Pour les articles homonymes, voirVincent.
| Naissance | Ingré |
|---|---|
| Décès | Paris |
| Nationalité | Française |
| Profession | Neurobiologiste, résistant(d),neurologue et neurochirurgien(en) |
|---|---|
| Distinctions | Commandeur de la Légion d'honneur etmédaille militaire |
Clovis Julien Désiré Vincent, né le àIngré (Loiret) et mort le dans le13e arrondissement de Paris[1], est unneurologue etneurochirurgienfrançais. Il a été avecThierry de Martel (1875-1940) l'un des fondateurs de la neurochirurgie enFrance[2].
Issu d'une famille demédecins, Clovis Vincent est admis à l'Internat des hôpitaux de Paris en 1903 et en gagne laMédaille d'Or en 1909. Élève du professeurFulgence Raymond, le successeur deJean-Martin Charcot, et d'Achille Souques, il a la plus grande admiration pourJoseph Babinski dont il reprendra la notion depithiatisme pour désigner lestroubles fonctionnels sans lésions organiques. En1910, il soutient sa thèse de doctorat sur lesméningites chroniques syphilitiques devant les professeursAnatole Chauffard,André Broca etHenri Claude en1910. Il devient médecin deshôpitaux de Paris en1913.
En août1914, lorsque laPremière Guerre mondiale éclate, il estmédecin aide-major de2e classe dans un corps de brancardier divisionnaire affecté au46e régiment d'infanterie. Finfévrier 1915, il participe à labataille de Vauquois.« Officier admirable et admiré de tous », Il reçoit laLégion d'honneur à titre militaire[3] et lamédaille militaire en 1915.
En novembre 1915, il est nommé médecin-chef du Centre neurologique de la9erégion militaire, installé dans les bâtiments dulycée Descartes àTours.
Les soldats frappés d'obusite, souffrant de ce que l'on nomme aujourd'hui detrouble de stress post-traumatique, étaient, selon la terminologie deBabinsky, qualifiés de « pithiatiques »[4] : sans aucune lésion organique, les paralytiques et les plicaturés n'étaient que des simulateurs qui s'ignoraient. Pour les soigner, Clovis Vincent met au point un « traitement faradique », plus communément appelé « torpillage »[5] :« Le mottorpillage n'a pas été trouvé par moi », écrit-il en 1916,« ce sont les premiers poilus que j'ai traités et guéris [...] qui ont dit : « Ça vous retourne comme une torpille ». Le mot lancé par eux s'est transmis ensuite de poilus à poilus. »[6] Des chocs électriques de 60 milliampères, mais pouvant aller jusqu'à 100 mA, sont infligés aux soldats plicaturés. Cette pratique, qui sera plus tard qualifiée de« torture »[7], aura beaucoup de succès auprès des autorités militaires qui souhaitent la généraliser dans tous les autres centres : seuls les centres neurologiques de Lyon et de Montpellier, respectivement dirigés par les docteursPaul Auguste Sollier etJoseph Grasset, refuseront de l'employer. Afin de montrer l'efficacité de la méthode, laSection photographique et cinématographique des armées (SPCA) tournera un film intitulé :Les progrès de la science française au profit des victimes de la guerre, une grande découverte du docteur Vincent[8].
Le 27 mai 1916, lors d'une séance de « torpillage », lezouave Baptiste Deschamps[9] frappe à plusieurs reprises Clovis Vincent et lui fracture le nez[10]. Clovis Vincent réplique et passe à tabac le soldat : cet épisode lui vaudra le surnom de« médecin-boxeur ». Il s'ensuit un procès retentissant, convoqué le1er août 1916 au conseil de guerre de Tours, que la presse relate en ces termes :« Un soldat peut-il refuser de se faire soigner ? »[11]. L'avocatPaul Meunier défend Deschamps. Le docteurEugène Doyen témoigne contre la pratique dutorpillage. Baptiste Deschamps est finalement condamné à six mois de prison avec sursis. Toutefois, dans son jugement, le tribunal précise que« M. Clovis Vincent a eu tort detorpiller Deschamps par la violence ». Paul Meunier est satisfait :« On peut être tranquille maintenant ; Deschamps ne sera pas torpillé, et nul autre blessé, grâce à lui, ne sera plus jamais torpillé, au moins contre sa volonté »[12]. Désavoué, Clovis Vincent demande à retourner sur le front : il sera affecté, comme médecin-chef, au44e bataillon de chasseurs à pied, puis dans le98e régiment d'infanterie et participera à la bataille de la cote 304 et celle duMort-Homme en août 1917.
En1928, dans un texte célébrant lecinquantenaire de l'hystérie[13],André Breton évoquera cette affaire :« Où sont les zouaves torpillés par leRaymond Roussel de la science, Clovis Vincent ? »
En1927, il se rend àBoston avecThierry de Martel afin de rencontrerHarvey Cushing, pionnier de laneurochirurgie. Le professeur Cushing affirmera plus tard, en parlant de Clovis Vincent,« avoir vu opérer le meilleur neurochirurgien du monde »[14].
En1933, il fonde le Centre neurochirurgical de La Pitié-Salpêtrière.
Le 19 décembre 1937, le professeur Clovis Vincent tente à Paris une intervention chirurgicale sur le cerveau deMaurice Ravel dans l'hypothèse d'une atteinte tumorale[15],[16]. Le compositeur se réveille un court moment après l’intervention, puis sombre définitivement dans le coma et meurt quelques jours après.
Le, lors de l'entrée des troupes allemandes dansParis, tandis que son ancien collaborateurThierry de Martel se suicide,« il descend dans la rue le fusil à la main. »[17].
À partir de1942, avecRobert Debré etPaul Milliez, il collabore à la mise en place duComité médical de la Résistance (CMR)[18] qui est présidé par le professeurLouis Pasteur Vallery-Radot[19].
Clovis Vincent est le parrain de l'historienne et psychanalysteÉlisabeth Roudinesco[20] : sa mèreJenny Roudinesco, membre duComité médical de la Résistance, avait notamment été son interne.