Pour les articles homonymes, voirLanzmann.
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| Archives conservées par | Service historique de la Défense (GR 16 P 337295) |
Claude Lanzmann est unjournaliste,écrivain,cinéaste etproducteur de cinémafrançais, né le àBois-Colombes et mort le dans le12e arrondissement de Paris[1],[2].
Ancienrésistant, il est notamment leréalisateur deShoah,film documentaire monumental consacré à l’extermination des Juifs d'Europe par lesnazis, inscrit en mai 2023 au registre de laMémoire du monde de l'UNESCO. Collaborateur de la revueLes Temps modernes à partir de 1952, il en est le directeur de 1986 à sa mort en 2018.
Alors que sa famille a des originesjuives, Claude Lanzmann grandit« [sans] l'ombre d'une quelconque éducation juive que ce soit, ni religieuse, ni culturelle », avant de découvrirIsraël en 1952 et d'y être« viscéralement attaché ».
Claude Lanzmann est né dans une famille dont les différentes branches sont originaires des communautés juivesashkénazes, immigrées en France à la fin duXIXe siècle[3].
La famille de son grand-père paternel, Itzhak Lanzmann, vient d'unshtetl près deMinsk enBiélorussie. Prenant le prénom de Léon, il épousa à Paris Anna, venant deRiga et devint marchand en mobilier ancienrue Drouot. De leur union naît en 1900, Armand, père de Claude Lanzmann[4]. Itzhak naturalisé en 1913 sera versé dans l'infanterie de1re ligne entre 1914 et 1918.
Sa mère, Pauline, dite Paulette, Grobermann (1903-1995) est née sur un navire entreOdessa etMarseille : ses parents, Yankel et Perl Grobermann, sont originaires deKichinev, enBessarabie. Établis en région parisienne, ils créent une affaire de brocante, puis deviennent antiquaires pendant laPremière Guerre mondiale, fournissant les jeunes studios américains en décors[5]. Ils élèvent leurs enfants« [sans] l’ombre d'une quelconque éducation juive que ce soit, ni religieuse, ni culturelle »[6]. Ce n'est qu'en 1952 que Claude Lanzmann découvreIsraël et s'y sent depuis« viscéralement attaché »[7].
En 1934, à la suite du divorce de ses parents, Claude, son frère cadetJacques (écrivain, scénariste et parolier) et sa sœur Évelyne (Évelyne Rey, actrice de théâtre), emmenés par leur père, vont vivre àBrioude, enHaute-Loire[8]. Ils y restent jusqu'en septembre 1938 ; lorsque la famille retourne à Paris, Claude poursuit ses études aulycée Condorcet[9], où il découvre l’antisémitisme[10].

En, son père, ancien combattant engagé volontaire en 1917, gazé àYpres fut « affecté spécial » de la défense nationale à Brioude. Là, il entraîne ses enfants à disparaître sans laisser de traces, en simulant des rafles de laGestapo ou de laMilice. Il enseigne à ses enfants la méfiance et le « pessimisme actif »[11].
À la rentrée 1943, Claude entre enlettres supérieures (hypokhâgne) aulycée Blaise-Pascal deClermont-Ferrand comme interne. À 18 ans, il devient membre desJeunesses communistes (alors clandestines) et l’un des organisateurs de la Résistance de Clermont-Ferrand. Il participe à la lutte clandestine, puis aux combats des maquis d’Auvergne à laMargeride, aumont Mouchet, aux embuscades dans leCantal et dans laHaute-Loire, pour retarder la remontée des troupes allemandes vers laNormandie, lors de l'été 1944[12]. Il fut homologué FFI pour la période du 2 avril au 22 août 1944 passée au sein des Mouvements unis de la Résistance, FFI d'Auvergne, une des unités combattantes reconnues dans le Puy-de-Dôme[13].
Après la Libération, sa famille revient vivre à Paris. Lanzmann, qui a retrouvé sa mère et le compagnon de celle-ci,Monny de Boully, est admis en enpremière supérieure (khâgne) aulycée Louis-le-Grand. Il y rencontreJean Cau, avec qui il noue une grande amitié. Ayant échoué au concours d'entrée à l'École normale supérieure, il s'inscrit en licence de philosophie à laSorbonne. Il choisit les « possibles et lesincompossibles » chezLeibniz comme sujet de sondiplôme d'études supérieures[14].
En 1947, sur les conseils de son amiMichel Tournier, Claude Lanzmann étudie la philosophie à l'université Eberhard Karl de Tübingen, enAllemagne :il veut voir « les Allemands en civil »[réf. souhaitée]. Puis, en 1948, il obtient un poste delecteur à l'université libre de Berlin, en secteur américain[15].
