Ne pas confondre avec l'entité administrative de laprovince du Dauphiné disparue en 1790.
Pour les articles homonymes, voirDauphiné.
| Dauphiné | ||
Armoiries du Dauphiné | ||
| Pays | ||
|---|---|---|
| Région française | Auvergne-Rhône-Alpes,Provence-Alpes-Côte d'Azur | |
| Département français | Hautes-Alpes,Drôme,Isère | |
| Villes principales | Briançon,Crest,Die,Embrun,Gap,Grenoble,Montélimar,Nyons,Romans,Saint-Marcellin,Serres,La Tour-du-Pin,Valence,Vienne | |
| Siège du pays | Grenoble | |
| Coordonnées | 45° 11′ 16″ nord, 5° 43′ 37″ est | |
| Superficie approximative | 19 931 km2 | |
| Population totale | 1 918 993 hab.(2018) | |
| Gentilé | Dauphinois | |
Localisation | ||
Géolocalisation sur la carte :France | ||
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LeDauphiné (/do.fi.ne/) est unerégion historique et culturelle, jadis nomméeViennois (parce queVienne fut par le passé la capitale de toute cetteancienneprovinceviennoise[1]), située dans le quart sud-est de laFrance actuelle et dont le siège étaitGrenoble. LeDauphiné de Viennois fut un État, sous l’autorité descomtes d’Albon, qui prirent le titre dedauphins. Cette entité apparaît dans l'ancienneProvence, et était une subdivision duSaint-Empire romain germanique, de ses origines admises auXIe siècle, jusqu'à son rattachement en1349 auroyaume de France. En 1343, le roi de FrancePhilippe VIde Valois avait décidé, lors de son séjour àSainte-Colombe, et acté parlettres patentes datées d’août de la même année, que, désormais, lui et ses successeurs, à qui appartiendra leDauphiné, seront appelésDauphins de Viennois[2]. La province continue à l'époque de s'étendre et acquiert sa forme définitive auXVe siècle.
LeDauphiné de Viennois devient alors laprovince du Dauphiné et conserve une certaine autonomie jusqu’en 1457.
À laRévolution française, la province se retrouve divisée en troisdépartements : laDrôme, lesHautes-Alpes et l’Isère. Durant lesXIXe et XXe siècles, une partie de son ancien territoire est rattachée au département duRhône.
Ses habitants sont lesDauphinois.
Le nom de la province du Dauphiné, connue en latin sous le nom deDelphinatus Viennensis, pourrait provenir du grec « Δελφίνι », Dauphin. Cette hypothèse est toutefois contestée par certains historiens. Delphinus est cependant un prénom relativement répandu au Moyen Âge, lequel évoque saint Delphinus, également connu sous le nom deDelphin de Bordeaux[3]. Quoi qu'il en soit, les souverains du pays viennois qui prirent ce titre usèrent d'un blason orné d'un dauphin qui les lient auroyaume d'Arles, un état féodal qui s'étendait de la Bourgogne à la Méditerranée et lié à des héritages mythologiques gréco-latins moralisés et adaptés à l'univers mental de la chrétienté médiévale[4].
Dauphiné est attesté en pour désigner le territoire de la principauté[5],[6] : sa premièreoccurrence se trouve dans un traité conclu àParis, le, entreHumbert Ier etRobert II,duc de Bourgogne, au sujet de la succession deJean Ier[7],[8].

La province sous l'Ancien Régime a pour limites : au nord, le Rhône, qui la sépare de laBresse et duBugey ; à l'est, laSavoie et lePiémont ; au sud laProvence et leComtat Venaissin. La limite occidentale avec leLanguedoc et leLyonnais est marquée par leRhône, depuisSaint-Paul-Trois-Châteaux jusqu'auxfaubourgs de Lyon. La capitale du Dauphiné estGrenoble où siège leParlement de la province.Vienne, siège d'un importantarchevêché couvrant la majeure partie du Dauphiné, en était le principal centre ecclésiastique.

La province offre des paysages variés entre les sommets alpins du Haut-Dauphiné (labarre des Écrins culmine à 4 102 mètres), les Préalpes (Vercors etChartreuse), les rudes plaines duViennois ou celles duValentinois, qui affichent un caractère plus méditerranéen.
On divise le Dauphiné en Bas-Dauphiné (plaines et secteurs vallonnés du nord-ouest et le long de la vallée du Rhône) et Haut-Dauphiné (Alpes et vallées intra-alpines). Durant l'Ancien Régime, le Dauphiné est également divisé enbailliages.


