Le flanc nord du cratèreOccator surCérès photographié par Dawn depuis une altitude de 33 kilomètres. La largeur de la surface photographiée est de 3 kilomètres (photo prise le 16 juin 2018).
Dawn (« Aube » enanglais) est unesonde spatiale de laNASA, dont la mission consistait à étudierVesta etCérès, les deux principaux corps de laceinture d'astéroïdes. Lancée en 2007,Dawn a entamé ses observations en2011, en se plaçant en orbite autour de Vesta, puis de Cérès, et les a achevées en 2018.Dawn est la neuvième mission duprogrammeDiscovery, qui regroupe les missions scientifiques de l'agence spatialeaméricaine caractérisées par un coût modéré et un cycle de développement rapide.
Vesta et Cérès sont desprotoplanètes, dont les caractéristiques n'ont pratiquement pas été modifiées depuis leur formation, il y a 4,6 milliards d'années, et qui constituent des témoins de lagenèse du Système solaire. À l'aide de ses trois instruments scientifiques, la sonde spatiale a photographié et cartographié les deux corps, analysé leurschamps de gravité et effectué des mesures spectrales de l'abondance et de la distribution des roches de surface, ainsi que deséléments chimiques significatifs. Les données recueillies doivent permettre d'affiner les théories relatives au processus de formation des planètes duSystème solaire.
Après avoir échappé de peu à une annulation du projet en 2006,Dawn a été lancée le 27 septembre 2007. Pour parvenir jusqu'à laceinture d'astéroïdes, la sonde spatiale a décrit deux orbites autour duSoleil, en s'éloignant progressivement de celui-ci, propulsée par ses moteurs qui ont fonctionné durant 70 % du temps du transit jusqu'à son premier objectif.Dawn a eu recours, en février 2009, à l'assistance gravitationnelle de la planèteMars. Le 16 juillet 2011, la sonde s'est mise enorbite autour deVesta et a recueilli des données, qui ont amélioré de manière significative notre connaissance de l'astéroïde. Les premières analyses ont démontré qu'il s'agissait d'uncorps différencié, possédant unnoyau dense denickel et defer, aux caractéristiques très proches de celles d'une planète
Après avoir étudié Vesta durant plus d'un an, la sonde l'a quitté le 5 septembre 2012, pour se diriger vers laplanète naineCérès, qu'elle atteint en février 2015, et autour de laquelle elle s'est satellisée le 6 mars. Durant l'année 2015, son orbite a été rabaissée à trois reprises : 4 400 kilomètres en mai, 1 470 en août, 385 en décembre. La mission s'est achevée le 31 octobre 2018, à la suite de l'épuisement des ergols permettant à la sonde spatiale de pointer ses instruments et ses antennes.
À la fin duXVIIIe siècle, lesastronomeseuropéens conjuguent leurs efforts pour trouverla planète qui, selon les théories de l'époque (en particulier laloi de Titius-Bode), devrait se trouver entre les orbites deMars etJupiter. En découvrant Cérès en 1801, ils pensent avoir identifié la planète manquante, mais ils détectent au cours des années suivantes d'autres corps célestes dont l'orbite s'inscrit dans la même région de l'espace située entre deux et quatreunités astronomiques du Soleil :Pallas en 1802,Junon en 1804 puisVesta en 1807. Vers 1830, les astronomes parviennent à estimer la taille de ces objets qui sont beaucoup plus petits que des planètes ; ils les rangent dans une nouvelle catégorie de corps célestes baptisésastéroïdes. Ces objets (et les suivants découverts) seront déclassés de leur statut de planète dans les années 1850, lorsqu'il devint clair qu'ils étaient très nombreux. Vers 1860, le nombre d'astéroïdes dépasse la centaine et le physicienDaniel Kirkwood met en évidence des lacunes dans la distribution de leurs orbites : il attribue ces irrégularités à l'influence gravitationnelle de Jupiter. Les astéroïdes sont longtemps considérés comme les débris d'uneancienne planète qui aurait été détruite par l'influence gravitationnelle de Jupiter, avant que la théorie en vigueur aujourd'hui ne suggère plutôt qu'à cause de cette influence, cette planète ne s'est en réalité jamais formée[2].
La ceinture d'astéroïdes et la formation du Système solaire
Depuis les premières découvertes, les astronomes ont pu déterminer, à l'aide detélescopes spatiaux et terrestres, que laceinture d'astéroïdes regroupait des centaines de milliers d'astéroïdes. Le processus de formation de la ceinture, communément admis au sein de la communauté scientifique, est désormais le suivant. Au moment de la naissance duSystème solaire, il y a environ 4,6 milliards d'années, cette région de l'espace contenait suffisamment de matière pour créer deux à trois planètes de la taille de la Terre ; en quelques dizaines de milliers d'années, comme dans le reste du Système solaire, un grand nombre deplanétésimaux se sont formés paraccrétion de cette matière. Quelquesprotoplanètes sont apparues. Mais alors qu'ailleurs, ces protoplanètes se sont elles-mêmes agrégées pour former les planètes que l'on connaît aujourd'hui, le processus s'est arrêté dans la zone correspondant à l'actuelle ceinture d'astéroïdes, environ 15 millions d'années après avoir débuté, lorsque les planètes voisines, plus massives, se sont formées. Lesrésonances orbitales avecJupiter etSaturne, ainsi que les interactions gravitationnelles avec des embryons plus massifs, ont chassé la majorité des planétésimaux vers d'autres orbites ou les ont fait éclater[3]. L'influence des planètes géantes et des protoplanètes n'a laissé, dans la ceinture d'astéroïdes, qu'une masse totale équivalente à moins de 0,1 % de celle de la Terre, composée principalement de petits planétésimaux[4], les deux plus grands étant les deux objets étudiés parDawn, Cérès et Vesta[5],[6]. La ceinture d'astéroïdes peut être considérée comme une relique du Système solaire primitif. Les astéroïdes qui subsistent ont peu évolué depuis l'époque de leur formation, et contiennent de ce fait des informations précieuses sur les conditions et les processus à l'œuvre à ce moment-clé de la formation des planètes.
Vesta et Cérès, qui sont les corps les plus massifs de la ceinture d'astéroïdes, ont été choisis comme objectifs de la mission de la sonde spatialeDawn. Le troisième astéroïde par la masse,Pallas, n'a pas été retenu par les concepteurs de la mission : son orbite est beaucoup plus coûteuse à atteindre car elle s'écarte fortement du plan de l'écliptique. Il est peu probable queDawn survole d'autres astéroïdes que Vesta et Cérès car, dans l'éventualité où il resterait suffisamment de temps, les scientifiques préfèrent prolonger l'étude des deux astéroïdes[7]. Vesta et Cérès, après s'être formées au cours des dix premiers millions d'années du processus d'accrétion, ont survécu à l'influence de Jupiter mais n'ont plus évolué par la suite, alors que l'accrétion s'est poursuivie durant 50 millions d'années pour la Terre[8].
