Cruscades est une commune rurale qui compte 940 habitants en 2022, après avoir connu une forte hausse de la population depuis 1975. Elle fait partie de l'aire d'attraction de Narbonne. Ses habitantssont appelés les Cruscadèls ou Cruscadèles.
Cruscades est une communeviticole de la plaine narbonnaise, traversée par la route qui va deLézignan-Corbières à l'embranchement de la D 24 et de laN 6113 (non loin du col de la Mède), viaOrnaisons. Cruscades est située à17 km deNarbonne et à5 km de Lézignan-Corbières, à43 km par la route, deCarcassonne, la préfecture.
D'un point de vue géographique et géologique, Cruscades se situe dans l'un des trois secteurs qui composent le Narbonnais, à savoir celui de Lézignan-Ginestas. Le bourg se trouve dans une plaine, délimitée : au sud par l'Orbieu ; à l'est et à l'ouest par deux élévations de terrain ; au nord par les terres de Canet-d'Aude. À l'ouest, l'ensemble Plat-de-Veyret/Resplandy/Saint-Michel [PRS] se situe à l'extrémité d'une longue digitation orientée SW/NE (axe Ferrals-les-Corbières/Canet-d'Aude) ; et plus à l'est, la Mouchère et les Ginestes, qui délimitent à l'ouest la plaine, et à l'est la dépression de la Cardaïre. Le sol de ces modestes éminences est recouvert de cailloux et graviers. Entre ces deux plissements s'étend la plaine qui va, en s'évasant, vers Canet-d'Aude. Elle est constituée d'une terre limoneuse, plus fertile. La formation de ces terrains est liée aux différentes glaciations quaternaires (rissien du [PRS], würmien de la plaine), mais aussi aux divagations de l'Aude et de l'Orbieu. Plus à l'ouest et plus à l'est, on remarque deux dépressions : celle dite "de l'Étang des Colombes", et l'autre "de la Cardaïre". Il s'agit d'anciens étangs, autrefois poissonneux, qui furent asséchés : le premier par les archevêques de Narbonne, le second (fin du XVIIIe-début du XIXe siècle) lors de la déviation du Lirou vers Canet-d'Aude (il s'écoulait anciennement dans ledit étang de la Cardaïre). Le village est entouré de verdure (parcs particuliers). L'altitude du village culmine modestement à36 mètres (hauteur du site de l'ancienne école). Le territoire communal s'étend sur 9,65 km2 (965 ha)[2].
Cruscades se situe en zone de sismicité 2 (sismicité faible)[3].
Au, Cruscades est catégorisée bourg rural, selon la nouvelle grille communale de densité à7 niveaux définie par l'Insee en 2022[20].Elle est située hors unité urbaine[I 1]. Par ailleurs la commune fait partie de l'aire d'attraction de Narbonne, dont elle est une commune de la couronne[Note 4],[I 1]. Cette aire, qui regroupe 71 communes, est catégorisée dans les aires de 50 000 à moins de 200 000 habitants[21],[22].
L'occupation des sols de la commune, telle qu'elle ressort de labase de donnéeseuropéenne d’occupationbiophysique des solsCorine Land Cover (CLC), est marquée par l'importance des territoires agricoles (100 % en 2018), une proportion identique à celle de 1990 (100 %). La répartition détaillée en 2018 est la suivante : cultures permanentes (84,6 %), zones agricoles hétérogènes (9,4 %),terres arables (6 %)[23]. L'évolution de l’occupation des sols de la commune et de ses infrastructures peut être observée sur les différentes représentations cartographiques du territoire : lacarte de Cassini (XVIIIe siècle), lacarte d'état-major (1820-1866) et les cartes ou photos aériennes de l'IGN pour la période actuelle (1950 à aujourd'hui)[Carte 2].
Carte des infrastructures et de l'occupation des sols de la commune en 2018 (CLC).
Certaines parties du territoire communal sont susceptibles d’être affectées par lerisque d’inondation par débordement de cours d'eau, notamment l'Orbieu. La commune a été reconnue enétat de catastrophe naturelle au titre des dommages causés par les inondations etcoulées de boue survenues en 1982, 1992, 1996, 1997, 1999, 2005, 2006, 2009 et 2014[26],[24].
Carte des zones d'aléa retrait-gonflement des sols argileux de Cruscades.
Leretrait-gonflement des sols argileux est susceptible d'engendrer desdommages importants aux bâtiments en cas d’alternance de périodes desécheresse et de pluie. La totalité de la commune est en aléa moyen ou fort (75,2 % au niveau départemental et 48,5 % au niveau national). Sur les 364 bâtiments dénombrés sur la commune en 2019, 364 sont en aléa moyen ou fort, soit 100 %, à comparer aux 94 % au niveau départemental et 54 % au niveau national. Une cartographie de l'exposition du territoire national auretrait gonflement des sols argileux est disponible sur le site duBRGM[27],[Carte 3].
D'après le "Dictionnaire étymologique des noms de lieux de France" de Dauzat et Rostaing (Larousse, 1963), Cruscades constituerait "une énigme toponymique". Plusieurs auteurs, dont les noms suivent, ont donné quelques hypothèses plus ou moins plausibles :
« Le lieu historique tirerait son origine du motcrusca, lequel, en dialecte ibérique, signifie un creux, un fossé, un silo. Cruscades serait « le bourg des silos »[29]. Mais l'origine est obscure ; il faut peut-être chercher dans l'occitancruscar « broyer »[30]. C'est aussi une énigmetoponymique[31] : c'est un nom unique en son genre ; on pense cependant à un nom gallo-romain de villa à suffixeanum, plurielanas (finale atone), appliqué à un sobriquet dérivé de crusculum, latin, petite jambe, par exemple Cruscatus ; on connaît comme surnom Crucellio. - gallo-romain (?)[32]. »
L'hypothèse qui fut formulée par leDr Lemoine[33], selon laquelle Cruscades dériverait d'un nom gallo-romain (avec suffixe -anum) ne paraît pas crédible, car nous aurions hérité d'un toponyme avec suffixe -an (comme Fabrezan, Lézignan, Moussan, etc.).
Parmi les hypothèses curieuses, si l'on admet que la bataille de l'Orbieu, en793, s'est déroulée près de Cruscades, on retiendra deux interprétations : le village de Cruscades tirerait son nom de deux motslatins :crux (croix) etcadere (tomber). Il désignerait l'endroit où laCroix, signe des combattants chrétiens, est tombée sous les coups du Croissant, signe des combattantssarrasins. Cruscades pourrait venir aussi du motoccitan : Cruc (sommet de la tête) et de la terminaisonada (substantif exprimant le résultat de l'action). Quand on a deux têtes qui se heurtent, on a une crucada. Ces hypothèses ont été développées par l'abbé Joseph Graves (1907-1991).