Dans le Bas-Dauphiné, on distingue :
Laprincipauté d'Orange est réunie au Dauphiné en 1734, mais la maison d'Orange-Nassau renonce à ses droits sur le territoire dès 1713. En 1793, elle est comprise dans ledépartement de Vaucluse.
Dans le Haut-Dauphiné, on distingue :
Pour compléter la description du Haut-Dauphiné, il faut mentionner l'actuel Dauphiné italien, qui appartient auBriançonnais jusqu'en 1713 et comprend les hautes vallées d'Oulx,Cluson etVaraita.
Les différents territoires du Dauphiné connaissent une évolution démographique bien différente. En effet, les plaines du Bas-Dauphiné et les grandes villes bénéficient d'une forte augmentation de population durant leXXe siècle, avec le développement industriel et l’arrivée de travailleurs étrangers. À l’inverse, les territoires montagneux du Haut-Dauphiné subissent un exode important et la population de certaines régions diminue fortement, comme l’illustre le déclin démographique des Hautes-Alpes jusque dans les années 1950.
Actuellement, l’ensemble des territoires bénéficie d’une augmentation de population en raison du développement économique, de l’attractivité touristique mais aussi, pour le Nord-Isère, de l’attractivité de l’agglomération lyonnaise.
| Territoire | 1801 | 1851 | 1901 | 1954 | 1975 | 1999 | 2007 | 2013[9] | |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Département de la Drôme | 235 357 | 327 000 | 297 000 | 275 280 | 361 847 | 437 657 | 473 428 | 494 712 | |
| Département des Hautes-Alpes | 112 500 | 132 000 | 109 510 | 85 067 | 97 358 | 121 338 | 132 482 | 139 279 | |
| Département de l’Isère | 413 109 | 578 000 | 544 243 | 587 975 | 860 339 | 1 092 778 | 1 178 714 | 1 235 387 | |
| Communes dauphinoises dudépartement des Alpes-de-Haute-Provence | - | 1 253 | 815 | 506 | 559 | 531 | - | - | |
| Communes dauphinoises dudépartement du Rhône | - | - | 37 544 | 175 209 | 418 571 | 466 193 | 494 004 | 508 464 | |
| Communes dauphinoises d'Italie | - | - | 27 748 | - | - | - | - | - | |
| Dauphiné | 760 966 | 1 038 253 | 1 016 860 | 1 124 037 | 1 738 674 | 2 118 497 | 2 265 267 | 2 377 842 | |
| Sources[source insuffisante] :INSEE,ISTAT | |||||||||
On constate une relative stabilité de la population de la région jusqu'au milieu duXXe siècle, période à partir de laquelle la croissance devient extrêmement forte. Il convient toutefois de noter que de nombreuses communes du nord de la province (Villeurbanne,Bron,Saint-Priest,Corbas, ou encoreFeyzin,Vénissieux par exemple) sont cédées au département du Rhône au fil des années (4 communes en 1852, 23 communes en 1967 et 1 commune en 1971). En 2007, la population de ces communes est de 494 004 habitants. La densité du Dauphiné est de 113,65 hab/km2 avec une très nette différence entre la partie rhodanienne (1 232 hab/km2), le département de l’Isère (159 hab/km2), la Drôme (73 hab/km2) et des Hautes-Alpes (23 hab/km2).
Grenoble concentre en 2009 près du quart de la population du Dauphiné. Valence constitue la deuxième grande métropole dauphinoise. Le Dauphiné bénéficie également d'un important réseau de villes moyennes réparties sur le territoire (Gap,Échirolles,Montélimar, etc.).
Le Dauphiné est occupé par les tribusgauloises desAllobroges, lesSegovellaunes, lesVoconces et lesTricastins. La capitale des Allobroges estVienne ; les terres vont de Genève vers le sud, en passant par Grenoble (Cularo) qui n'est qu'un point de passage pour franchir l'Isère.
Au début de la deuxièmeguerre punique en 218 av. J-C.,Hannibal conduit son armée de la province d'Hispanie (Espagne actuelle) jusqu'en Italie. Hannibal fait passer son armée par lesAlpes. Son parcours est décrit par les historiens anciens Polybe et Tite-Live. La route exacte fait cependant l'objet de nombreux débats, sans qu'un consensus ait pu se dégager. Hannibal passe de façon certaine par le territoire desAllobroges, domaine assez vaste des Alpes du Nord.
Le point de départ de la traversée des Alpes est le confluent du Rhône et d’une rivière quePolybe nomme « Skaras » ou « Skaros », et que les traducteurs identifient comme étant l’Isère. Au confluent, les deux cours d’eau sont parallèles et entourent une bande de terre nommée « île » avant de se rejoindre. Tite-Live donne d’autres précisions géographiques, et mentionne notamment qu'il a reçu du ravitaillement de la part des Allobroges.
« Près de là se trouvent les Allobroges, peuple qui ne le cède, en puissance, en renommée, à aucune nation de la Gaule. Il était alors divisé par la querelle de deux frères qui se disputaient la couronne. L'aîné, nommé Brancus, d'abord possesseur du trône, en avait été chassé par son frère et par les jeunes guerriers du pays, qui, à défaut du droit, faisaient valoir la force. La décision de ce démêlé, survenu si à propos, fut remise à Hannibal: nommé arbitre des deux princes, il rendit l'empire à l'aîné, d'après l'avis du sénat et des chefs. Brancus reconnaissant fournit aux Carthaginois des provisions de toute espèce, et surtout des vêtements, que le froid si rigoureux des Alpes rendait indispensables. Les dissensions des Allobroges apaisées, Hannibal, qui se dirigeait vers les Alpes, n'en prit pas encore directement le chemin. Il se détourna sur la gauche vers le pays des Tricastins, et, côtoyant l'extrême frontière des Voconces, il pénétra sur le territoire des Tricorii, sans éprouver sur sa route aucun retard, jusqu'aux bords de la Durance. »
Le pays des Allobroges est conquis par lesRomains bien avant l'expédition deCésar enGaule. Il est incorporé à la province narbonnaise.Vienne est érigée en colonie romaine et devient une des cités les plus importantes de Gaule.
Les premières traces duChristianisme dans la province remontent auIIe siècle[phd 1]. Les groupes de chrétiens se trouvent alors essentiellement àVienne. Ils s’étendent à l’ensemble du Dauphiné auIVe siècle. Les plus connus des prédicateurs sont saint Mamert de Vienne, qui institue les rogations, etsaint Marcellin.

Le Dauphiné connaît diverses invasions.Wisigoths etAlains pillent de nombreuses cités (Valence, Montélimar…). LesBurgondes s'installent dans la région en 442, et choisissentVienne, qui gardait son prestige de grande cité romaine, pour capitale de la Bourgogne[phd 2].
Vers 740, lesSarrasins font de nombreuses incursions dans la région. Vienne et Grenoble souffrent de lourds pillages jusqu'à leur expulsion définitive probablement au cours de l'épiscopat d'Isarn de Grenoble, grâce à l'intervention de familles étrangères comme les Lombard ou lesAlleman, de même que les Aynard de Domène (Montaynard)[10],[11].

Autraité de 843, la région se trouve intégrée au royaume deLothaire. En 855, elle passe àCharles de Provence. En 863, à la mort de ce dernier,Lothaire II impose son autorité sur lecomté de Vienne, mais quand il meurt en 869,Charles le Chauve etLouis le Germanique se partagent ses possessions autraité de Meerssen de 870, par lequel le comté de Vienne revient à Charles. Celui-ci se proclame empereur en 875, à la mort deLouis II d'Italie.
Mais à la mort de son fils,Boson, gouverneur de Vienne, se fait proclamer roi deBourgogne en 879. Avec leroyaume de Provence se forme alors leroyaume d'Arles qui demeure indépendant jusqu’en 1032, date à laquelle il est intégré auSaint-Empire romain[phd 3].
Cependant, l’éloignement du suzerain favorise l’établissement de la féodalité. Apparaît alors dans la région une foule de petits États laïcs et ecclésiastiques. La formation du Dauphiné est alors l’œuvre des comtes d’Albon, plus tarddauphins de Viennois, qui ont l’habileté de réunir peu à peu sous leur autorité toutes les seigneuries voisines de leurs domaines respectifs[phd 4].
Le fait majeur marquant Vienne comme ville d'Empire est leconcile de Vienne qui siège entre le et le. Environ cent dix prélats (sur les trois cents conviés) venus de toute la chrétienté, le papeClément V, le roi de FrancePhilippe le Bel ainsi que ses fils,Louis d'Évreux frère du roi, Enguerrand de Marigny, Guillaume de Nogaret et Plaisians, ainsi qu'une multitude de barons et de chevaliers venus de France, sont présents pour ce qui précède à l'abrogation de l'ordre des Templiers, comme demandé dans la bulle pontificaleVox in excelso, le. Par la bulleAd providam Christi Vicarii du, Clément V attribue les biens du Temple aux Hospitaliers. Le, le pape promulgue une autre bulle,Considerantes dudum, fixant le sort des Templiers, en les divisant en deux catégories : ceux qui ont avoué et les autres.
Les comtes d'Albon parviennent, dans l'ordre féodal, à s’élever au-dessus des autres seigneurs et à acquérir la supériorité sur la région. Leur histoire commence de manière certaine en 1040, sous le règne deGuiguesIer le Vieux, seigneur d'Annonay, qui possède en outreCheyssieu et leChampsaur. Sa puissance augmente considérablement lorsqu’il acquiert une partie duViennois, le Grésivaudan et l'Oisans. L'empereurConrad II le Salique lui donne également leBriançonnais, tandis qu'HumbertIer de Savoie, premiercomte de Savoie, reçoit laMaurienne. LaSavoie et le Dauphiné se forment côte à côte. Celui-ci est alors un État quasi indépendant, faisant partie duSaint-Empire romain.