L'éloignement et la faible taille des deux astéroïdes, rendent leur observation difficile depuis la Terre.Photo de gauche : l'astéroïdeVesta selon une reconstitution réalisée à partir de photos prises depuis l'orbite terrestre -Photo de droite : une des meilleures photos deCérès photographié par letélescope spatial Hubble en 2005.
D'après les observations effectuées à l'aide de télescopes, Vesta, dont le diamètre volumétrique moyen est d'environ 530 kilomètres, est un corps où l'eau semble absente et qui comporte des terrains différenciés dont une partie serait constituée delavesbasaltiques. Laprotoplanète a suivi un processus dedifférenciation planétaire comme les planètes internes, au cours duquel les éléments radioactifs à courte durée de vie ont fait fondre les roches en unmagma à l'origine dunoyau ferreux plus dense et du manteau magmatique périphérique plus léger. Un cratère d'impact de 460 kilomètres de diamètre, près du pôle Sud de Vesta, est le reflet d'une collision qui a expulsé près de 1 % de sa masse. La gravité sur Vesta est d'environ 3 % de celle de la Terre. Lesmétéorites HED, qui sont sans doute des fragments de Vesta arrachés lors de collisions avec d'autres astéroïdes, ont fourni de nombreuses informations sur la structure de l'astéroïde : un des objectifs de la mission est tout à la fois de confirmer cette origine et de déterminer dans quelles conditions géologiques le matériau très particulier qui constitue ces météorites s'est créé[9],[8],[10].
Cérès est le plus grand corps de la ceinture d'astéroïdes, avec un diamètre volumétrique moyen d'environ 950 kilomètres. Contrairement à Vesta, elle est classée dans la catégorie desplanètes naines, car elle possède une masse suffisante pour que sa gravité l'emporte sur les forces de cohésion du corps solide et le maintienne enéquilibre hydrostatique, ce qui lui donne une forme presque sphérique ; Cérès reste néanmoins toujours un astéroïde, indépendamment de cette considération. Elle est très différente de Vesta. Les mesures effectuées semblent indiquer que la surface est constituée d'argiles et que l'eau a donc joué un rôle important dans son passé géologique. De l'eau semble encore s'échapper de la surface de Cérès et unecalotte de glace pourrait subsister au niveau des pôles[11]. Cérès est plus éloignée que Vesta du Soleil, ce qui pourrait expliquer que le processus de différenciation ne se soita priori pas enclenché ; une autre explication serait que Cérès se soit formée plus tardivement et que la majorité deséléments radioactifs présents à l'origine se soient déjà désintégrés. La gravité sur Cérès, dont la densité est le tiers de celle de la Terre, est identique à celle de Vesta, bien que la protoplanète ait un rayon double, car sa densité est deux fois plus faible. Aucune météorite en provenance de Cérès n'a, jusqu'à présent, pu être identifiée : il se pourrait que la protoplanète n'ait pas subi de collisions analogues à celles subies par Vesta. Une autre explication serait que le spectre électromagnétique de la surface ne reflète pas la composition des roches qui n'auraient pu être identifiées parmi les météorites parvenues jusqu'à la Terre[8],[12].
Les deux astéroïdes qu'a explorés la sondeDawn, ont donc des caractéristiques partagées entre celles des planètes internes, ayant subi un processus de fusion interne et de différenciation, et celles des planètes externes, formées en grande partie de glace[11].
Dawn devait rejoindre la ceinture d'astéroïdes et se placer successivement enorbite autour de Vesta et de Cérès. La sonde spatiale doit déterminer la structure interne des deux astéroïdes, leur densité, leur forme, leur taille, leur composition et leur masse.Dawn doit également fournir des informations sur latopographie de la surface et faire un inventaire descratères. Toutes ces mesures doivent permettre de reconstituer l'histoire de la formation de Vesta et Cérès et le rôle de l'eau dans l'évolution des astéroïdes. Elles doivent contribuer à comprendre les conditions et les processus à l'œuvre au tout début de laformation du Système solaire, ainsi que le rôle de l'eau et de la taille dans l'évolution des planètes[13].
La sonde spatiale doit effectuer les opérations suivantes[11] :
mesurer ladensité de Cérès et de Vesta, avec une incertitude inférieure à 1 % ;
mesurer l'inclinaison de l'axe de rotation, avec une erreur inférieure à 0,5 degré ;
photographier plus de 80 % de leur surface, avec unedéfinition au moins égale à 100 mètres parpixel pour Vesta et 200 mètres par pixel pour Cérès ;
réaliser unecarte topographique de plus de 80 % de la surface des deux astéroïdes, avec la même définition que les images et une précision verticale de 10 mètres pour Vesta et de 20 mètres pour Cérès ;
mesurer l'abondance et la distribution des principales formations rocheuses ;
mesurer l'abondance et la distribution de l'hydrogène, dupotassium, duthorium et de l'uranium à la surface des deux astéroïdes ;
effectuer plus de 10 000 mesuresspectrales de Vesta et plus de 8 000 de Cérès dans leslongueurs d'onde comprises entre 0,25 et 5 microns, avec une résolution inférieure à 200 mètres par pixel pour Vesta et 400 mètres par pixel pour Cérès pour la moitié des spectres.
Vesta, plus proche du Soleil, est le premier astéroïde atteint. En profitant d'une conjonction qui ne se reproduit que tous les 17 ans, la sonde peut ensuite quitter Vesta pour atteindre Cérès[14].
L'étude de Cérès doit se dérouler entre février et juillet 2015, prolongée à la fin 2018. Comme pour Vesta, l'exploration de Cérès comprend trois phases, avec un séjour sur des orbites situées à une altitude de 5 900, 1 300 et 700 kilomètres[15].
Les caractéristiques techniques de la sonde spatialeDawn
La structure centrale deDawn est un cylindre enmatériau composite à base defibre de carbone, dans lequel sont logés les réservoirs dexénon (capacité de 450 kilogrammes) et d'hydrazine (45 kilogrammes) utilisés pour propulser et orienter la sonde. Le cylindre central est enfermé dans un parallélépipède de1,64 × 1,27 × 1,776 mètres, constitué de panneaux en aluminium, sur lesquels sont montés la plupart des autres composants de la sonde.Dawn a une masse de 725 kilogrammes à sec, et d'environ 1 237 kilogrammes avec lesergols[16],[13],[18],[17].
Schéma et ventilation de la masse de Dawn par composant[19]
Un moteur ioniqueNSTAR analogue à ceux qui propulsentDawn est testé sur banc d'essais.
