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Constitution civile du clergé

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Constitution civile du clergé
Données clés

Présentation
TitreSérie des décrets sur la Constitution civile du clergé
PaysDrapeau du royaume de France : entièrement blancRoyaume de France
Langue(s) officielle(s)Français
TypeDécret
Adoption et entrée en vigueur
Adoptionpar l'Assemblée nationale constituante le
SanctionparLouis XVI le

Lire en ligne

Assemblée nationale :Fac-similé

Concordat de Bologne(1516)Concordat(1801)

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LaConstitution civile du clergé est undécret adopté le, au début de laRévolution française (1789-1799), par l'Assemblée nationale constituante, et organisant l'Église de France, notamment en raison de lanationalisation des biens de l'Église en novembre 1789.

Sanctionnée contre son gré parLouis XVI le, elle réorganise unilatéralement leclergé séculier français, instituant une nouvelle Église, l'Église constitutionnelle. Cette réorganisation est condamnée par lepapePie VI en mars 1791, ce qui provoque la division du clergé français enclergé constitutionnel (les « jureurs ») etclergé réfractaire[1], division qui est à l'origine de la volonté dedéchristianisation qui marque le mouvementsans-culotte à partir de 1791 et des gouvernements républicains à partir de 1792.

La Constitution civile du clergé est abrogée en 1801 par lePremier ConsulNapoléon Bonaparte, qui fait la paix avec le pape grâce auconcordat, qui restera en vigueur enMoselle et enAlsace tandis qu'il est remplacé dans le reste du pays par laloi de séparation des Églises et de l'État de 1905.

Le Comité ecclésiastique de l'Assemblée constituante

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Article détaillé :Comité ecclésiastique.
14 août 1790 : Proclamation par le roi du décret sur la constitution civile du clergé en annexe de la séance de l'assemblée nationale constituante du lundi 12 juillet 1790[2].

À la suite de laNuit du 4 août 1789, l'ordre du clergé, premier ordre en dignité de lasociété d'Ancien Régime, disparaît en tant que corps politique.

À l'automne 1789 commencent à laConstituante les débats sur la nouvelle organisation de l'Église de France. LeComité ecclésiastique[3], présidé parTreilhard (1742-1810), est chargé d'élaborer un projet. Trois membres du comité, avocats de tendancejanséniste, sont plus spécialement concernés par son élaboration :Louis-Simon Martineau (1733-1799) comme rapporteur,Armand Camus (1740-1804) etJean-Denis Lanjuinais (1753-1827) comme défenseurs. Membres de la magistrature qui se sont affirmés dans le mouvement de la fronde et dujansénisme parlementaire, adeptes dugallicanisme, ils considèrent qu'ils ont le droit de réformer une Église de France qu'ils veulent indépendante dupape et soumise au gouvernement. Enfin, selon la tendance janséniste formée autour dudiacre Pâris et en s'inspirant durichérisme, doctrine ecclésiologique[4] très implantée dans le bas-clergé, qui prône le gouvernement démocratique des communautésparoissiales et diocésaines, ils ont l'ambition de réformer leclergé pour revenir à la pureté de l'« Église primitive » .

Le rapport de Martineau, légèrement amendé, est voté le : il devient laConstitution civile du clergé. Après une période d'opposition,Louis XVI finit par donner son accord le 22 juillet pour que le décret soit promulgué le 24 août 1790[5].

Le nouveau règlement

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Le texte comporte quatre titres :

  1. « Des offices ecclésiastiques ».
  2. « Nomination aux bénéfices ».
  3. « Traitements et pensions ».
  4. « De la résidence »[6].

Les offices ecclésiastiques

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Lesdiocèses etparoisses étaient profondément remaniés.

L'article 1 du décret décide que « Chaque département formera un seul diocèse, et chaque diocèse aura la même étendue et les mêmes limites que le département. » Le nombre de diocèses était de ce fait réduit de 130 à 83. Les évêques s'entourent devicaires épiscopaux qui, avec les directeurs et supérieurs du séminaire diocésain, forment le « conseil » qui doit donner son accord pour les actes de juridiction en rapport avec le gouvernement du diocèse.

