styliste collaborer avec les ingénieurs au cours de l'étude de style. Cela permet par exemple de dimensionner complètement la pièce pour être certain que la forme soit fixée une fois pour toutes à la fin de l'étude. Lorsque l'objet inclut un mécanisme, cela permet de bien incorporer le mécanisme dans l'objet. Enwebdesign le styliste doit savoir ce qui est réalisable au moment de créer son programme. Parfois ils peuvent réaliser une partie du codeHTML de l'affichage. Dans lesméthodes agiles la collaboration styliste - concepteur suit un mode interactif et impose aux deux protagonistes de travailler complètement ensemble.
Au-delà de cet aspect, le design interagit avec la technique au cœur du processus d'innovation. Le design propose généralement des innovations liées à l'usage qui peuvent déboucher sur de nouvelles recherches techniques. C'est principalement le cas dudesign prospectif qui va permettre de donner à l'entreprise des visions sur les innovations possibles de demain et des axes d'étude pour laR&D. À l'inverse, le design peut permettre de trouver des applications pour des technologies. Le sigleR&D : recherche et développement, peut être remplacé par RID : Recherche, Innovation, Développement, dans les cas où il existe un réel travail double sur la technique et le concept.
En France, via l'impulsion deLa27e Région[26], de nombreux territoires,collectivités, administrations locales, régionales ou encore nationales, ont expérimenté les pratiques du design pour rénover et repenser l'action publique en la recentrant sur laco-création avec les usagers, bénéficiaires et citoyens.
Le design a donc commencé à être intégré comme une nouvelle forme d'innovation publique[27],[28].
Le design entretient parfois des relations conflictuelles avec lemarketing. On peut lier cela à une perception négative et caricaturale du marketing dans la culture globale ainsi qu'à des conflits d'intérêts au sein de l'entreprise. Le design et le marketing vont tous deux travailler sur les besoins client suivant des approches différentes. Bien que le design et le marketing puissent être considérés comme des approches très complémentaires, les uns peuvent avoir l'impression que les autres empiètent sur leurs plates-bandes. Il faut ajouter à cela quePhilip Kotler, théoricien du marketing, prit l'initiative de classer le design comme un outil du marketing. Bien que Philip Kotler soit revenu sur ses propos par la suite (correspondance avecBrigitte Borja de Mozota, chercheur endesign management) et ait corrigé cela, cette vision subsiste dans de nombreux manuels de marketing et attise les conflits et les incompréhensions en entreprise.
Le design se distingue du marketing par une approche avant tout empathique du consommateur, préférant par exemple le terme utilisateur. Les designeurs appuient beaucoup sur le fait que le design considère avant tout le bien-être de l'utilisateur. Cela n'empêche pas qu'il existe des techniques de manipulation s'exprimant par le design, par exemple dans la conception des espaces vente. Suivant généralement des approches empathiques, le design est une source deretour sur investissement et unlevier économique de premier ordre et bien perçu, par sa proximité avec l'utilisateur.
Le designeur va beaucoup s'appuyer sur une perception intuitive et empathique de l'utilisateur. Il développe cette perception par une veille, en allant à la rencontre de l'utilisateur lors d'interviews, etc. À l'issue de l'étude préliminaire, le designeur doit être capable de décrire un univers, un service, qui conviennent à l'utilisateur.
Une étude de design peut être beaucoup plus documentée qu'une étude marketing sur les aspects liés à la perception de l'utilisateur. En revanche, les études chiffrées du marketing restent une ressource exclusive qui peut être très utile au designeur. Il est intéressant de les inclure en annexe dans lebrief design.
Le design devient complémentaire du marketing lorsqu'il existe une réelle communication et une bonne compréhension entre les deux corps de métier.
Le design de marque est une technique demarketing visant à créer et gérer l'identité d'une marque auprès des consommateurs par le biais de son design. Cette discipline provient essentiellement des pays anglo-saxons.
École Nationale Supérieure d'art et de design de Valenciennes délivrant un titre d'architecte d'intérieur/Designeur certifié au niveau II duRNCP(Bac +3/4)
L'École Boulle établissement public, école supérieure des arts appliqués, lycée des métiers d'arts, de l'architecture et du design - Paris
L'Institut Universitaire Professionnalisant - IUP Arts Appliqués Couleur Image Design situé à Montauban.
L'UTC (l'université de technologie de Compiègne). École d'ingénieur avec une filière en Design Industriel.
La Martinière-Diderot, Pôle supérieur de design, à Lyon (Rhône), établissement public d'enseignement
Lycée Auguste Renoir (lycée des métiers de l'image et de la photographie), Paris
L'École Supérieur d'Arts Appliqués de Bourgogne (ESAAB), Nevers (Nièvre)
Lycée Claude-Nicolas Ledoux, Besançon (Doubs), DN MADE et BTS ERA (ancien AEA)
Lycée Jacques Prévert, Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), DN MADE (mention graphisme et numérique) et DSAA Design graphique et narration multimédia
Lycée Vauban, Brest (Finistère), DNMADE (Mention Design de produit)
ISD Rubika - Institut Supérieur de Design, Valenciennes. École de Design produits et transports, intégrée au groupe RUBIKA (Valenciennes, Montréal, Pune)
ARBA ESA - Académie royale des beaux-arts - École supérieure des arts Bruxelles - Architecture d'intérieur champ mobilier design et Master en Food Design
ESA Saint-Luc de Liège - École Supérieure des Arts Saint-Luc de Liège - Design Industriel
En Suisse, la formation de designeur s'acquiert par une formation universitaire de 3 ans(Bachelor), plus une année propédeutique. Des formations de niveau Master existent dans certains domaines.
↑En 1908, à Vienne, Adolf Loos publieOrnement et crime où il combat l’ornementation au profit de la lecture claire de la fonction dans la forme d’un bâtiment.
↑ab etcPenny Sparke,100 ans de design, Octopus, Paris, 2002.
↑Michael Siebenbrodt et Lutz Schöbe,Le Bauhaus, New York, Parkstone Press International,.
↑. Connu comme photographe, il est néanmoins l'auteur du design de clubs ouvriers et du pavillon russe à l'exposition des arts décoratifs de Paris, en 1925.
↑Alexandra Midal,Antidesign, Petite histoire de la capsule d'habitation en images, Éditions Épithème, 2003.
↑Ce dernier point ne se vérifie pas au Canada francophone, où la tendance aux anglicismes est combattue âprement par l'élite intellectuelle et artistique, grande créatrice et consommatrice de design.
↑Stéphane Laurent (historien), «Why a culture of design in France never took off»,Design Issues, University of Chicago Press, Volume 28, numéro 2, printemps 2012,p. 72 -77.
↑François Jégou et Christophe Gouache,Phasing-in : Amorçage d'un processus d'innovation publique : Design des politiques publiques, Bruxelles, Strategic Design Scenarios Publishing,(ISBN978-2-9601314-1-3,lire en ligne)
↑Jean-MarcWeller et FrédériquePallez, « Les formes d’innovation publique par le design : un essai de cartographie »,Sciences du Design,no 5,,p. 32–51(ISSN2428-3711,lire en ligne, consulté le)