Ce jeu traditionnel était un des évènements phares à cette époque et pouvait se dérouler sur plusieurs jours durant lesquels des rencontres s'organisaient entre villages ou tribus voisins, réunissant à l'occasion des centaines voire un millier de participants. Il se disputait souvent sur un terrain entre les deux villages adverses et les buts pouvaient être distants de 500 mètres à plusieurs kilomètres[5]. Les règles de ces jeux étaient décidées quelques jours avant la compétition. Généralement, tout le monde pouvait y participer, la balle ne devait pas être touchée avec la main, les buts étaient constitués soit des rochers soit des arbres, avant la mise en place de poteaux en bois, et la durée du match dépendait du soleil. Chaque joueur était armé d'une crosse.
Des rites d'avant-match étaient organisés, semblables aux rites liés à la guerre. Les joueurs se maquillaient avec de la peinture et du charbon de bois et se dotaient de différents objets qu'ils portaient sur eux, symbolisant leurs qualités. Un sorcier les préparait et exécutait des rites. Par ailleurs, la veille d'un match, différentes manifestations prenaient place, comme des cérémonies dansantes où les joueurs étaient costumés. Il y avait aussi des sacrifices, ainsi que des cris pour intimider les adversaires[6]. Le jour du match, les équipes avançaient dans les champs tout en poursuivant les rites prodigués par leurs sorciers, certains joueurs ayant même des traces des cérémonies sur leurs bras ou leurs torses[7]. Avant le début de la rencontre, les joueurs tenaient des paris, engageant des couteaux, des chevaux voire leurs femmes et leurs enfants[réf. nécessaire], la mise était ensuite remportée par le vainqueur.
Danse et célébrations avant une rencontre.
La partie débutait par la mise en jeu d'une balle, celle-ci était lancée en l'air et les opposants se dépêchaient de la récupérer. En raison de l'implication d'un grand nombre de joueurs, le jeu se déplaçait lentement à travers le terrain. Les sorciers remplissaient alors le rôle d'entraîneurs et les femmes étaient là pour ravitailler les joueurs[7] en eau (il existait également une version féminine de ce jeu appeléamtaj avec des crosses plus courtes[7]). Après la rencontre, un grand festin était organisé.
Ce jeu remplissait différents objectifs : le plus important était de régler les conflits entre les différentes tribus et cela concernait notamment lesCinq-Nations. Le jeu permettait également d'entretenir physiquement les joueurs pour des rencontres futures. Enfin, il était associé aux croyances religieuses. Il leur permettait ainsi de se rassembler[8].
À cette époque, la balle était faite de bois (d'autres l'étaient avec une coque en peau de daim remplie de cheveux[9]) et mesurait huit centimètres de diamètre[7].
Les premières crosses étaient également en bois sans filet, avant que ce dernier ne soit ajouté, sur dix à treize centimètres[7]. Ce filet était fait à partir de tendons de cerf et les filets formaient unU plutôt qu'un cercle. Les crosses étaient longues de 60 à 150 centimètres. Leurs formes variaient selon les régions. Par ailleurs, certains joueurs étaient tellement attachés à leur crosse qu'ils désiraient même être enterrés avec[réf. nécessaire]. Aucun équipement de protection n'était porté à cette époque.
Les premiers Européens à découvrir le jeu de la crosse sont lesmissionnairesjésuitesfrançais dans lavallée du Saint-Laurent. Dans lesannées 1630, ils sont témoins de ce jeu et le condamnent. Ils s'opposent à ce jeu en raison de sa violence et tentent de l'éradiquer[10].
Le missionnaire jésuiteJean de Brébeuf est le premier à relater ce jeu et lui donne son nom : « la crosse ». Il décrit lesAmérindiens Hurons jouant à ce jeu en1636. Le terme crosse est originaire du termefrançais relatif auterrain de hockey : « le jeu de la crosse », d'autres suggestions sont qu'il est relatif à lacrosse, bâton pastoral des évêques.
Malgré l'opposition des Jésuites, de nombreux colons européens sont intrigués par le jeu de la crosse. Des rencontres sont organisées et, en 1740, de nombreux colons français y prennent part. Cependant, ils n'affrontent jamais les Amérindiens.
En 1834, l'équipe deCaughnawaga fait une démonstration du jeu àMontréal. À partir de ce moment-là, l'intérêt pour le jeu de la crosse s'accroît progressivement. En1840, les premières rencontres entre Canadiens d'origine européenne et Amérindiens sont organisées. En1856, le docteurWilliam George Beers, dentiste canadien, fonde leMontreal Lacrosse Club, il codifie le jeu en1867, diminuant la durée des rencontres, réduisant le nombre de joueurs et le terrain, uniformisant la crosse (l'instrument) et intégrant une balle en caoutchouc. Le premier match officiel est disputé sous ces règles-là à l'Upper Canada College en1867 où l'Upper Canada College perd contre le Toronto Cricket Club sur le score de 3-1. Durant lesannées 1860, le jeu de la crosse devient un sport national. En1869, la première association sportive de crosse est créée avec l'Association canadienne de crosse.