L'article 3 prévoit que « Le royaume sera divisé en dix arrondissements métropolitains, dont les sièges serontRouen,Reims,Besançon,Rennes,Paris,Bourges,Bordeaux,Toulouse,Aix etLyon. » Ces arrondissements métropolitains remplacent les14 provinces ecclésiastiques (archevêchés) de l'Ancien Régime.

Dans sonarticle 15, le décret dispose que « Dans toutes les villes et bourgs qui ne comprendront pas plus de six mille âmes, il n'y aura qu'une seule paroisse ; les autres paroisses seront supprimées et réunies à l'église principale. »

L'article 16 énonce que « Dans les villes où il y a plus de six mille âmes, chaque paroisse pourra comprendre un plus grand nombre de paroissiens, et il en sera conservé ou établi autant que les besoins des peuples et les localités le demanderont. »

Suppression du clergé régulier et de certains offices ecclésiastiques

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L'article 20 du décret décide que « Tous titres et offices autres que ceux mentionnés en la présente constitution, les dignités, canonicats, prébendes, demi-prébendes, chapelles, chapellenies, tant des églises cathédrales que des églises collégiales, et tous chapitres réguliers et séculiers de l'un et l'autre sexe, les abbayes et prieurés en règle ou en commende, aussi de l'un et de l'autre sexe et tous autres bénéfices [...] de quelque nature et sous quelque dénomination que ce soit, sont, à compter du jour de la publication du présent décret, éteints et supprimés sans qu'il puisse jamais en être établi de semblables. »

Disparaissaient ainsi leschanoines,prébendiers ouchapelains, « sans charge d'âme ».

La nomination aux bénéfices

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Lesévêques sont élus par l'assemblée des électeurs du département[7] et les curés par celle des électeurs du district, que les électeurs professent lareligion catholique ou non. L'amendement proposé par l'abbé Grégoire, disposant que les catholiques soient seuls électeurs, fut repoussé[8].

Le texte conserve la distinction entre la nomination, c'est-à-dire la désignation du titulaire, et l'institution canonique, laquelle confère la juridiction. Cependant, si l'évêque conserve l'institution des curés, il est lui-même institué non plus par le pape, mais par le métropolitain ou le plus ancien évêque de l'arrondissement métropolitain. Le pape n'est plus qu'« un chef visible de l'Église universelle »[9], auquel il peut écrire en gage d'unité defoi et decommunion dans le sein de l'Église catholique.

Avant leur sacre, les évêques doivent prêter« le serment solennel de veiller avec soin sur les fidèles du diocèse […], d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi et de maintenir de tout [leur] pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi »[10]. Les curés devront faire de même, un dimanche, avant la grand-messe.

Des officiers civils

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Les ecclésiastiques — évêques et curés — perçoivent un traitement de l'État. Le traitement de l'évêque de Paris est de 50 000livres, celui des autres évêques de 20 000 livres. Les vicaires épiscopaux reçoivent entre 8 000 et 2 000 livres. Les curés entre 6 000, pour les cures de Paris, et 1 200 livres, pour les cures les moins peuplées ;

Tous les religieux — évêques,prêtres,moines,moniales — ont des droits civiques qui les autorisent à quitter leurs postes[11] ou leurs communautés monastiques.

Un ecclésiastique ne peut être maire, officier municipal ou conseiller général. Il est cependant électeur et éligible à l'Assemblée nationale.

Avant cette loi, les membres du clergé étaient soumis à la juridiction interne de l'Église, qui les astreignait au célibat, les empêchait de léguer les biens acquis dans l'exercice de leur ministère à leur famille et d'habiter où bon leur semblait, et les soumettait à des tribunaux ecclésiastiques, appelésofficialités.