La sonde utilise une version améliorée dumoteur ionique auxénonNSTAR (NASA Solar electric propulsion Technology Application Readiness) qui a propulsé la sondeDeep Space 1 lancée en 1998. C'était à l'époque la première fois que ce type de moteur était utilisé comme propulsion principale par une sonde interplanétaire. Un moteur ionique fonctionne en éjectant à grande vitesse des ionsaccélérés par lechamp électrostatique créé par une grille chargée électriquement. En application de la loi de laconservation de la quantité de mouvement, la sonde est accélérée en sens inverse de manière proportionnelle à la vitesse du xénon éjecté et inversement proportionnelle à sa masse. L'énergie utilisée pour éjecter le xénon est fournie par l'électricité produite par les panneaux solaires. Le rendement de ce type de moteur est bien supérieur à celui d'unmoteur-fusée : la vitesse d'éjection du xénon est dix fois supérieure à celle des gaz produits par les propulseurs chimiques utilisés habituellement sur les sondes. Mais lapoussée est très faible : surNSTAR elle peut être comprise entre 92 millinewtons (sur Terre une poussée de 9,2 grammes soit l'équivalent du poids d'une feuille de papier) pour une puissance électrique de 2,6 kilowatts et 19 millinewtons pour une puissance de 0,5 kilowatt[20],[21],[22],[23].
À pleine puissance, leNSTAR consomme 3,25 milligrammes dexénon par seconde, soit un peu plus de 300 grammes par 24 heures. La vitesse de la sonde augmente d'environ25km/h après 24 heures d'accélération. Lapoussée des moteurs est modulable : un ordinateur dédié, et qui dispose d'une doublure en cas de défaillance, permet de faire varier à la demande à la fois la puissance électrique délivrée et l'alimentation en xénon du moteur. La poussée peut ainsi être modulée par pas de 1/124. Un transformateur porte la tension électrique reçue des panneaux électriques de 100 à 1 000 volts. Pour fournir l'accélération nécessaire à la mission, le système de propulsion ionique (IPS :Ion Propulsion System) doit fonctionner pratiquement en permanence, car il lui faut pallier la faiblesse de la poussée. La sonde n'utilise qu'un seul moteur à un moment donné, mais dispose de trois moteurs pour faire face à l'usure et aux risques de défaillance. Les trois moteurs sont regroupés sur la face arrière de la sonde, à l'opposé de la face portant les instruments scientifiques. L'axe de poussée de chaque moteur peut être modifié d'environ trois degrés, pour modifier l'orientation de la sonde, mais également pour compenser le déplacement ducentre de masse au cours de la mission dû à l'épuisement progressif du xénon stocké[20],[21],[22].
Montage d'un des deux panneaux solaires sur le corps de la sonde.Le système d'alimentation du xénon fixé à la structure centrale cylindrique deDawn.
Les moteurs ioniques ont besoin de beaucoup d'énergie électrique[N 2], et au niveau de la ceinture d'astéroïdes, l'intensité lumineuse est considérablement réduite. Les panneaux solaires sont donc de grande dimension : la sonde comporte deux grandes ailes de 18 m2 (2,3 × 8,3 mètres) comprenant chacun cinqpanneaux solaires couverts decellules photovoltaïques triple jonction InGaP/InGaAs/Ge, qui fournissent 10,3 kilowatts au niveau de l'orbite terrestre, mais seulement 1,3 kilowatt au niveau de la ceinture d'astéroïdes, à la fin de la mission[N 3]. Il s'agit des panneaux solaires les plus puissants ayant jusque-là équipé une sonde spatiale[24],[N 4]. Les panneaux solaires deDawn sont repliés en accordéon durant le lancement, et déployés une fois la sonde en orbite ; celle-ci a alors une envergure totale de 19,7 mètres. Les panneaux solaires sont orientables autour de leur axe longitudinal. L'énergie électrique est convertie par l'EPS (Electrical Power System) en courant à 80-140 volts à destination des moteurs ioniques, et 22-35 volts pour les autres équipements. L'énergie électrique est stockée dans unebatterie Ni-H2 de 35 ampères-heures[25],[13],[17].
Le spectromètre gamma et à neutrons GRaND.Le spectromètre infrarouge et visible VIR.
Dawn embarque trois instruments scientifiques : une caméra fonctionnant enlumière visible et procheinfrarouge (FC), unspectromètre gamma et à neutrons (GRaND) et un spectromètre en lumière visible et infrarouge (VIR). Par ailleurs le système de télécommunications est mis à contribution pour mesurer le champ de gravité pareffet Doppler depuis les stations terrestres[26].
La caméra FC (Framing Camera), qui fonctionne en lumière visible et proche infrarouge, est fournie par l'Institut Max-Planck de recherche sur le Système solaire deKatlenburg-Lindau (Allemagne) et l'Institut de recherche planétaire rattaché à l'Agence de recherche aéronautique et aérospatiale allemande (DLR) située àBerlin. Elle est utilisée pour déterminer la topographie et effectuer la cartographie des astéroïdes. Elle est également employée pour les besoins de navigation lorsque la sonde se trouve à proximité de Vesta et Cérès. Elle comprend deux caméras identiques pour permettre de pallier une panne. La caméra FC a unedistance focale de 150 millimètres et uneouverture de f/7,9. Le capteur est unCCD à transfert de trame avec une résolution de 1 024 pixels × 1 024 pixels (un peu plus d'unmégapixel). La caméra FC devrait fournir des images avec une définition de 12 mètres par pixel enorbite basse autour de Vesta et de 62 mètres sur le même type d'orbite autour de Cérès. La caméra peut utiliser huitfiltres montés sur une roue pour sélectionner une partie duspectre lumineux. La caméra FC dispose de sa propre électronique qui gère les séquences photographiques et effectue les tâches de compression et recadre les prises de vue conformément aux instructions. Chacune des deux caméras dispose d'une mémoire de stockage de huit gigaoctets[29],[26].
Lespectromètre imageur en lumière visible et infrarouge VIR (Visible and Infrared Spectrometer) est fourni par l'Institut national italien d'astrophysique àRome et l'Agence spatiale italienne. VIR dérive de l'instrument embarqué sur les sondes européennesRosetta etVenus Express. L'instrument est essentiellement une évolution du spectromètre de la sondeCassini. VIR est utilisé pour dresser la carte de lacomposition minéralogique de la surface des deux astéroïdes en fournissant le contexte géologique. L'instrument doit permettre d'identifier la nature des composants solides (silicates, oxydes, sels, composants organiques, glaces). Larésolution élevée de l'élevée permet de mettre en évidence la diversité de la surface et sarésolution spectrale doit permettre de lever toute ambiguïté concernant la composition des roches. Deux capteurs sont utilisés pour couvrir les longueurs d'onde comprises entre0,25 et 5microns. L'électronique de VIR permet de comprimer les images obtenues et d'effectuer des recadrages. L'instrument dispose d'une mémoire de stockage de 6 gigaoctets[30],[26].