À cette époque, les comtes prennent une décision importante pour l’unité de leurs domaines. En effet, ils choisissentGrenoble, ville de médiocre importance en ceXIe siècle, pour capitale. Ils auraient pu céder à la tentation deVienne, l’ancienne métropole romaine[phd 5]. Ce choix fondamental leur permet de garantir leur autorité à la fois sur le Bas et sur le Haut-Dauphiné. Cependant, les territoires respectifs du Dauphiné et de la Savoie se chevauchent à cette époque (ainsi, leFaucigny appartient au premier tandis que la seconde possédaitVoiron etla Côte-Saint-André). Cet enchevêtrement est source de nombreux conflits entre les deux maisons.
AuXIIe siècle, les comtes d'Albon prennent le titre dedauphins de Viennois. Le comté d'Albon prend alors le titre de Dauphiné.
Le dernier dauphin indépendant,Humbert II, parvient à assurer la paix avec lesSavoyards. Le visage mince éclairé d’yeux clairs, Humbert II fascine autant qu’il intrigue. « C’est un personnage ambigu, résume l’historien René Verdier. Soit on le considère comme un humaniste aux nobles ambitions, soit comme un velléitaire, qui a raté tout ce qu’il a entrepris ». Cet intellectuel, élevé à la cour de Naples, rêvera ainsi de reconstituer une nation, à l’image de feu le royaume de Bourgogne. Il agrandit la province avec l'acquisition de Romans. Il tenta également, sans succès, de substituer son autorité sur Vienne à celle de l'archevêque. Il modernise l’État, créé leConseil delphinal (1337), qui garantit à son peuple un grand nombre de privilèges, ainsi que l'université de Grenoble (1339), qui n’entrera vraiment en activité que des années plus tard. Cependant, Humbert II était très dépensier et s'endetta ; en 1338, il offrit de vendre ses possessions à son voisin d'Avignon, le pape Benoît XII : chacune des deux parties fit mener une enquête dans le territoire proposé, entre décembre 1338 et juin 1339, afin d'en estimer la valeur (enquête papale etenquête delphinale)[12] ; mais la transaction ne se fit pas. En 1343, Humbert II nommaHenri de Villars vicaire du Dauphiné (dont il sera de fait le premier gouverneur). Il établit également, en 1349, le « Statut delphinal », sorte de Constitution garantissant les libertés des Dauphinois.
Humbert II eut goût à la vie fastueuse et dépensa des sommes considérables, jusqu'à ne plus pouvoir s'acquitter de ses dettes. Il se trouva sans héritier, son fils étant mort à l'âge de deux ans. Depuis1337, il cherchait à vendre le Dauphiné, etRobert d'Anjou, roi de Sicile et Comte de Provence, avait sa préférence sur le roi de France, car il se sentait plus angevin que français. Mais l'affaire ne réussit pas, car on ne lui proposait que 100 000 florins. Après une mise à prix de 120 000 florins, un second marchandage a lieu (1338-1339) avec le papeBenoîtXII : au début, tout marche à souhait, mais l'enquête des commissaires pontificaux sur les revenus du domaine delphinal aboutit au constat que le prix en est surévalué, et la vente échoue. La troisième est la bonne, Humbert étant très endetté (il sera excommunié par le pape, en 1341, pour non paiement de ses dettes).Philippe VI de Valois, roi de France[13], tirant profit de la situation, Humbert finit par lui vendre le Dauphiné pour 200 000 florins, le 30 mars1349, par letraité de Romans, négocié par sonprotonotaire,Amblard de Beaumont, Humbert de Villars ainsi que Humbert de Choulay et Humbert Pilati. Du côté de l'acheteur, ce sont le Duc de Normandie,JeanII, fils aîné du roi de France,Guillaume Flotte, chancelier de France, Jean Richer, chevalier Béranger de Montaut, Pierre de Cugnières etClémentVI[14] qui prennent part à la négociation. La vente conclue, le roiPhilippe VI devait, comme il l'avait décrété en1343 parlettre patente donnée àSainte-Colombe, prendre le titre dedauphin, qui reviendra également à tous ses successeurs à qui appartiendra le Dauphiné. La France reconnaît une certaine autonomie à la province.