Georges Sénié pense que l'une des premières appellations du village :Aruscadae pose problème. L'abbé Sabarthès, dans sonDictionnaire Topographique de l'Aude, écrit qu'il doit s'agir d'une erreur de transcription et qu'il faut lireCruscadae. Mais rien n'autorise formellement qu'il faille éliminer ladite appellationAruscadae. On a la preuve, grâce à des découvertesarchéologiques réalisées par l'abbé Toustou au début duXXe siècle dans le périmètre de l'église, que l'existence du bourg de Cruscades remonte au moins au début du Haut Moyen Âge : on a trouvé entre autres vestiges un fragment de l'épitaphe d'un nommé Pentadia datant du règne deRécarèdeIer, roi desWisigoths de l'an 586 à l'an 601, année de sa mort à Tolède. Ce Pentadia devait être un riche propriétaire et Cruscades le siège d'une vastevilla gallo-romaine (à l'instar de celles du "Pla de Beyret" et de la « Métairie de Saint-Michel », aujourd'hui « Resplandy »). Si le toponyme de Cruscades demeure bien une énigme, on ne peut pas éliminer cependant l'hypothèse d'un nom de lieu d'originewisigothique : c'est pour cette raison que l'on doit conserver la graphieAruscadae.
« A Cruscades, dans l'Aude, ont été faites, ces derniers temps des découvertes qui intéressent l'archéologie, et peut-être la préhistoire. Au pied d'une muraille fort ancienne, si l'on en juge par l'extrême usure des pierres, se trouve un vaste puits de 12 mètres de circonférence, très-solidement construit et curieusement pavé avec des cailloux de rivière. On a supposé d'abord que c'était une citerne. Il fallut abandonner cette hypothèse lorsqu'on vit que le pavage reposait sur une épaisse couche de sable. Ce ne pouvait être un silo, car le sol est trop humide, ni une prison, le pavage en serait usé. Un archéologue a émis l'idée que ça pouvait représenter une glacière peut-être d'origine gallo-romaine. De nouvelles fouilles ont fait découvrir, autour du puits une voûte de maçonnerie, abritant des squelettes et des vases funéraires brisés, sauf un qui a été recueilli entier. Plus loin, on trouva un autre puits, de dimension moindre, pavé plus grossièrement, plein de squelettes qui s'effritaient au contact de l'air. Chaque squelette était enfermé dans une sorte de cercueil en pierres brutes. Nulle inscription, si ce n'est sur un morceau de marbre trouvé presque à fleur de terre, les deux tiers d'une épitaphe en latin, de l'époque wisigothique. Le pavage du grand puits mérite une mention particulière. On y voit trois rangées de pierres en saillie et des traits gravés au burin. Est-ce des lettres appartenant à un alphabet primitif ? On pourrait le soutenir avec quelque vraisemblance. Est-ce des oghams, des runes, ces caractères mystérieux auxquels certains peuples attribuaient un pouvoir magique ? Ne serait-ce pas le résultat unique de la fantaisie extraordinaire d'un ouvrier ? Les signes sont en trop petit nombre, déclare l'auteur de ces découvertes pour en tirer des déductions solides. Il faut attendre d'autres trouvailles avant de porter un jugement. »
Cruscades a été humanisé bien avant notre ère, si l'on se fie aux découvertes des archéologues. Le site du Pla-de-Beyret, associé à celui du Plo-de-Beyret (il en est fait mention un peu plus bas, avec celui de Resplandy ) prouvent sans conteste que les environs immédiats du Cruscades actuel furent occupés dès l'époque gallo-romaine. Par ailleurs, de ce même site du Plo-de-Beyret, l'archéologue Régis AYMÉ nous apporte une information importante, à la suite de constatations faites en 2006 :" Un défoncement a mis au jour, dans une parcelle dominant l'ancien et rive de l'Orbieu, un site de l'Âge du Fer d'une superficie d’environ 1500 m². Le mobilier recueilli en surface se compose de nombreux tessons d'amphores micacées d'origine massaliète, de céramique ibéro-languedocienne à pâte claire dont le décor peint n'est pas conservé. Deux petits fragments de coupes à vernis noir de type ionien permettent de situer l'ensemble vers la fin du 1er Âge du Fer ou le début du second. La poterie indigène modelée est pratiquement absente. À l'extrémité de la partie du terrain anciennement occupée, est visible une aire de terre rubéfiée d'environ 9 m x 5 m, contenant de nombreux éléments de terre cuite d'environ 10 cm d'épaisseur, dans lesquels on remarque des empreintes de végétaux, et présentant une seule face régularisée. Il s'agit certainement des restes d'une structure de cuisson, dont on ne peut dire, faute de fouille, s'il s'agit d'un four domestique ou d'une installation potière, qu'aucun autre indice ne permet d'envisager. Dans un angle de la parcelle, on voit la trace d'un fossé de 40 mètres de long et de plusieurs de large, d'époque indéterminée."Toujours en 2006, un autre site important a été révélé à l'occasion d'un défonçage au lieu-ditl'Amayral. Ce site a bénéficié d'une prospection systématique et d'un ramassage en surface, prospection que l'on doit à deux archéologues : Régis AYMÉ (déjà cité) et Guy RANCOULE. La quasi-totalité des vestiges se concentre sur une petite surface de 1500 m² en bordure de laquelle le soc de la charrue a soulevé des restes d'un four (parois en terre cuite, terre rubéfiée, galets de 10 à 20 cm de diamètre). Au nord-est de la parcelle, sur une longue traînée de 10 m de long et 2 de large (peut-être un fossé comblé), la charrue a exhumé des fragments de tuiles et de la vaisselle commune tardive. Au centre de ladite parcelle, les archéologues ont trouvé des vestiges gallo-romains. Au niveau de la céramique, il s'agit presque exclusivement de productions tournées de technique méditerranéenne, importée, ou d'origine régionale, de formes connues et standardisées (Cf. Dicocer 1993). Les morceaux d'amphores relevés datent du VIe siècle avant notre ère,et évoquent les productions grecques attiques ; un tesson isolé, à pâte beige, portant des vestiges de peinture externe brun noir (technique dite "à la brosse"), pourrait provenir d'une amphore des mêmes provenance et époque.Des vases de tables possiblement d'origine grecque orientale, des céramiques grises monochromes, des fragments de céramiques ibéro-languedociennes (provenant de grands vases), des tessons de poteries modelées, des débris d'os, des restes probables d'un four domestique, des fragments de coquilles de moule, etc., complètent le tout. Selon les archéologues, le site recèle en profondeur d'autres et nombreux vestiges. Les archéologues soulignent que le gisement étudié del'Amayral se situe non loin duprincipal itinéraire ancien en direction de l'ouest. Et d'ajouter :Les intrusions attribuables à des périodes postérieures recueillies dans la première zone sont rares : une anse de pâte grise dure, probablement tardo-romaine, quelques tessons à cuisson oxydante, dont un fond de pot de technique gallo-romaine, un fragment de plomb, un poids cylindrique de 480 g, en plomb, avec des trous de suspension. Du milieu du champ proviennent 21 fragments, issus de plusieurs amphores d'époque romaine, dont un bord subvertical incomplet de la forme Pascual 1, ou assimilée, et un autre fragment d'amphore à lèvre oblique et rectiligne assez longue. De la partie nord-est, proviennent deux fragments d'une coupelle à pâte grise, dure, mal épurée (...), trois fragments de poterie à cuisson oxydante, un bord d'urne (...) et quelques autres fragments atypiques, tous attribuables à des vases de formes et de technique propres aux productions régionales de l'Antiquité tardive ou du haut Moyen Âge..." On retiendra de tout cela, qu'à une faible distance de Cruscades (au sud-ouest), vivaient des hommes vers le VIe siècle avant notre ère, et que le site fut occupé irrégulièrement jusqu'auVe – VIe siècle après J.-C.[41].