Photo: William Notman / Musée McCord. Équipe de crosse de Kahnawake, en 1876.
Les premières rencontres d'exhibition hors du territoire ont lieu également en 1867. En 1876, laReine Victoria est témoin de ce jeu et déclare que« le jeu est très joli à regarder. » C'est ainsi que de nombreux collèges de filles anglais l'incorporent dans leur programme d'éducation physique dans lesannées 1890.
Alors que ce sport se développait, son aspect relativement violent était toujours présent. Il devenait en cela un obstacle à son expansion, jusqu'à son interdiction même dans lesannées 1900 : les AmérindiensChactas fixaient ainsi au bout de leurs crosses, des poids pour blesser leurs adversaires.
Pratique de la crosse chez les enfants.
Peu de temps après, la crosse poursuivait cependant sa progression. Elle était aux programmes dans de nombreux collèges et universités. Par ailleurs, ce jeu est intégré au programme desJeux olympiques d'été en 1904 et 1908 avant son exclusion du programme (il intégrera lesJeux mondiaux). Dans lesannées 1930, de nouvelles tentatives sont effectuées pour les Jeux olympiques. Cette discipline sportive est l'objet de démonstrations en 1928 et en 1932, mais sans succès.
Aux États-Unis, la crosse était uniquement confinée autour de la région de laNouvelle-Angleterre avant de s'étendre àNew York,Long Island et aux États du Nord-Est. Puis après, ce sont les États deGéorgie et deFloride puis duColorado,Californie,Texas et leMidwest qui accueillent ce sport, notamment grâce à sa visibilité dans les médias et son intégration à de nombreux programmes d'éducation physique des collèges et universités (avec la NCAA Men's Lacrosse Championship sur le même modèle que lebasket-ball). Dans lesannées 1970, le sport connaît une meilleure expansion. Elle est surtout due à des crosses avec des têtes en plastique : cela permet de réduire leur coûts, mais aussi et avant tout, une meilleure rapidité de jeu et par conséquent, un plus grand attrait pour le public.
Parallèlement dans lesannées 1930, une version en salle est créée au Canada. Cette version devient prépondérante par rapport à l'autre, celle-ci est en fait le résultat de la fusion de la crosse et duhockey sur glace. Elle se dispute notamment sur le même terrain que le hockey sur glace, recouvert d'un gazon synthétique. Cette version dépasse son ainée puisqu'en1987, une ligue professionnelle de crosse en salle est créée, renommée depuis enNational Lacrosse League. Une dizaine de clubs y prennent part. Plus récemment, la version originelle s'est elle-même créée sa propre ligue professionnelle :Major League Lacrosse (MLL) depuis 2001, elle compte dix équipes.
La version originelle codifiée en 1867 est la crosse au champ. C'est une rencontre de deux équipes de dix joueurs (trois attaquants, trois milieux, trois défenseurs et un gardien) sur un terrain engazonné. Les joueurs utilisent une longue crosse pour attraper, porter et se passer une balle en caoutchouc dans l'objectif de la mettre dans le but adverse. La tête triangulaire de la crosse possède un filet qui permet au joueur de tenir la balle. En plus de cette crosse, les joueurs doivent être revêtus de diverses protections. Défensivement, l'objectif est d'empêcher l'équipe adverse de marquer mais aussi de la déposséder de la balle à l'aide de leurs crosses, les contacts physiques étant autorisés. Les règles mises en place limitent le nombre de joueurs par zone et exigent que la balle se déplace sans interruption en direction du but opposé.
Les Canadiens jouent généralement à la crosse en salle, une version du jeu en salle disputée par des équipes composées de six joueurs sur des terrains de hockey sur glace, où la glace est recouverte d'une pelouse synthétique. Cette forme de jeu se joue dans un endroit clos, d'où son nom de « box » (boîte en anglais) par rapport au jeu traditionnel. Cette version a été créée dans lesannées 1930 pour améliorer les finances des patinoires de hockey. Les buts de crosse en salle sont plus petits que ceux du jeu de crosse extérieur, et le gardien porte davantage de protections. Chaque attaque doit aboutir à un tir au but en moins de trente secondes (à l'instar des 24 secondes enbasket-ball). Enfin, elle est plus violente que la crosse extérieure, car les doubles-échecs sont permis à l'intérieur du demi-cercle autour du filet.
La crosse organisée par laNational Lacrosse League en Amérique du Nord reprend les spécificités de la crosse en salle, mais également de nombreuses règles issues du jeu traditionnel. Les rencontres ont lieu principalement en hiver. Cette « sous-version » de crosse se dispute en quatre périodes de 15 minutes.
La crosse féminine est unsport collectifféminin qui oppose deux équipes de douze joueuses (une gardienne, trois défenseuses, cinq milieux de terrain et trois attaquantes) sur un terrain en herbe. Il s'agit de l'une des trois versions majeures de la crosse. Lacrosse au champ est la première version, codifiée en 1867, la crosse féminine trouve son origine enÉcosse dans lesannées 1890 et lacrosse en enclos apparaît dans lesannées 1930.
