Lapercecylindrique de la clarinette la distingue duhautbois et dusaxophone, tous deux à perceconique, et lui confère une aptitude auquintoiement[note 1]. Son timbre chaud dans le registre grave, peut s'avérer extrêmement brillant voire perçant dans l'aigu.
Cet instrument est utilisé dans la musiqueclassique ettraditionnelle ainsi qu'enjazz et en musique contemporaine. Parmi les compositions célèbres pour clarinette, on peut citer leConcerto pour clarinette de Mozart.
Le musicien instrumentiste qui joue de la clarinette est appelé unclarinettiste.
W. A. Mozart, Concerto pour clarinette,3e mouvement.
Lecentre national de ressources textuelles et lexicales considère comme origine la plus probable du mot clarinette un dérivé du motprovençalclarin, désignant un hautbois primitif, dont le nom dérivait encore du mot« clar » (clair) auquel a été ajouté le suffixe -ette pour le différencier duclarino[1].
Ledictionnaire historique de la langue française reprend leclarin provençal comme source étymologique, en ajoutant qu'« une autre origine possible, avec une valeur diminutive, par dérivation declarine, « clochette à son clair au cou des animaux », est moins probable[5] ». La première mention de« clarin » est attestée en 1508, celle de« clarinette » en1753[5].
Registres de la clarinette,notes lues pour les clarinettes en clef de sol[6].
Toute la famille des clarinettes tire son origine duchalumeau français duMoyen Âge,« vieil instrument encore employé parGluck dans l’Orfeo (1764) et dans l’Alceste italienne (1766)[7] ».
François-Auguste Gevaert note que« le nom français de l'instrument est employé par les vieux compositeurs italiens sous le déguisement graphique desalmó, et par les maîtres allemands qui l'écriventChalumau etChalamaus. En allemand, de même qu'en néerlandais, le motSchalmei désigne lehautbois primitif[7] ». Aujourd'hui encore, le registre grave de la clarinette est appeléregistre du chalumeau.
C'est àJohann Christoph Denner (1655–1707), un facteur deNuremberg, que l'on devrait l'invention de la clarinette. Vers1690[8],« après dix années d'essais infructueux »[9] il ajouta au chalumeau français lepavillon et deuxclés d'importance majeure. L'ajout de la « clé de12e[note 2]», également désignée « clé de registre », permit de tirer parti de l'aptitude de l'instrument auquintoiement, que les musiciens les plus doués pouvaient provoquer par une modification de la position de l'embouchure. Le registre atteint est alors celui ditdu clairon et sa sonorité se rapproche de laclarine, petitetrompette duXVIIIe siècle, qui donna son nom à la clarinette.
À cette époque, l'instrument était manipulé via huittrous bouchés par les doigts, ce qui permettait à l'instrumentiste de jouer la gamme depuis lefa grave jusqu'ausol médium. La gamme ne se poursuivait sur le registre supérieur qu'à partir dudo, et se faisait donc avec un défaut de deux notes sur lagamme : lela et lesi étaient absents de la gamme. La deuxième clef, celle « dula », étend vers le haut le registre du chalumeau.
Lesi est obtenu par « quintoiement[10] » d'une note plus grave (lemi) grâce au pavillon prolongeant la clarinette et l'ajout d'une clef actionnée par l'auriculaire de la main gauche alors inoccupé. Il fait donc partie du registre du clairon. La gamme (diatonique) est alors complète et le changement de registre se passe sans discontinuité.
Dans l'état, l'instrument ne disposant pas d'unegamme chromatique complète, il restait prisonnier de quelquestonalités particulières. Pour y remédier, les musiciens disposaient de différents modèles de clarinettes, réalisés chacun pour unetonalité spécifique[11]. Lesaltérations pouvaient cependant être obtenues par des doigtésfourches ne permettant pas une grande virtuosité, et à la sonorité peu satisfaisante.
Entre1740 et1850, il a existé une famille de clarinettes anciennes, appeléeclarinette d'amour, réalisées dans différentes tonalités (ensol, en fa, en ré...) et dotées de 3 à 5 clés, qui possédait un pavillon en forme de poire, appelépavillon d'amour, à l'instar duhautbois d'amour, un bocal courbé et une perce réduite.
Clarinette à 13 clés par Iwan Müller, trous de tonalité avec un siège conique et tampons en cuir, inventée en 1809
Clarinette Boehm standard, avec 17 clefs et 6 anneaux, développée en 1843 et brevetée par Hyacinthe Klosé et Louis Auguste Buffet
Clarinette en système Albert, conçue vers 1850 par Eugène Albert, techniquement intermédiaire entre les clarinettes Müller et Oehler
Clarinette en système Baermann, conçue vers 1860, techniquement intermédiaire entre les clarinettes Müller et Oehler
Clarinette dite « Full-Boehm » avec 21 clés et 7 anneaux, développée en 1870 par Buffet-Crampon
Clarinette allemande 1905 (Oehler), avec 22 clefs, 5 anneaux et un plateau, avec clefs de pavillon ajoutées plus tard pour renforcer mi et fa graves
Clarinette standard allemande sans plateau, ni clef de pavillon
Clarinette en système Boehm réformé, avec 19 clefs et 7 anneaux, développée en 1949 par Fritz Wurlitzer
Différentes vues d'une clarinette à quarts de tons de Fritz Schüller (1883-1977).