Enfrançais moderne, la loi aurait pu être appelée« loi de réorganisation de l'Église et donnant statut d'agent public aux membres du clergé ». Compromis entre les tendancesgallicanes,jansénistes etrichéristes, la Constitution civile du clergé, tout en souhaitant établir l'indépendance, sauf en matière doctrinale, de l'Église de France à l'égard de lapapauté, la soumet à l'État. PourPierre de la Gorce :« Peu d'actes ont aussi mal résisté au temps. Vu à distance, celui-ci ne répond à aucune conception nette »[12].

La controverse

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Portrait du papePie VI (vers 1775).

Le, le papePie VI tient un consistoire secret, au cours duquel il dénonce particulièrement la sécularisation des biens ecclésiastiques et lasuppression des vœux de religion. Lecardinal de Bernis, ambassadeur de France auprès duSaint-Siège, obtient que cette allocution ne soit pas publiée. Il s'en félicite dans ses dépêches àMontmorin tout en précisant :« Si on continue à traiter si durement l'Église de France, je ne saurais répondre à la longue de la patience du chef de l'Église catholique »[13].

Dans les mois qui suivent, la préparation de la Constitution civile du clergé est suivie avec anxiété aussi bien à Rome que parLouis XVI. Ce dernier sollicite les avis de deux de ses ministres :Lefranc de Pompignan, ancienarchevêque de Vienne, etChampion de Cicé,archevêque de Bordeaux. Se faisant les porte-parole de leurs confrères, dont la plupart siègent à l'Assemblée nationale, ils conseillent au roi de ne pas s'opposer à l'Assemblée et de rechercher un compromis avec Pie VI. Cependant, le pape écrit le 9 juillet 1790 à Louis XVI :« Nous devons vous dire avec fermeté et amour paternel que, si vous approuvez les décrets concernant le Clergé, vous induirez en erreur votre Nation entière, vous précipiterez votre Royaume dans le schisme et peut-être dans une guerre civile de religion »[14]. Le 10 juillet, des brefs de Pie VI demandent au roi de refuser la Constitution. Ceux-ci sont remis à Louis XVI le 23 juillet. Or, la veille, celui-ci a annoncé qu'il accepterait les décrets. Croyant le Pape mal informé des affaires de France — celui-ci est en effet conseillé par le cardinal de Bernis, fort prévenu contre le nouvel ordre des choses — et persuadé de l'urgence, Louis XVI sanctionne et promulgue les décrets le 24 août 1790.

Dès le mois d'août,Jean-René Asseline,évêque de Boulogne, publie une réfutation de la Constitution civile, à laquelle adhèrent quarante évêques. En octobre,Boisgelin,archevêque d'Aix, publie sesObservations sur le serment prescrit aux ecclésiastiques et sur le décret qui l'ordonne[15]. Tous les évêques de France adhèrent à ce texte, qui est envoyé au pape. Un très grand nombre de publications s'attachent à défendre ou à combattre la Constitution civile. Pour les uns, elle est une œuvre indispensable pour mettre fin aux abus : elle permet un retour à la pureté et à la simplicité de l'Église primitive, et elle correspond aux vœux de la Nation souveraine. Pour les autres, l'assemblée a commis un abus de pouvoir en remodelant les circonscriptions ecclésiastiques. Celles-ci n'établissent pas un pouvoir sur un territoire mais sur des âmes. Or, ce pouvoir sur les âmes ne peut être conféré que par l'Église[16]. Leconcordat de Bologne avait été établi par deux parties : le roi et le pape. Mais ce dernier n'a pas été consulté. Enfin, la Constitution est schismatique : le sacre ne donne pas à l'évêque une mission et un pouvoir dejuridiction, laquelle ne peut lui être conférée que par l'Institution canonique. Cependant, en réduisant celle-ci à une formalité, puisque c'est le président de l'assemblée électorale qui proclame l'élu évêque (titre II, art. 14) et non les autorités légitimes, le lien avec le pape et l'Église est rompu. Ce qui fait écrire à Boisgelin :« Nous ne pouvons pas transporter le schisme dans nos principes »[17].