Les joueuses utilisent une longue crosse pour attraper, porter et se passer une balle en caoutchouc dans l'objectif de la mettre dans le but adverse. Il s'agit d'un sport sans contact et sans mise en échec hormis de gêner ou de taper la crosse de son adversaire avec la sienne pour récupérer la balle. La tête triangulaire de la crosse possède un filet qui permet aux joueuses de tenir la balle. En plus de cette crosse, les joueuses doivent être revêtues de divers équipements de protection.
Cette variante de la crosse oppose deux équipes de cinq joueurs chacune (avec gardien) sur du sable. Une partie se déroule en deux périodes de 18 minutes avec une mi-temps de 4 minutes. Les joueurs n'ont pas de chaussures et les gardiens non plus.
Cette variante de la crosse est une adaptation pour personnes en fauteuil roulant. Elle oppose deux équipes de huit joueurs. Le terrain est semblable à celui de la crosse en enclos avec surface dure.
Cette variante de la crosse oppose deux équipes de cinq joueurs ou joueuses. Elle est sans contact et se joue en salle ou à l'extérieur, sur un terrain de 40m sur 20m. L'intercrosse est gérée au niveau international par la Fédération internationale d'intercrosse. La FIIC est membre associé de la Fédération internationale de crosse.
La crosse est essentiellement jouée au Canada, aux États-Unis, ainsi que dans certaines communautés enGrande-Bretagne et enAustralie. Récemment, le sport commence à prospérer au niveau international avec son intégration dans de nombreux nouveaux pays, notamment enEurope et enAsie de l'Est.
À partir de 1967, pour fêter le centième anniversaire de cette discipline sportive, unChampionnat du monde de crosse au champ fut organisé et est depuis disputé tous les quatre ans. Il existe aujourd'hui unecoupe du monde féminine ainsi que pour les moins de 19 ans, chez les hommes comme chez les femmes. Jusqu'en 1986, la crosse internationale (hockey sur gazon) est seulement pratiquée par les États-Unis, le Canada, l'Angleterre et l'Australie, ainsi qu'à un degré moindre par l'Écosse et lePays de Galles dans les épreuves féminines. Lacoupe du monde féminine en 2009 a mis en jeu seize nations différentes.
La seconde plus grande compétition internationale est le championnat européen de crosse (hockey sur gazon), organisé par la Fédération européenne de crosse (ELF) depuis 1995.
En général, les championnats du monde au champ sont dominés par les États-Unis (vainqueur de huit éditions sur dix) où seul le Canada avec deux titres (1978 et 2006) peut contester sa suprématie. C'est également le cas dans les championnats du monde de moins de 19 ans où dans cette catégorie ils ont remporté tous les titres depuis sa création en 1988. Chez les femmes, les États-Unis sont également les plus titrés (avec cinq titres en sept éditions) où ici seule l'Australie est capable de les priver de ce titre (en 1986 et 2005) tandis qu'en moins de 19 ans, les États-Unis ont remporté tous les titres mis en jeu.
Une particularité est propre à ce sport sur le plan international : une sélection composée uniquement d'Iroquois, lesIroquois Nationals. Cette sélection consiste à regrouper les membres desCinq-Nations des Iroquois. Admise en 1990 par la Fédération internationale de crosse, il s'agit de la seule équipe propre auxAmérindiens pouvant participer à un sport sur le plan international, ils furent trois fois deuxièmes et trois fois quatrièmes à l'occasion des derniers championnats du monde masculins.
En France, le premier championnat s'est tenu pendant la saison 2012/2013, et a vu l'équipe Lille Spartiates/Valenciennes Haveurs remporter le trophée au détriment de Nevers et Paris.
La crosse est un sport assez répandu dans les lycées américains. Plusieurs séries télévisées et films mettent en scène des personnages pratiquant ce sport, tels que Oz dansAmerican Pie, Stiles et Scott dansTeen Wolf, Chase Stein dansRunaways ou Alex dansModern Family. Dans la série télévisée américaineArcher, de nombreuses références sont faites à propos de ce sport, Sterling Archer étant un joueur passionné depuis son adolescence.
Dans la trilogie littéraireLes amours de Lara Jean deJenny Han et également dans le film Netflix tiré du livreÀ tous les garçons que j'ai aimés, Peter Kavinsky pratique ce sport dans le club de son école. Dans le livreIntimidation d'Harlan Coben, le fils du personnage principal pratique ce sport.
↑Terme privilégié en France et notamment utilisé par l’Association française de lacrosse (pour éviter la confusion avec un autre sport ancien français portant ce nom (cf.Crosse (sport ancien)) et terme privilégié aussi par le Mouvement olympique dans ses textes et bases de données en français même si toutefois le Mouvement olympique use occasionnellement du terme de « crosse ».