En1810,Heinrich Bärmann (1784-1847) proposa le retournement du bec[12], positionnant ainsi l'anche sur la lèvre inférieure du musicien. Ceci adoucit et garantit la sonorité.Iwan (ou Ywan) Müller[13],[note 3] y apporta en treize clés supplémentaires offrant enfin lagamme chromatique complète. Ces nouveautés permirent d'abandonner peu à peu la collection d'instruments dédiés aux tonalités distinctes dont disposaient les musiciens pour interpréter les différentes pièces.
La clarinette fut amenée à son degré de perfectionnement actuel par le facteur d'instruments françaisLouis Auguste Buffet en collaboration avec le clarinettisteHyacinthe Klosé[14],[note 4]. Tous deux adoptèrent le principe des anneaux mobiles que l'AllemandTheobald Boehm avait imaginé pour la flûte : lesystème Boehm (1843). Aujourd'hui, le système Boehm est utilisé par les clarinettistes du monde entier, aux exceptions des Allemands et des Autrichiens, qui se servent pour la plupart du système concurrent : lesystème Oehler[note 5]. Un autre système à treize clés mis au point parEugène Albert auXIXe siècle, lesystème Albert, est encore utilisé de nos jours en Europe centrale et enTurquie.
Une clarinette utilisant lesystème Boehm, peut disposer de près de22 éléments mobiles utiles, auxquels il faut ajouter les paliers, lesaxes, les vis et lesressorts (ressort à aiguille, ressort à lame). L'ensemble dépasse la centaine de pièces mécaniques, et participe à la manipulation de17 tampons obturant autant d'orifices inaccessibles avec les doigts.
Le facteur allemandFritz Wurlitzer (père deHerbert Wurlitzer) a mis au point en1949 une variante de la clarinette française, qu'il a qualifiée de clarinettesystème Boehm réformé. C'est une clarinette avec un système de doigté français, dont le son est très proche de celui de la clarinette allemande à travers une perce (diamètre et profil interne du tube constituant le corps de la clarinette) différente, et un autre type debec[15]. Ce type de clarinette trouve encore des amoureux dans certains pays.
Le nombre declés annoncé par les facteurs correspond au nombre de points de commande intentionnelles (les anneaux n'en font donc pas partie puisqu'ils sont actionnés en même temps qu'un trou est bouché). La clarinette Boehm comporte donc17 clés, parfois 18 avec la clef de renvoisol/mi main gauche. Il existe deux variantes du système Oehler comportant respectivement 19 et27 clés.
La famille des clarinettes modernes est très étendue. La taille et la tonalité sont les principaux éléments différentiels. Si l'étendue de latessiture est à peu près constante, les registres de jeu sont différents.Aujourd'hui, les clarinettes suivantes sont utilisées, depuis la plus aiguë jusqu'à la plus grave, la plus utilisée restant la clarinette en sib[16] :
Rarement employée, sinon pour l'exécution desbandes militaires et orchestres d'harmonie[17] où« pratiquement, elle ne monte pas plus haut que la petite clarinette enmi[18] ». Cependant, sa sonorité criarde intéresse les compositeurs de musique contemporaine[19].
Son timbre est très caractéristique, un peu criard. Utilisée dans certaines œuvres romantiques et post-romantiques (de laSymphonie fantastique deBerlioz[20] aux symphonies deMahler[21]), encore très utilisée aujourd'hui enharmonie, sa tonalité étant très « compatible » avec la plupart des autres instruments (si principalement) ;
Un peu oubliée, après avoir été« très en honneur chez les musiciens duXVIIIe siècle,Gluck notamment[22] ». SelonHenri Büsser, elle est« legrand soprano dramatique de la belle famille des clarinettes[22] ».
sans transposition
Barbiere de Sevillia
Clarinette soprano
ensi
« Expressive,lumineuse », selonCharles Kœchlin, et« plus généralement employée que celle enla[23] ».
seconde majeure au-dessus
Beethoven 8 III
Clarinette soprano
enla
Moins brillante, plus douce, plus veloutée. Souvent présentée comme« un peu moins agile que celle ensi, quoique la différence n'est pas grande[23]… »
Clarinette enla avec une extension au do, employée presque exclusivement pour l'exécution duConcerto pour clarinette de Mozart dans sa version originale.
tierce mineure au-dessus
Rachmaninov 2 II
Clarinette de basset
ensi
Clarinette ensi avec une extension au do. L'exemple sonore est joué sur une clarinette de basset en sol.
Verdi est l'un des premiers à l'utiliser dansAïda[11]. Très utilisée pour ses notes graves où elle peut jouer« plus doux qu'aucun autre instrument à vent[26] ».
