La crue survient souvent après de fortespluies en amont dans lebassin versant, parfois lors d'unefonte des neiges brutale ou lors d'une concomitance de fortes pluies et de fonte des neiges, plus rarement par réamorçage d'un siphonkarstique, exceptionnellement quand une fracture terrestre profonde libère desnappes phréatiques. Liées à des caractéristiquesmétéorologiques etgéomorphologiques propres à chaque site, les crues sont un phénomène naturel très suivi dans l'histoire.
On évoque la crue d'un cours d'eau lorsque son « niveau critique de crue »[6] est atteint en un point quelconque dubief amont. Ce seuil peut être indiqué par unlimnimètre fixe.
Le maximum de hauteur d'eau atteint est lapointe de crue, correspondant à undébit maximum de crue oudébit de pointe. Il est temporairement marqué par unelaisse de crue (boue sur les murs, déchets accrochés aux branches) et est parfois enregistré ultérieurement par unrepère de crue dont le recensement peut être effectué dans une base nationale des repères de crues.
Ce maximum de hauteur d'eau se déplace vers l'aval du cours d'eau avec uneonde de crue[2],[7].
Ladécrue, est la baisse du niveau d'eau jusqu'au retour de l'écoulement dans lelit mineur du cours d'eau. Si celle-ci s'amorce très lentement (plusieurs heures au maximum de hauteur d'eau ou en grande proximité) on peut alors évoquer unplateau de crue plutôt qu'une pointe de crue.
Enhydrologie, l'ensemble du phénomène crue-décrue peut se caractériser en un point caractéristique, (une section de contrôle ex : un pont) par unhydrogramme[7],[8] dont lespentes caractérisent la rapidité ou la lenteur des variations. On relie ensuite souvent la pointe de crue à unepériode de retour de la crue.
Pluviométrie : l'intensité et/ou la durée de la pluie sur un mêmebassin versant génère par ruissellement et automatiquement une augmentation du débit du cours d'eau. La crue commence alors quand un seuil spécifique à chaque lieu est atteint, puis dépassé. L'ampleur du phénomène dépend aussi beaucoup de laperméabilité et de la saturation en eau des sols du bassin versant.
Fonte des neiges : au printemps, la transformation de la neige en eau liquide étant un phénomène relativement lent, l'eau issue de la fonte des neiges pénètre mieux dans le sol que l'eau de pluie, elle contribue donc plus à l'alimentation des nappes phréatiques et au régime dit nival du débit du cours d'eau. Néanmoins, les quantités d'eau stockée sous forme de neige ou de glace pouvant être considérables, et en cas de radoucissement intense, rapide et accompagné de pluies, la fonte rapide des neiges peut provoquer des inondations parfois catastrophiques. En zone de montagne, la crue est un phénomène périodique annuel entraînant rarement des inondations.
Refoulement par unfleuve en crue sur une rivière affluente : la montée des eaux provient alors de l'aval !
Conjonction d'une crue sur unfleuve côtier et d'unemarée de pleine mer (= haute) à fortcoefficient de marée et/ou en situation desurcote par exemple) ; le débordement du fleuve (= la crue) est alors temporairement amplifié en amont de l'embouchure.
Crue à Queens Park (Grande-Bretagne) - Piéton en danger.
Le premier critère de distinction des crues est son temps de montée lié à la taille dubassin versant concerné[8] :
unecrue soudaine ou crue-éclair[9],[10] a un temps de montée très court, inférieur à quelques heures[10] et se produit sur un petitbassin versant (jusqu'à une centaine de km2)[11], souvent assezpentu. Elle peut être torrentielle[9], urbaine ou périurbaine[9]. Letorrent, leruisseau, ou larivière sort subitement de son lit à la suite depluies torrentielles, généralement de durée assez limitée, souvent sous des orages. Ce phénomène est fréquent dans les régions montagneuses où leruissellement des pentes vers les vallées est très rapide ;
unecrue rapide[9],[12] a un temps de montée compris entre 2 et 12 heures et se produit sur unbassin versant assez grand (plusieurs centaines à quelques milliers de km2)[11] ou lors d'intensité pluviométrique moins forte. Parfois la pluie est tombée assez loin de la zone inondée car la crue résulte de la concentration de l'eau tombant sur l'ensemble du bassin hydrique vers les points les plus bas ;
unecrue lente[9] a un temps de montée supérieur à 12 heures et se produit sur un grandbassin versant (supérieur à une dizaine de milliers de km2)[11] en plaine sur les fleuves et les grandes rivières. Les pluies continues sur de larges zones, comme lamousson, vont ruisseler vers les cours d'eau. Dans ces cas, même si la pente est faible, la quantité importante de pluie peut les faire déborder.