Le serment à la Constitution civile

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Le serment obligatoire

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Estampes opposant le« prêtre patriote prêtant de bonne foi le serment civique » au« prêtre aristocrate » fuyant le même serment (1790).

Le 26 novembre,Voidel, député de laMoselle, dénonce la formation d'une ligue contre la Constitution civile. Il propose le serment obligatoire comme le moyen indispensable de régénérer l'église de France. Le décret est voté. Le Roi doit le sanctionner le, ayant vainement espéré des concessions de la part du Pape, ce dernier ayant accepté, dix ans plus tôt, la réforme de l'Église d'Autriche opérée de façon autoritaire et unilatérale par l'empereur Joseph II, frère de Marie-Antoinette.

« Par décret de l'Assemblée nationale, et conformément à la constitution civile du clergé en date du 24 août 1790[18], tous les ecclésiastiques prêteront le serment exigé un jour de dimanche après la messe, en présence du conseil général de la commune et des fidèles. Ceux qui ne le prêteront pas seront réputés avoir renoncé à leur office et il sera pourvu à leur remplacement. »

Le serment était le suivant :

« Je jure de veiller avec soin sur les fidèles de la paroisse (ou du diocèse) qui m'est confiée, d'être fidèle à la Nation, à la Loi, au Roi et de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le Roi. »

Le serment oblige prêtres et évêques à maintenir la nouvelle organisation du clergé[19]. Pour les deux cent cinquante officiers ecclésiastiques membres de l'assemblée, le serment doit être prêté dans les huit jours, soit le 4 janvier 1791 au plus tard. À la suite de l'abbé Grégoire, cent cinq députés prêtent serment à la barre. Enfin, le, malgré la pression des tribunes, quatre seulement jurent. En tenant compte des rétractations, ce sont quatre-vingt-dix-neuf députés ecclésiastiques qui prêtent le serment[20].

Le 7 janvier commencent les prestations de serment dans les provinces. Elles sont échelonnées tous les dimanches, de janvier et février 1791, à des dates différentes selon lesdiocèses. La quasi-totalité desévêques, sauf quatre[21], et la moitié des curés, refusent alors de prêter serment.

À partir du10 août 1792 et de la chute de la royauté, un nouveau serment, dit « de Liberté-Égalité », est mis en place ; celui-ci ne fait plus référence au roi[22].

Réponse officielle du pape Pie VI

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« Je jure de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution & [la haie]. » Plat commémoratif de la Constitution civile du clergé secrètement contre-révolutionnaire par un rébus (1790).Musée Carnavalet.

LepapePie VI, qui ne répond pas durant des mois aux demandes pressantes de l'ambassadeur de France, fait connaître sa réponse officielle par les brefsQuod aliquantum, du, etCaritas, du. Il demande aux membres du clergé n'ayant pas encore prêté serment de ne pas le faire, et à ceux qui ont déjà prêté serment de se rétracter dans l'espace de quarante jours. Les élections épiscopales et paroissiales sont déclarées nulles et les consécrations d'évêques sacrilèges. La publication des brefs est interdite, mais ceux-ci circulent clandestinement et sont largement connus[23].

Malgré les nombreuses rétractations deprêtres assermentés au sein de l'Église de France, une situation deschisme divise le clergé en prêtres constitutionnels, désignés comme « jureurs », et prêtres insermentés, désignés comme « réfractaires ». La rupture entre la Révolution et l'Église catholique semble inévitable[24].

Par souci d'apaisement, et en application de laliberté religieuse affirmée par laDéclaration des droits de l'homme et du citoyen, sur proposition deTalleyrand etSieyès, l'Assemblée constituante vote le 7 mai 1791 un décret qui donne le droit aux prêtres insermentés de célébrer la messe dans les églises constitutionnelles. Les catholiques qui refusent la nouvelle église ont la possibilité de louer des édifices pour le culte[25].

Assermentés et insermentés

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On appelleinsermentés lesprêtres qui refusent de prêter serment à la Constitution civile du clergé. La quasi-totalité des évêques (sauf cinq), la totalité des prêtres desMissions étrangères de Paris et une grosse moitié des curés seront des prêtres réfractaires.