La cérémonie officielle a lieu àLyon, le 16 juillet 1349. Humbert II remet à Charles de Normandie (futurCharles V) le sceptre, la bannière, l'anneau et l’ancienne épée du dauphin. À cette époque, Humbert II porte également les titres de « prince duBriançonnais, duc deChampsaur, marquis deCésane,comte de Vienne, d'Albon, deGrésivaudan, d'Embrun et deGapençais, baronpalatin deLa Tour, deLa Valbonne, deMontauban et deMévouillon », qu'il transmet également à la France. Dès lors, le Dauphiné est réservé à l'héritier du trône de France. Charles réside quelques mois à Grenoble et visite son nouveau territoire. D'autre part, cette annexion entraîne la création desÉtats du Dauphiné. Les nouveaux dauphins ne résidant pas en permanence dans la province, desgouverneurs sont successivement nommés.
Chrétien fervent, Humbert II prend l’habit de dominicain en 1349 et meurt six ans plus tard, à 43 ans.
A cette époque, le Dauphiné n'a pas encore sa forme définitive. Le Valentinois et le Diois sont indépendants, la Savoie détient de nombreux territoires en Bas-Dauphiné, Vienne appartient à l'archevêque, et, à Grenoble même, l'autorité est partagée avec l'évêque de la cité. La province recouvre également des territoires extérieurs (leFaucigny,Oulx,La Valbonne,Cézanne,Château-Dauphin). En 1355, un traité avec la Savoie permet au Dauphiné de reprendre Voiron et la Côte-Saint-André en échange du Faucigny.Louis d'Anjou, frère deCharles V, tente en 1364, puis en 1371, de prendre le contrôle du Dauphiné : sans succès. D'autre part, en 1378, le gouverneurCharles de Bouville (1370-1385) siège à Vienne et se fait prêter hommage pour le Valentinois (annexion définitive avec le Diois en 1423).
La noblesse dauphinoise prend part aux événements de laguerre de Cent Ans, notamment lors des batailles dePoitiers, d'Azincourt et deVerneuil (où meurtHenrile Roux,gouverneur du Dauphiné).
La province est également un enjeu de lutte. Profitant en effet de l'anarchie du royaume deCharles VII, leduc de SavoieAmédée VIII et leprince d'OrangeLouis de Chalon, de connivence avec les Bourguignons et les Anglais, projettent d'envahir le Dauphiné en 1430. Cependant, lors de labataille d'Anthon en juin 1430, les troupes dauphinoises, largement inférieures en nombre, remportent une victoire écrasante face aux troupes du prince d'Orange. La province est sauvée, l’invasion échoue.
Cependant, à cette époque, comme partout en France, la population a à souffrir des incursions desGrandes compagnies,routiers,Écorcheurs et autres mercenaires.
Peu après, le Dauphiné voit le rattachement du Valentinois et du Diois, ces deux territoires sis au sud de la rivière Isère - soit le département de la Drôme moins Nyons et les Baronnies -, à la couronne de France. « Jusqu'auXIVe siècle, ce vaste espace provençal formait deux comtés indépendants qui ne cessaient de guerroyer entre eux » explique René Verdier, maître de conférences en histoire médiévale à l'Université Pierre-Mendès-France de Grenoble, « le Valentinois, situé autour de Crest, était le fief laïque de lafamille Poitiers-Saint-Vallier ; le Diois relevait, quant à lui, de l’évêque de Valence et de Die ».
Louis, futur roi de FranceLouis XI, est le seul dauphin de France à résider dans sa province et à la gouverner, faisant de cette période son école du pouvoir. C'est véritablement sous son autorité que le Dauphiné s'intègre au royaume de France.
À son arrivée, le Dauphiné est encore un petit État archaïque, où les affrontements entre familles féodales (les Commiers, les Allemans…) demeurent récurrents[15]. En arrivant en 1447, il se comporte en véritable souverain et renforce le pouvoir jusque-là purement nominal duroyaume de France. Il interdit les guerres privées entre féodaux et oblige les nobles à lui rendre hommage. Par ailleurs, il simplifie l'administration territoriale, qui est alors un véritable puzzle de fiefs. Il transforme leConseil delphinal enParlement (le troisième du royaume après ceux deParis etToulouse). Il entreprend l'unité politique du Dauphiné : après s'en être pris aux nobles, il force l'archevêque de Vienne à lui prêter serment et fait de même avec lesévêques de Grenoble etde Valence et l'abbaye de Romans. Il acquiert égalementMontélimar et la principauté d'Orange.
En outre, il développe l'économie et l'industrie de la province, fait réparer les voies de communication, institue des foires commerciales dans différentes villes, encourage l'exploitation des mines de fer. Il attire également la main d'œuvre étrangère, prend la communauté juive sous sa protection et créé l'université de Valence pour attirer des intellectuels. Il fait rédiger la première mise par écrit de l'histoire du Dauphiné par son proche conseiller au Conseil delphinal,Mathieu Thomassin, œuvre connue sous le nom deRegistre delphinal. Asseyant son autorité, il cherche aussi à attaquer les libertés reconnues par le Statut delphinal en instaurant, par exemple, lagabelle, alors inexistante dans la province. Il lève également d'autres impôts sans consulter les États, entraînant de vifs mécontentements.
Doué d’un formidable appétit politique, le dauphin Louis complote contre son père, Charles VII. Tant et si bien que celui-ci envoie une armée récupérer la province. Le dauphin se réfugie alors, en 1456, dans le Brabant, chez les Bourguignons.
Charles VII reprend l'administration de la province en main. Il souhaite qu'on lui prête serment. Les États parlementent, sachant que leur autonomie est en jeu. Mais, le roi insiste et les États s'inclinent en 1457. Ils prêtent le serment demandé, marquant la fin de l'autonomie provinciale[phd 6].
Louis de Laval (1448-1456) est le seulgouverneur nommé par le dauphin Louis.
Une fois encore, la noblesse dauphinoise participe activement auxconflits militaires du royaume (c’est ainsi que trois cents d'entre eux combattent àMarignan). Elle acquiert alors une gloire immense mais est terriblement décimée, ce qui lui vaut le titre « d’écarlate de la noblesse française »[phd 7]. Le plus célèbre de ses représentants est Pierre Terrail de Bayard,chevalier Bayard (1476-1524), le « chevalier sans peur et sans reproche », né au château de Bayard àPontcharra.
De nombreux conseillers dauphinois participent également à l'administration des territoires italiens conquis par les troupes françaises.
Par sa situation géographique, le Dauphiné est une étape et un cantonnement militaire sur la route de l'Italie. À cette occasionCharles VIII,Louis XII etFrançoisIer viennent régulièrement séjourner à Grenoble. Mais, le passage des armées est une lourde charge pour la population, qui connaît aussi les pillages de la part des soldats et doit subir des épidémies.
Parmi les gouverneurs du Dauphiné auXVIe siècle,Gaston de Foix-Nemours (1509) s'illustrera comme capitaine des armées d'Italie etAntoine de Bourbon-Vendôme (1562), roi-consort deNavarre et père du futurHenri IV, remplacé à sa mort (1562) par leduc de Nemours[16].

Le Dauphiné a beaucoup souffert du conflit entreprotestants etcatholiques en tant que foyer important du protestantisme (en particulier, dans le Haut-Dauphiné). Le Gapençais est gagné par la nouvelle religion, tout commeDie,Corps,Mens oula Mure, qui deviennent des centres du protestantisme. D'importants noyaux se forment également dans les grandes villes (Vienne, Valence, Grenoble…).
En 1562, le duc de SavoieEmmanuel-Philibert prend les armes contre lescalvinistes, qui dévastent le midi de la France et menacent ses États. Il nomme Charles deLa Forest, baron de Rumilly, lieutenant-général en Dauphiné. À la tête d'un corps de troupes, La Forest combatFrançois de Beaumont, baron des Adrets, le chef le plus habile et le plus sanguinaire du parti protestant, mais « fut tué les armes en mains, sous les murs de Vienne, dans une rencontre avec leshuguenots l’an 1565 »[17]. Le baron des Adrets se signale par ses cruautés et ses dévastations. Les églises, en particulier, souffrent de ses exactions. Il anéantit ainsi nombre de chefs-d’œuvre de l’art médiéval. Lacathédrale Saint-Maurice de Vienne et l’abbaye de Saint-Antoine en portent toujours les traces de ses mutilations. À Grenoble, il fait détruire les tombeaux des dauphins et pille lacathédrale.
En 1572, lorsque la nouvelle dumassacre de la Saint-Barthélemy se répand, elle provoque de nouvelles exactions (août-octobre 1572). Toutefois, le lieutenant-général du roi,Gordes, protège les protestants, limitant le nombre de victimes dans la région[18].
À partir de 1575,Lesdiguières devient le chef unique des huguenots dans la région. Il parvient à défendre Corps, à s’emparer de Gap en 1577 mais il ne peut empêcher la prise de la Mure par les catholiques. Il s’empare également de Montélimar et d’Embrun. L’accession d’Henri IV au trône en 1589 lui permet de s’allier àLa Valette, gouverneur du Dauphiné, et àAlphonse d'Ornano, lieutenant-général de la province. Ils doivent cependant affronter laLigue catholique. Ces derniers s’étant emparé de Grenoble. Lesdiguières vient faire le siège de la ville et, au bout d’un mois d’escarmouches, il reprend la capitale dauphinoise, le. Briançon etCrest ont déjà signé leur reddition, Vienne, la dernière, le fait en 1591. Il devient le maître de toute la province.
Les guerres sont désormais finies mais elles laissent le pays épuisé et couvert de ruines. L’édit de Nantes donne aux protestants des places de sûreté où ils peuvent entretenir une garnison (Gap, Briançon, Embrun, Grenoble, Die…).
François de Bonne de Lesdiguières est nommé, en 1591, parHenri IV comme gouverneur de Grenoble, puis, en 1597, comme lieutenant-général du Dauphiné, devenant le maître incontesté de la province, installé dans sonhôtel particulier au bord de l'Isère. On l’appelle le « petit roi dauphin »[phd 8].