sa durée : de quelques minutes à plusieurs jours : Temps de montée[7],[13] des eaux.
sa vitesse d'augmentation, sa soudaineté de réalisation en un lieu donné : ex : à vue d'œil ;
son ampleur : approche / dépassement des niveaux historiquement connus ; son extension spatiale ;
sa vitesse de propagation le long du cours d'eau : Onde de crue[7],[14] ;
Les zones inondées par les crues sont néanmoins très souvent considérées comme àrisque en liaison avec leur occupation humaine (habitat, voie de circulation, zone industrielle/ commerciale). Elles sont maintenant assez bien répertoriées en France dans chaqueplan de prévention du risque inondation communal.
Les grandes crues, par leur soudaineté ou par l'étendue des inondations qu'elles provoquent, sont souvent des catastrophes, avec leur lot de victimes et de dégâts matériels.
Mais dans certaines régions du globe, les crues font partie du cycle naturel des saisons. Durant plusieurs millénaires,la crue annuelle duNil[20], très souvent bienfaitrice en s'étendant sur une bande agricole jusqu'à environ 25 kilomètres des bords du fleuve, a fait prospérer la civilisation égyptienne. Elle était mesurée par desnilomètres comme celuid'Éléphantine. Son démarrage commençait la nouvelle année égyptienne. Parfois liés auxmoussons, de nombreuses zones tropicales sont encore tributaires de ce type de crue assez régulière, qui fertilisent et irriguent les cultures, en reconstituant des réserves d’eau pour la saison sèche.
Les crues ont aussi des coûts financiers : ainsi en France les crues des affluents de la Seine et de la Loire, qui ont touché 8 départements de mai à juin 2016 ont été le second évènement le plus coûteux du pays après latempête Xynthia (février 2010) : 800 millions à 1,2 milliard d’euros[21].
Témoin de crue de la hauteur d'eau en 1910 àParis sous lePont Neuf. Il existe un autre témoin dans les salles de la conciergerie à environ un mètre au-dessus du sol et un de1845 à environ 1 mètre au-dessus de la route surplombant à mi-hauteur du chambranle d'une porte à plus de 5 mètres de haut le niveau courant de laLoire àOrléans à moins de 300 mètres du pont Jeanne-d'Arc au-dessus du niveau des constructions au sud de la Loire.
3 témoins de crue dont 1910 sur le mur de la mairie construite en 1763 deNoyers (89) sous la fenêtre.
Chaque crue résulte de la conjonction de plusieurs processus complexes et simultanés et de paramètres géo-pédologiques, d'abord théorisés par Horton en 1933 qui considère que le ruissellement est produit par dépassement de la capacité d’infiltration des sols[22].
La modélisation visait autrefois à reproduire au mieux le comportement hydrologique d'un bassin ou sous-bassin versant pour prédire les évènements de crue[22]. Les ingénieurs ont d'abord cherché à prévoir le débit à l’exutoire et en plusieurs points du cours d'eau. Puis les modèles se sont complexifiés en essayant de reproduire au mieux la réalité globale et systémique d'un bassin via une analyse distribuée et plus fine du comportement de l’eau dans tous ses compartiments[22], lors des écoulements et des échanges nappes-cours d'eau, et parfois en intégrant des paramètres plus écologiques (nature et importance du couvert végétal, présence d'embâcles naturels ou de barrages naturels tels que ceux qui sont fabriqués par les castors, etc.). Ces modèles deviennent de ce fait aussi des outils degestion des ressources en eau et d'aménagement du territoire[22].
Les modélisateurs s'intéressent aussi aux effets des couverts végétaux agricoles intermittents ou d'hiver et aux effets de l'agriculture biologique et l'agriculture sans labour (itinéraires techniques simplifiés) qui améliorent la porosité et capillarité des sols ainsi que leurs capacités de rétention de l'eau en modifiant donc sa distribution[23],[24],[25],[26] et l'orientation de sa circulation dans le sol[27] (Ball et al., 1994 ; Sasal et al., 2006) ou encore la connectivité des pores[26],[28]. Divers auteurs[29],[23],[28],[24],[25] ont aussi montré des changements dans les taux d’infiltration de l’eau dans le sol et par suite dans sa conductivité hydraulique verticale à saturation.