D'après unmanuscrit, rédigé par un ancien prêtre et cité par l'abbé Joseph Graves (ce document n'a pas été retrouvé), il était écrit que « parmi les villages environnants sur les bords de l'Orbieu, Cruscades, seul, se trouve à l'abri desinondations et convient excellemment à la construction desilos, en raison de sa situation légèrement surélevée par rapport au niveau de larivière, même en période de fortescrues ». Or, la terrible inondation du 12- a démenti cette croyance ancestrale puisque, pendant la nuit, les eaux arrivèrent jusqu'à la D 24 en inondant une partie des maisons situées le long des rues de l'Égalité et de la République. Mais il est vrai cependant que, de mémoire de Cruscadèls, on n'avait jamais vu pareille catastrophe, et les plus âgés ne se souvenaient pas avoir entendu parler de pareils événements. (Il faut toutefois noter que le niveau de la crue fut loin d'atteindre l'église.) Entre 2000 et2008, d'importants travaux de protection contre la montée des eaux ont été entrepris. Un peu plus loin, ledit curé ajoute : « La plaine (de Cruscades) devait être le véritablegrenier de la région ». En 1927-1928, une sorte de grand puits fut mis au jour près de l'église, du côté du nord-est. De nombreuses hypothèses ont été émises, certaines peu crédibles. Mais il est communément admis que cette grande fosse circulaire devait être une glacière datant duMoyen Âge. C'est d'ailleurs l'opinion de l'abbé Giry[42].
Dans le Dictionnaire de Girault de Saint-Fargeau, au chapitre du département de l'Aude, on peut lire :"À Cruscades, l'Orbieu a abandonné insensiblement, et par des relais successifs, son ancien lit(côté gauche), et, coulant plus avant dans le territoire deLuc, il a laissé une assez grande quantité de terrain qui, exhaussé par leslimons alluviaux, est très fertile..." C'est la terrasse alluviale dite de "Grazas". Jusqu'au début duXIXe siècle, l'Orbieu se divisait en deux bras en cet endroit (voir carte du diocèse de Narbonne, duXVIIIe siècle). L'eau du bras aujourd'hui mort alimentait unmoulin hydraulique construit auXIIe siècle : on le sait grâce àl'InventaireRocques, déposé au Département des Archives de Narbonne, ce qui est confirmé par le livre de comptes duBaille de Canet, Aymeric SOLAS, qui se trouve dans les "Archives secrètes" vaticanes et dont nous avons eu copie. Ce livre a été dépouillé par M. Sylvain DURAND, archéologue (Oupia - Hérault)[2].
Le village primitif existait, selon des sources écrites, dès leIXe siècle, sous la forme de quelques maisons construites sur une motte naturelle (toujours visible, là où se dresse aujourd'hui la « Maison Tauja », propriété de la famille Ayraud) ; il dépendait de la temporalité de l'archevêque de Narbonne, seigneur en toute justice de Cruscades. Ces quelques maisons se protégeaient derrière une solide palissade (la construction des remparts en dur se déroula dès 1196). Il ne reste aujourd'hui aucune trace de la maison dite "seigneuriale", si ce n'est un fragment de fenêtre en grès de Fontfroide, observable depuis l'impasse qui mène derrière la maison de M. Ayraud. Cependant, des vestiges archéologiques prouvent que le site actuel du village de Cruscades fut humanisé bien avant leIXe siècle : une épitaphe datant du roiwisigothRécarèdeIer ou ReccaredIer (de 586 à 601) a été retrouvée à Cruscades[43]. Il faut signaler également deux habitats antiques : lieux-dits du « Pla de Beyret » (Ier siècle av. J.-C.-IIIe siècle apr. J.-C.) et de « Resplandy » (Ier siècle av. J.-C. - Antiquité tardive) ; celui-ci était appelé naguère « Métairie de Saint-Michel »[2].
Par une charte de 1157, Louis VIII confirme àBérenger,archevêque de Narbonne, les privilèges et les possessions que lui et ses prédécesseurs avaient reçus des rois, entre autres le château de Cruscades, « castrum de Cruscadas ».
Au cours d'un concile provincial, l'archevêque Bernard Gaucelin excommunia publiquement, comme dévastateur et pilleur d'églises, un certain Nicol, qui, avec sa bande, ravageait le pays depuis le château de Cruscades où il avait établi son quartier général[44]. Le brigand aragonais avait osé établir un péage à Cruscades sur l'anciennevoie romaine qui menait de Narbonne à Carcassonne. Mais le successeur de Bernard, l'archevêque Bérenger, qui possédait entre autres les châteaux deCapestang et de Cruscades, confia leur administration à l'Aragonais, au grand dam du papeInnocent III qui dressa un réquisitoire, en 1204, contre ledit Bérenger[2].
Un document desarchives de Narbonne signale l'existence des remparts auXIIe siècle. Pendant cette époque troublée par les incursions des troupes étrangères et le passage des brigands, les habitants de la communauté s'engagent à verser à Ramon Filhol, alors châtelain du lieu (il était en faitbayle c'est-à-dire représentant du seigneur-archevêque de Narbonne), la somme de 2 700 sols melgoriens pour subvenir aux frais« du bastimant des murailhes dudit Cruscades et faictes sous le bon plaisir du seigneur Archevêque »[45].
