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967–1314
| Statut | fief mouvant de la |
|---|---|
| Capitale | Troyes |
| Langue(s) | Latin médiéval Ancien français Champenois |
| 1102 | Fusion des comtésde Meaux etde Troyes |
|---|---|
| 1314 | Intégration audomaine royal |
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Lecomté de Champagne est uneprincipauté féodale duroyaume de France. Ce comté parfois également nommé« Comté de Champagne et de Brie » issu de la réunion des différentes terres de la dynastie desThibaldiens, c'est-à-dire la branche issue de Thibaut « le Tricheur » (ThibaudIer de Blois) :comté de Meaux,comté de Troyes.
Le comté de Champagne est rattaché audomaine royal par le mariage deJeanne de Navarre, comtesse de Champagne, et du futurPhilippe IV le Bel en 1284.
Fonctionnaires de la cour d'Austrasie et comprenait les villes de Reims et Châlons.
Entre 900 et 950, le comté de Troyes est unhonor (charge publique) qui se revendique souvent par les femmes[1].
ThibautIer de Champagne. Il est le premier à s'intitulercomte de Champagne après avoir conquis le comté de Troyes à son neveuEudes III de Troyes vers 1065.
HuguesIer de Champagne (†1126), fils deThibaut III de Blois.
En1152, à la suite de la mort du comteThibaut IV de Blois dit Thibaut le Grand ou Thibaut II de Champagne, le comté de Blois-Champagne est divisé en trois comtés autonomes :HenriIer le Libéral, fils aîné deThibaut IV, reçoit laChampagne et laBrie ; les fils cadets,Thibaut V de Blois etÉtienne de Sancerre, reçoivent respectivement les terres deBlois et les terres deSancerre.
Le comte de Champagne était l'un des sixpairs laïcs primitifs. Les différentes circonscriptions du comté de Champagne relèvent duroi de France, du duc de Bourgogne, de l'archevêque de Reims, de l'archevêque de Sens, de l'évêque de Langres, de l'évêché deChâlons-en-Champagne, de l'abbaye de Saint-Denis, etc.

En 511, lors du partage de laGaule entre les quatre fils deClovis, ce territoire est, avec celui de la futureLorraine, au cœur de l'Austrasie, constituée au profit de l'aîné,Thierry. En 566, le neveu deThierry,Sigebert Ier, priveReims du statut de capitale au profit deMetz. Déjà cinq ans plus tôt, en 561, à la mort du cadetClotaire le Vieux, le fils de celui-ci,Gontran, obtient le rattachement duTroyesaustrasien à laBourgogne. Avec leBrenois, leBlaisois, leBolesnois et leBarrois (celui d'Arc et non deBar-le-Duc, qui n'existait pas sous ce nom à l'époque), il y restera jusqu'aupartage de Verdun en 843 puis intégré au sein de laBourgogne franque.
En 837,Aleran,comte de Troyes fonde l'abbaye deMontiéramey. En 852,Charles le Chauve confie le comté àEudes. De 843 à 855, le territoire champenois, excepté donc cette partie deBourgogne qu'est alors lecomté de Troyes, est inclus à la suite dutraité de Verdun dans l'éphémèreFrancie médiane puis, en vertu dutraité de Prüm dans la tout aussi éphémèreLotharingie. En 858, c'est l'archevêque de ReimsHincmar qui met un terme à l'invasion de laFrancie occidentale parLouis le Germanique. Lecomté de Troyes est alors confisqué àEudes, qui a soutenu l'Empereur. En 870, letraité de Meerssen donne le reste du territoire champenois restélotharingien àCharles le Chauve, roi deFrance (« Francia »), la séparant ainsi définitivement de la futureLorraineimpériale avec laquelle elle formait la premièreAustrasie.
En 871,Eudes de Troyes récupère légalement lecomté de Troyes qui avait été confisqué à son pèreEudes. Par le mariage de son frère,Robert Porte Carquois, qui lui succède à sa mort en 876, avecGisèle, lescomtes de Troyes entrent dans une alliance royale.Adalelme, le neveu deRobert Porte Carquois, dont la femme est morte prématurément sans laisser d'enfants, lui succède. En 894,Adalelme meurt à la guerre aux côtés de son frèreAdémar d'Angoulême et lecomté endéshérence revient légalement à son suzerain,Richard le Justicier,duc de Bourgogne.