Devenu maréchal de France en 1609 puis duc et pair en 1611, il sera le dernier connétable de France – grade militaire le plus élevé de l'Ancien Régime –, en 1622. Surtout, il inscrit profondément la France dans cette province en résolvant la crise religieuse entre protestants et catholiques, en assurant la sécurité du Dauphiné face à la Savoie, en l'administrant au mieux sans jamais perdre de vue ses intérêts personnels. Alain Chevalier, conservateur dumusée de la Révolution française de Vizille le résume comme« une espèce decondottiere à l'italienne ».
Lors de la guerre entre le roi de France et le duc de Savoie, Lesdiguières remporte de nombreuses victoires sur les Savoyards. En 1591, il lesbat à Pontcharra. En 1597, il s’empare defort Barraux tout juste construit par les Savoyards. Pendant la construction, il dit alors :« Le roi a besoin d’un fort en cet endroit ; je le prendrai sans canons, sans siège, et sans qu’il en coûta un écu ». Il tient sa promesse.
Excellent administrateur, il marque de son empreinte la ville de Grenoble qu'il étend, embellit, sécurise, fortifie. Il y fait construire une nouvelle enceinte, l'agrandissant considérablement, commence la construction de laBastille, fait creuser un nouveau lit pour le Drac, édifier lePont Lesdiguières. Son plus bel héritage reste lechâteau de Vizille, qu’il fait construire à l'emplacement d'un ancien château médiéval pour en faire s propre demeure. Il fait également refaire les voies de communication. À partir de 1610, c'est son gendre,Charles II de Créquy, qui reprend la lieutenance générale du Dauphiné.
Des troupes nombreuses traversent la province en 1628 pour se rendre en Italie. C'est à cette occasion qu'est conquise, aux confins du Val Cluson, la ville dePignerol. Mais, une fois encore, l’armée commet une foule de déprédations dans le Briançonnais. Le pays a beaucoup de mal à s’en relever. Cette année marque la dernière réunion des États du Dauphiné. C’est la fin des libertés delphinales : les impôts sont payés désormais sans l’assentiment des représentants du pays. C’est un signe du progrès de l’absolutisme.
C'est auXVIIe siècle que prend naissance la locution proverbiale deBrûleurs de loups dans la province du Dauphiné. En effet, le cardinalLe Camus, lors d'une visite paroissiale en 1672 àSaint-Christophe en Oisans évoque l'usage de mettre le feu aux forêts pour éloigner les loups[19]. Aujourd'hui, le club dehockey sur glace de Grenoble se pare de cette appellation deBrûleurs de loups.

Larévocation de l'édit de Nantes en 1685 provoque le départ d'environ 20 000 protestants, ce qui affaiblit l'économie dauphinoise, déjà fortement mise à mal par les guerres successives d'Italie, de religion et deLouis XIV. Quelques vallées, notamment celle du Queyras, voient leur population diminuer de moitié. Grenoble perd 3 000 habitants à elle seule[phd 9]. Il y a des mesures de rigueur contre les faux convertis et nombre de leurs biens sont confisqués. Malgré les interventions des évêques de Vienne et de Grenoble pour mettre un terme à ces persécutions, les condamnations demeurent jusqu’auXVIIIe siècle. À la fin duXVIIe siècle, avec la Province voisine du Vivarais, autre bastion protestant, le Dauphiné est agité par une « épidémie » de « prophétisme » qui se répand jusqu'en Cévennes et Languedoc, et annonce là-bas laguerre des Camisards. La vague de « prophétisme » commence quand la jeune bergère Isabeau Vincent, âgée de 15 ans et ne parlant que patois, en transe dans son sommeil, se met à parler en français, pour appeler à la rédemption des nouveaux convertis et au châtiment des anciens catholiques, dans un style apocalyptique inspiré de la Bible. S'ensuivent des phénomènes semblables, perçus comme « miracles » ou prodiges annonçant des temps nouveaux pour les Huguenots, comme simulation de prophètes formés dans une école spécifique clandestine pour leurs adversaires « papistes », ou comme « hystérie » pathologique et fanatique pour les plus rationnels[réf. souhaitée].
En 1692,Victor-Amédée II de Savoie, partie prenante de laLigue d'Augsbourg contre la France de Louis XIVenvahit le Dauphiné par la région de Barcelonnette, à la tête d'une armée de 40 000 hommes[20]. Gap, Chorges, Guillestre et soixante-dix villages sont ruinés ; Embrun, ville archiépiscopale, échappe au pillage et sa garnison quitte la ville avec ses drapeaux. Les troupes savoyardes sont repoussées en Provence parPhilis de La Charce, mais reprennent, en 1696,Pignerol.
Letraité d’Utrecht de 1713 modifie la frontière de la province du côté duPiémont; la France gagne Barcelonnette et sa vallée mais perd lesEscartons du côté italien des Alpes (celui d'Oulx, du val Cluson et de Château-Dauphin), soit environ les deux tiers du Briançonnais.

L’industrie se développe :ganterie de Grésivaudan à Grenoble, toiles de Voiron, draps de Romans, papeteries[21] filatures et tissage de la Soie dans la vallée du Rhône. Le commerce aussi est actif ; des foires importantes se tiennent à Grenoble, Romans et Beaucroissant.
Le, la province est la première à réclamer la tenue desÉtats généraux. Le tournant décisif a lieu l’année 1788. L’activité économique de Grenoble dépend alors fortement duParlement du Dauphiné. Face à la menace royale de chasser les parlementaires de la ville, la population prend fait et cause pour les défendre. Il s’agit de laJournée des Tuiles du. Se tient alors laréunion des états généraux du Dauphiné, le, qui obtient la tenue desÉtats généraux pour l'année suivante. La révolution est en marche. Les députés dauphinois,Antoine Barnave etJean-Joseph Mounier, sont des acteurs importants du début de la Révolution française. La deuxième réunion des États a lieu du jusqu'au, par une assemblée préliminaire, puis, officiellement, du jusqu’au à Romans[22].
LaGrande Peur sévit particulièrement dans le Bas-Dauphiné. Arrivant deFranche-Comté et de Bourgogne, elle est violente dans le Viennois (Bourgoin-Jallieu, Crémieu, la Tour-du-Pin, les Terres Froides). Bourgoin en est le centre et, de là, le mouvement gagne tous les environs. Le calme revient le7 août. Finalement, neuf châteaux ont été détruits et une quarantaine saccagés[23].