Dite aussiclarinette-pédale, parfois employée dans des orchestres symphoniques et dans l'opéra (Fervaal deVincent d'Indy, par exemple[25]).
2 octaves + seconde majeure au-dessus
Mahler 9 IV
La clarinette est uninstrument transpositeur (sauf celle en ut naturellement). Par exemple lorsqu'un musicien joue, sur une clarinette en sib, un do qu'il est en train de lire sur sa partition, le pianiste entend un sib. Cela permet de ne pas changer les doigtés principaux entre les instruments d'une même famille: ce sont les notes - et les armures - qui sont décalées sur les partitions de clarinette. Cependant, depuisSchoenberg etProkofiev, les compositeurs ont tendance« à écrire directement les sons que l'oreille perçoit » sur les partitions d'orchestre[27].
Conçu par l'acousticienCharles Houvenaghel, un prototype declarinette octo-contrebasse en métal[28] a été fabriqué en1939 parLéon Leblanc[note 6]. Cet instrument était plus grave d'une octave par rapport à la clarinette contrebasse. Elle sonnait comme un jeu d'orgue de32 pieds. Le projet, très ambitieux de par la taille de l'instrument, a été abandonné. En 1971, une clarinette octo-contralto a également été fabriquée par Léon Leblanc. Décrite et jouée par Cyrille Mercadier lors d'un concert le[29], elle est exposée avec la clarinette octo-contrebasse auMusée des Instruments à vent deLa Couture-Boussey.
Parties d'une clarinette, à gauche: bec avec ligature, baril, corps du haut; à droite: corps du bas et pavillon.Description dubec.
La clarinette ensi (mais aussi celles enla, enut, enré etmi) se présente sous la forme d'un long tuyau droit. La clarinette est généralement réalisée en bois noble tel que legrenadille ou lepalissandre (au moins pour le corps). Certains modèles, dits d'études, sont parfois moulés en plastique (Resonite, Resotone, ABS...). Dans lesannées 1930, lejazz a utilisé desmodèles en métal[note 7],[30].
En 1994, des clarinettes enmatériau composite ont fait leur apparition. Cette gamme d'instruments est développée parBuffet Crampon sous l'appellationGreen Line et fabriquée sur la base d'un matériau constitué de 95 % de poudre d'ébène et de 5 % de fibre de carbone[31]. Ces clarinettes présentent les avantages du bois sans leurs inconvénients : elles conservent la sonorité des instruments en ébène, gagnent en légèreté et sont moins sujettes aux fentes.
Lesclés sont enmaillechort (alliage à base de nickel) plaqué argent, nickel ou or.
Pour des raisons pratiques de fabrication et de transport, les clarinettes soprano (enSi,La ouUt) se composent en général de 5 éléments principaux (de haut en bas) :
lebec, saligature et l'anche fixée sur la partie inférieure du bec ;
le baril ;
le corps supérieur (ou "corps du haut") (pour la main gauche) ;
le corps inférieur (ou "corps du bas") (pour la main droite) ;
Les deux parties du corps d'une clarinette (en bois, en plastique, ou en métal) sont parfois frappées d'un numéro de série, sorte d'immatriculation de l'instrument. Cette identification permet notamment de vérifier lors de l'achat d'un instrument d'occasion que les deux éléments appartiennent bien à un instrument unique. Le baril et le pavillon n'étant pas taillés dans la même pièce de bois, et parfois même réalisés dans un autre matériau, ne sont généralement pas marqués.
Lebec (ouembouchure) est l'élément par lequel l'instrumentiste souffle l'air. Autrefois taillé dans le bois ou dans l'ivoire, il est aujourd'hui principalement moulé enébonite noire ou blanche, enplastique voire enverre (alors appelé « bec cristal »). Dans tous les cas, la table (partie du bec sur laquelle s'applique l'anche) est finie parusinage oupolissage.
Les becs en ébonite sont les plus fréquemment utilisés et offrent une large gamme de sonorité. Les becs en verre ont un entretien[note 8] plus simple et une sonorité plus nette ; ils sont plus rares et sont généralement réservés à lamusique classique. Moins chers, les becs en plastique ont également une moindre qualité sonore ; ils sont généralement réservés aux instruments d'étude.
L'ouverture (hauteur de flèche de l'anche) et la longueur de la table (longueur libre enflexion de l'anche) sont les principaux paramètres géométriques distinctifs des becs. Un bec ouvert offre plus de puissance mais peut dégrader la qualité du son.
Le choix d'un bec est aussi important que celui de l'instrument. Il influe grandement sur le confort du musicien. Si les conseils de clarinettistes professionnels peuvent aider au choix d'un bec, seuls des essais personnels permettent un choix définitif. Des prototypes de becs à géométrie variable sont développés[32].