En cette fin duIXe siècle, l'antiquecité melde, comme elle avait appartenu àSoissons, appartient aucomte de Vermandois, lenivelonideThierry. Son héritier,Herbert de Vermandois, petit-fils parson père duroi carolingien des Lombards déchuBernard, étend son territoire jusque sur leVexin pour faire face à l'invasion normande. En 925,Herbert II, le fils d'Herbert de Vermandois, investit Reims et crée uncomté de Reims au profit de son fils de cinq ans,Hugues. Six ans plus tard, l'usurpateurRaoul l'en chasse une première fois. En,Hugues, désormais majeur et aidé de son père, reconquiert leRémois puis leRethelois, érigé encomté parArtaud de Reims, l'archevêque de Reims déchu, comme une position de repli défendue par le neveu de ce dernier,Manassès. Six ans plus tard,Hugues de Vermandois, son père ayant été pendu trois ans plus tôt, peine infamante, doit de nouveau renoncer àReims à la suite de l'intervention de l'EmpereurOtton, venu avec les troupes deConrad de Bourgogne restaurerLouis d'Outremer sur le trône deFrancie occidentale.
En 950, un des petits-fils d'Herbert,Robert de Meaux, épouse la petite fille deRichard le Justicier, Adélaïde, dite Werra. À la mort de son beau pèreGilbert,comte principal des Bourguignons, en 956, il en hérite lecomté de Troyes, qui se trouve désormais réuni aucomté de Meaux qui lui était échu comme sa part d'héritage dix ans plus tôt. En 984, le fils deRobert,Herbert de Troyes, héritant de son oncleHerbert d'Omois, récupère l'Omois et agrandit le domaine familial ducomté de Reims dont son autre oncle,Hugues de Reims, avait été dépossédé par l'Empereur au profit de l'archevêque de Reims.
En dépit de cette instabilité aristocratique, à l'aube du millénaire, l'école cathédrale dechapitre de Reims, dontGerbert d'Aurillac estécolâtre de972 à982, devient un centre intellectuel de premier plan. En moins d'un siècle et demi, lesVermandois herbertiens ont rassemblé les trois comtés fondamentaux de la future Champagne. Deux générations plus tard, l'un de leurs héritiers va s'efforcer de les dominer à lui seul.

En 1021,Eudes de Blois, héritier naturel du titre de son grand oncle, lecomte de Reims, frère desa grand-mère paternelle, hérite en outre de son cousin germainÉtienne deVermandois, sans descendance, descomtés deTroyes,Meaux,Omois etVitry. Lecomte palatinEudes est le petit-fils deThibaud de Blois, rival en son temps dumarquisHugues le Grand, et qui s'était proclamé gouverneur deNeustrie affranchi de tout suzerain[5]. Thibaud avait vu sa prééminence éphémère sur laFrancie occidentale ravie par le fils d'Hugues le Grand,Hugues Capet, reconnu en 960duc des Francs par soncousin germain, leroiLothaire. La réunion du futur territoire de la Champagne dans la main d'unthibaldien menace lecapétienRobert le Pieux.
Deux ans plus tard l'archevêque de Reims,Ebles de Roucy, pousse le roi à saisir au profit de l'archevêché letemporel ducomté de Reims. Lacommise est prononcée sans que personne ait les moyens de la faire appliquer mais cela suffit pour obliger lesvassaux à prêterhommage à l'archevêque, élevé au rang depair en 1060. Comme l'atteste un siècle plus tard la « grande charte champenoise », la mainmise ecclésiastique sur la partie nord de la Champagne la voue à laviticulture, spécialité confiée aux monastères, non seulement parce qu'ils fournissent levin de messe, dont le marché annuel fait l'objet de contrats très importants, mais aussi parce qu'ils valorisent des terres inadaptées à la culture du blé.
L'immensediocèse rémois, parce que les possessions ecclésiastiques y sont considérables, échappe ainsi durablement avec la ville dusacre à la future maison de Champagne. Celle-ci doit se contenter de réunir lecomté de Meaux etcelui de Troyes, qui ne sont reliés que par le bourg deDouze Ponts. Le titre decomte de Champagne pour désigner la suzeraineté sur cet ensemble est attesté à partir de 1065, à l'époque du petit-fils d'Eudes de Blois,Eudes de Champagne, puis de l'oncle de celui-ci,Thibaud de Blois, après qu'il a spolié son neveu. L'usage est probablement antérieur mais n'est pas documenté. Il est repris en 1102 par le benjamin d'Eudes de Champagne banni,Hugues de Champagne, lequel, déshéritant son propre fils, le transmet en 1125 au petit-fils du même oncleThibaud de Blois,Thibaud le Grand, dont le cadet,Étienne de Blois, deviendraroi d'Angleterre.
Pour autant, lecomte de Champagne exerce son influence sur lerémois en manœuvrant ses alliances, comme en 1107 quand il annule l'investiture deGervais de Rethel à l'archevêché de Reims décidée par leroi.
