La compétition est remportée par l'équipe du Brésil, qui s'appuie sur une génération d'attaquants exceptionnelle avecPelé,Gérson,Jairzinho,Rivellino etTostão, et qui marque quatre buts lors de la finale face à l'Italie. Cette édition de laCoupe du monde, décrite comme l'une des plus spectaculaires[2], est également marquée par les dix buts deGerd Müller (dont deux triplés), et par la demi-finale à suspense Italie-RFA, qualifiée par certains de « Match du siècle », et qui se termine sur le score de 4 buts à 3 pour l'Italie après prolongation.
Le trophée de la Coupe du monde, appelé « Coupe Jules Rimet », mis en jeu lors de la première édition de la compétition en1930, était destiné à être conservé définitivement par la première équipe qui parviendrait à gagner la Coupe du monde à trois reprises. C'est chose faite pour le Brésil qui est sacré champion du monde pour la troisième fois après1958 et1962.Pelé, qui a contribué à toutes ces campagnes victorieuses du Brésil, reste à ce jour le seul joueur vainqueur de trois titres mondiaux.
Le format de la compétition est resté le même qu'en 1958, 1962 et 1966 : 16 équipes qualifiées, réparties en quatre groupes de quatre équipes qui se rencontrent au premier tour une fois chacune. Les deux équipes en tête dans chaque groupe sont qualifiées pour les quarts de finale[3]. La principale innovation concerne l'utilisation de la différence de buts pour départager les équipes à égalité de points, évitant ainsi les matchs d'appui pour les places qualificatives (le départage par tirage au sort restant utilisé en dernier recours).
Pour la première fois, le remplacement de joueurs dans le jeu a été autorisé en coupe du monde, à raison de deux substitutions par équipe pendant un match[3]. L'Union soviétique a été la première équipe à faire un changement dans l'histoire de la coupe du monde contre le Mexique dans le match d'ouverture. Viktor Serebryanikov était le premier joueur à être remplacé, par Anatoly Puzach après 45 minutes.
Cette coupe du monde a également vu la première utilisation des cartons jaunes et rouges, critère visuel compréhensible de tous (y compris des spectateurs dans les tribunes), pour signaler respectivement les avertissements et les expulsions (la procédure d'avertissement et d'expulsion existant déjà bien avant 1970)[3]. Cinq cartons jaunes ont ainsi été distribués lors du match d'ouverture Mexique contre l'URSS, alors que les arbitres n'ont pas eu à sortir un seul carton rouge sur l'ensemble du tournoi.
Cette coupe du monde était également la première à être télévisée en couleurs. Afin de s'adapter aux horaires des programmes européens, quelques coups d'envoi, dont notamment ceux du match d'ouverture, des quarts de finale et de la finale, ont été donnés à midi. C'était une décision impopulaire pour beaucoup de joueurs et d'entraîneurs en raison de la chaleur intense au Mexique à cette heure[3].
Cette édition voit aussi le retour de l'Afrique avec la participation du Maroc, deuxième nation africaine présente en phase finale après l'Égypte en 1934, et la présence inédite d'Israël, le représentant du continent asiatique.
Dans le groupe 1, les hôtesmexicains ont suscité les espérances d'une nation entière en accédant aux quarts de finale en compagnie de l'Union soviétique. Cependant la victoire mexicaine face à la Belgique lors de la dernière journée repose sur un penalty contestable. À l'issue des trois journées, l'Union soviétique et le Mexique terminent en tête du groupe à égalité sur tous les critères du règlement (nombre de points et différence de buts). Un tirage au sort est alors effectué entre les deux qualifiés afin de les répartir dans le tableau final : l’Union soviétique reste à la première place et le Mexique hérite de la deuxième place, ce qui curieusement correspond au classement obtenu en utilisant le critère de la meilleure attaque (qui entrera en vigueur en 1974)[4].
Le Groupe 2 a vu l'Uruguay et les champions européensitaliens se défaire de la Suède et d'Israël. L'Italie, qualifiée après une série de matchs insipides, montrera cependant la vraie mesure de son talent lors de la phase à élimination directe.