On appelleassermentés — ou « jureurs » ou « intrus » — lesprêtres qui prêtent serment à la Constitution civile du clergé.Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord,Henri Grégoire,Yves Marie Audrein sont les premiers à appartenir au clergé constitutionnel. Le premier évêque constitutionnel estLouis-Alexandre Expilly de La Poipe, recteur (curé) deSaint-Martin-des-Champs près deMorlaix, élu député du clergé en août 1788, et qui préside ensuite à l'Assemblée constituante la commission qui rédige la Constitution civile du clergé. Il est sacréévêque du Finistère àParis parTalleyrand, lui-mêmeévêque, en 1790, avant d'être guillotiné le.

Typologies des prestations de serment

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Serment Curé de Sablières.

Avec l'historien Jean de Viguerie[26], on peut distinguer six manières de prêter le serment :

  1. le serment prêté purement et simplement ;
  2. le serment d'abord refusé puis prêté ;
  3. le serment prêté avec restriction ou avec rétractation partielle — ainsi Bernard Bellegarrigue, curé deBorn dans laHaute-Garonne, jure le 13 mars 1791 en précisant« D'après l'instruction de l'Assemblée Nationale qu'elle n'entend porter aucune atteinte à la religion catholique, apostolique et romaine »[27] ;
  4. le serment prêté puis entièrement rétracté ;
  5. le refus avec explication, souvent fondé sur l'argument de l'impossibilité en conscience ;
  6. le refus pur et simple.
En fonction de la position hiérarchique

L'historien américainTimothy Tackett note que la proportion de réfractaires était, dans le hautclergé (évêques), très supérieure à celle observée dans le bas clergé (prêtres etvicaires). Il note par ailleurs que les vicaires étaient statistiquement davantage réfractaires que les curés.

En fonction de la géographie

En général, les régions périphériques seront davantage réfractaires. Cela pourrait être lié aux différences culturelles, soulignées par l'usage encore très répandu de langues régionales : par exemple, enBretagne, avec 20 % de jureurs[28] ou enAlsace, avec seulement 8 % de jureurs dans le Bas-Rhin. Dans ce contexte, on peut aussi citer leNord, laLorraine, leLanguedoc et l'Auvergne. Cela pourrait peut-être aussi s'expliquer du fait d'une certaine méfiance vis-à-vis des décisions de la capitale.

La diffusion des idées desLumières est sans doute également l'un des facteurs de motivation pour prêter ou non serment. La présence d'un nombreux clergégallican et/oujanséniste dans leBassin parisien est, pour certains historiens, l'une des raisons pour lesquelles le serment y a rencontré beaucoup de succès (90 % de jureurs dans leLoiret). Les autres régions à majorité de jureurs sont la Bourgogne, la Provence (96 % de jureurs dans leVar[29]) et les régions littorales du Sud-Ouest.

Au total, au niveau national, en tenant compte des rétractations intervenues après les brefs pontificaux, on atteindrait une proportion de 47 à 48 % de jureurs[30].

Élection du nouveau clergé

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Pour remplacer lesprêtres réfractaires, il faudra élire de nouveaux prêtres : quatre-vingts évêques sont alors élus et environ vingt mille prêtres sont remplacés[31]. L'abbé Grégoire, curé et député, qui avait participé à la rédaction du projet de Constitution civile du clergé, sera élu évêque constitutionnel de Loir-et-Cher, et deviendra, de fait, le chef de l'Église constitutionnelle de France. Il faut souligner que ces élections sont ouvertes aux non catholiques, ce qui ne pouvait qu'irriter les fidèles et la Papauté.

Conséquences de la Constitution civile du clergé et du serment

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La plupart des prêtres réfractaires prennent le parti de lacontre-révolution et les patriotes suspectent les ecclésiastiques, ce qui engendre des haines passionnées. De très nombreux catholiques, paysans, artisans ou bourgeois, qui avaient soutenu letiers état, rejoignent ainsi l'opposition. Dans l'Ouest de laFrance, alors que des régions comme laBretagne ou laVendée avaient soutenu les débuts de la Révolution, celles-ci deviennent des foyers de troubles et de guerres liés à la contre-révolution.