Dawn est un engin stabilisé sur trois axes. En phase de croisière normale le système decontrôle d'attitude (ACS) utilise desviseurs d'étoiles pour déterminer l'orientation et la vitesse de la sonde et desgyroscopes pour détecter les changements d'orientation et de vitesse. Des senseurs solaires (CSS :Coarse Sun Sensor) sont également utilisés pour effectuer des contrôles plus grossiers. Tous les senseurs sont doublés. Durant la phase de transit la sonde utilise cinq fois par seconde ses viseurs d'étoiles pour vérifier son orientation et si nécessaire déclenche une correction et éventuellement réoriente les panneaux solaires. Les gyroscopes, qui ont une durée de vie limitée, ne sont pratiquement pas utilisés durant le transit : ils sont mis en marche pour permettre un pointage précis des instruments lorsque la sonde recueille ses données scientifiques. Pour corriger l'orientation de la sonde, l'ACS peut utiliser desroues de réaction au nombre de quatre (une de rechange), faire pivoter le moteur ionique s'il est en marche ou utiliser des petitsmoteurs-fusées consommant de l'hydrazine (RCS :Reaction Control System). Ces derniers sont également utilisés pour désaturer les roues de réaction[N 5] et disposent d'une marge suffisante de carburant (45 kilogrammes en tout) pour effectuer une modification rapide d'orbite, si la sonde ne dispose pas de suffisamment de temps pour l'effectuer avec le moteur ionique. Ces propulseurs d'attitude sont regroupés en deux grappes de six moteurs d'une poussée unitaire de 0,9 newton. L'ACS est également chargé de maintenir l'orientation des panneaux solaires, qui peuvent pivoter avec deuxdegrés de liberté, de manière que ceux-ci soient toujours perpendiculaires à l'incidence des rayons du Soleil[25],[31],[32],[17].
Dawn en cours d'installation sur le lanceur : les panneaux solaires sont en position repliée, on distingue l'antenne grand gain et en bas la tuyère d'un des trois moteurs ioniques.
Le système de contrôle et de gestion des données (Command and Data Handling System : CDHS), cerveau de la sonde, utilise un calculateurdurci contre les radiationsRAD6000 cadencé à 33 mégahertz qui exécute des programmes écrits enlangage C et enassembleur. Ceux-ci tournent sous lesystème d'exploitationVxWorks. Le CDHS dispose d'unemémoire de masse de 8 gigaoctets pour le stockage des données scientifiques et des télémesures. Le logiciel de bord qui pilote la sonde comprend environ 400 000 lignes de code. La sonde dispose d'un ordinateur de secours et de quatre exemplaires du logiciel (deux par ordinateur). Le système surveille en permanence plus de 200 paramètres. Il communique avec les différents composants de la sonde spatiale via unbus Mil-Std-1553B sauf avec l'instrument GRaND qui utilise un bus série RS-422. Pratiquement toutes les cartes électroniques composant le système ont été développées pour des familles de satellites du constructeur Orbital. 80 % du code programme a été également écrit dans le cadre de ces projets. La principale évolution logicielle porte sur l'introduction duVirtual Machine Langage, un méta langage utilisé par les sondesMars Odyssey etMars Reconnaissance Orbiter ainsi que par letélescope spatialSpitzer ; ce langage permet d'envoyer à la sonde des commandes complexes comprenant des ordres conditionnels[25],[32],[17].
Le système de télécommunications fonctionne enbande X et permet de recevoir des données avec un débit compris entre 7,8 octets par seconde et 2 ko/s et d'émettre avec un débit compris entre 10 octets par seconde et 124 ko/s. Le système repose sur deuxémetteurs d'une puissance de 100 watts mis au point par le JPL pour ses sondes interplanétaires.Dawn dispose d'uneantenne parabolique grandgain fixe (High Gain Antenna : HGA) d'un rayon de 1,52 mètre et de trois antennes à faible gain (LGA) émettant chacune dans le prolongement de l'un des trois axes de la sonde. Une seule antenne peut être utilisée à un instant donné[33],[17].
Le système de contrôle thermique (Thermal Control System : TCS) utilise à la fois des moyens passifs et actifs pour maintenir les composants de la sonde dans une plage de température acceptable. Des persiennes (ouvertures) s'ouvrent automatiquement pour évacuer la chaleur excédentaire produite par l'électronique ou l'action du Soleil. Descaloducs dans lesquels circulent de l'ammoniac sont également utilisés dans le même objectif. Au fur et à mesure que la sonde s'éloigne du Soleil, il faut également combattre le froid. Près de 150 résistances sont installées près des équipements sensibles. Lorsque la sonde se trouve dans la ceinture d'astéroïdes, le système de contrôle thermique consomme 200 watts pour maintenir une température suffisante. Chaque seconde, une centaine decapteurs fournissent des informations sur la température des différents équipements que lelogiciel de bord utilise pour déclencher les différents mécanismes de régulation thermique[25],[32],[17].
La missionDawn est le9e projet[34] duprogramme Discovery de la NASA, qui rassemble des missions d'exploration interplanétaires répondant à des interrogations scientifiques ciblées et qui nécessitent des ressources suffisamment modestes pour permettre des lancements fréquents. Pour répondre à cet objectif, le coût d'une missionDiscovery doit être inférieur à 425 millions de dollars (299 millions de dollars en 2001), le délai de développement ne doit pas excéder 36 mois, le nombre d'instruments scientifiques est réduit et le développement est confié à une seule équipe[35]. La NASA sélectionne la missionDawn en décembre 2001, en même temps que le télescope spatialKepler, parmi 26 missions scientifiques proposées[36]. La mission est baptiséeDawn (c'est-à-dire « aube »), car elle doit apporter des réponses à propos de la naissance (l'aube) duSystème solaire[37],[38].
La gestion du projetDawn est confiée au centre spatial de la NASAJPL, qui est dédié au développement dessondes interplanétaires. Celui-ci assure la conduite du projet, et fournit également lesystème de propulsion ionique, une partie du système électrique et du système de télécommunications. La sociétéOrbital Sciences est choisie pour construire la sonde spatiale, intégrer les composants fournis par les autres participants, réaliser les tests et assurer le lancement. La sonde emporte trois instruments scientifiques, dont lespectromètre VIR fourni par l'Italie et la caméra FC fournie par l'Allemagne[9].
Le réservoir de xénon a rencontré des problèmes de tenue à la pression.
Le projet démarre officiellement en septembre 2001, et les participants (industriel, équipes européennes, JPL) entrent dans une phase pleinement active en janvier 2002[39]. Au cours de la phase préparatoire de la première revue (Preliminary Design Review : PDR), on décide d'ajouter un cinquième panneau solaire sur chaque aile de la sonde pour disposer d'une marge de puissance plus importante lorsqueDawn sera près de Cérès, située à 2,9 unités astronomiques du Soleil. Pour accroître la marge financière du projet, l'équipe décide également de remplacer le lanceurDelta II, lourd, par une version standard[40],[38].
