Premier fils d'Héraclius et deFabia Eudocia, il est très tôt associé au gouvernement pour consolider le pouvoir encore fragile de la nouvelle dynastie. Il passe l'essentiel de sa jeunesse àConstantinople tandis que son père est souvent en campagne contre lesSassanides. D'une santé fragile, il assure la continuité du pouvoir impérial en l'absence d'Héraclius. En dépit de son statut d'héritier désigné, il est rapidement en concurrence avec les enfants deMartine, la deuxième femme d'Héraclius qui cherche à les promouvoir aux dépens de Constantin. Cela ne l'empêche pas de succéder au trône en 641 alors que l'Empire est dans une situation critique.
Son règne,qui ne dure que quelques semaines, est surtout consacré à quelques tentatives de stabiliser l'Empire et de préserver son trône et les droits de son fils,Constant, face aux visées de Martine. Il meurt en mai 641, probablement de latuberculose, et, si Martine en profite pour prendre la régence au nom de son filsHéraclonas, Constant est finalement élevé sur le trône au terme d'une révolte de l'armée, peut-être en partie planifiée par Constantin avant sa mort.
Constantin est le premier fils d'Héraclius et de sa première femme,Fabia Eudocia, épousée dès son accession au trône le. Héraclius est très probablement d'originearménienne[1],[2] et il passe une large partie de sa jeunesse enAfrique car son père,Héraclius l'Ancien, a été nommé exarque d'Afrique, l'un des postes les plus élevés de l'Empire[3]. C'est dans cette région qu'il y rencontre Fabia Eudocia, fille d'un riche propriétaire terrien local du nom de Rogas[4],[5].
En 608, Héraclius suit son père dans la rébellion contre l'empereurPhocas qui a usurpé le trône en 602 sans parvenir à affermir sa légitimité. À la tête d'une flotte, il débarque près deConstantinople et capture Phocas avant de l'exécuter[6]. Néanmoins, il doit très tôt s'atteler à consolider son pouvoir, lui aussi fragile car issu d'une rébellion. Confronté à des frontières qui vacillent sous les assauts desSassanides en Orient, il compte très tôt sur son entourage familial, que ce soitNicétas qui devient gouverneur de l'Égypte ou son frèreThéodore[7].
Constantin naît le, peu avant la mort de sa mère, vraisemblablement dans le palais de Sophia[8]. Il reçoit la bénédiction deThéodore de Sykéon, qui est alors l'une des figures religieuses les plus éminentes de l'Empire, et est baptisé en décembre 612. Son père cherche alors certainement à renforcer son pouvoir en s'associant à un personnage reconnu pour sa piété et proche de ses prédécesseurs, tant Phocas queMaurice[9].
Constantin est rapidement reconnu comme successeur désigné puisqu'il est couronné co-empereur alors qu'il n'a que quelques mois, le 22 janvier613[9]. Il est présenté à l'hippodrome où il est acclamé par leSénat puis par lesfactions de la ville, avant d’être amené àSainte-Sophie[10]. L'association du fils et héritier au pouvoir impérial est une pratique déjà courante dans le monde byzantin. Elle vise à prévoir les troubles de la succession. L'Empire byzantin, pénétré de l'héritage de la Rome antique, ne reconnaît alors qu'une valeur relative au principe de la légitimité dynastique[11]. Cependant, la décision d'Héraclius de donner la couronne impériale à son fils alors même qu'il n'est qu'un bébé est un geste significatif, qui atteste son désir de préparer au mieux sa succession et d'installer sa famille à la tête de l'Empire, alors que Fabia Eudocia est morte peu après la naissance de Constantin. Il est aussi possible qu'en associant son fils au pouvoir, il se réserve la possibilité de quitter plus aisément Constantinople. En laissant son fils dans la capitale, il maintient la présence de sa famille dans la Cité impériale, cœur du pouvoir que les empereurs précédents n'ont que rarement quittée. Ainsi, dès 613, Héraclius part en campagne à la tête de ses troupes[12]. De même, Constantin apparaît assez tôt sur les pièces de monnaie émises par son père, là encore pour illustrer son rôle de successeur désigné, bien plus, par exemple queThéodose, le fils deMaurice, empereur de 578 à 602 et renversé par Phocas. Héraclius a peut-être voulu prendre exemple sur cet échec pour affirmer très vite la position de son fils. Enfin, en632, Constantin est élevé au rang deconsul[13].