On a pu retrouver les vestiges de ces remparts à l'occasion de la pose des canalisations du tout-à-l'égout, dans les années-1930, mais surtout lorsque la municipalité réalisa le projet fontinal (fin des années/1950-début des années-1960) : la pelle mécanique a soulevé les fondations d'un mur, infrastructure de la vieille enceinte bâtie avec un mortier réalisé avec de la chaux (liant), du sable, du gravier et des cailloux plus ou moins gros, selon la technique en usage au Moyen Âge. Si l'on observe les maisons du vieux Cruscades, on constate que parmi les matériaux utilisés, on distingue la présence fréquente du très beau grès deFontfroide (grès turonien d'un bel orangé), celle de la pierre de Ferrals (tuf du quaternaire), et de cailloux roulés (galets).
Pendant lacroisade contre les Albigeois,Simon de Montfort, alors duc de Narbonne, occupe le Lézignanais et entre en conflit avec le nouvel archevêque,Arnaud Amaury. Il enlève tous les châteaux du vicomte Amaury de Narbonne, dont il reçoit l'hommage. En 1226, Pierre Amiel, nouvel archevêque, reçoit400 livres en compensation pour les terres dont il a été dépossédé par Simon de Montfort, puis par Amaury de Montfort qui va les céder en 1224 au roiLouis VIII. Ce dernier les rétrocédera àGuy de Montfort, à savoir Sérame, Lengoust, Tourouzelle, Castelnau, Conilhac, Caumont.
Ces seigneuries resteront rattachées à la seigneurie de Lézignan jusqu'à laRévolution. En 1258, une châtellenie est créée parLouis IX à Lézignan, mais n'en feront pas partie lesparoisses relevant soit de la vicomté de Narbonne, soit de l'archevêché ou du chapitre de Saint-Just et Saint-Paul, comme Cruscades, Canet...
Cruscades avait construit ses remparts dès 1196. L'attaque des compagnies de brigands se déroule presque deux cents ans après l'érection des murailles. On peut légitimement se demander si l'on avait régulièrement procédé à l'entretien de l'enceinte. Le royaume de France était alors en plein marasme à cause de la guerre dite « de Cent Ans », dont le prétexte remonte à la mort deCharles IV, fils dePhilippe IV le Bel, resté sans héritier : en 1340,Édouard III d'Angleterre, petit-fils de Philippe le Bel, va soudainement réclamer lacouronne de France. Le conflit, long et ruineux, se terminera, sans qu'aucun traité bilatéral ne fût signé, en 1453 ; les Anglais conservèrent Calais, qu'ils ne rendirent seulement qu'en 1558. En 1404, le délégué de l'archevêque de Narbonne, Jean Corsier, entreprit la visite d’une bonne partie des paroisses circonvoisines du siège archiépiscopal (plus d'une vingtaine). Il est noté dans les rapports d'inspection que certains dégâts faits aux édifices religieux le furent pour cause de guerre[47].
Les « Recherches diocésaines de Narbonne » ([48]) du début duXVIe siècle, réalisées en 1537 à Cruscades, vont poser les bases d'un nouveaucadastre de la paroisse (territoire communal) en définissant les limites, en dressant l'inventaire des maisons et des terres en présence des consuls Arnaud Tourdes et Jordy Ramon (on les fait jurer sur les « quatre saintsévangiles » de fournir auxgéomètres patentés et arpenteurs désignés sous les termes de« prodomes et destrayres » dans le texte de1537, tous les renseignements possibles, en toute loyauté). Parfois, à défaut de repères géodésiques naturels (comme certains arbres réputés vivre très vieux, par exemple), les préposés aux « Recherches » édifiaient de petits tas de pierres en guise debornes, appelés« senhols » (signaux).
Les terres cultes et incultes représentent 3 739 sesterades, soit environ850 hectares. Le bourg qui couvre une surface réduite se compose de« la vyllo, gleysos, sementery, hyeros, jardyns » (ville, églises, cimetière, aires de dépiquage,jardins). On note15 maisons ou«ostals»,6« patus » (enclos murés) et6« cortals» servant de dépendances agricoles. Les terres à céréales, les vignes, lesolivettes et les prés s'étendent sur près de 50 % duterroir ; le reste des terres est signalé en friche,« terros ermos », constituant des vacants voués, la plupart du temps, à la dépaissance. Il fallut attendre l'ordonnance royale de 1770 pour que l'on assistât au défrichement de nombreuses parcelles dites « en non valeur », qui furent le plus souvent plantées en vignes (elles donnaient une petitepiquette, dont une partie était distillée à Canet-d'Aude)[2].
La construction dupont sur la rivière de l'Orbieu, entre les communes de Cruscades et d'Ornaisons, qui dura de 1745 à 1752, obligea lesÉtats de Languedoc à mettre en service une nouvelle route pour relier l'ouvrage à Lézignan. Il fallut aussi se pencher sur l'aménagement desrelais de poste qui s'égrenaient le long de ce grand chemin dit « deCarcassonne àNarbonne ».
Au cours d'un grand nettoyage des abords du monument aux morts dans lesannées 1980, on découvrit d'anciennes pierres tumulaires, desstèles etmonuments funéraires entassés sous une épaisse couche de terreau, en face du presbytère, côté est. Parmi ces vestiges, une pierre portait l'inscription « De Robert ». On ignore où ont été déposés ces vestiges. Lors de la construction du monument aux morts pour honorer la mémoire des jeunes Cruscadèls tombés au champ d'honneur, on déplaça de nombreuses stèles et pierres tumulaires que l'on entreposa non loin. Le vieux cimetière de Cruscades, qui s'étendait tout près de l'église Saint-Jean, commença à être déserté dès la fin des années 1870, quand on créa le "cimetière neuf", --- il est aujourd'hui le cimetière vieux, puisque l'on assit une troisième nécropole, dans les années 1970, au lieu-ditla Caussade[2].
Dans le « Livre Vert » (ainsi appelé à cause de la couleur de sa couverture), rédigé à l'initiative dePierre de La Jugie,archevêque de Narbonne (1347-1375), on lit, au chapitre de Cruscades (« De Cruscadis ») que le seigneur archevêque possède « un four propre avec droit de fournage : à chaque cuisson, il a droit à unpain sur trente pains cuits ». (Au début duXVIIIe siècle, la redevance fut convertie en unealbergue d'une croix d'or d'une valeur de10 livres.) Il tenait aussi unmoulin banal avec droit de mouture (ce moulin fut construit auXIIIe siècle sur un bras de l'Orbieu qui passait alors, là où se dresse aujourd'hui le vieuxchâteau d'eau, au chemin de Luc, vers « Grasas »). Ce moulin fut la propriété, à l'origine, d'une famille de Villedaigne.