Claude Lanzmann se découvre des talents et un goût de pédagogue, comme il le dit,« mêlant en une torsade uniqueLe Rouge et le Noir etL'Être et le Néant ». La parution desRéflexions sur la question juive deSartre en 1947 fut pour lui un événement fondateur et devient le fondement d'un séminaire sur l'antisémitisme qu'il organisa à la demande des étudiants. Il se convainc que les thèses de Sartre doivent être dépassées, ce qui sera l'une des raisons de son premier voyage en Israël en 1952. Voulant dénoncer la faiblesse de ladénazification au sein de l'université, il publie en 1949 deux articles dans leBerliner Zeitung, journal de laRDA, ce qui lui vaut de quitter ses fonctions officielles[16].
À son retour en France, il devientpigiste pour le groupe de presse dePierre Lazareff, le magazineElle, créé et dirigée par son épouse Hélène Lazareff,France-Soir et son édition dominicaleFrance Dimanche. Il est aussi « nègre » et « rewriter » dans ce groupe de presse[17]. Il restera pigiste pour ce groupe pendant vingt ans, en particulier en quand il se rendra enCorée du Nord.
Il propose fin 1951 un reportage sur la vie en Allemagne de l'Est, où il part avec l’accord de Lazareff[17], en se recommandant duMonde, ramenant une dizaine d’articles que la direction deFrance-Soir refuse, "après beaucoup d’hésitations" car ce n'est "pas assez grand public" et "jugé trop favorable au bloc de l’Est"[18], mais qu'il publie finalement (L'Allemagne derrière leRideau de fer) dans le journalLe Monde en janvier 1952[17]. Il apprend par son amiJean Cau que Sartre les a trouvés intéressants et il va le voir à une conférence surKafka, où Sartre lui demande de participer aux réunions desTemps modernes, place Saint-Germain-des-Prés[17]. Cinématographique ou littéraire, la critique y est "tournante"[18].

Son premier article paraît dansLes Temps modernes. Il est titré "Sur la liberté de la presse", avec le pseudonyme de David Gruber[19],[20], car il souhaite rester rewriter àFrance-Soir, "publié aussitôt", dans le numéro d'avril. C'est une réflexion sur "la nature de la presse", inspirée par son expérience chez Lazareff et qui conclut sur "les possibilités vertigineuses de la propagande". La revueEsprit en fait un compte rendu "enthousiaste"[20]. Diplômé de philosophie, il devient l'ami deSimone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre.
Le, il publie un long article sur la fuite dudalaï-lama du Tibet, dansElle à la demande de sa fondatriceHélène Lazareff qui pressentait l'importance de l’événement[21].
Claude Lanzmann succède à Simone de Beauvoir comme directeur de la revue en1986. En 1987, il présente dansLes Temps Modernes l'attribution dumassacre de Katyń aux Soviétiques comme de la« propagande nazie »[22].
Son engagementanticolonialiste le confronte à la peine capitale. Il fait partie des dix inculpés, parmi les signataires dumanifeste des 121 titré « Déclaration sur le droit à l’insoumission dans laguerre d’Algérie », qui dénoncent la répression enAlgérie en 1960. En 1967, il prend une grande part à l'élaboration du fameux numéro desTemps modernes intituléLe conflit israëlo-arabe.
Jusqu’en 1970, Claude Lanzmann partage ses activités entreLes Temps Modernes, et le journalisme. Il écrit de nombreux articles et reportages. En 1986, après la mort de Simone de Beauvoir, il deviendra responsable de la revueLes Temps Modernes.

À partir de 1970, Claude Lanzmann se consacre aucinéma. Son premier film,Pourquoi Israël, sort en 1973 et détaille déjà la méthode Lanzmann : film mosaïque avec des entretiens originaux, où l'interviewer, Lanzmann lui-même, est autant acteur que metteur en scène.
Dès qu'il a fini ce film, Lanzmann se plonge dans ce qui va devenirShoah : il y consacre 12 ans de travail (recherche documentaire,recherche des survivants, des bourreaux, des témoins, une dizaine de campagnes de tournage et presque 6 ans de montage, avec la monteuse Ziva Postec), avant que le film ne sorte en 1985. D'une durée de plus de 9 heures,Shoah est considéré comme un monument du cinéma : sans image d'archives, il parvient à dire l'indicible sur le génocide.