Très jeune, Constantin semble d'une santé fragile[14]. Alors que son père quitte Constantinople en 622 pour conduire ses troupes contre les Sassanides durant plusieurs années, Constantin reste généralement dans la capitale, sauf lors d'un bref moment en 624 lors duquel il accompagne Héraclius jusqu'àNicomédie avant de revenir à Constantinople[15]. Il est alors nécessaire qu'un membre de la famille impériale,a fortiori l'héritier désigné, demeure à Constantinople pour assurer une sorte de continuité, même si dans les faits le pouvoir est en réalité détenu conjointement par le patriarcheSerge Ier de Constantinople et le généralBonus[14]. Dans les années 630, Constantin n'accompagne pas non plus son père et il est difficile de savoir les relations qu'il entretient avec lui, alors qu'il est dorénavant suffisamment âgé pour prendre part au gouvernement de l'Empire. Il est possible qu'Héraclius, conscient de la santé précaire de son fils, ait essayé de le préserver ou bien que Constantin III ait poursuivi sa fonction de représentation d'Héraclius dans la capitale[16],[17]. Nikolas Hächler met ainsi en évidence une forme de partage du pouvoir et de la représentation impériale entre le père et le fils, dans le contexte de l'installation d'une nouvelle dynastie et d'une période de grand trouble pour l'Empire. Ainsi, même si les fonctions de Constantin III sont essentiellement cérémonielles, son rôle serait plus important qu'il n'y paraît[18].
Tout au long de sa vie, Constantin est le successeur désigné par Héraclius. Néanmoins, le remariage de celui-ci avec sa nièceMartine favorise des conflits familiaux avec les enfants issus de cette union. Héraclius souhaite probablement assurer l'avenir de sa dynastie en concevant de nouveaux fils, d'autant plus que Constantin est d'une santé précaire[16]. Or, Martine montre assez tôt son désir de promouvoir ses propres enfants au sommet de la hiérarchie impériale. Héraclius y consent en partie, certainement pour se prémunir d'un décès précoce de Constantin. Si les premiers enfants qu'il a avec Martine sont frappés d'infirmité et meurent parfois en bas âge,Héraclonas (né en 626) est couronné co-empereur en638. Son plus jeune frère,David, est élevé à la dignité deCésar la même année. Néanmoins, cette décision renforce aussi la concurrence intrafamiliale[28]. Dans ces dernières années du règne d'Héraclius, Constantin III le représente de plus en plus, aux côtés d'Héraclonas, alors qu'Héraclius s'isole sur la rive asiatique duBosphore et renâcle à se rendre dans la cité impériale[29].
Exemple de solidus frappé au temps du règne d'Héraclius, représentant Héraclius Constantin sous des traits enfantins. De ce fait, la pièce a vraisemblablement été frappée entre 615 et 625. Avec le temps, le portrait de Constantin III devient de même taille que celui de son père.
Malgré tout, le règne très court de Constantin ne lui permet guère de peser sur les bouleversements en cours dans son Empire. Malade, il est réputé résider dans un palais àChalcédoine, à l'extérieur de Constantinople[22]. Toutefois, il jouit apparemment d'une bonne popularité dans la Cité impériale, en lien peut-être avec sa présence lors de la défense de la ville à l'occasion du siège de 626 mais également parce qu'il n'est pas issu de l'union entre Héraclius et Martine[40]. Il tente d'organiser la défense de l'Égypte, dont de larges pans ont d'ores et déjà été envahis, alors que l'une des dernières décisions d'Héraclius a été de refuser la trêve conclue entreCyrus de Phase et les Arabes. Face à l'incapacité du généralThéodore, principal militaire dans la région, à défendre la bande côtière égyptienne toujours tenue par les Byzantins, Constantin rappelle Cyrus de Phase, qui est nommé préfet de l'Égypte, avec pour consigne de préparer la défense d'Alexandrie[41]. Symbole d'un Empire en crise financière autant que militaire, des chroniqueurs commeGeorges Cédrène rapportent une anecdote dont il est difficile d'attester la véracité. Constantin III aurait fait exhumer la couronne de son père pour la fondre[42].