Le 8 novembre1699, Guillaume Bonnafous, fermier du four « banier » (ou banal) de la communauté poursuit en justice Jean Barthes, « bayle » (le « bayle » ou « baille », du latin « bajulus », est le représentant du seigneur-archevêque à Cruscades), qui fait cuire son pain dans un autre four que celui de la communauté, à la métairie de Resplandy (du nom de son propriétaire d'alors, un certain Paul Resplandi, originaire deNarbonne) ; on l'appelait aussi « mettérie de saint Michel »[49]. La justice tranchera dans ce conflit[50].
L'évolution du nombre d'habitants est connue à travers lesrecensements de la population effectués dans la commune depuis 1793. Pour les communes de moins de 10 000 habitants, une enquête de recensement portant sur toute la population est réalisée tous les cinq ans, les populations de référence des années intermédiaires étant quant à elles estimées par interpolation ou extrapolation[55]. Pour la commune, le premier recensement exhaustif entrant dans le cadre du nouveau dispositif a été réalisé en 2005[56].
En 2022, la commune comptait 940 habitants[Note 5], en évolution de +4,79 % par rapport à 2016 (Aude : +2,65 %,France horsMayotte : +2,11 %).
Choisi par les consuls, le maître d’école devait se pourvoir de lettres de régence délivrées par l’archevêque de Narbonne, seigneur de Cruscades (ou par l'un de ses « grands vicaires » ou vicaires généraux). Ces documents étaient gratis et renouvelables. On demandait aux régents d'être bons chrétiens, de bonnes mœurs, de témoigner d’une vie exemplaire, avant même de s’enquérir de leurs diplômes. Les régents étaient nommés pour un an : l’année commençait à la Saint-Jean-Baptiste et se terminait donc à la même date de l’année suivante. Lorsqu’un régent était apprécié, les communautés pouvaient renouveler pendant plusieurs années ses services. Quelquefois, le régent tardait à arriver dans la commune : le curé se chargeait alors d’éduquer la « petite jeunesse » ; dès lors, il recevait les gages correspondant à la période de remplacement, gages qu'il reversait le plus souvent à une œuvre de charité. Il n'était pas rare, d'ailleurs, que le recteur (lou ritou) exerçât cet enseignement à temps plein. Les consuls veillaient à ce que les enfants jouissent d’un bon enseignement, que le régent vive "paisiblement". Le curé du village venait régulièrement à l'école "faire la catéchèse". Il exigeait que l'on plaçât au mur de la classe un crucifix devant lequel, deux fois par jour, les enfants venaient prier. Quelquefois, mais très rarement, le torchon brûlait entre les consuls et l’enseignant, quand ce dernier ne se conformait pas au contrat passé entre celui-ci et la communauté.Il advenait parfois que deux régents fussent nommés dans un même village, chacun d’eux muni dumandatum épiscopal : des procès s’ensuivaient. En ces occasions, il n'était pas rare de voir la population se scinder en deux camps, chacun soutenant un candidat. Les consuls s'en remettaient à l’Intendant de la Province, compétent pour les affaires scolaires. Mais souvent, « l’affaire ne montait pas si haut » : ils s'adressaient aux pères de familles qui donnaient généralement un avis de bon sens. Il arrivait aussi que lesdits pères demandassent le renvoi de l’instituteur qu’ils ne jugeaient pas compétent. Car, dans la population, il se trouvait des gens instruits qui pouvaient tester le niveau d'acquisition de connaissances des élèves (avancement de l’apprentissage de la lecture et du calcul, de l'expression écrite).
L’enseignement dispensé aux jeunes filles ne pouvait l’être par le régent : les règlements synodaux stipulaient que l’enseignant pouvait être frappé d’excommunication s’il recevait, dans sa classe, des filles, et même s’il était prouvé qu’il leur avait donné des cours particuliers à domicile. Leur éducation était confiée à une régente qui était, le plus souvent, épouse ou fille du régent exerçant depuis un certain temps dans la commune. Les consuls considéraient que la principale mission de ces régentes consistait essentiellement dans l'apprentissage "de ce dont elles auront besoin pour tenir, plus tard, leur foyer" : la couture, le tricotage et le ravaudage, la cuisine, etc. L'enseignement de la morale chrétienne n'était pour autant pas oublié. En somme, on demandait d'abord aux filles de devenir de futures épouses exemplaires. Cependant, on observait de notables différences dans ledit enseignement des filles, selon les communautés. Il en était où les consuls exigeaient que les filles reçussent des cours de culture générale incluant le calcul, la lecture, l'écriture : dans ce cas, ils faisaient appel à une régente diplômée. Mais, généralement, la régente était une bonne mère de famille, sans instruction particulière. Il n'était pas rare, d'ailleurs, qu'elle ne sût point signer la quittance attestant le versement de ses émoluments…
Le régent pouvait cependant assumer d’autres missions comme tenir le greffe consulaire (ancêtre du secrétariat de mairie) ; s’occuper de l’horloge communale ; collecter la taille, etc. ÀCruscades, le régent prenait aux enchères la levée de l’impôt et remplissait les fonctions de percepteur et de receveur municipal. Il pouvait recevoir, des parents d’élèves, des contributions en nature (vin, froment, huile…). Il devait parfois, comme cela était consigné dans le contrat, enseigner gratis un certain nombre d’enfants de parents réputés indigents[59].
LES RÉGENTS CRUSCADELS AVANT 1789
On sait qu’il y eut un régent à Cruscades en 1723, mais on ignore son nom. Les gages avaient été fixés par les consuls à75 livres : ils ne varieront pas jusqu’à la Révolution.
1724 : BONNAFOUS André (les Bonnafous étaient nombreux à Cruscades). 1725 : CASTAGNET (De 1726 à 1733 : pas de régent) 1734 : TARBOURIECH (De 1735 à 1748 : pas de régent) 1749 : Louis MERCIER 1750-1751 : AZEMAR 1752-1753 : PONTET (Pas de régent en 1754) 1755 : ALIMAN (Pas de régent de 1756 à 1761) 1762-1763 : NEGRE 1764-1765 : CASSAN (Pas de régent en 1766) 1767 : RIBEZAUTES François (Pas de régent de 1768 à 1771) 1772 : FORMIGA (Pas de régent de 1773 à 1774) 1775 : VARENNES 1776 : COMIGNAN Joseph 1777 : BLANCHET Jean 1778 : DE ROBERT André (il y avait une famille DE ROBERT à Cruscades) (Pas de régent de 1779 à 1782) 1783-1784 : Jean ESCLOUPIÉ dit « Janelle ou Janette » 1785-1788 : LIGNÈRES Jean-Antoine[60].