Entre décembre 2003 et janvier 2004, le télescopeHubble est utilisé pour une campagne d'observation de Cérès. Les 267 images obtenues à l'aide de la caméra à haute résolution permettent de préciser certaines caractéristiques de la planète naine : son corps est pratiquement une sphère parfaite, mais son diamètre à l'équateur est plus important qu'au niveau des pôles. Les simulations informatiques indiquent que Cérès comporte un noyau dense et une croûte superficielle composée de roches légères. Les astronomes considèrent que de la glace pourrait se trouver enfouie sous la surface, car la densité de Cérès est inférieure à celle de lacroûte terrestre, et parce que l'analyse spectroscopique de la surface indique des minéraux riches en eau. Ils estiment que Cérès est composée à un quart d'eau[41],[38].
En février 2004, après avoir franchi la revue préliminaire, le projet entre en phase d'implémentation. Pour répondre à une consigne générale de réduction des risques de dépassement budgétaire, d'accroissement de la masse, de la consommation électrique et de retard sur le planning, plusieurs caractéristiques de la mission et de la sonde sont modifiées. La marge sur la consommation électrique est portée à 15 %, en augmentant la superficie des panneaux solaires pour pouvoir faire face à des besoins inattendus. Une marge de 25 % sur le coût est introduite. Pour atteindre cet objectif, la durée du séjour en orbite autour des astéroïdes est réduite, de onze mois à sept mois pour Vesta, et à cinq mois pour Cérès. Deux des cinq instruments scientifiques sont supprimés : l'altimètre laser, abandonné avant même la revue préliminaire, et lemagnétomètre, bien que sa présence eût pu permettre d'analyser le champ magnétique résiduel de Vesta et détecter la présence d'eau liquide sous la croûte superficielle de Cérès[42],[38].
En juin, la revue critique de conception (Critical Design Review) est franchie sans encombre, et la sonde entre en phase de fabrication[43]. En janvier, l'assemblage de la sonde débute chez le constructeur Orbital Sciences. Les tests environnementaux et thermiques des panneaux solaires sont réalisés, et les bancs d'essai des systèmes de commande sont mis au point. Les instruments scientifiques sont livrés entre avril et juillet 2005[44],[38].
Le panneau solaire a été légèrement abîmé durant les préparatifs d'assemblage sur le lanceur.
Le projet Dawn avait déjà été annulé une première fois, en décembre 2003[45], avant d'être réactivé en février 2004. Mais en septembre 2005, les responsables du projet annoncent aux dirigeants de la NASA que le budget alloué pour la réalisation deDawn ne sera pas suffisant, et demandent une enveloppe supplémentaire de 40 millions $. Le lancement de la sonde est repoussé de 2006 à 2007, pour étaler la dépense et prendre compte des retards du projet. L'état-major de la NASA réagit en demandant le gel du projet en octobre 2005, et lançant unaudit de celui-ci. Les experts indépendants rendent leur rapport en janvier 2006; et mettent en évidence une mauvaise gestion du projet, mais concluent que celui-ci peut être mené à son terme, avec un an de retard et à condition d'injecter 73 millions $, portant le coût total à 446 millions $. Deux problèmes techniques sont mis en évidence : deux exemplaires du réservoir contenant lexénon et réalisés avec des feuilles detitane ultra minces enrobées decomposite carbone ont cédé de manière spectaculaire durant les essais de mise sous pression, et un relais de l'électronique de puissance associée au moteur ionique a également été victime d'une défaillance aubanc d'essais. Le 3 mars, le responsable du programme des missions interplanétaires de la NASA appelle le responsable scientifique de la mission (Principal Investigator : PI) pour lui annoncer l'annulation de la mission. La décision soulève une levée de boucliers de la part des scientifiques engagés dans le projet, qui obtiennent que la décision soit réexaminée. Les ingénieurs sur le projet proposent de réduire la pression dans le réservoir de xénon, en limitant la quantité embarquée à 425 kg au lieu des 450 kg prévus, en entamant la marge disponible, et de mener une campagne dédiée pour valider le fonctionnement de l'électronique associée au moteur ionique[46],[47]. De son côté, Orbital Sciences, le constructeur de la sonde, fait appel de la décision et offre de construireDawn à prix coûtant, pour gagner en expérience sur la construction de ce type d'engin[48]. Finalement, la NASA annonce, le 27 mars 2006, que la mission est réactivée[49],[50],[38].
Le lancement est planifié pour le. Durant la phase d'assemblage de la sonde sur son lanceur fin juin, la partie arrière d'un panneau solaire est endommagée accidentellement par un outil mais une réparation est rapidement effectuée[51].À la suite de retards liés à des conditions météorologiques défavorables, le lancement de la sonde spatiale est repoussé à septembre. En effet, la sonde martiennePhoenix a désormais la priorité car elle doit être impérativement lancée au cours de l'été ; or, son pas de tir est situé à moins de 200 mètres de celui deDawn ce qui interdit temporairement l'utilisation du pas de tir deDawn. Pour réduire les conséquences financières d'une explosion du lanceur de Phoenix, la sondeDawn est mise à l'abri[52].
Le lanceurDelta II a placéDawn sur uneorbite elliptique de 1UA sur 1,62 UA avec une légèreinclinaison par rapport auplan de l'écliptique (0,6°). La marge disponible permet à la sonde d'atteindre la cible si la durée de la défaillance de sa propulsion est inférieure ou égale à 28 jours. La trajectoire est calculée pour permettre une interruption de la propulsion de 8 heures par semaine dédiée aux échanges de données avec les stations terrestres et à d'autres activités. Du fait des spécificités de la propulsion ionique, lafenêtre de lancement était très large puisqu'elle s'étendait de mai 2006 à septembre 2007 sans changement important dans les dates d'arrivée[53].
Trajectoire de la sonde définie mi 2009 après prise en compte des performances accrues du système de propulsion.
Le transit vers Vesta commence par une phase de deux mois durant laquelle le fonctionnement de la propulsion ionique, des systèmes de contrôle d'attitude et des télécommunications est vérifié et les instruments scientifiques sont calibrés. Des phases propulsives continues sont réalisées à différents niveaux de puissance. L'ensemble des tests s'achève mi-décembre 2007 sans avoir mis en évidence de problème de fonctionnement majeur. Une nouvelle version dulogiciel embarqué, corrigeant les anomalies détectées, est téléchargée sur l'ordinateur de bord à la fin de la phase de test[54].
Mi-2009, après de longues analyses du comportement de la sonde, l'équipe projet conclut que le système de propulsion se comporte mieux que prévu, en particulier que les panneaux solaires sont plus efficaces, faisant gagner six semaines sur la date d'arrivée à Vesta, et six semaines sur le transit entre Vesta et Cérès. Combiné à d'autres facteurs, le gain de puissance permet d'allonger le séjour en orbite de Vesta à douze mois au lieu des neuf prévus initialement[57]. Le 13 novembre 2009, la sonde atteint la ceinture d'astéroïdes. Bien que celle-ci contienne un grand nombre d'astéroïdes, dont plus d'un million ont un diamètre supérieur à un kilomètre, la probabilité que la sonde heurte un de ceux-ci est très faible, car ces objets sont très espacés. De plus, le vecteur vitesse de la sonde est proche de celui des astéroïdes, ce qui réduit encore le risque de collision[58].