Thibaud le Grand est le fils d'Adèle de Normandie, sœur duroi d'AngleterreHenri et femme savante qui illustre le règne des femmes provoqué par le départ des maris encroisade et la naissance de lasociété courtoise. Elle exerce larégence sur le double domaine de laMaison de Blois, val deLoire et Champagne, jusqu'en 1120. C'est l'époque où, lesjuifs bénéficiant en Champagne d'une relativetolérance, prospèrent lestossafistes.
Émancipé,Thibaud le Grand jouit d'une administration sans égale et d'un réseau d'alliés fiable qui lui permet d'étendre sa suzeraineté sur de nombreuses seigneuries dans lediocèse de Reims et sur le port clef deNogent. Il négocie avec l'abbaye de Saint-Denis les donations defiefs qu'elle ne maîtrise plus depuis lesinvasions normandes mais qui fournissent de nouveauParis en blé. En 1129, auconcile de Troyes, il fonde avecHugues de Payns l'ordre du Temple, qui devient en quelques décennies le premier réseau bancaire. AvecPierre Abélard, il fonde la même année une abbaye de prestige, leParaclet. Sous la direction d'Héloïse refondant la liturgie, l'abbaye devient le premier centre de production musicale de son temps et la première école pour femmes.
Ce n'est qu'à la génération suivante, en 1152, à l'avènement de son fils aînéHenri le Libéral, que la Champagne devient un état distinct, ledomaine de Blois revenantau cadet.

Henri le Libéral recueille le bénéfice des alliances de sa mèreMathilde de Carinthie avec les cours les plus importantes et plus encore des institutions mises en place en 1147 par son pèreThibaud le Grand :
Elles contribuent à faire de la Champagne la province la plus prospère de l'époque. Six fois plus populeuse qu'aujourd'hui,Provins est alors la troisième ville deFrance, aprèsParis etRouen. Lecomte de Champagne est plus riche que sonsuzerain, leroi de France. À la cour de larégenteMarie de France,Chrétien de Troyes,Gace Brulé,Gautier d'Arras,Guyot de Provins,Huon d'Oisy,Geoffroi de Villehardouin, abandonnant lelatin aux moines, font émerger, un siècle après l'exemplenormand deTurold comme en écho à leur contemporaine lapoétesse Marie, une littérature en langue vulgaire. Au sein d'une population renouvelée par un développement démographique exceptionnel, ils diffusent le standard linguistique de lavallée de la Loire dont sont originaires leurs princes et repoussent sur les marges du domaine duchampenois les languespicardes etwallonnes qui partagent le territoire de l'ancienneBelgique.
Le fils aîné du comte et de la comtesse,Henri, est élu en 1192roi de Jérusalem. En 1201, le neveu et successeur de celui-ci,Thibaud le Chansonnier, hérite de son père mort quelques jours avant sa naissance lapairie de France et de sa mère leroyaume de Navarre. C'est à celle-ci qu'échoit, trois ans après la mort deMarie de France, larégence. Elle fixe àProvins sa résidence et celle de ses successeurs. La capitale comtale devient une ville spécialisée dans le « ners de Provins », étoffe delaine produite par les innombrablesmoutons de la « Champagne pouilleuse », puis teinte en noire dans leDurteint et certifiée par lesceau de la corporation des maîtrestisserands. Elle devient aussi la capitale de la mode, qui est dessinée enItalie et portée tant à la cour qu'à la ville.
Lesguerres de succession de Champagne provoquent en 1226 l'érection d'une des plus formidablesenceintes fortifiées de l'époque, lerempart de Provins, achevé dix ans plus tard. La succession réglée en 1234, la prospérité revient au prix d'unedévaluation de lalivre deProvins. En 1254, la cour de la régenteMarguerite de Bourbon, troisième femme de feuThibaud le Chansonnier, reçoit, dit la tradition,Robert de Brie de retour decroisade, lequel a dans ses bagages un plant derose de Damas. Desboutures ducultivar odorant sont remises auxnobles visiteurs et se diffuse dans toutes les cours d'Europe.
En 1276,Blanche d'Artois, belle fille de feueMarguerite de Bourbon, veuve depuis deux ans etrégente à son tour, épouseEdmond de Lancastre. Prince consort pendant huit ans, c'est ce frère duroiÉdouard qui décide de porter sur sesarmes larose de Provins, que la secondeMaison de Lancastre prendra en 1485 comme emblème de sa victoire contre laMaison d'York à la fin de laguerre des Deux-Roses, larose de Lancastre.