Le saint Patron de Cruscades est saint Jean l'Apôtre ou l’Évangéliste, qui se fête le 27 décembre. Depuis des temps immémoriaux, Cruscades a fêté son saint tutélaire, fête qui faisait partie des réjouissances de la Nativité. Jusqu'à ces dernières années, le village organisait trois jours de fête, les 25, 26 et 27 décembre, selon la tradition. (De nos jours, on marque le coup le 27 décembre : le comité des fêtes invite la population à un petit apéritif. On préfère se réserver pour la fête d'été.)
On engageait un orchestre. Les vieux Cruscadèls appelaient ça un« Jazz ». On s'accordait les services de formations venant de villages du Narbonnais, comme celle d'Ornaisons. Sous l'Ancien Régime, on dansait aux sons de la « boudègo » (bodega) que d'aucuns appelaient aussi « sansogno » (sansonha) : c'est la cornemuse ; du « aubouès » (auboès) : hautbois ; de la flûte ; d'un tambourin (parfois constitué d'un pot en grès fermé avec une peau de mouton tannée)...Il n'y avait pas qu'à la Noël que l'on dansait et ripaillait à Cruscades. Sous l'Ancien Régime, au début de l'été, arrivaient au village les « estibandiers », des ouvriers venus de l'extérieur pour faire la moisson. Cruscades fut, avant la généralisation de la vigne, un grenier à blé en Narbonnais. Après une rude journée de labeur, les hommes prenaient un peu de plaisir en dansant avec les demoiselles du village. Cela pouvait donner lieu, quelquefois, à un mariage. Il arrivait aussi que, longtemps après leur départ, quelque Cruscadèle se trouvât « couflado » (conflada), enceinte.. Mais il se trouvait souvent quelque brave célibataire qui prenait femme et enfant, au grand soulagement des parents de la frivole...
Il y avait d'autres fêtes, religieuses : « le Mois de Marie », les processions du Saint-Sacrement (Fête Dieu). C'était spectaculaire. Le cortège démarrait devant l’église et parcourait les rues du village. En certains endroits, on ménageait une station où l'on avait érigé des autels temporaires ; là, le prêtre officiait, avant de repartir pour une autre station.. La confection de ces autels prenait beaucoup de temps. Les rues qu'empruntait le cortège processionnaire étaient jonchées de pétales de fleurs provenant de corbeilles que les femmes et les enfants, qui précédaient la procession, jetaient au passage des paroissiens. À l'avant de la foule, qui chantait des cantiques choisis, avançait le prêtre sous un dais (les anciens l'appelaient : « le tambourel sens rodos », le tombereau sans roues), dais que les propriétaires du village portaient. Outre ces manifestations, il y avait les processions rogatoires (« las rougazous ») : les Rogations (avant l'Ascension). On partait en chantant des litanies vers certaines croix qui se trouvaient disséminées sur le territoire communal. (À Cruscades, le dernier prêtre à résidence, Joseph GRAVES, en avait compté treize.) On entendait alors une incantation, des dizaines de fois répétée : « Te rogamus audi nos ! » : « Écoute (Dieu), nous t'implorons ! » C'était l'occasion pour demander l'intercession du Ciel pour que soient protégés les fruits de la terre[2]...
LeComités des Fêtes
Depuis l'Ancien Régime, on fêtait chaque année le saint Patron de la communauté - saint Jean l'Apôtre -, deux jours après Noël, le 27 décembre. C'était généralement à l'initiative d'un groupe de Cruscadèls qui comprenait des représentants de la bourgeoisie, le recteur et les marguilliers : la fête revêtait essentiellement un caractère religieux. Il fallut attendre l'année 1962, le 16 août exactement, pour que Cruscades se dote d'unComité des Fêtes déclaré officiellement en sous-préfecture avec dépôt des statuts, et insertion au Journal Officiel le 30 août 1962. Cette association de type Loi-1901 se donna comme but d'organiser les fêtes de la commune et, spécialement, la fête patronale. Le premier président du comité fut le pilier du FCL XIII Guy Villemur (1930-2020). Il fut épaulé par André Salles, Joseph Subias et André Sénié. Cette année-là, le premier souci des membres fut de préparer les fêtes de Noël : il ne restait que quatre mois pour tout préparer et louer un orchestre : la formation « Didier Normand » vint animer les trois jours de festivités programmés. Mais trois ans plus tard, on constate des flottements, on entend des critiques : le bureau démissionne. Des jeunes gens vont prendre la relève : le nouveau président sera Élie Tavagnutti, secondé par Jean-Pierre Scanduizzi, Roger Cabrera et Alain Mathieu. L’orchestre à la mode Jack Allen sera réservé. Deux mois plus tard, on enregistre des démissions au cours d'une réunion plénière où fut invitée à participer la population cruscadèle. Pour l'année 1966, on loua la formation Michel March.
Mais il faudra attendre 1968 pour connaître un nouveau Comité des Fêtes complètement renouvelé. Le 24 juillet 1968, en soirée, a lieu une importante assemblée générale dans la salle commune de la mairie, en présence du maire et instituteur Pierre Alméras. Est-ce parce que la révolution de Mai-68 était passée par là ? Le tout est qu'une importante partie de la population se déplaça. On vota pour élire le bureau et les membres : Jean-Claude Sogorb, président ; Paul Mathieu, vice-président ; secrétaire, Robert Palao (secrétaire de mairie) ; secrétaire adjoint : Jean-Claude Laffitte ; trésorier, Gilbert Carbonneau ; trésorier-adjoint : Daniel Pradelle. Les membres : Marie-Laure Auriol, Sylvie Bourigault, Jean Février, Henri Villefranche, Jean-Pierre Scanduizzi, Jean Mathieu, Aimé Puyuelo, Jean-Marie Salles, André Laborda, Gilbert Bourigault, Fernande Cristante. On peut dire que 1968 fut l'année à partir de laquelle le Comité des fêtes allait connaître une bonne stabilité et son régime de croisière. Aujourd'hui, cette association est toujours en activité.