En 1790 le Dauphiné donne naissance à trois départements : la Drôme, les Hautes-Alpes et l’Isère, dont les chefs-lieux sont respectivement Valence, Gap et Grenoble[24]. La principauté d’Orange se trouve quant à elle rattachée au département duVaucluse.
De nombreuses communes sont renommées sous la période révolutionnaire. Grenoble voit de nombreuses de ses rues changer de nom comme la rue Saint-Laurent qui devient pendant quelques années rue de la Montagne,Saint-Marcellin est rebaptisée « les Thermopyles ». Seul le nom dela Tronche, autrefois « Saint-Ferjus », est conservé jusqu’à nos jours.
Les années suivantes, au cours de la période appelée laTerreur, la Révolution déclenchée ne provoque que deux morts à Grenoble grâce à l'intervention en 1794 d'un officier municipal,Joseph Chanrion, devant leComité de salut public à Paris[25]. Alors qu'à travers la France 16 594 personnes passent par la guillotine[26], les deux victimes grenobloises sont deux prêtres réfractaires les abbés Revenaz et Guillabert guillotinés sur la place Grenette le. Cependant, une troisième victime reste dans la mémoire des Grenoblois, celle de leur ancien maire,Antoine Barnave, guillotiné à Paris le à la suite de ses entrevues avecMarie-Antoinette d'Autriche.
Le plébiscite pour l’approbation du sénatus-consulte qui transforme leConsulat enEmpire donne, dans le département de l’Isère, 82 084 oui contre 12 non. Les arrondissements de Vienne et Saint-Marcellin n’ont aucun non[phd 10].
L'institution dumusée de Grenoble est créée en 1798 par un professeur de dessin, passionné d'art,Louis-Joseph Jay, qui installe les premières œuvres dans les locaux de l'ancien évêché, puis dans une partie du collège des Jésuites.
LepapePie VII passe à Grenoble pour le couronnement de l'empereur Napoléon Ier. Il y revient une nouvelle fois en 1809, sur la route de l’exil, après avoir été arrêté à Rome.


En 1813, le Dauphiné se trouve sous la menace des Autrichiens qui envahissent laSuisse et la Savoie alors occupée par la France. Après une importante résistance àFort Barraux, les troupes françaises doivent se retirer vers Grenoble. La ville, bien défendue, parvient à repousser les Autrichiens versGenève. Toutefois,l'invasion de la France entraîne la capitulation des troupes en Dauphiné et l'occupation de Grenoble par des troupes autrichiennes durant les mois d'avril et mai 1814.
Lors duretour de l’Empereur en 1815, ce dernier reçoit un accueil favorable dans les Hautes-Alpes. ÀLaffrey, Napoléon se trouve face à un bataillon du5e de Ligne envoyé parLouis XVIII pour l'arrêter. Il s'avance seul au-devant des troupes, entrouvre sa redingote et s'écrie : « S'il est parmi vous un soldat qui veuille tuer son Empereur, me voici.» À ces mots, le5e de Ligne met bas les armes et se précipite vers Napoléon. Ce dernier fait une entrée triomphale à Grenoble.Honoré de Balzac retrace cet épisode dansle Médecin de campagne[27]. Cependant, trois mois plus tard, après à la défaite deWaterloo, le Dauphiné subit une nouvelle invasion de troupes austro-sardes. Sans armée, les grenoblois se défendent eux-mêmes contre l’envahisseur. Mais à la suite de l’abdication de l’Empereur, la ville capitule.

La période allant de 1830 à 1848 est marquée par l’établissement de la grande industrie, tant dans la Drôme que dans l’Isère. Elle recoupe alors le tissage mécanique pour la soie. C'est aussi l’apogée des toiles de Voiron. L’industrie de la chaussure se développe également à Romans. D’autre part, à la suite d'une invention deXavier Jouvin, laganterie grenobloise entre dans son âge d’or. La production s’exporte dans le monde entier (Royaume-Uni,Russie,États-Unis…).
En 1852, le prince présidentLouis-Napoléon Bonaparte vient dans la région pour son voyage de propagande. Il y est, en général, bien accueilli et encouragé dans ses projets. C’est la période de mise en exploitation des principales lignes de chemin de fer. Valence accueille ses premiers trains en 1854, Grenoble en 1858. LeSecond Empire est marqué également par un regain d’intérêt pour les stations thermales, àAllevard ou àUriage-les-Bains. En 1852 enfin, le canton de Villeurbanne est détaché de l’Isère pour être rattaché auRhône.
Les traités de commerce de 1860 favorisent un grand développement de l’industrie (nombreuses usines pour le tissage de la soie, construction mécanique, papeterie[21]). Des routes sont percées dans les massifs (Vercors, Chartreuse) facilitant considérablement la circulation et favorisant l’essor du tourisme. Il faut cependant encore 70 ans pour relier Grenoble à Briançon. En 1869,Aristide Bergès invente ce qu’il appelle plus tard lahouille blanche. Cette invention a un impact majeur sur l’activité économique de la région. Il favorise le développement de la papeterie dans la vallée du Grésivaudan.
À la même époque est construitNotre-Dame de La Salette, de 1852 à 1865.

À la suite de la formation de laTriple Alliance, le gouvernement institutionnalise en 1888 les premières troupes de montagne, les bataillons dechasseurs alpins.
Les frèresAuguste et Émile Burle, originaires de Gap, récoltent un herbier historique, entre 1870 et 1889, constitué de plantes des alentours de Gap ; il est composé environ de 30 000 parts. Ils contribuent à améliorer la connaissance des plantes du département des Hautes-Alpes.
Le désenclavement des massifs permet l’installation d’usines le long des cours d’eau, sources d’énergie. La vallée de la Romanche devient ainsi une des principales vallées industrielles de France[28]. L’arrivée du chemin de fer à la Mure permet d’exploiter au mieux les gisements d’anthracite duplateau matheysin.
Lors de laGrande Guerre, de nombreux bataillons de chasseurs alpins se retrouvent mobilisés sur le front au Nord-Est du pays. Plusieurs de leurs bataillons sont totalement anéantis. Le courage dont ils font preuve au combat leur vaut le surnom de « diables bleus ».

Cependant, le conflit mondial donne une impulsion nouvelle à l’économie régionale. Pour soutenir l’effort de guerre, de nouvelles centrales hydroélectriques se construisent le long du Drac, de la Romanche, telle la centrale des Vernes. De nombreuses usines se convertissent également en industrie d’armement. Grenoble, lePont-de-Claix et Roussillon se lancent dans l’industrie chimique, industrie qui se développe durant tout leXXe siècle. Enfin, le Nord de la France étant occupé, de nombreux ateliers et usines textiles s’établissent dans le Nord-Isère et la Drôme. Vienne par exemple se spécialise dans le marché militaire et parvient à fournir en 1915 20 % de la production française de draps à l’armée[29].
Pour mettre en lumière ce développement économique, Grenoble organise en 1925, l’Exposition internationale de la houille blanche, qui attire un million de visiteurs venus du monde entier.
Les années 1930, avec le début des congés payés, marquent le développement du tourisme d’hiver. La station del’Alpe d’Huez par exemple est créée en 1936[30]. C’est ici queJean Pomagalski crée son premier téléski à perches, sur les pentes de l'Éclose. C’est à cette époque qu’ouvrent d’autre part les sanatoriums deSaint-Hilaire du Touvet.
Lors de labataille des Alpes durant laSeconde Guerre mondiale, les chasseurs alpins parviennent à contenir et repousser les forces armées italiennes dans les Alpes. Cependant, l’avancée fulgurante en 1940 des forces allemandes permettent aux ennemis d’atteindre les portes de Grenoble fin juin. Ils sont cependant stoppés àVoreppe, en raison de la résistance des troupes dugénéral Cartier. Mais l’armistice met un terme aux combats. Le 19 mars 1941, lemaréchal Pétain, en visite à Grenoble, reçoit un accueil triomphal. À partir de 1942, la région est occupée par les troupes italiennes. Leur clémence à l’égard des juifs entraîne une immigration forte dans la région. Leur nombre est multiplié par trois[31].