En mai 2010, du fait de la distance croissante entre la sonde et le Soleil, l'énergie produite par les panneaux solaires n'est plus suffisante pour alimenter les systèmes deDawn tout en utilisant 100 % de lapoussée du moteur ionique. Pour continuer à alimenter le moteur à sa poussée maximale, les liaisons radio, jusque-là continues, sont remplacées par des vacations planifiées deux fois par semaine. Le 5 juin 2010,Dawn établit un nouveau record parmi les sondes interplanétaires, avec uneaccélération cumulée depuis son lancement de plus de4,4km/s grâce à son moteur ionique. Le détenteur du précédent record était la sondeDeep Space 1, également équipée d'un moteur de ce type[52]. Le 17 juin, des signes de friction anormale sont détectés sur la roue de réactionno 4, qui doit être arrêtée[59]. Malgré plusieurs tentatives effectuées par la suite, le fonctionnement de la roue de réaction ne peut être rétabli. Avec trois roues en fonctionnement, la sonde ne dispose plus de rechange, et il est décidé en août, afin de les préserver pour les phases d'étude des astéroïdes, de les arrêter et de contrôler l'orientation de la sonde avec les moteurs fonctionnant à l'hydrazine[60] À partir du 23 août, un peu plus d'un mois après la date prévue, alors que la sonde se trouve à 2,02 UA du Soleil, la diminution de l'ensoleillement impose à la sonde de réduire la poussée demandée au moteur ionique. Juste avant cet événement, grâce à l'allégement provoqué par la consommation de son carburant, la sonde a atteint son pic d'accélération, avec 7,6 mètres par seconde gagnés sur une journée[61],[28].
Évolution de l'orbite deDawn autour du Soleil et fonctionnement des moteurs ioniques[62],[63],[57],[64],[65]
En mai 2011,Dawn, qui ne se trouve plus qu'à 1,21 million de kilomètres de Vesta, entame la phase d'approche, durant laquelle une navigation beaucoup plus précise est nécessaire. Lesroues de réaction sont remises en service : elles permettent de contrôler de manière plus efficace, et sans utiliser d'hydrazine, l'orientation de la sonde. Or, le pointage des instruments va nécessiter de changer fréquemment l'orientation de la sonde[60]. Durant la phase d'approche, "Dawn" effectue une navigation optique, qui repose sur des photos prises à l'aide de la caméra scientifique FC. Les images sont ensuite interprétées par l'équipe de la mission sur Terre, pour corriger la trajectoire. Ces images permettent également d'identifier les points remarquables à la surface de l'astéroïde, et d'étudier son environnement, pour localiser d'éventuelles petites lunes qui seraient en orbite autour du corps céleste[66]. Alors que les sondes se placent habituellement en orbite autour de la planète visée par une décélération brutale,Dawn, du fait de son mode de propulsion, aligne progressivement son orbite sur celle de Vesta, dans le cadre d'une manœuvre entamée longtemps auparavant[N 6]. L'approche se fait à des vitesses relatives faibles : la sonde ne progresse plus que de0,37km/s par rapport à Vesta, et cette vitesse diminue en permanence tandis que son orbite est presque alignée sur celle de l'astéroïde[67].Le 27 juin, l'un des deux calculateurs qui contrôlent les vannes d'alimentation en carburant des moteurs 1 et 3 ne parvient plus à ouvrir celles-ci. L'explication la plus probable est qu'un de sescircuits électroniques a été touché par unrayon cosmique. En attendant de déterminer s'il peut être remis en marche, le deuxième calculateur qui permet de contrôler l'alimentation des moteurs 2 et 3 est activé, et la propulsion est réactivée. Le 15 juillet 2011, après avoir parcouru 2,8 milliards de kilomètres depuis son lancement, et alors que sa vitesse relative et sa distance par rapport à Vesta sont tombées, respectivement, à111km/h et 16 000 km, la sonde entre dans lechamp d'influence gravitationnel de l'astéroïde et entame les manœuvres pour se placer sur sa première orbite de travail autour de Vesta[68],[69]. La mesure des déplacements de la sonde a permis d'obtenir une estimation précise de la masse de Vesta. Celle-ci, après calcul, est révisée de 262 à 259 millions de milliards de tonnes. L'erreur d'estimation desastronomes, environ 1 %, était remarquablement basse, compte tenu de la distance, et de la taille relativement faible de Vesta[70].
Une des premières images de Vesta obtenue le 7 juillet alors que la sonde se trouve à 41 000 km de l'astéroïde.
Les trois types d'orbite parcourus par la sonde autour de Vesta.
Dawn, qui s'est placé en orbite autour de Vesta le 16 juillet 2011, en repartira en août 2012 pour se diriger versCérès. Dans l'intervalle, la sonde va se placer successivement sur trois orbites de plus en plus rapprochées, pour étudier la protoplanète. Toutes sont desorbites polaires qui fournissent de bons angles d'observation pour les instruments et permettent d'éviter les éclipses durant lesquelles le satellite doit survivre sur ses batteries.
Le mouvement de rotation de Vesta de 5,342 heures reconstitué à partir de 64 photos prises parDawn.
Le 11 août, la sonde est parvenue sur son orbite de reconnaissance (survey orbit), située à 2 700 km d'altitude, d'où elle doit mener une première campagne d'observation scientifique. Cette orbite est suffisamment haute pour que les instruments de la sonde aient une vue d'ensemble de l'astéroïde.Dawn circule sur uneorbite polaire d'une périodicité de 69 heures. Vesta effectue un tour complet sur elle-même en 5 heures et 20 minutes ce qui facilite les prises de vue de la partie éclairée de l'astre, et permet d'en dresser une carte en couleurs enlumière visible,ultraviolet etinfrarouge, avec une définition de 250 mètres parpixel. Toutefois l'hémisphère nord de Vesta n'est pas complètement éclairé car c'est la saison hivernale : les latitudes supérieures à 52° sont plongées dans le noir.Dawn boucle six orbites (17 jours) à cette altitude. Durant la moitié de son orbite, la sonde pointe ses instruments vers la protoplanète. Durant le reste de l'orbite, lorsqu'elle fait face à la partie non éclairée de Vesta, elle se réoriente pour pointer son antenne principale vers la Terre, et transfère les données collectées[70],[71].