Ligature, bec du haut et du bas, anche ; bec avec ligature en forme d'anneau, conique à l'intérieur, en caoutchouc dur
L'anche est la partie vibrante de l'instrument. Elle est faite enroseau de canne ou en plastique et est placée sur le bec au moyen d'uneligature en métal, en cuir ou en plastique. Les modèles allemands utilisent une cordelette comme ligature. Lorsque la clarinette est montée, l'anche se trouve sous le bec, contre la lèvre inférieure du musicien.
Les anches sont vendues taillées selon un classement de "force", en fonction de la rigidité du morceau de roseau dans lequel elles ont été fabriquées. De nombreux musiciens professionnels taillent ou retaillent eux-mêmes leurs anches. La "force" de l'anche et la géométrie du bec sont liées.
L'anche est à l'origine de la production sonore. Avec son utilisation, une anche se dégrade rapidement, et les fibres du roseau se brisent. La résistance de cette pièce à la pression de l'air, la force de l'anche, est rapidement modifiée. Par conséquent, la façon dont le son est produit est modifiée et affecte le jeu du musicien.
Le temps mis par l'anche pour perdre de sa force est variable. Il dépend de la force initiale de l'anche, de son temps d'utilisation, de la pression d'air exercée par le musicien, et de la façon dont le bec est tenu en bouche (de la puissance avec laquelle le clarinettiste serre l'anche entre ses mâchoires). Pour une utilisation quotidienne de deux heures par jour, l'anche est changée en moyenne toutes les deux semaines.
Le baril (parfois appelébarillet), situé après le bec, a pour rôle principal l'accord de l'instrument. Beaucoup de clarinettistes se munissent de plusieurs barils de longueurs différentes afin de pouvoir en changer selon les conditions de jeu et dudiapason retenu par l'orchestre. La longueur de cette pièce et sa géométrie interne influent sur la longueur totale de l'instrument et donc sur l'accord.
Les corps de la main droite et de la main gauche peuvent également être écartés l'un de l'autre, allongeant la taille de l'instrument. Cependant les écarts relatifs des orifices de chacun de ces corps sont calculés pour être fixes. La clarinette est très sensible à toute modification de ces longueurs. Il faut éviter d'utiliser ce moyen pour l'accord. Les professionnels réussissent à compenser la justesse simplement en modifiant leur technique d'embouchure et le support aérodynamique. Dans les cas extrêmes, le recours à des barillets de tailles différentes devient inévitable.
Les deux corps situés entre le baril et le pavillon de l'instrument comportent des trous, les anneaux et lesclés. Ces morceaux de bois sont traversés par la perce (perçage interne) et percés d'emplacements (trous bouchés par les clés) et de bosses (trous bouchés par les doigts). Les doigts de l'instrumentiste bouchent les différents trousen fonction de la note jouée. Lorsqu'un trou est hors de portée des doigts (car situé en haut, en bas et sur les côtés de l’instrument), l'instrumentiste utilise lesclés prévues à cet effet.
Sur certains instruments, l'obturation des bosses n'est pas confiée aux doigts eux-mêmes mais à des plateaux munis de tampons. On parle alors de clarinette à plateaux. Ceci peut s'avérer utile aux musiciens ayant des difficultés à assurer avec leurs doigts un bouchage parfait (arthrose, par exemple).
Certaines clarinettes (enré, enmi, mais souvent aussi lesclarinettes en métal) ont un corps en une seule partie.
En prolongeant le chalumeau, lepavillon permet l'émission d'une note plus grave (le mi) qui par quintoiement, donne le si (dit bouché) grâce à la clé de douzième (ref nécessaire). Ainsi la gamme de la clarinette est complète .
Enfin, cette pièce de forme évasée favorise une bonne diffusion du son des notes bouchées :mi, fa, sol, la pour le grave. Elle résout le problème de la justesse relative des notes les plus graves des registresgrave etclairon.
6 clarinettes « à bocal » : clarinette alto, cor de basset, clarinettes basse au mib et à l'ut grave, clarinette contralto et clarinette contrebasse.
Les modèles de clarinettes graves présentent quelques différences structurelles par rapport aux clarinettes droites. Il s'agit du cor de basset et des clarinettes alto, basse, contralto et contrebasse. Hormis les proportions plus grandes rendant leur tessiture plus grave, l'allongement global du tube est obtenu en partie, par l'ajout de piècescintrées réduisant ainsi son encombrement : lebocal et le pavillon sont réalisés en métal (mêmes alliages que pour lessaxophones ou les cuivres)[33]. Pour les plus grandes clarinettes, le corps lui-même peut être métallique.
Du fait du poids élevé de l'instrument, une béquille fixée sous le pavillon le maintient à hauteur. Les grandes clarinettes se jouent principalement en position assise.
Enfin, les modèles graves disposent de notes supplémentaires dans le registre grave, lemi essentiellement, voire jusqu'au do pour le cor de basset et certaines clarinettes basse et contrebasse.
Pour une clarinette ensi, le tableau ci-dessous donne les dimensions et autres données physiques liées à l'instrument[34]. Pour certains cas particuliers, ces valeurs pourront évidemment s'écarter des plages proposées.
