
Le concept decontinuité rétroactive (généralement désigné par lenéologismeanglophone « retroactive continuity » ouretcon) désigne une technique narrative utilisée pour altérer des faits établis dans uneœuvre de fiction antérieure en apportant de nouveaux éléments explicatifs. Ce procédé est souvent employé pour rester fidèle aucanon d'un univers de fiction, dans un but explicatif ou amélioratif.
Les auteurs d'une nouvelle œuvre s'inscrivant dans un cadre narratif préétabli, ou lors d'une réécriture plus moderne d'une œuvre (remake oureboot) font souvent appel aux procédés duretcon pour justifier leurs choix créatifs. Cela leur permet de modifier ou de recontextualiser des événements passés, de faire apparaître, disparaître, changer d'apparence, voire ressusciter des personnages, tout en enrichissant l'intrigue et en maintenant la cohérence de l'histoire.
Un retcon doit être justifié s’il contredit une information précédemment évoquée dans le récit. Dans ce cas, la continuité peut être maintenue si les nouveaux éléments sont justifiés de façon cohérente. Si la justification est mauvaise, les lecteurs ou spectateurs peuvent percevoir une rupture de continuité. S’il n’y a aucune justification, la continuité est alors considérée comme ayant été brisée, ce qui transforme le retcon en incohérence narrative, abaissant ainsi la qualité du récit.
Un retcon n’a pas besoin de justification s’il s’insère simplement dans les non-dits du récit. Cela signifie que la continuité est respectée même si les nouveaux éléments n’étaient pas prévus initialement. Ce cas de figure est plus difficile a détecter, et c'est souvent l'auteur de l'oeuvre lui-même qui indique, dans une interview ou un documentaire de typemaking-of par exemple, les changements qu'il a décidé d'amener à son récit initial en cours d'écriture.
Bien que le romancierJules Verne ait utilisé le concept (voirL'Île mystérieuse), les termes associés de « retroactive continuity » (continuité rétroactive) ne sont apparus pour la première fois qu'en 1974 dans le livreThe Theology of Wolfhart Pannenberg de Elgin Frank Tupper[1]. Le propos tenu dans le livre de Tupper est quePannenberg considère que l'Histoire, et le sens qui lui est donné, sont le fruit de découvertes et de théorisations futures et qu'il est faux de considérer le futur comme seul produit des évènements passés.
L'usage moderne de l'expression a eu lieu pour la première fois dans la18e parution de la série decomicsAll-Star Squadron, datée de et éditée parDC Comics. La série, se déroulant sur « Terre 2 », l'une des multiples dimensions parallèles de l'univers DC, apportait à chaque nouveau numéro une nouvelle information et par conséquent une nouvelle zone d'ombre quant à sa cohérence globale. En marge de ce numéro, le scénaristeRoy Thomas répondit aux nombreuses interrogations des lecteurs assidus en indiquant sa volonté d'expliquer clairement à l'avenir les situations contradictoires ou les éventuels changements d'attitude de ses personnages[2]. Il employa alors l'expression « retroactive continuity », qui fut ainsi définie et intégrée pleinement à la culturecomics des années 1980.
L'origine de l'abréviation « Retcon » est plus difficile à établir, mais sa paternité est revendiquée par Damian Cugle[Qui ?], qui prétend l'avoir inventée lors de conversations surUSENET en 1988.
Dans le premier épisode de la saga cinématographiqueStar Wars,Star Wars, épisode IV : Un nouvel espoir,Obi-Wan Kenobi explique au jeuneLuke Skywalker que son père est décédé face au maléfiqueDark Vador :
Cependant, cette version des faits est mise à mal par la révélation principale de l'épisode suivant,L'Empire contre-attaque, dans lequel Vador affronte Luke en combat singulier :
Afin de rétablir l'équilibre entre ces deux versions discordantes quant au destin d'Anakin Skywalker, les scénaristes duRetour du Jedi font tenir le discours suivant à Obi-Wan :
Bien que le termeretcon ne soit pas encore couramment utilisé à l'époque (1983), cet exemple est l'un des plus connus et des plus facilement identifiables. En revenant sur un propos tenu originellement et en l'altérant, les auteurs modifient et améliorent l'histoire en effaçant au mieux ses contradictions internes.