
Leconceptisme,conceptismo enespagnol, est un style littéraire caractéristique de lalittérature baroque espagnole de la fin duXVIe au XVIIe siècle et dontAlonso de Ledesma fut l'initiateur.Francisco de Quevedo en a été le plus grand représentant[1].
L’écrivain jésuiteGracián l'a théorisé, dansAgudeza y arte del ingenio (Art et figures de l’esprit,1647, tout à la fois traité théorique de poétique conceptiste et anthologie de cette esthétique), comme : « Un acte de l’entendement qui exprime la correspondance entre les objets ». Ce mysticisme de pensée, dont le principal représentant fut le poèteQuevedo, se caractérise par un rythme rapide, un vocabulaire simple et direct, desmétaphores pleines d’esprit et des jeux de mots. Cette école avait surtout ses adeptes dans la chaire chrétienne.
S’opposant à un autre style littéraire baroque espagnol, lecultisme (culteranismo), le conceptisme vise à détourner le langage au service d’un raisonnement rigoureux et d’une pensée subtile et extrêmement ingénieuse. Il s’agit, pour l’essentiel, d’établir élégamment et de la façon la plus condensée possible des rapports inattendus entre les objets, en tenant que « ce que la beauté est pour les yeux, l’harmonie pour l’ouïe, le concept l’est pour l’entendement » (Gracián).
Laconique et sentencieux, le style conceptiste se caractérise par la concision de l’expression et l’intensité sémantique des mots, qui sont chargés de significations, en adoptant plusieurs sens. De cette manière, le langage apparaît fréquemment polysémique. Le conceptisme opère avec les signifiés des mots et avec les relations ingénieuses entre eux. Ses ressources formelles les plus fréquentes sont l’ellipse, lezeugma, lapolysémie, l’antithèse, l’équivoque, leparadoxe, laparonomase.
Tout comme le cultisme ou le gongorisme, le conceptisme propose comme valeur esthétique, dans la ligne de l’esthétiquemaniériste et baroque tout entière, la difficulté du langage littéraire, qui vise à s’épurer en vue de se distinguer de la langue qu’elle a héritée de laRenaissance et qu’elle perçoit comme vulgaire. Il en résulte une évolution vers un art intellectuel préconisé par le maniérisme qui marque l’épuisement des modèles classiques de la prose et du vers établis par la Renaissance. L’instauration de nouveaux canons esthétiques prescrits par laContre-Réforme auConcile de Trente qui souhaitait éviter l’accès du peuple à la culture a également joué un rôle.
À la différence de l’esthétique conceptuelle du cultisme, procédant par amplification d’un minimum de pensées dans un maximum de formes labyrinthiques qui impressionnent et désorientent les sens, et qui s’exerce principalement au travers de laversification, le conceptisme choisit, afin de compliquer son message, de concentrer un maximum de pensée dans un minimum de formes et opte prioritairement pour laprose.
Les conceptistes, par leurs excès, provoquèrent de la part descultistes (au style caractérisé par la prolifération desmétaphores les plus étranges, lespointes, les jeux de mots purement ornementaux allant jusqu’auxcalembours), une réplique portée à son incandescence par le poèteGóngora, le grand rival personnel de Quevedo, qui ajouta encore à la confusion, fatale au bon goût, dans laquelle tomba lalittérature espagnole auXVIIe siècle.
Machado s’est montré très critique envers le défaut de substance tant du cultisme que du conceptisme, qu’il a caractérisé comme double expression d’une même indigence.