Clés de l'auriculaire de la main droite.Position des doigts sur la clarinette. Exemple pour l'exécution du fa# clairon en doigté fourche[6]
Comme presque tous les instruments à vent, la clarinette se tient avec lamain gauche en haut du corps (plus près de la bouche) et la main droite en bas du corps. Sur le corps inférieur, une patte accueille le pouce droit qui maintient l'instrument, et qui n'intervient pas dans le jeu. Le poids de l'instrument repose entièrement sur ce doigt, les clarinettistes peuvent souffrir detendinite[35] lors d'une pratique prolongée. Les jeunes instrumentistes peuvent alors utiliser uncollier.
La clarinette est tenue en bouche et les bras avec un angle de 30° à 45° avec le corps du musicien. Le corps du haut possède quatre trous qui sont bouchés par le pouce, l'index, le majeur et l'annulaire de la main gauche. Le corps du bas possède trois trous. Ils sont bouchés par l'index, le majeur et l'annulaire de la main droite et dans le même ordre. Les auriculaires de chaque main permettent de manipuler les clés de bas de registre. Chaque auriculaire est utilisé pour contrôler quatre clés. Le travail de ces doigts est certainement celui qui demande le plus d'efforts au début[36]. Le changement d'instrument peut nécessiter un temps d'adaptation.
Comme tous les instruments à trous, la note jouée est d'autant plus aiguë que le nombre de trous ouverts est grand et la note la plus grave est obtenue lorsque tous les trous sont bouchés. Pour un même registre, lesdoigtés des autres notes, s'obtiennent en ouvrant progressivement les trous de la main droite puis ceux de la main gauche.
Vibration de la colonne d'air dans l'instrument[37].
Leson est uneonde qui se propage dans l'air. Elle résulte d'une variation locale depression. Les étapes du déroulement d'un cycle d'oscillation de la colonne d'air (en régime d'anche battante) sont les suivantes[38] :
La colonne d'air contenue dans la perce de l'instrument est à pression atmosphérique et se déplace en direction du pavillon (ou du premier trou ouvert). La minuscule fente entre le bec et l'anche ne permet qu'à une quantité infime d'air d'entrer dans l'instrument. Ceci crée une dépression dans le bec. La différence de pression entre les deux faces de l'anche augmente, ce qui provoque la fermeture immédiate de l'anche (un peu comme une porte qui claque dans un courant d'air) ;
Une onde de dépression progresse dans le corps de l'instrument et arrive au1er trou ouvert ;
L'air extérieur, à pression atmosphérique, est aspiré par la dépression. Cet air qui jusqu'ici sortait par le trou ouvert change brusquement de direction et entre dans la perce ;
La dépression se comble progressivement au fur et à mesure de la progression de l'onde de dépression en direction du bec ;
Lorsque toute la colonne d'air contenue dans la perce se trouve à pression atmosphérique (se déplaçant en direction du bec), la différence de pression entre les deux faces de l'anche diminue, ce qui ouvre l'anche ;
La progression de la colonne d'air est stoppée net avec la soudaine confrontation avec l'air sous pression régnant dans la bouche. On observe alors la formation d'une onde de surpression se dirigeant vers le1er trou ouvert ;
Quand elle y arrive, l'air qui entrait dans la perce change brusquement de direction et sort par le trou ;
La surpression se comble progressivement et on se retrouve au début du cycle, lorsque toute la colonne d'air se retrouve à pression atmosphérique, se déplaçant en direction du pavillon.
Ce cycle se répétant àfréquence constante, on obtient l'émission d'une note dont la hauteur est liée à cette fréquence. Ainsi lela3, à 440Hz, est obtenu quand ce cycle se produit440 fois par seconde. La clarinette est le deuxième instrument le plus sonore dans l'orchestre symphonique, atteignant 103décibels à son maximum.
Dans l'orchestre symphonique, la clarinette s'inscrit au pupitre des bois. La plupart du temps une à deux clarinettes sopranos sont utilisées (si ou la, suivant latonalité des morceaux). Une clarinette basse peut compléter la formation, pour la première fois dans l'opéraLes Huguenots deGiacomo Meyerbeer (acte V). Plus rarement, certaines pièces plus modernes, telles que leBoléro deRavel, laSymphonie fantastique deBerlioz ou bien les symphonies deMahler, font usage d'une petite clarinette enmi. Mozart a également beaucoup utilisé le cor de basset, notamment dans laSérénade KV 361 Grande Partita pour 13 instruments et dans sonRequiem KV.625, ou encore la clarinette de basset (en Si bémol ou en La), qu'il utilise pour de superbes interventions dans son opéraLa Clémence de Titus. C'est pour cet instrument que leconcerto pour clarinette KV.622 fut composé. Aujourd'hui, les clarinettistes l'interprètent généralement sur la clarinette en La.
Lesorchestres de chambre étant de petits orchestres, ils ne rassemblent pas obligatoirement tous les pupitres de l'orchestre symphonique. Certainsbois viennent apporter une couleur différente au son des violons, parmi lesquels la clarinette occupe une place privilégiée. L'Orpheus Chamber Orchestra est un bel exemple de ce type de formation ; dans leur enregistrement consacré àAaron Copland, la clarinette tient une magnifique partition[39].