Neuf ans plus tard, en 1994, sort le filmTsahal dont le questionnement est : l’armée israélienne est-elle une armée comme les autres ? Ce documentaire de 5 heures fait l'objet de vives polémiques. Il est jugé tendancieux et apologétique par ses détracteurs, qui lui reprochent notamment son manque de distance vis-à-vis du discours tenu par l'armée israélienne sur elle-même, ainsi que son silence au sujet de la guerre du Liban — un conflit qui a pourtant suscité de vifs débats en Israël même[23],[24]. Pour la sortie en DVD du film en 2008, l'anniversaire des 60 ans de l'État d'Israël, Lanzmann tourneLights and Shadows, un entretien d'une quarantaine de minutes avecEhud Barak.
Pour réaliserShoah, Lanzmann a tourné 350 heures de film entre 1974 et 1981[25]. La quasi-totalité des rushs exploitables (approximativement 220 heures) sont disponibles à l'USHMM. Plus tard, à partir de ces rushs non utilisés dansShoah et d'images tournées spécifiquement pour les films, Claude Lanzmann a réalisé quatre films autour de quatre personnages : Maurice Rossel (dansUn vivant qui passe en 1997),Yehuda Lerner (dansSobibor, 14 octobre 1943, 16 heures en 2001),Jan Karski (dansLe Rapport Karski en 2010) etBenjamin Murmelstein (dansLe Dernier des injustes en 2013).
En 2016, lors de la diffusion du documentaire d'Adam Benzine (en)Claude Lanzmann, porte-parole de la Shoah[26], Lanzmann, qui s'insurge contre l'utilisation par d'autres d'images qu'il n'a pas utilisées dans ses films, dit :« Je vais bientôt en sortir quatre autres[27]. » Deux de ces films sontNapalm (qui traite de laCorée du Nord, relatant des événements narrés dansLe Lièvre de Patagonie[28]), sorti en 2017, etLes Quatre Sœurs (sur les horreurs subies par quatre femmes dans les camps, notamment à cause duDrMengele[29]), sorti en 2018.

À partir de, il vit une histoire d'amour avecSimone de Beauvoir. Malgré leur rupture en 1959, il demeurera très proche d’elle jusqu'à sa mort en 1986[30].
En 1963, il épouse l'actriceJudith Magre, dont il divorce en 1971. Cette même année, il s'unit à la romancière allemandeAngelika Schrobsdorff (1927—2016)[31] puis, en 1995, il épouse Dominique Petithory.
Claude Lanzmann a deux enfants : Angélique Lanzmann et Félix Lanzmann. Ce dernier, fils de Dominique Lanzmann-Petithory, étudiantnormalien[32], est mort du cancer en 2017[33]. Une lettre à son chirurgien narrant son combat contre la maladie, suivie de quelques fragments datés, est publiée parLes Temps modernes dans un numéro qui lui est dédié[34]. Il est inhumé aucimetière du Montparnasse[35].
Claude Lanzmann meurt le à l'hôpital Saint-Antoine deParis, le lendemain de la sortie au cinéma desQuatre Sœurs. Son éditeur déclare qu'il était affaibli les derniers jours, en rajoutant que le cinéaste-journaliste était très affecté depuis la mort de son fils. Il avait fait sa dernière apparition publique à la clôture dufestival de Cannes 2018[36],[37]. Le 12 juillet 2018, Claude Lanzmann est inhumé aucimetière du Montparnasse (5e division), dans la même tombe que son fils Félix - et dans le même cimetière que Simone de Beauvoir, dont il fut le compagnon[38].
Intellectuel très engagé, Claude Lanzmann s'est retrouvé au cœur d’innombrables controverses, d'abord comme responsable de la revueLes Temps modernes, dont il a fait partie pendant 66 ans et qu’il a dirigée pendant 32 ans, ensuite comme défenseur d'Israël, de la mémoire de Sartre et des mouvements qu'il avait initiés.
Enfévrier 1987, Lanzmann écrit dans le « Rapport du maitre-forestier May », dans leno 487 desTemps modernes, que la grande majorité des historiens s’accordent sur l'absence de responsabilité soviétique aumassacre de Katyń. Il fait référence à la découverte de munitions et de revolvers allemands sur et autour des cadavres polonais, qui déclenchèrent une longue polémique autour des responsables du massacre.
En 1988, à la suite de ces écrits, Lanzmann est pris à partie parJean-François Revel dansLa Connaissance inutile qui l’accuse d’avoir des positions pro-soviétiques, dans la ligne de la fameuse apostrophe de Sartre (« il ne faut pas désespérerBillancourt ») :« L'ignorance volontaire du passé entraîne la falsification du présent. »
En 1990, les Allemands seront définitivement innocentés lorsqueMikhaïl Gorbatchev reconnaît publiquement l'implication duNKVD dans les meurtres de masse deKatyń.