Malgré des incidents qui empêchent toute utilisation de l'instrument VIR durant la première et troisième orbite, les objectifs sont largement remplis : la caméra a pu photographier toute la partie éclairée (il était prévu une couverture de 66 %) et VIR a pu réaliser 13 000 images spectrales (objectif 5 000)[71]. Les premières observations rapprochées ont permis d'étudier de plus près le relief particulièrement marqué du pôle Sud, qui est l'une des montagnes les plus élevées du Système solaire. Une des particularités de Vesta est la grande diversité des matériaux présents à la surface, en particulier autour des cratères. Le relief de Vesta est beaucoup plus chaotique que celui de la plupart des astéroïdes. De nombreuses régions de l'hémisphère sud remontent à 1 ou 2 milliards d'années, et sont beaucoup plus jeunes que les terrains de l'hémisphère nord[72].
Mi-décembre 2011,Dawn achève les manœuvres qui la placent sur une orbite basse (210 km)[74]. Le séjour en orbite autour de Vesta est prolongé de 40 jours par rapport à ce qui était planifié, permettant de passer plus de temps en observation en orbite basse (jusqu'au1er mai) et en orbite haute (jusqu'au 26 août)[75].
Les premières images détaillées de Cérès sont prises parDawn à compter de décembre 2014. Dès le 13 janvier 2015 les images prises à une distance de 383 000 km, ont une résolution quasi équivalente aux photos prises par le télescope spatialHubble[82]. Les photos retournées le 19 février (Cérès fait environ 210 pixels de large) permettent de commencer à distinguer les structures géologiques, et en particulier les formes des cratères. Plusieurs points brillants situés au centre de certains de ces cratères pourraient correspondre à de la glace mise à nu (Cérès est très sombre et les photos sont volontairement surexposées, ce qui transforme un blanc cassé en une zone surexposée). Un évènement volcanique pourrait être à l'origine de ce phénomène, mais il est plus raisonnable de supposer que c'est l'impact ayant formé le cratère qui a exposé la glace. La photo prise montre également un très grand cratère au fond particulièrement plat et peu profond, aux bords à peine marqués, sans pic central et ne contenant que des cratères de petites tailles, ce qui normalement traduit un âge récent. Ces caractéristiques sont difficilement explicables, car relativement incompatibles[83].
Orbites de Dawn autour de Cérès et résolution des images prises[84]
Le, laNASA annonce une seconde extension de mission pour la sondeDawn. Lors de cette phase finale, qui devrait pouvoir durer jusqu'au seconde semestre 2018, la sonde s'approchera de la planète naine comme jamais encore, à peine à 200 kilomètres d'altitude. Une priorité de cette extension sera de collecter des données avec le spectromètre pour rayons gamma et pour neutrons, qui mesure le nombre et l'énergie des rayons gamma et des neutrons. Ces informations serviront à comprendre la composition de la couche supérieure de Cérès, et à déterminer à quel point elle est riche en glace. La sonde prendra aussi des images en lumière visible de la surface de Cérès et fera également des mesures spectroscopiques dans le visible et dans l'infrarouge. Dawn étudiera notamment Cérès lors de son passage auperihélie, c'est-à-dire le point de son orbite le plus proche du Soleil, en avril 2018. Les observations deDawn, complétées d'observations depuis la Terre, chercheront notamment à évaluer si la fineatmosphère de vapeur d'eau de Cérès augmente à ce moment-là.
Quel objectif pour la fin de mission ? (juillet 2018)
Il était prévu initialement queDawn demeure perpétuellement un satellite de Cérès une fois la mission achevée, étant donné la grande stabilité de son orbite[86]. Un survol de l'astéroïde(2) Pallas après la fin de l'étude de Cérès avait été envisagé, mais jamais pris sérieusement en considération :Dawn n'aurait pas pu se mettre en orbite autour de Pallas, à cause de la grandeinclinaison de l'orbite de Pallas par rapport à celle de Cérès[87]. Une autre option consistant à faire atterrir la sonde spatiale à la surface deCérès a été écartée, car la stérilisation de la sonde spatiale n'est pas assez poussée (risque de contamination biologique). L'équipe scientifique deDawn propose début 2016 que, à l'issue de la mission qui s'achève au cours de l'été 2016, la sonde spatiale soit envoyée vers un autre astéroïde. Toutefois compte tenu de la faible quantité dexénon restant, la liste des cibles potentielles était restreinte[88],[89]. Dans cette optique le survol deAdeona est envisagé. Finalement, début juillet 2016, le conseil scientifique de la NASA ayant évalué l'apport de cette option par rapport à la poursuite des observations actuelles, l'agence spatiale décide que la sonde spatiale poursuivra ses observations sur son orbite autour de Cérès[90].
L'équipe projet opte pour une orbite finale fortement elliptique avec un passage à très faible altitude au-dessus de la surface (35 kilomètres soit 10 fois plus près que toutes les orbites antérieures) et avec unapogée à 4000 kilomètres. Le premier passage à cette altitude a lieu le 9 juin. La sonde spatiale boucle cette orbite environ 1 fois par jour. Cette orbite nécessite beaucoup plus de manœuvres que précédemment et donc d'ergols.
La mission s'achève le 31 octobre 2018 à la suite de l'épuisement de l'hydrazine qui permet aux moteurs de la sonde spatiale de pointer les panneaux solaires, les instruments et les antennes de communication vers la Terre[91]. Le choix a été fait de ne pas faire s'écraser la sonde spatiale à l'issue de la mission pour ne pas contaminer l'astéroïde avec des micro-organismes venus de la Terre. En effet, les scientifiques veulent être certains de ne pas perturber la chimie, potentiellement complexe, de Cérès, et laplanète naine a été rangée dans la catégorie III de laprotection planétaire qui impose certaines dispositions. La sonde spatiale devrait donc rester en orbite au moins 20 ans et les ingénieurs sont presque certains (à 99%) que la sonde spatiale ne s'écrasera pas sur le sol de Cérès avant 50 ans. Le délai de 20 ans n'est pas suffisant pour supprimer tous les micro-organismes terrestres mais permet d'envisager avant ce délai l'envoi d'une nouvelle mission chargée d'étudier les processus chimiques à l’œuvre à la surface de Cérès[92],[93].
Vidéo réalisée à partir de plusieurs photos de Cérès prises le 4 février 2015.
Photomontage des formations les plus spectaculaires de Cérès.Trois vues de Ahuna Mons, qui s'élève à 4 kilomètres au-dessus du niveau moyen et pourrait être uncryovolcan encore en activité il y a quelques centaines de millions d'années.
Dès 2016 Dawn a collecté toutes les données nécessaires pour remplir les objectifs de la mission relatifs à Dawn. Ses instruments ont permis de déterminer sa forme, sa densité moyenne, la morphologie de sa surface, lacomposition minéralogique de celle-ci, les éléments chimiques avec unerésolution spatiale dépassant les valeurs fixées[94].