Deux clarinettes alto modernes en mib : système Boehm jusqu'au mib grave, système allemand jusqu'au ut grave (Yamaha et Dietz)
Il existe aussi des orchestres de chambre composés exclusivement de clarinettes, interprétant des pièces transcrites ou dédiées. Ces formations sont composées de trois ou quatre instruments comprenant essentiellement des clarinettes sopranos (duo, trio, quatuor de clarinettes sopranos) et complétées éventuellement par une clarinette basse.
Un ensemble complet de clarinettes est formé par quatre à cinq clarinettes sopranos, une clarinette alto, une clarinette basse et éventuellement une clarinette contralto et/ou contrebasse. Certainsensembles de clarinettes disposent de quasiment toutes les tailles de clarinettes, pour autant de variété de timbre.
La clarinettesi est à l'harmonie ce qu'est leviolon à l'orchestre symphonique. Pour une harmonie de50 musiciens, on compte idéalement 10 à 12 clarinettes réparties sur trois voix. Cepupitre est souvent situé à gauche du chef d'orchestre, c'est-à-dire à la même place que les violons de l'orchestre symphonique, face auxsaxophones.
Dans les plus gros orchestres, on trouvera également une à deux petites clarinettesmi, une clarinette alto, une à deux clarinettes basses et, à l'occasion, une clarinette contralto ou contrebasse.
Outre son rôle dans des œuvres de musique de chambre, lesquintettes avec clarinette et quatuor à cordes étant les plus connues, la clarinette est un élément duquintette à vent avec la flûte, le hautbois, le basson et le cor. De nombreuses compositions ont été écrites pour cet ensemble depuis le début duXIXe siècle.
Letrio d'anches sous la forme d'un ensemble avec la clarinette, le hautbois et le basson rencontre un grand intérêt de la part des compositeurs à partir des années1930, probablement sous l'action deLouise Hanson-Dyer, fondatrice de la maison d'édition « Éditions de l'Oiseau-Lyre ».
On retrouve également la clarinette dans certains « stages band », souvent jouée par un saxophoniste. Dans unbig band, un des saxophonistes peut aussi parfois jouer de la clarinette sur certains morceaux.
Emploi dans les principaux styles musicaux dits classiques
La présence de la clarinette est très rare dans lamusique baroque, notamment par le fait qu’elle n’a été créée qu'en 1690. On peut néanmoins citer l’Ouverture HWV 424 deGeorg Friedrich Haendel où l’on trouve deux clarinettes[40].
À la fin des années 1740, au début de la périodeclassique, les clarinettes sont introduites à l’orchestre de La Pouplinière à Paris. Le célèbre clarinette solo de cet orchestre estGaspard Procksch, et c’est pour lui queJohann Stamitz écrit sonConcerto en si bémol majeur[45]. Ce concerto est le premier à être écrit pour la grande clarinette ensi-bémol et à couvrir toute la tessiture employée à cette époque : plus de trois octaves. Au même moment,Johann Melchior Molter écrit six concertos pour clarinette enré.
Outre son rôle d'instrument d'orchestre la clarinette reste utilisée comme instrument soliste de concerto et dans la musique de chambre.
Les œuvres deCarl Maria von Weber font une partie importante du répertoire de la clarinette. Weber utilise cet instrument en tant que soliste pour la première fois en mars 1811, quand il vient àMunich et fait connaissance deHeinrich Joseph Bärmann, clarinette solo à l’orchestre de la cour du roi de Bavière. LeConcertino en mi bémol majeur a beaucoup de succès et Weber écrit pour Bärmann deux autres grand concertos, enfa mineur, op.73, et enmi bémol majeur, op.74. Plus tard Weber écrit lesVariations pour clarinette et piano et leQuintette pour clarinette et cordes, tous deux également pour Bärmann[50]. Sa dernière œuvre pour la clarinette, leGrand duo concertant pour clarinette et piano, est dédiée à un autre virtuose de son temps :Johann Simon Hermstedt. C’est aussi pour Hermstedt queLouis Spohr écrit ses quatre concertos pour clarinette. Selon les sources, Bärmann jouait uneclarinette à dix clefs acquise en 1809 chezGriessling & Schlott à Berlin[51] ou utilisait déjà unmodèle à douze clefs lors d'une tournée à Paris en 1808[52].
Comme au siècle précédent, certains clarinettistes composent eux-mêmes les œuvres pour leur instrument. C’est le cas deBernhard Henrik Crusell qui écrit trois concertos et lesVariations sur un air suédois, ou des clarinettistes italiens tels queBenedetto Carulli,Ernesto Cavallini,Luigi Bassi, dont on doit des nombreuses fantaisies sur les thèmes des opéras italiens[49].