L’État français accepte la création dans la ville thermale d’Uriage d’uneécole nationale des cadres (modèle de la futureENA), pour constituer l’élite intellectuelle de la France nouvelle. Mais ce lieu devient rapidement un centre de réflexion critique contre lenazisme etVichy et est rapidement fermé. Nombre de ses membres rejoignent alors laRésistance armée dans la région. En effet, le caractère alpin du Dauphiné permet la constitution de bases solides pour la Résistance, avec la constitution demaquis notamment dans le massif duVercors, mais également enChartreuse, dans laMatheysine, l'Oisans ou leGrésivaudan.Grenoble elle-même prend part à de nombreuses actions, notamment à partir de l’occupation allemande à partir de 1943. Le, la caserne de Bonne, utilisée comme arsenal par les Allemands, y est détruite[32] ; de nombreux trains et tunnels sont sabotés dans toute la région. En 1944, la répression des troupes nazies contre les maquisards duVercors est terrible. Le village martyr deVassieux-en-Vercors est faitcompagnon de la Libération par le généralDe Gaulle, ainsi queGrenoble[33].
Lors de la libération de la région,Valence souffre de nombreux bombardements alliés.
En 1967, 23 nouvelles communes de l'Isère furent rattachées au Rhône. En 1971,Colombier-Saugnieu est également détachée de l'Isère.
En 1968, Grenoble accueille lesXe jeux Olympiques d’hiver, permettant une transformation et un agrandissement de la ville ainsi qu’un développement des infrastructures (aéroport, autoroute…). Cette période marque également le développement du tourisme de masse et les grands complexes sportifs se forment (Les Deux Alpes,Chamrousse,Serre Chevalier…).
Laville nouvelle de L'Isle-d'Abeau est créée le, pour répondre à la croissance de l’agglomération lyonnaise.
En 1982, le Dauphiné se trouve partagé entre les régionsRhône-Alpes (comprenant laDrôme et l’Isère) etProvence-Alpes-Côte d’Azur (incluant lesHautes-Alpes).
Avant 1790, le Dauphiné était dominé par dix villes dont les consuls siégeaient à la tête des députés du tiers état, dans les États généraux de la province :
L'industrialisation et l'urbanisation ont profondément bouleversé cette hiérarchie au profit des agglomérationslyonnaise etgrenobloise, en particulier depuis la seconde moitié duXXe siècle. Actuellement, les 20 communes les plus peuplées du Dauphiné sont :
| Villes | Département | Nombre d'habitants(2021) | |
|---|---|---|---|
| Lyon (3e,6e,7e et8e arrondissements)[N 1] | Rhône | 325 432 | |
| Grenoble | Isère | 157 477 | |
| Villeurbanne | Rhône | 156 928 | |
| Vénissieux | Rhône | 66 363 | |
| Valence | Drôme | 64 483 | |
| Vaulx-en-Velin | Rhône | 52 139 | |
| Saint-Priest | Rhône | 48 822 | |
| Bron | Rhône | 43 049 | |
| Gap | Hautes-Alpes | 40 500 | |
| Montélimar | Drôme | 40 399 | |
| Saint-Martin-d'Hères | Isère | 38 454 | |
| Échirolles | Isère | 36 849 | |
| Meyzieu | Rhône | 35 882 | |
| Romans-sur-Isère | Drôme | 32 911 | |
| Vienne | Isère | 31 051 | |
| Décines-Charpieu | Rhône | 29 731 | |
| Bourgoin-Jallieu | Isère | 29 577 | |
| Fontaine | Isère | 22 891 | |
| Voiron | Isère | 20 891 | |
| Bourg-lès-Valence | Drôme | 19 581 | |
| Saint-Fons | Rhône | 19 360 | |
| Briançon | Hautes-Alpes | 10 561 | |
| Crest | Drôme | 8 756 | |
| Embrun | Hautes-Alpes | 6 404 | |
| Die | Drôme | 4 803 |
Le parc national des Écrins a été officiellement créé en sous l’impulsion d’alpinistes, d’associations naturalistes et duClub alpin français. Organisé en secteurs, le parc s’appuie sur des équipes de terrain chargées de la gestion et de l’animation quotidienne de ce vaste territoire. Le parc bénéficie d'un réseau de près de 700 kilomètres de sentiers et de109 passerelles ou ponts. Il est géré par un établissement public qui dépend duministère de l'Écologie. Entre Gap, Grenoble et Briançon, le parc national des Écrins a pour partie centrale lemassif des Écrins et est délimité approximativement par les vallées de laRomanche au nord, de laGuisane et de laDurance à l'est et au sud, duDrac à l'ouest. Ces cours d'eau collectent les eaux des rivières et torrents du massif des Écrins, constituant autant de vallées dont ils poursuivent le travail de creusement et d'érosion.

C'est un territoire de haute montagne dont la succession des principaux sommets structure l’ensemble du massif selon une architecture complexe qui culmine à 4 102 mètres à labarre des Écrins.
On peut distinguer :
Au total, plus de150 sommets dépassent « 3 000 m », pour des fonds de vallée avoisinant les 1 000 m. Les glaciers, encore bien présents (10 000 hectares), ont laissé dans le paysage de très nombreuses traces de leurs débordements anciens. Les roches sédimentaires (calcaires, schistes, grès), qui prédominent au sud-est du territoire et ont recouvert le socle ancien, ont facilité l'ouverture de larges vallées, tandis qu'au nord et à l'ouest les roches cristallines et métamorphiques (granite, gneiss…) ont résisté aux burins successifs des glaciers et torrents, dessinant des profils en auge caractéristiques où successions de verrous et surcreusements accroissent encore l'aspect abrupt des versants[34].
L'ancienne province du Dauphiné héberge le territoire de plusieurs parcs naturels régionaux, leparc naturel régional de Chartreuse, leParc naturel régional du Vercors et leparc naturel régional des Baronnies provençales (partiellement).
Il s'agit de curiosités naturelles de la géologie alpine, tels que leMont Aiguille, laFontaine ardente,la Pierre Percée, lesGrottes de la Balme ou lesCuves de Sassenage, ou de constructions anciennes telles que latour sans Venin et lepont Lesdiguières. Ces « merveilles » sont toutes encore visibles en 2022 et certaines d'entre elles (les grottes) sont soumises à des visites payantes. Elles sont toutes situées dans le département français de l'Isère et donc dans l'ancienne province du Dauphiné.
La devise « Dauphiné en avant » est attestée au moins depuis la fin duXIXe siècle[35].
Selon le livre de géographie aux éditions Delagrave en 1936 :
« On vante beaucoup le caractère du Dauphinois, avec sa profondeur, sa ténacité, sa finesse ; plus calme que le provençal, au lieu de s'emporter, il réfléchit. On connaît d'ailleurs le dicton : fin, rusé, courtois, le Dauphinois sent venir le vent et connaît la couleur de la brise. »

Le Dauphiné est partagé en deux grandes zones linguistiques, celle de l'arpitan oufranco-provençal au nord et celle de l'occitan ou langue d'oc au sud. Le termedauphinois peut ainsi faire référence aux deux parlers mais il s'applique généralement aux parlers arpitans du Dauphiné.
La première zone linguistique est située au nord. Il s'agit de celle dudauphinois, un dialecte de l'arpitan et qui est parlé deVilleurbanne jusqu'àLaffrey en passant parVienne etGrenoble.
La moitié sud du Dauphiné est delangue occitane et plus précisément de dialectevivaro-alpin, parler parfois également nomméprovençal alpin. Son aire géographique s'étend deRomans àBardonnèche enItalie et dePierrelatte jusqu'àLa Mure etBriançon.