« Décret de l'Assemblée national [sic] qui supprime les ordres religieux et religieuses. Le mardi 16 février 1790. » Caricature anonyme de 1790. « Que ce jour est heureux, mes sœurs. Oui, les doux noms de mère et d'épouse est bien préférable à celui de nonne, il vous rend tous les droits de la nature ainsi qu'à nous. »

Les débats agitent en profondeur la société française pendant les six premiers mois de 1791, et commencent à couper le pays en deux. Ils divisent des familles, rompent des amitiés anciennes. Charrier de La Roche, défenseur de la Révolution, constate en octobre 1791 :« On accrédite des préjugés incendiaires dont les mieux intentionnés n'ont aucun moyen de se garantir, on sème, on entretient l'aigreur et l'animosité contre les sectateurs les plus paisibles du parti que l'on n'a pas adopté »[32]. Le, un décret donne aux administrateurs locaux la possibilité de déporter les prêtres de leur domicile en cas de trouble[33].

Les suites

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Article détaillé :Déchristianisation (Révolution française).

Des mesures dedéchristianisation se poursuivent en France en 1793 et 1794, avec la mise en place ducalendrier républicain qui efface les références chrétiennes ducalendrier grégorien (dimanche et jours fériés), l'instauration duculte de la Raison, la fermeture d'églises au culte du jusque vers novembre 1794, puis l'instauration duculte de l'Être suprême. Les lois de 1790 — hors Constitution civile du clergé, réservée au culte catholique — permettent des mesures de tolérance par rapport aux protestants et auxjuifs, accordant à ces derniers lacitoyenneté. Lesprêtres réfractaires sont l'objet d'une sévère répression, notamment sous laTerreur, et sont confondus pendant cette période avec lesprêtres constitutionnels (ou assermentés, ou jureurs).

Dans laRhénanie occupée par les forces françaises (1793), le mouvement desécularisation chasse l'archevêque de Mayence de ses terres. La désacralisation des symboles et des édifices religieux et aristocratiques favorise l'émergence du pouvoir bourgeois dans leSaint-Empire.

La fin : la première séparation de l’Église et de l’État (1794)

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« La séparation de l'Église et de l'État avait été instaurée en fait par le décret du 2 sansculotides an II (18 septembre 1794) : par raison d'économie,Cambon fit supprimer ce jour-là le budget de l'Église assermentée ; la Constitution civile du clergé était ainsi implicitement rapportée et l'État complètement laïcisé »[34].

Cinq mois plus tard, laConvention thermidorienne confirme cette séparation en votant, le 21 février 1795 (3 ventôse an III), leDécret sur la liberté des cultes :

Art. I - Conformément à l'article VII de la Déclaration des Droits de l'homme et à l'article 122 de la Constitution, l'exercice d'aucun culte ne peut être troublé.
Art. II - La République n'en salarie aucun.
Art. III.- Elle ne fournit aucun local, ni pour l'exercice des cultes, ni pour le logement des ministres.
Art. IV.- Les cérémonies de tout culte sont interdites hors de l'enceinte choisie pour leur exercice.
Art. V - La loi ne reconnaît aucun ministre du culte, nul ne peut paraître en public avec les habits, ornements ou costumes affectés à des cérémonies religieuses.
Art. VI - Tout rassemblement de citoyens pour l'exercice d'un culte quelconque est soumis à la surveillance des autorités constituées. Cette surveillance se renferme dans des mesures de police et de sûreté publique.
Art. VII - Aucun signe particulier à un culte ne peut être placé dans un lieu public, ni extérieurement, de quelque manière que ce soit. Aucune inscription ne peut désigner le lieu qui lui est affecté. Aucune proclamation ni convocation publique ne peut être faite pour y inviter les citoyens.
Art. VIII - Les communes ou sections de commune en nom collectif, ne pourront acquérir ni louer de local pour l'exercice des cultes…
Art. X - Quiconque troublerait par violence les cérémonies d’un culte quelconque, ou en outragerait les objets, sera puni suivant la loi du 22 juillet 1791 sur la police correctionnelle…

Enfin, la paix religieuse est totalement retrouvée avecBonaparte, alors Premier consul, qui signe leConcordat avec le Pape en 1801.Pie VII entérine une mise sous tutelle de l'Église de France.