À cette époque beaucoup de pièces utilisent la clarinette en musique de chambre. Les formations et les œuvres sont variées. On trouve cet instrument dans les œuvres deLudwig van Beethoven (duos pour clarinette et basson, trio avec piano et violoncelle, quintette pour vents et piano, septuor pour cordes et vents),Franz Schubert (Octuor),Felix Mendelssohn (Sonate avec piano, deuxKonzertstücke avec cor de basset et piano),Robert Schumann (Phantasiestücke pour clarinette et piano,Märchenerzählungen avec piano et alto) et d’autres compositeurs.
Johannes Brahms, inspiré parRichard Mühlfeld, écrit dans les dernières années de sa vie quatre œuvres pour la clarinette : deux sonates avec piano, le trio avec violoncelle et piano et le quintette avec cordes. Sous l’influence de Brahms sont écrits le trio d’Alexander von Zemlinsky et la sonate deGustav Jenner.
À l'orchestre, la clarinette incarne le chat dansPierre et le Loup deSergueï Prokofiev, et un de ses emplois les plus fameux est évidemment leglissando virtuose qui introduit laRhapsody in Blue deGeorge Gershwin, ce solo redoutablement difficile est une sorte d'indicatif de l'œuvre et est demeuré célèbre.
Dans cette célèbre composition deCamille Saint-Saëns, la clarinette joue dans quatre des quatorze mouvements, à savoir :
Poules et coqs
Exemple rarissime de musique purement imitative, ce caquetage concertant, auquel vient s'ajouter la clarinette, est un morceau de bravoure, au caractère très ironique. La clarinette y renforce à un court instant le caquetage présomptueux des coqs.
Le Coucou au fond des bois
C’est sans doute l’un des thèmes les plus connus à la clarinette. Son originalité réside dans le fait que la clarinette a le privilège de répéter21 fois le même motif, sur les mêmes deux notes (2 croches Ré4-Sib3, à l’oreille Do4-Lab3), alors que le piano mène la mélodie seul par des accords lents… Par ces deux notes répétées inlassablement, la clarinette imite le son du coucou, renforçant ainsi le côté satirique de la pièce.
Fossiles
Passage parodique évoquant, outre les animaux disparus, les vieux airs d'époque. La clarinette reprend le célèbre thème duBarbier de Séville deGioachino Rossini una voce poco fa et plaisante même avec sa propre Danse macabre, rendue gaie pour l'occasion ! On y entend très clairement un fragment d’Au clair de la lune, par la clarinette.
Finale
Ce dernier morceau équivaut à la parade des fins de revue. La clarinette y joue tout au long, côte à côte avec lapetite flûte.
La musique de style contemporain (post Darmstadt, après 1949)
Domaines, en version pour clarinette solo (1961) et en version avec ensemble (rév. 1969) etDialogue de l'ombre double (1985), avec électronique dePierre Boulez
Cinq mouvements, pour quatuor de clarinettes, deClaude Arrieu, 1964
La clarinette est représentée depuis la fin duXIXe siècle dans bien des musiques traditionnelles européennes, mais il convient de rappeler qu'il existe aussi depuis fort longtemps de par le monde des clarinettes dites « primitives », ayant les mêmes caractéristiques de productions sonores, mais réalisées dans des matériaux et à l'aide d'une facture plus simple, ainsi en est-il de l'arghoul ou de laclarinette double de l'Égypte antique.
La clarinette est aujourd'hui, avec lesaxophone, l'instrument roi de la musique desBalkans[59]. On la trouve notamment enBulgarie, enMacédoine (grneta), enSerbie (gërnëte), enGrèce (klarino), enArménie (klarnet), et dans le Banat au sud de laRoumanie où elle est colportée par les musiciens tsiganes ou juifs. Elle est présente dans des ensembleschalgia qui jouent dans les noces, les danses (berance) les fêtes de village, et aujourd'hui dans des concerts « modernes » où se marient claviers, batterie, et instruments traditionnels. Elle intègre tout autant les petites formations grecqueskoumpania que des duos instrumentaux avec une percussion (daouli outoumbeleki) où elle joue un rôle de soliste. On la retrouve aussi dans l'accompagnement de la danseTsifteteli.Tassos Halkias en est un interprète notable.
Devant jouer parfois toute une nuit, le clarinettiste préfère les becs ouverts et lesanches faibles. Le son qui en ressort est très caractéristique : embouchure relâchée, détaché léger mais toujours présent, suivant les ornementations des doigts pour obtenir le fameux « Tay-ta ». Afin de produire au mieux ces ornementations, les clarinettistes préfèrent souvent utiliser les systèmes « Full Boehm ».