Les images fournies par la caméra de Dawn montrent de nombreux cratères éparpillés sur une surface globalement homogène avec des "taches lumineuses". Celles-ci sont des dépôts de carbonates et autres sels. La surface s'est révélée relativement complexe, avec une superposition de terrains jeunes et anciens. De nombreux indices, tels que la quantité d'hydrogène mesurée, l'identification directe et la trace d'écoulements, démontrent que les glaces sont abondantes aux latitudes élevées. Mais la présence de cratères de grande taille (jusqu'à 300 kilomètres de diamètre) plaide pour une croute plus solide que de la glace, dominée par les sels hydratés, les roches et les clarathes (molécules de gaz piégées dans des molécules plus solides que de la glace)[94].
Les mesures du champ gravitationnel et l'étude des formations en surface indiquent que la densité interne de Cérès augmente lorsqu'on se rapproche du centre de la planète naine. Ceci indique que Cérès est une planète différentiée avec un cœur dense composé essentiellement de roches, un manteau riche en eau. Cette caractéristique distingue Cérès des autres astéroïdes[94].
De l'ammoniac a été détecté à la surface de Cérès. Cette découverte suggère que les matériaux composant Cérès, ou Cérès elle-même, se sont formés dans la partie externe du Système solaire et confirme l'hypothèse que celui-ci a subi un ou plusieurs changements importants avant d'adopter sa configuration actuelle[94].
De l'eau liquide sous la surface à une période récente
Lespectromètreinfrarouge de Dawn a permis d'identifier l'origine destaches claires visibles dans la région ducratèreOccator. Elles sont constituées par une accumulation decarbonate. La quantité de ce minéral présent sur le site dépasse tout ce qui peut être trouvé dans des formations similaires sur Terre. Occator est un cratère récent à l'échelle géologique, avec un âge estimé à 80 millions d'années. La présence de carbonates sur Terre signale l'existence de phénomènes hydrothermaux, ce qui implique la présence d'eaux chaudes. Le carbonate de Cérès suggère que l'intérieur de l'astéroïde est beaucoup plus chaud que ce qui était estimé par les scientifiques. Ceux-ci sont désormais certains que de l'eau à l'état liquide était présente sous la surface dans un passé récent à l'échelle géologique. Les sels visibles constituent des reliquats d'un océan ou de poches d'eau ayant atteint la surface[95].
Composition de la surface de Cérès et origine de l'astéroïde
Lespectromètreinfrarouge de Dawn indique également la présence de sels contenant de l'ammoniac dans le cratère d'Occator. Des argiles contenant de l'ammoniac ont déjà été détectées à d'autres endroits de la surface de Cérès. Cette découverte, avec celle des carbonates, conforte la thèse selon laquelle Cérès se serait formée dans la partie externe du système solaire, vers l'orbite de Neptune, et que son orbite s'est ensuite déplacée vers la partie interne du système solaire. Toutefois, l'étude de la surface de Cérès semble contredire cette hypothèse. En effet, les cratères ayant plus de 2 km de profondeur, et qui ont été formés par un impact ayant eu lieu il y a plusieurs milliards d'années, ne présentent pas de signe de déformation. Si la surface était composée uniquement de glace, ce genre de relief aurait dû s'estomper au fil des périodes de réchauffement et de refroidissement. D'après l'étude réalisée, la couche externe de la surface ne contiendrait pas plus de 30 à 40 % de glace, le reste étant constitué de roches et de minéraux. Cette constitution rocheuse de la surface est commune parmi les corps s'étant formés près du Soleil, et vient donc contredire les conclusions tirées à partir de la présence des minéraux[95].
Les instruments deDawn ont réalisé, au cours du séjour d'un an en orbite autour de Vesta, environ 31 000 photos de sa surface, 20 millions despectres enlumière visible etinfrarouge et ont consacré des milliers d'heures à la réalisation de spectres deneutrons et durayonnement gamma, ainsi qu'à des mesures de la gravité de ce corps céleste. Ces données ont permis de déterminer que Vesta était très différente des autres astéroïdes[97]. Sa géologie est complexe : il s'agit d'uncorps différencié qui possède unnoyau dense denickel et defer dont le diamètre serait compris entre214 et 226km (le diamètre de Vesta est de 530 km), unmanteau et unecroûte. Pour le responsable scientifique de la mission, Vesta présente des caractéristiques très proche de celles d'une planète. Cette affiliation est confortée par la découverte de météorites terrestres en provenance de Vesta, présentant des indices prouvant qu'un champ magnétique important présent a existé il y a 3,6 milliards d'années : il y a donc eu à cette époque un noyau métallique liquide capable de le générer. Il pourrait subsister des traces de ce champ magnétique aujourd'hui[98].
Carte géologique de Vesta réalisée à partir des données recueillies par les instruments de Dawn. Les régions en marron sont constituées des terrains les plus anciens caractérisés par une forte densité de cratères. Les régions colorées en violet pâle (au nord de l'équateur) et bleu foncé au sud représentent respectivement l'intérieur des bassins de Rheasilvia et Veneneia. Les zones vertes correspondent à des glissements de terrain relativement récents et ceux colorés en jaune à des cratères d'impact peu anciens.
↑Lorsque la sonde se sera éloignée de plus de deux unités astronomiques du Soleil, les panneaux solaires ne permettront plus au moteur ionique de fournir sa pleine puissance du fait de la réduction de l'ensoleillement, mais également du fait de l'accroissement de la consommation des radiateurs chargés de maintenir les équipements dans une fourchette de température acceptable.
↑L'orientation de la sonde est perturbée en particulier par lapression de radiation exercée par le Soleil qui exerce une force de direction constante sur de grandes périodes de temps. Les roues à réaction contrebalancent cette force en augmentant leur vitesse de rotation (la sonde pivote dans le sens inverse en application de la conservation du moment cinétique total de la sonde) mais au bout d'un certain laps de temps les roues à réaction ne peuvent plus accroître leur vitesse. Il faut annuler la rotation des roues à réaction ce qui nécessite d'appliquer une autre force pour ne pas mettre en rotation la sonde toujours en application de la conservation du moment cinétique total. Cette opération de désaturation est appliquée deux fois par semaine en phase de croisière.
↑Avec une sonde interplanétaire dotée de propulseurs chimiques classiques, la sonde décélère généralement de0,6 à 1,5km/s pour pouvoir s'insérer en orbite.
↑La majorité des météorites collectées sur Terre a une origine inconnue, seules celles en provenance de la Lune, de Mars et de Vesta étant identifiables.
La première date est celle du lancement du lancement (du premier lancement s'il y a plusieurs exemplaires). Lorsqu'elle existe la deuxième date indique la date de lancement du dernier exemplaire. Si d'autres exemplaires doivent lancés la deuxième date est remplacée par un -. Pour les engins spatiaux autres que les lanceurs les dates de fin de mission ne sont jamais fournies.
La version du 21 septembre 2012 de cet article a été reconnue comme « bon article », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.