En mai 641, Constantin meurt à seulement vingt-neuf ans, probablement de latuberculose,Jean de Nikiou rapportant qu'il crache du sang en abondance au moment de sa mort[47]. La date précise n'est pas connue avec exactitude, maisNicéphore de Constantinople parlant d'un règne de103 jours, il est possible de situer sa disparition entre le 24 et le26 mai, bien qu'une source anonyme, leNecrologium la date au20 avril et fasse débuter son règne au11 janvier. Des rumeurs font état d'un empoisonnement par Martine, sans qu'il soit possible de confirmer une telle hypothèse, mais les chroniqueurs sont nombreux à la relayer, dont Théophane le Confesseur,Jean Zonaras,Léon le Grammairien ouMichel Glycas, certains accusant également le patriarchePyrrhus de Constantinople.Andreas Stratos souligne que Philagrios, lesacellaire et principal ministre de Constantin, a pu diffuser une telle rumeur avant même la mort de l'empereur, alors souffrant. Il l'aurait fait pour garantir sa place et celle des fils de Constantin face aux ambitions de Martine. Nicéphore de Constantinople écrit par ailleurs que Constantin aurait également anticipé sa propre mort en confiant une importante somme d'argent à Valentin pour qu'il l'utilise pour garantir le soutien de l'armée à sa famille. Il n'est toutefois pas possible d'être certain de ces affirmations[48],[35]. Néanmoins, la mort de Constantin ouvre de nouveau la querelle successorale au sein de la famille d'Héraclius puisqu'elle oppose désormais Martine et Héraclonas àConstant II, le jeune fils de Constantin qui devient très vite le candidat des opposants à Martine, dont Valentin[49]. Quant à Constantin, il est enterré dans la nécropole impériale de l'église des Saints-Apôtres de Constantinople, dans un sarcophage blanc demarbre du Proconnèse, aux côtés de son père[50].
Constantin III se marie en630 avec sa cousine germaine,Gregoria Anastasia, fille deNicétas et de sa tante Grégoria. Cette union est sûrement à l'instigation d'Héraclius qui souhaite renforcer l'influence de sa famille sur les institutions impériales, même si la proximité familiale entre les époux est susceptible de susciter une opposition, en écho avec sa propre union avec Martine[51]. Ensemble, ils ont au moins deux fils : Héraclius (né le), qui devientConstant II quand il est couronné co-empereur en 641 et Théodose, futur général et haut dignitaire de l'Empire, tué par son frère vers 660[52].
Théophane mentionne Constantin III comme coempereur avec son père, puis comme unique souverain après la mort d'Héraclius. Il relate également son bref règne (environ trois mois en 641) et les rumeurs selon lesquelles il aurait été empoisonné par Martine, sa belle-mère, pour préparer le terrain à son fils Héraclonas[54]. LeBréviarium deNicéphore offre un avis succinct sur l'accession au trône et la mort de Constantin et souligne souvent les intrigues de la cour et les ambitions de Martine[55].John Julius Norwich décrit avec vivacité Constantin III comme une« figure tragique » éclipsée par l’héritage de son père et détruite par les« intrigues venimeuses » de Martine[56].
↑Justin Sabatier,Description générale des monnaies byzantines frappées sous les empereurs d'Orient depuis Arcadius jusqu'à la prise de Constantinople par Mahomet II,vol. 1, Rollin et Feuardent,,p. 4-5.
↑Constantin Zuckerman, « La formule de datation du SBVI8986 et son témoignage sur la succession d'Héraclius »,The Journal of Juristic Papyrology,vol. 25,,p. 187-201
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