Notes et références

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  1. Michel Vovelle,La Révolution française, Paris,Armand Colin,,p. 24.
  2. Décret sur la constitution civile du clergé en annexe de la séance du lundi 12 juillet 1790,,p. 55-60.Voir et modifier les données sur Wikidata
  3. Durand de Maillane,Histoire apologétique du Comité ecclésiastique de l'Assemblée Nationale…, 1791.
  4. Sur l’organisation de l’Église.
  5. Jacques Le Goff etRené Rémond (dir.),Histoire de la France religieuse,XVIIIe – XIXe sièclee, Seuil, p. 90
  6. L. Sciout,Histoire de la Constitution civile du clergé (1790-1801), 4 vol., 1872-1881.
  7. Un électeur pour cent citoyen actif, l'électeur devant justifier un revenu de 150 ou 200 journées de travail. Gazier, p. 32.
  8. Amendement de l'abbé Grégoire repoussé, Archives Parlementaires de 1787 à 1860 - Première série (1787-1799), Persée.
  9. Titre II, art. 19.
  10. Titre II, art. 21.
  11. En renonçant à leur traitement.
  12. La Gorce,Histoire religieuse de la Révolution française, 1911-1922, t. 1,p. 255, cité par Viguerie,Christianisme et Révolution, 1986,p. 79.
  13. Cité par La Gorce,Histoire religieuse de la Révolution française, t. I,p. 276.
  14. Cité par Viguerie,Christianisme et Révolution,p. 82.
  15. Boisgelin.
  16. Abbé Jabineau,Vraie Conspiration dévoilée, 20 août 1791, cité par Viguerie,p. 79.
  17. Cité par Ledré,L'Église…,p. 78.
  18. Titre II, art. 21 et 38.
  19. Ledré,Une controverse…
  20. Viguerie,p. 87.
  21. Talleyrand, évêque d'Autun,Loménie de Brienne, archevêque deSens,Jarente, évêque d'Orléans etLafont de Savines, évêque deViviers.
  22. « Le serment de " Liberté-Égalité " et les massacres de prêtres en 1792 »,Le Monde.fr,‎(lire en ligne, consulté le).
  23. La Gorce,Histoire religieuse de la Révolution française, t. 1,p. 422-423.
  24. Cependant, ce point fait l'objet de discussions de la part des historiens. En effet, dans un bref en date du 2 avril 1792, Pie VI lui-même écrit qu'on s'est servi de son nom pour troubler les consciences et semer la discorde en France en fabriquant des bulles qui défendent de prêter serment de fidélité à la patrie. À trois reprises, par décret, l'Inquisiteur général d'Espagne condamnera comme faux le bref du 10 mars 1791. Archives du Vatican. VoirPie VI et la Révolution française.
  25. La Gorce,Histoire religieuse de la Révolution française, t. 1,p. 432.
  26. Viguerie, p. 89.
  27. Meyer,p. 101, cité par Viguerie,p. 90.
  28. Dupuy,p. 71.
  29. Sauf indication contraire, ces chiffres sont donnés à partir des statistiques départementales dressées en mars 1791 à la demande de l'Assemblée nationale.
  30. Viguerie,p. 93.
  31. Conséquences, suites et fin de la Constitution civile, 2 novembre 1789 : nationalisation des biens du clergé, JYC 2010.
  32. Cité par Ledré,L'Église…,p. 89.
  33. Cfr. ledécret contre les prêtres réfractaires.
  34. Soboul.

Voir aussi

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Bibliographie

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Articles connexes

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