De nombreux contes et légendes se sont racontées devant la cheminée des fermes par les anciens paysans du Dauphiné dans ce qui reste une tradition essentiellement orale. La plupart de ces récits textes sont connus grâce aux ouvrages de la romancière dauphinoiseLouise Drevet, grande spécialiste de l'histoire régionale du Dauphiné[36].
Un autre spécialiste du folklore et des anciennes traditions françaises, l'ethnologueCharles Joisten (1936-1981), ancienconservateur duMusée dauphinois, après avoir découvert les ouvrages d'Arnold van Gennep sur les traditions du Dauphiné et desHautes-Alpes, s'est penché sur les superstitions des campagnes dauphinoises. Il est l'auteur d'un ouvrage notable consacré aux légendes locales, fruits d'une recherche longue et minutieuse et qui relate, parmi les autres légendes, lebestiaire fantastique des territoires de l'Isère sans oublier les Terres froides, l'Isle Crémieu, la plaine de Bièvre, le Grésivaudan et les grands alpages du Vercors et de la Chartreuse[37].
Plus récemment,Éric Tasset, auteur d'ouvrages sur l'histoire et le folklore du Dauphiné, a publiéLes plus belles légendes de l'histoire du Dauphiné (2000), qui rassemble de nombreuses légendes et récits de la région, parmi lesquels le passage par les Alpes d'Hannibal, les origines de la Pierre Percée, César et la Manne de Briançon, le partage dulac de Laffrey, le dernierdragon du Dauphiné (Fontaine ardente), les aventures deRoland, deMandrin, deBayard et dePhilis de la Charce, laTarasque, lesogres du Dauphiné, l'histoire deMélusine ou encre lesnymphes duMont Aiguille, etc.[38].
Jusqu'à laRévolution Française, le territoire du Dauphiné était réparti entre 6provinces ecclésiastiques, dont deux avaient leur métropole en Dauphiné (Embrun etVienne) :
Par ailleurs, les portions de territoire acquises aux dépens de l'Italie par les communes deMontgenèvre etNévache lors dutraité de Paris ratifié en1947 relevaient précédemment de paroisses comprises dans lediocèse de Suse, suffragant deTurin.

Le Dauphiné est réputé pour certaines spécialités culinaires :
et pour ses produits du terroir :
Les soirées de mondées sont encore populaires en Dauphiné et consistent à effectuer une soirée de veillée tout en mondant les noix, c'est-à-dire de débarrasser lesnoix de leur coque rigide afin d'en extraire les cerneaux.
Depuis 1977,Empi et Riaume(groupe d'arts et tradition du Dauphiné et du Vivarais) organise le Festival International de Folklore « Cultures et Traditions du Monde », qui réunit chaque année, durant la première quinzaine dejuillet, des groupes traditionnels venus du monde entier, àRomans-sur-Isère. L'événement, reconnu par le CIOFF mobilise de nombreux bénévoles durant toute l'année et attire des milliers de spectateurs venus de toute la France[39].

Durant l'Ancien Régime, les toilettes des femmes sont généralement assez uniformes dans toute la province et seule la coiffe fut différente dans chaque région et les fit distinguer les unes des autres. Les caractéristiques de la tenue sont le port d'une jupe longue et ample de couleur unie, un petit corsage à manches longues, un mouchoir ou châle de tissu de couleur, des bas de laine blanche ou brune et des souliers plats ou desgaloches. Les hommes, quant à eux, portent longue veste non boutonnée, descendant jusqu'à mi-cuisse, un chapeau « lampion » ou « clabaud » mais aussi un bonnet de laine, généralement de couleur rouge et sur lequel, les jours de fêtes, ils posaient leur chapeau[40].
Cette danse orthographié « rigodon » ou « rigaudon » est une danse folklorique du Dauphiné, pratiqué dans la région. Une association, située àSaint-Jean-de-Soudain, dénomméeLe Folk des Terres Froides perpétue sa mémoire en organisant des bals au niveau local[41]. Les groupes folkloriques Sarreloups, créé en 1978 et situé àTêche[42],[43], et Cru de Paille, créé en 1981 àMontseveroux[44], participent dans le sud Grésivaudan et dans le Bas-Dauphiné à la perpétuation des costumes et danses locales. Lechibrelli, type danse connue enBresse et enFranche-Comté est également connue dans les Terres froides, l'une d'entre-elles portant le nom de la région[45].
Le hameau de Pont-de-Cervières, situé à la sortie de Briançon, en direction de l'Izoard, accueille une fois par an, le 16 août, la danse traditionnelle du « bacchu-ber », exécutée par des hommes portant des épées ; cette danse n'existe plus que dans ce village.
LeCritérium du Dauphiné est une compétition cycliste par étapes, créée parGeorges Cazeneuve en1947. Elle doit son nom au journal régional qui était distribué dans tous les départements de l'ancienne province et se dénommait à son origine, le « Critérium du Dauphiné libéré ». Dès ses débuts, cette compétition qui attire les meilleurs cyclistes français, sort du cadre de l'ancienne province car les coureurs devront emprunter les routes deSavoie et de laSuisse[47].
Le Dauphiné libéré est un quotidien dont le siège est à Grenoble, et qui est diffusé dans une partie de la régionRhône-Alpes (lePays de Gex dans l'Ain, l'Ardèche, laDrôme, l'Isère, laSavoie, laHaute-Savoie) ainsi que dans le nord de la régionProvence-Alpes-Côte d'Azur (Hautes-Alpes,Avignon etComtat dans leVaucluse etVallée de l'Ubaye dans lesAlpes-de-Haute-Provence).
Autrefois, la Compagnie du Dauphiné (ex-Compagnie du chemin de fer de Saint-Rambert à Rives) exploitait la ligne de chemin de fer de Saint-Rambert-d'Albon àRives, puis àGrenoble. Cette Compagnie fut rachetée par lePLM, puis reprise par laSNCF. C'était la première ligne de chemin de fer menant àGrenoble, la capitale du Dauphiné.
Sur les gouverneurs, liste deGuy Allard -Les gouverneurs et les lieutenants au gouvernement de Dauphiné, Grenoble, Jean Verdier impr., 1704 (rééd. par H. Gariel, Grenoble, 1864,p. 155-211).
Sur la tradition orale