Depuis que le rugby s'est imposé en Languedoc, il y a plus d'un siècle, les villages du Lézignanais et du Narbonnais ont fourni de bons joueurs aux équipes des grosses villes. Ici, c'est surtout Lézignan qui a pu bénéficier des bonnes « tiges » repérées par quelque recruteur : Guy Villemur, Jean-Claude SOGORB (Cruscadèl d'adoption) connurent leur heure de gloire avec le FCL XIII. Mais on ne peut pas dire que Cruscades ait bénéficié de sa propre équipe. Dans les années 1950, quelques amis amoureux du ballon ovale constituèrent des équipes fugitives, avec l'apport de joueurs d'autres villages, qui participèrent à des championnats régionaux.
Avec l'arrivée de l'abbé Joseph Graves, en 1951, la jeunesse se passionna aussi pour le ping-pong : on jouait dans la salle du catéchisme, au presbytère, et au foyer rural. Les premiers initiateurs furent Claude Monnier et Oreste Fabris. Il y eut quelques compétitions, sans envergure. Juste après l'installation du nouveau curé, un couple d'instituteurs (M. et Mme Pierre Alméras) créa une dynamique sportive qui allait porter le volley-ball sur le devant de la scène locale.
En 2007 fut organisée dans la salle polyvalente une exposition ayant pour thème : « Le Sport collectif ; jeux de ballons », préparée par une étudiante cruscadèle en B.T.S., Stéphanie Mas.
En 2018, la population âgée de 15 à 64 ans s'élève à 559 personnes, parmi lesquelles on compte 74,6 % d'actifs (64,6 % ayant un emploi et 9,9 % de chômeurs) et 25,4 % d'inactifs[Note 7],[I 4]. En 2018, letaux de chômage communal (au sens du recensement) des15-64 ans est inférieur à celui de la France et du département, alors qu'en 2008 la situation était inverse.
La commune fait partie de la couronne de l'aire d'attraction de Narbonne, du fait qu'au moins 15 % des actifs travaillent dans le pôle[Carte 4],[I 7]. Elle compte 125 emplois en 2018, contre 113 en 2013 et 76 en 2008. Le nombre d'actifs ayant un emploi résidant dans la commune est de 368, soit unindicateur de concentration d'emploi de 33,8 % et un taux d'activité parmi les 15 ans ou plus de 58,6 %[I 8].
Sur ces 368 actifs de 15 ans ou plus ayant un emploi, 85 travaillent dans la commune, soit 23 % des habitants[I 9]. Pour se rendre au travail, 85,8 % des habitants utilisent un véhicule personnel ou de fonction à quatre roues, 1,7 % lestransports en commun, 6,1 % s'y rendent en deux-roues, à vélo ou à pied et 6,4 % n'ont pas besoin de transport (travail au domicile)[I 10].
52 établissements[Note 8] sont implantés à Cruscades au. Le tableau ci-dessous en détaille le nombre par secteur d'activité et compare les ratios avec ceux du département[Note 9],[I 11].
Secteur d'activité
Commune
Département
Nombre
%
%
Ensemble
52
100 %
(100 %)
Industrie manufacturière, industries extractives et autres
13
25 %
(8,8 %)
Construction
12
23,1 %
(14 %)
Commerce de gros et de détail, transports, hébergement et restauration
14
26,9 %
(32,3 %)
Information et communication
1
1,9 %
(1,6 %)
Activités financières et d'assurance
1
1,9 %
(2,7 %)
Activités immobilières
2
3,8 %
(5,2 %)
Activités spécialisées, scientifiques et techniques et activités de services administratifs et de soutien
3
5,8 %
(13,3 %)
Administration publique, enseignement, santé humaine et action sociale
5
9,6 %
(13,2 %)
Autres activités de services
1
1,9 %
(8,8 %)
Le secteur du commerce de gros et de détail, des transports, de l'hébergement et de la restauration est prépondérant sur la commune puisqu'il représente 26,9 % du nombre total d'établissements de la commune (14 sur les 52 entreprises implantées à Cruscades), contre 32,3 % au niveau départemental[I 12].
La commune fait partie de lapetite région agricole dénommée « Région viticole »[62]. En 2010, l'orientation technico-économique de l'agriculture[Note 10] sur la commune est la viticulture (appellation et autre)[63].
Cruscades est une communeviticole, où de nombreux arrachages ont eu lieu dès le début des années2000. De grosses pièces de terre furent rachetées à la fin duXXe siècle par un banquier hollandais, qui furent revendues. Le vignoble cruscadèl produit un bonvin de table. Un propriétaire a adopté laculture biologique avec succès. Cruscades est l'un des rares villages des environs à ne pas posséder de cave coopérative viti-vinicole (nombreuses caves particulières aujourd'hui presque toutes reconverties).
Principaux producteurs de vin : - Louis Fabre (vins bio) ; - GFA Cordonnier-Hortala ; - Les héritiers Ayraud ; - Château Etang des Colombes ; - Domaine d'Olivéry ; - Château Cruscades racheté par la société Bonfils en 2011.- Domaines de M. Walter Rollandin.- Plusieurs propriétaires vivant essentiellement de leur vignoble, notamment : M. Refalo ; M. Pellissa ; M. Villemur ; MM. Miquel Christian et Christophe. Certains d'entre eux portent leur récolte vers les caves coopératives de Lézignan et d'Ornaisons.
À Cruscades, M. Louis Fabre est réputé pour ses vins issus de l'agriculture biologique, plusieurs fois primés. En mars 2012, notamment, un classement officiel des vins biologiques du Languedoc a placé ses vins au « Top 20 » des meilleurs produits dans la catégorie. Depuis, de nombreux prix et médailles sont venus confirmer les premiers succès[66].
L'église paroissiale Saint-Jean de Cruscades, dédiée àsaint Jean l'Evangéliste, duXIIIe siècle, est bien conforme au style du pays par sonchœur plus étroit que lanef et sa voûte d'ogives. On regrette en voyant les belles pierres de taille du sanctuaire que la nef ait été couverte d'un enduit blanc[67].
Anciennechapelle castrale. Bâti sur les restes d'uneéglise romane, l'édifice est remarquable par la pureté de sonstyle gothique ; l'abside pourrait remonter à la fin duXIIIe siècle. Selon l'abbé Graves, certains détails de la construction devenus visibles après les réparations de 1965 — lesclefs de voûte, des linteaux de portes formées de deux pierres juxtaposées, les chapiteaux, le profil des arcs — indiquent une parenté avec lacathédrale Saint-Just de Narbonne. L'élan, la force, l'harmonie de l'ensemble, surtout duchœur, révèlent la technique d'un maître que l'on retrouve chez ceux qui conçurent et édifièrent Saint-Just. On trouvera aussi des ressemblances avec l'église deLézignan.
Cet édifice inachevé, avec deux chapelles, sanstransept, présente des murailles de forteresse. À plusieurs reprises, des réparations et des modifications furent entreprises, tant auXVIIe siècle qu'en1861. En1620, on abat la muraille de cers et on déplace la porte d'entrée sous leclocher qu'on surélève.