La Champagne est réunie audomaine royal à la suite du mariage prononcé le entreJeanne de Navarre et le futurPhilippe le Bel, prince de seize ans qui accèdera autrône de France l'année suivante. Le comté de Champagne conserve une existence juridique jusqu'à la mort de celui-ci, en1314, et c'est son filsLouisX le Hutin, en tant qu'unique héritier tant du trône que de la principauté champenoise, qui rattache cette dernière au domaine royal. Auparavant, le gouvernement dePhilippe le Bel s'empressa, pour renflouer les caisses du royaume en déficit, de ruiner le commerce champenois, non seulement en spoliant et détruisant le principal réseau bancaire sur lequel il s'appuyait, l'ordre du Temple, mais en décrétant des impôts successifs pour les nombreuxjuifs champenois :25 000 livres comme « don de joyeux » pour fêter son avènement en 1285 ; destailles arbitraires en 1288, 1291, 1293, 1296 ; une taille majorée de 14 % en 1298 ; de nouveau des tailles confiscatoires en 1299, 1300 et 1301.
Cependant, avec l'extinction descapétiens directs, si le trône revient àPhilippe VI de Valois, le comté de Champagne tout comme le royaume de Navarre reviennentde jure àJeanne II. Néanmoins, Philippe VI ne souhaite pas laisser sa cousine trop puissante etlui retire le contrôle du comté de Champagne et de Brie. En avril1328, le grand conseil, assemblé àSaint-Germain-en-Laye, adoube la décision du roi[6],[7].
Jules Viard[8] décrit cette ultime union ainsi : « Les droits queJeanne tenait de sonaieule et de sonpère ne s’étendaient pas seulement sur la Navarre, mais encore sur la Champagne et la Brie. Ces deux provinces formaient comme le prolongement de l’Île-de-France vers l’est, c'est-à-dire vers l’Empire, et leur rattachement au domaine royal accroitrait sa force en même temps que se sécurité. AussiPhilippe le Long, par les traités du 17 juillet 1316, du 27 mars 1318[9]etCharles IV le Bel, par des lettres du mois de janvier 1328[10],[11], avaient-ils cherché par d’habiles transactions à ménager leur réunion à la couronne ;Philippe de Valois n’eut qu’à suivre leurs traces. Les négociations furent longues et de nombreux pourparlers eurent sans doute lieu, car ce fut seulement le 14 mars 1336 qu’àVilleneuve, près d’Avignon, le traité définitif de l’abandon de la Champagne et de la Brie au roi et à ses successeurs fut conclu. En échange de ces provinces, Philippe VI donnait à Jeanne, reine de Navarre, et àson époux :
Ils tiendraient le tout de la couronne de France en baronnie et pairie, à une foi et hommage avec les comtés d’Angoulême et de Mortai. Ainsi fut accomplie la réunion irrévocable de la Champagne et de la Brie à la France, un peu plus de cinquante ans après quePhilippe III le Hardi l’avait préparée par le mariage de son filsPhilippe le Bel, avecJeanne, reine de Navarre et comtesse de Champagne et de Brie. »
La Champagne, épargnée dans un premier temps, est profondément touchée à partir de 1358 par laguerre de Cent Ans, dont elle devient un des principaux champs de bataille parcourus par lesroutiers. Le, les mercenaires d'Étienne Marcel etCharles de Navarre renforcés deJacquesassaillent Meaux[12]. Sept milleJacques sont jetés dans laMarne etMeaux est incendiée par lescroisés ducaptal de Buch[13]. Les pillages sont perpétrés loin dans les campagnes, comme àNogent[14], incendié l'année suivante au terme d'unechevauchée duroiÉdouard. Le àChaudefouace, lagrande compagnie deBrocard de Fenestrange et la milice de l'évêque de TroyesHenri de Poitiers repoussent les troupes anglaises d'Eustache d'Abrichecourt dansNogent etPonts.
Le front se déplace à travers la Champagne. Lesgranges, usines agricoles qui rassemblent matériels et personnels, sont incendiées, les bâtiments isolés qui pourraient servir de bastions sont rasés[15], les campagnes désertées, la population qui survit à lapeste noire se réfugie dans les villes, la circulation des marchandises et des personnes devient très risquée, la production agricole s'effondre et fait place à une économie de guerre. De 1417 à 1433, la capitale comtale est occupée par l'armée anglaise. Letraité de Troyes signé en 1420 ne fait que figer la situation et n'apporte pas la paix.

Une partie du village deDomrémy — village natal deJeanne d'Arc — dépendait de lachâtellenie de Gondrecourt enBarrois mouvant, tandis que l'autre partie relevait du comté de Champagne.
La richesse du comté fut développée par lesfoires de Champagne dont la sécurité était garantie par ses comtes. Le conduit royal de1209, accordé parPhilippe Auguste, élargit encore le rayonnement de ces foires. Celles-ci forment désormais un ensemble cohérent, qui attire lesItaliens aussi bien que lesFlamands. Le conduit royal les assure que tout tort qui leur serait causé serait tenu pourlèse-majesté et pris en compte par la justice royale[16].
Le pouvoir s'organisait autour d'un certain nombre de charges comme :