Dans le match opposant le Brésil à la Tchécoslovaquie, Pelé, audacieux, a tenté unlob du milieu du terrain sur le gardien de but tchécoslovaque,Ivo Viktor, manquant le cadre d'un rien. Une action jamais vue auparavant dans une Coupe du monde. Quant au « désaccord des champions » entre le Brésil et l'Angleterre, il a été à la hauteur de toutes les espérances, avec le Brésil gagnant un match de haute qualité sur le score de 1-0. Durant la partie,Gordon Banks, gardien de but de l'Angleterre, effectua notamment l'un des plus beaux arrêts du mondial à la suite d'une tête dePelé aux 6 mètres[6].
Dans le groupe 4, le Pérou avec son jeu d'attaque modèle a créé la sensation en battant la Bulgarie 3-2 alors qu'il était mené 0-2 après 49 minutes de jeu. Qualifié pour les quarts de finale après ses deux premiers matchs, le Pérou est battu par une forte équipe allemande et doit se contenter de la seconde place du groupe.
Les quarts de finale ont vu une Italie transformée s'imposer 4-1 sur l'hôtemexicain après avoir encaissé le premier but. Victoire du Brésil sur le Pérou 4-2 après un match spectaculaire entre deux équipes portées vers l'attaque. L'Uruguay a défait, après prolongation, une équipe d'Union soviétique qui partait pourtant favorite.
Le dernier quart de finale, un « remake » de la finale1966 entre l'Angleterre et la République fédérale d'Allemagne, produit un des grands matchs de l'histoire de la Coupe du monde[8]. Après cinquante minutes, l'Angleterre mène 2-0 et a déjà un pied en demi-finale. C'est alors que l'entraîneur de l'AngleterreAlf Ramsey, trop confiant, décide de sortir un de ses joueurs-clés,Bobby Charlton, afin de l'épargner pour la suite du tournoi. Mais sans Charlton, l'Angleterre perd son emprise sur le jeu et ne peut contenir les implacables attaques allemandes. Après queFranz Beckenbauer a réduit l'écart d'un tir puissant 2-1, la RFA égalise à huit minutes de la fin sur une tête d'Uwe Seeler et une hésitation fatidique du gardien de but remplaçantPeter Bonetti (Gordon Banks étant absent pour cause d'intoxication alimentaire). L'élan anglais était irrévocablement brisé et la RFA tiendra sa revanche grâce au but de la victoire signéGerd Müller durant la prolongation (après une autre erreur deBonetti).
Les demi-finales présentent des affiches de prestige, les quatre équipes ayant toutes au moins un titre mondial à leur palmarès. Le Brésil défait l'Uruguay 3-1 dans une demi-finale 100% sud-américaine au goût de finale, qui a vu un moment lumineux du « roiPelé » : sur une ouverture au ras du sol, Pelé se trouve à l'entrée de la surface de réparation face au gardien uruguayen,Ladislao Mazurkiewicz, avec un ballon venant sur sa gauche. Le gardien se focalise uniquement surPelé et anticipe une prise de balle de ce dernier. Or le Brésilien laisse volontairement filer le ballon sans le toucher et effectue un grand pont sur le gardien qui est trompé par la feinte. Mais ce coup de génie n'aura pas le destin qu'il mérite car, après avoir récupéré le ballon dans le dos de Mazurkiewicz, Pelé croise trop son tir face au but vide, la balle frôlant seulement le poteau. Il s'agit pour beaucoup d'un des plus beaux gestes de Pelé, illustrant le sens de l'innovation de ce joueur d'exception.