Lors des événements ayant conduit à la mort d'un jeune Palestinien,Mohammed Al Durah, Claude Lanzmann réagit dans un article duMonde, en ces termes :« Ce qui me révolte personnellement dans cette histoire, c'est que cette mort a été filmée en direct par le cameraman arabe d'une chaîne française de télévision[39]. »
Dans le quotidienLibération, le, Claude Lanzmann« accuseRaymond Barre d’êtreantisémite », à la suite d'une entrevue que celui-ci a accordée àFrance Culture le, interview diffusée le[40]. Raymond Barre déclarait dans cet interview « Un attentat odieux qui voulait frapper des israélites qui se rendaient à la synagogue et qui a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic » .
Raymond Barre répond à ces critiques le même jour, surRTL :« Il y a une clique qui depuis 1979 me poursuit pour me faire apparaître antisémite[41]. »
En, Claude Lanzmann s'élève vivement contre le roman deYannick Haenel,Jan Karski, lui reprochant sa lecture biographique et les citations d'entretiens avecJan Karski pour le filmShoah.
En 2011, il publie un numéro spécial desTemps Modernes sur les anciensharkis[42], où il revient sur des propos tenus en 1961, les appelant« les chiens de l’humaniste Papon »[43],[44],[45].
En 2012, il engage la polémique avecMichel Onfray en faisant publier un véritable réquisitoire de 60 pages dans la revueLes Temps Modernes qu'il dirige.« L'objet du délit n'est ici pas son texte surJean Soler, mais surL'Ordre libertaire, ouvrage paru en janvier tout à la gloire d'Albert Camus… et très critique enversJean-Paul Sartre, fondateur desTemps Modernes[46]. »
Le, lendemain de la mort d'Elie Wiesel, Claude Lanzmann déclare à France Inter, en se référant de façon erronée[47] au livreÊtre sans destin d'Imre Kertész, qu'Elie Wiesel (contrairement à ce qu'il dit dansLa Nuit) n'a été que quatre jours à Auschwitz — en réalité, à la page 166 d'Être sans destin[48], Kertész parle de lui-même lorsqu'il écrit :
« Quel ne fut pas mon étonnement quand, par la suite, j'ai fait le compte, mais le fait était là : je n'ai passé en tout et pour tout que trois jours entiers à Auschwitz. Au soir du quatrième jour, j'étais de nouveau dans un train, dans l'un de ces wagons à bestiaux que je connaissais déjà. La destination — comme nous l'apprîmes — était “Buchenwald”. »
En outre, Lanzmann fait grief à Wiesel de ne pas l'avoir encouragé quand il lui annonça son projet de réaliser son filmShoah et de ne pas avoir accordé d'éloges à ce film après l'accueil« triomphal » (dixit Lanzmann) qu'il avait reçu[49]. Ces propos valent à Lanzmann, de la part du magazine d'orientation juive communautaireAlliance, le reproche de s'être« livré à un exercice d’ignominie, d’exécution et de petitesse consternante[50] ».
Claude Lanzmann fait l'objet d'accusations publiques dans plusieurs cas d'agression sexuelle[51].
Aucune desdites accusations n'a été avérée ni fait l'objet de poursuite.
En 2012, il a été entendu à l'aéroport, à la suite de la réaction d'une employée de sécurité de l'aéroport de Tel Aviv[52],[53], qui expliquait avoir été embrassée de force par Claude Lanzmann. Claude Lanzmann a répondu sur cet incident le lendemain même dans un article publié dansLe Monde.
Le 18 octobre 2017, au début dumouvement MeToo, la journaliste néerlandaise Joyce Roodnat raconte comment, alors qu’elle était venue interviewer Claude Lanzmann chez lui en 1985 au sujet du filmShoah, le cinéaste lui avait imposé des contacts physiques non consentis. Elle réitère ses accusations sur la chaîne de télévision néerlandaiseNPO, en ajoutant que deux autres femmes journalistes lui ont dit avoir subi les mêmes procédés de la part de Lanzmann[54],[55],[56],[57],[58].
EnAllemagne, la journaliste Natascha Freundel raconte dans un article que Claude Lanzmann a essayé de l’embrasser de force :« Après une interview, [il] a pressé ses lèvres de 84 ans sur ma bouche. C'était répugnant[59]. »
Lanzmann apparaît (en plus de son rôle d'intervieweur dans ses propres films) dans les documentaires suivants :
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