À côté du clocher, unefouille de1927 a permis de dégager une vaste excavation de4 m de diamètre et5 m de profondeur, comblée desable. La porte y donnant accès ouvrait sur une salle voûtée dont il restait un bel arceau, brisé par l'abbé Toustou quand il aménagea lasacristie actuelle. Antérieure à la construction de l'église, cette cavité existe toujours, difficilement abordable par lepresbytère, mais visible et éclairée. On a pensé à unsilo pour emmagasiner les grains. L'abbé Giry (1905-2002, ancien conservateur du musée deNissan-lez-Enserune) y voit une glacière, comme en possédaient si souvent les châteaux de la région.
À côté du silo, unsarcophage sous voûte protégeait unsquelette de1,80 m et une petiteamphore enpoterie noire. Le cercueil était constitué de pierres platesgallo-romaines, selon l'abbé Cabirol, témoin oculaire. Fond du silo découvert par l'abbé Toustou en 1927 dans l'église de Cruscades.
Les travaux d'adduction d'eau potable ont permis de mettre au jour des vestiges du vieux village : des traces d'anciens murs formant le rempart circulaire, des fondations de l'ancien château, des restes de murs et de sols enbrique rouge, un four à fondre lefer hors les murs.
On peut voir quelques rares maisons bourgeoises, des linteaux de porte datés (dont un portant l'inscription : « LI(I)ME TA » (erreur du sculpteur), c'est-à-dire : Seuil (de la maison) de T(ournal) A (peut-être l'initiale du prénom André). Également uneborne-fontaine en pierre de Ferrals.
Le compoix de1647 mentionne « l'estang d'Olivery », dont le nom se confond avec celui de la Cardaïre. La métairie dite "d'Olivery" tire son nom de celui de son tenancier, auXVIe siècle : dans les « Recherches Diocèsaines » de 1537, on relève :« uno boryo, estables, cortals, porcigolo et galiniero de mestre Guylhaumes Olyvery ». Cette terre, abandonnée auXVIIIe siècle, fut vendue aux enchères avant laRévolution[68].
Cettemétairie se trouve mentionnée dans le compoix de1647 sur letènement de Saint-Michel, là où l'abbaye de Lagrasse possédait (d'après l'abbé Sabarthès) uneéglise dédiée à ce saint et dénommée « de Parietibus Longis » en1251. (Dans une étude sur l'abbaye de Lagrasse,Claudine Pailhès, ancienne directrice du Service des archives départementales de l'Ariège, placeSaint-Michel aux longs murs du côté de Sallèles-d'Aude : nous pensons qu'il s'agit là d'une petite erreur de localisation. La teneur du testament de Pierre Gason, bourgeois de Lézignan, datant de 1251 et déposé aux archives départementales de l'Aude, a convaincu le très savant abbé Sabarthès de situerSaint-Michel sur le territoire de Cruscades.)
Bruno Pradal (Rabat 1949 - Joigny 1992) : né au Maroc, il est originaire de Cruscades par sa mère Lucette Pous-Gleizes. Acteur de cinéma, il a tourné dans une dizaine de films :Mourir d'aimer (1971),La Saignée (1971),Pas folle la guêpe (1972). Il est décédé dans un accident de voiture, le, près d'Orléans.
Matthieu Lagrive, né le à Lisieux, est un pilote de course de motos. Triple champion du monde d'endurance (Suzuki Endurance Racing Team). Marié, père de deux enfants, il s'est installé à Ornaisons après avoir vécu deux ans à Cruscades.
Sonblasonnement est :D'azur, à une roue à huit rais d'or sans jante.
À l'instar d'autres communautés, Cruscades ne possédait pas d'armoiries propres. À l'époque où le roiLouis XIV impose par l'édit de novembre 1696 l'enregistrement des armoiries (aux communautés, corporations, bourgeois, etc.), les habitants de Cruscades adoptent une partie des armoiries du seigneur-archevêque contemporain,Pierre de Bonzi, à savoir la roue d'or déjantée à8 rayons (ou 7) sur champ d'azur. Dans les « Préambules des Rolles des Contributions » de 1696 pour la communauté de Cruscades (document déposé aux Archives départementales), on peut lire que lesconsuls débloquent au titre des dépenses extraordinaires une somme de29 livres pour l'enregistrement des armoiries — une somme importante qui correspond à environ 550 de nos euros[2].
↑Dans les sites Natura 2000, lesÉtats membres s'engagent à maintenir dans un état de conservation favorable les types d'habitats et d'espèces concernés, par le biais de mesures réglementaires, administratives ou contractuelles[14].
↑Les ZNIEFF detype 1 sont des secteurs d’une superficie en général limitée, caractérisés par la présence d’espèces, d’association d’espèces ou de milieux rares, remarquables, ou caractéristiques du milieu du patrimoine naturel régional ou national.
↑Les ZNIEFF detype 2 sont de grands ensembles naturels riches, ou peu modifiés, qui offrent des potentialités biologiques importantes.
↑Population municipale de référence en vigueur au 1er janvier 2025, millésimée 2022, définie dans les limites territoriales en vigueur au 1er janvier 2024, date de référence statistique : 1er janvier 2022.
↑Un ménage fiscal est constitué par le regroupement desfoyers fiscaux répertoriés dans un même logement. Son existence, une année donnée, tient au fait que coïncident au moins une déclaration indépendante de revenus et l’occupation d’un logement connu à lataxe d’habitation.
↑Les inactifs regroupent, au sens de l'Insee, les élèves, les étudiants, les stagiaires non rémunérés, les pré-retraités, les retraités et les autres inactifs.
↑L'établissement, au sens de l’Insee, est une unité de production géographiquement individualisée, mais juridiquement dépendante de l'unité légale. Il produit des biens ou des services.
↑Le champ de ce tableau couvre les activités marchandes hors agriculture.
↑L'orientation technico-économique est la production dominante de l'exploitation, déterminée selon la contribution de chaque surface ou cheptel à la production brute standard.
↑Le recensement agricole est une opération décennale européenne et obligatoire qui a pour objectif d'actualiser les données sur l'agriculture française et de mesurer son poids dans l'agriculture européenne[64].
↑a etbDaniel Joly, Thierry Brossard, Hervé Cardot, Jean Cavailhes, Mohamed Hilal et Pierre Wavresky, « Les types de climats en France, une construction spatiale »,Cybergéo, revue européenne de géographie - European Journal of Geography,no 501,(DOI10.4000/cybergeo.23155,lire en ligne, consulté le)