L'autre demi-finale, entre l'Italie et la République fédérale d'Allemagne, est considérée comme l'un des plus grands matchs de l'histoire de laCoupe du monde[2]. L'Italie ouvre le score en début de rencontre par Roberto Boninsegna à la suite d'un excellent une-deux avec Luigi Riva. La RFA se montre patiente dans le jeu et parvient à égaliser parKarl-Heinz Schnellinger à la90e minute. Durant la prolongation,Gerd Müller donne l'avantage à l'Allemagne à la94e minute avant que l'Italie ne revienne à la marque par le défenseurTarcisio Burgnich (son unique but international hors match amical). Le chassé-croisé au tableau d'affichage se poursuit : à la104e minute, Riva trompe le gardien allemandSepp Maier et signe le troisième but italien (3-2), puis Müller égalise six minutes plus tard (3-3). Latélévision est en train de retransmettre le ralenti du but allemand quand le milieu italienGianni Rivera, esseulé au point de penalty, prend à contre-pied le gardien allemand sur un bon centre en retrait de Boninsegna (4-3).Franz Beckenbauer a continué de jouer après avoir eu la clavicule cassée à la suite d'un choc avec un Italien pendant cette prolongation, car le sélectionneur ouest-allemand Helmut Schön avait déjà effectué les deux remplacements autorisés. Beckenbauer, qui était critiqué avant le match du côté allemand, est ainsi resté sur le terrain jusqu'à la fin du match avec un bras en écharpe, image devenue le symbole de son courage et de sa persévérance. De par son scénario riche en émotions, cette rencontre Italie-RFA est considérée par certains comme le « Match du siècle » (« Partita del Secolo » en italien et « Jahrhundertspiel » en allemand). Un monument sur l'Estadio Azteca àMexico commémore d'ailleurs cette partie.
Dans la finale, le Brésil frappe le premier et prend logiquement l'avantage grâce à une tête de Pelé sur un centre de Rivelino à la18e minute. MaisRoberto Boninsegna profite d'une erreur défensive brésilienne pour remettre les deux équipes à égalité avant la mi-temps et maintenir l'espoir dans le camp italien. En deuxième mi-temps, l'Italie reste accrochée à son système défensif prudent mais, passé l'heure de jeu, elle craque face à la puissance de feu et la créativité du Brésil.Gérson double la mise pour le Brésil d'un tir puissant des 20 mètres. Il frappe ensuite un coup franc des 40 m surPelé qui remet de la tête surJairzinho lancé qui ne peut que marquer. Enfin, après une magnifique démonstration de maîtrise collective face à des Italiens déboussolés,Pelé décale son capitaineCarlos Alberto sur le flanc droit pour le dernier but. Ce but deCarlos Alberto, après une série de mouvements par l'équipe brésilienne de la gauche au centre, est considéré comme l'un des plus grands buts jamais marqués dans l'histoire du tournoi. Cette victoire a consacré les premiers triple champions (« tri-campeão » enportugais) du monde. Du côté italien, une vive polémique s'installe à propos du joueur vedette etBallon d'or en titre,Gianni Rivera, qui n'est entré en jeu qu'à la84e minute.
Avec cette troisième victoire (faisant suite à celles de1958 et1962), le Brésil a gagné le droit de conserver définitivement la coupeJules Rimet (celle-ci a cependant été volée en 1983 àRio de Janeiro et n'a jamais été récupérée). L'entraîneur brésilienMário Zagallo fut le premier footballeur à devenir champion du monde en tant que joueur (1958,1962) et entraîneur (1970), et Pelé a fini sa carrière en Coupe de monde en tant que premier joueur à avoir gagné trois coupes du monde.
L'excellent ailier brésilienJairzinho a marqué au moins un but dans chacune des six rencontres disputées par son équipe au cours de la phase finale (dans le premier match, contre la Tchécoslovaquie, il en a marqué deux), un exploit unique dans l’histoire de la Coupe du monde pour une nation finaliste[2]. Cependant, le meilleur buteur du tournoi est l'AllemandGerd Müller avec un total impressionnant de 10 buts[2]. Müller a réalisé deux « hat-trick » (trois buts dans une partie) au premier tour lors de deux matchs consécutifs, contre la Bulgarie puis le Pérou. Buteur pour l'Allemagne à chaque rencontre jusqu'en demi-finale, il n'a cependant pas réussi à marquer dans le dernier match (pour la3e place) contre l'Uruguay (1-0).
↑a etbClassement affiné rétroactivement. Bulgarie et Maroc sont à égalité de points et de différence de buts, le critère de la meilleure attaque n’intervenant qu'à partir de 1974.