Certains pays organisent la prévision des crues pour alerter la protection civile et les populations en indiquant continuellement le niveau de vigilance adapté aux principaux cours d'eau :
en Belgique, avec Meteo-Belgique par l'intermédiaire de l'alerte aux fortes pluies[30],
au Canada, avec les centres de prévision des crues[31] des différentes provinces,
Un particulier, une entreprise qui souhaite limiter les effets des crues pour lui-même, sa famille, son habitation[34], son local de travail[35] peut :
Bassin de rétention des crues du ruisseau duVerderet, àTavernolles, en Isère.
bien avant la crue :
prévoir une issue vers le haut, facile pour tous, utilisable sans éclairage ni électricité ni outillage particulier : étage supérieur, toit, constituant un espace refuge ;
disposer bien en conséquence sonInstallation électrique (tableau hors d'eau, sectionnement de toutes les parties inférieures (cave, rez-de chaussée), ...) ;
s'informer de l'ampleur prévue de la crue et prévoir une marge supplémentaire (en hauteur, en vitesse, en temps de survenue) ;
déplacer hors d'atteinte des plus hautes eaux connues les objets de valeur (véhicules, documents officiels, cartes de crédit...), les aliments, les produits polluants, le matériel de nettoyage ;
se constituer une réserve d'eau potable ; recharger ses batteries électriques (pour radio / téléphone portable / lampe-torche) ; en cas de confinement prolongé, prévoir une solution temporaire toilettes, des couvertures sèches ;
installer les équipements limitant la pénétration de l'eau ; obturer les bouches d'aération basses ;
installer les balises d'emplacement de piscine ;
au moment de la montée des eaux à proximité :
couper, si possible et sans se mettre en danger, les arrivées de gaz, d'eau et d'électricité ;
monter toutes les personnes encore présentes dans les étages, avec le nécessaire de survie ; ne jamais descendre (cave, sous-sol, parking enterré...) ;
ne pas utiliser son véhicule ou sortir à pied et ne jamais s'engager sur un parcours immergé avec un courant d'eau ;
signaler les présences dans l'habitation, notamment les personnes particulièrement vulnérables.
Tableau de la probabilité (en %) d'une crue d'un temps de retour T (en années) sur une période d'observation continue P (en années) :
Période P pendant laquelle on attend l'événement
T / P en %
2
5
10
20
50
100
200
500
1 000
Temps de retour T de l'évènement
2
75%
97%
100%
100%
100%
100%
100%
100%
100%
5
36%
67%
89%
99%
100%
100%
100%
100%
100%
10
19%
41%
65%
88%
99%
100%
100%
100%
100%
20
10%
23%
40%
64%
92%
99%
100%
100%
100%
50
4%
10%
18%
33%
64%
87%
98%
100%
100%
100
2%
5%
10%
18%
39%
63%
87%
99%
100%
200
1%
2%
5%
10%
22%
39%
63%
92%
99%
500
0%
1%
2%
4%
10%
18%
33%
63%
86%
1 000
0%
0%
1%
2%
5%
10%
18%
39%
63%
Nota : Les valeurs sur la diagonale correspondent à celles de la dernière colonne du tableau précédent[36]. Exemples de lecture : une crue biennale a 97% de chance d'être observée sur une période de 5 ans ; Durant une période de 20 ans on a 18% de chance d'observer une crue centennale.
Ladirective européenne inondation de 2007[37] prévoit dans son chapitre III"Cartes des zones inondables et cartes des risques d'inondation" la prise en compte des 3 scénarios suivants :
crue de faible probabilité ou scénarios d'évènements extrêmes ;
crue de probabilité moyenne (période de retour probable supérieure ou égale à cent ans) ;
↑abc etdHelga-JaneSCARWELL et RichardLAGANIER,Risque d'inondation et aménagement durable du territoire, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion,, 242 p.(ISBN2-85939-870-8,lire en ligne),p. 51
↑RenaudMarty,Prévision hydrologique d'ensemble adaptée aux bassins à crue rapide,, 302 p.(lire en ligne)
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↑a etbBhattacharyya R., Prakash V., Kundu S. & Gupta H.S., 2006. Effect of tillage and crop rotations on pore size distribution and soil hydraulic conductivity in sandy clay loam soil of the Indian Himalayas. Soil Tillage Res ., 86 , 129-140
↑a etbSasal M.C., Andriulo A.E. & Taboada M.A., 2006. Soil porosity characteristics and water movement under zero tillage in silty soils in Argentinian pampas. Soil Tillage Res ., 87 , 9-18.
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