La clarinette est présente dans lamusique bretonne depuis lesannées 1840. Le clarinettiste est appelé "soner treujenn-gaol" enbreton, "soner" désignant lesonneur et "treujenn-gaol" fait référence au "tronc de choux" qui est la tige des choux à vaches qui laisse apparaître un creux lorsque l'on coupe une feuille. Elle est le plus souvent jouée en duo, imitant les couples dekan ha diskan (chant et déchant), en utilisant des effets detuilage : le premier clarinettiste joue une phrase, le deuxième commence à jouer les dernières notes de la phrase puis la reprend du début. Un tambour peut se joindre au couple, comme pour le couplebiniou etbombarde, mais il est aussi possible de jouer seul. Le répertoire des musiciens (sonneurs) était constitué d'airs : de danses, à marcher, de circonstances... accompagnant tout le cérémonial du mariage traditionnel. Aujourd'hui on retrouve laTreujenn-gaol principalement dans lesfestoù-noz, jouée en couple, ou dans des groupes. Des groupes bretons de concert aux influences jazz, rock ouWorld music l'utilisent aussi.
Certains facteurs font aujourd'hui des clarinettes diatoniques (sans clef de quintoiement), avec de 1 à 5 clefs, généralement en sol.
EnCantabrie, région du nord de l'Espagne, parmi les styles de musique folklorique, on trouve les « piteros », duo composé d'une caisse claire (tambor) et d'une clarinette (pito), qui donnent son nom à ce type de formation. Très mobiles, ils se produisent lors des fêtes de village, foires ou pèlerinages. Les thèmes joués, appelés « jotas montañesas » sont sur une base rythmique à3/4 (à 200 environ à la noire), sur lesquels s'exécutent spontanément des groupes de danseurs improvisés.
Cette clarinette enmi (avec un petit nombre de clés pour les instruments les plus anciens), est appelée alorsrequinto. On notera cependant deux modifications : la clé de douzième est volontairement tordue pour ne plus se fermer. De ce fait l'instrument est toujours dans les registres du clairon ou suraigu ce qui permet au son de porter loin. De plus, l'embouchure est retournée (anche en haut comme sur le chalumeau), ce qui confère un son plus perçant.
Le pito est l'instrument mélodique de la formation. Il peut être remplacé par unfifre parfois.
Dans la province de Valence, la clarinette tend à remplacer le hautboisdulzaina.
La clarinette est très présente dans lamusique turque (sous le nom deklarnet)[64], parfois sous sa forme occidentale, parfois sous la forme d'une clarinette en métal mais plus fine, plus petite et de forme sensiblement différente, notamment pour les clés. La perce reste néanmoins cylindrique contrairement à celle du saxophone, et le son et le comportement restent ceux d'une clarinette, mais avec des effets de glissandi propres aux clarinettes et des possibilités de jeux typiquement orientales.
Elle est de façon générale bien intégrée aux différentes musiques traditionnelles. On la retrouve :
EnSuède, bien que très rarement employée aujourd'hui (Kjell Leidhammar dans Vindvak),elle était aussi populaire que le violon au siècle dernier[réf. nécessaire].
Dans les musiques centre-France où elle est de plus en plus présente.
EnItalie du Sud, on retrouve de plus en plus souvent la clarinette en métal.
EnInde du Sud, la clarinette en Mib est intégrée depuis leXIXe siècle aux petits ensembles accompagnant la danse indienne. À partir duXXe siècle, elle devient également un instrument soliste de lamusique carnatique savante et dans les petits ensembles jouant dans les temples, bien que de manière fort discrète. Malgré les clefs et l'accord européen, les musiciens indiens parviennent à infléchir les notes au moyen de techniques buccales.
EnBelgique, la clarinette est aussi présente lors des carnavals wallons (carnaval de Binche, etc.). Elle remplace leflageolet utilisé auparavant à la suite de l'apparition des peaux de tambours synthétique lors de l'aubade matinale et l'après midi, c'est elle qui annonce aux autres musiciens l'air qu'ils doivent jouer ensemble.
Cantonnée par la musique classique dans un registre lyrique et poétique avecMozart etBrahms, la clarinette s'impose dès les débuts dujazz Nouvelle-Orléans comme un des trois instruments à vent obligés de ce style, au côté dutrombone et de latrompette (ou ducornet), à laquelle, grâce à l'étendue de son registre, elle peut apporter un contrepoint volubile aussi bien dans le grave que dans l'aigu, tout en se prêtant à des démonstrations de haute virtuosité en solo.
AuxÉtats-Unis, le termeLiquorice Stick (bâton deréglisse) est aussi employé enargot pour désigner une clarinette[69]
Malgré la concurrence des saxophones, privilégiés pendant les années 1940, sa richesse d'expression lui a permis de revenir sur le devant de la scène européenne du jazz dans lesannées 1950 avec des artistes aussi populaires qu'Acker Bilk,Monty Sunshine ouClaude Luter.
Bien qu'il s'agisse d'une pièce classique, laRhapsody in Blue deGeorge Gershwin, commence par le très célèbresolo de clarinette, et un glissando ascendant remarquable (mi au do suraigu). De même,Aaron Copland composa en 1943, sur commande deBenny Goodman un concerto dont la cadence centrale ressemble à une improvisation jazz.
Le saxophonisteArt Pepper a laissé également quelques enregistrements à la clarinette. Le saxophonisteEric Dolphy est également connu pour avoir popularisé laclarinette basse dans le jazz.
Le clarinettisteJean-Christian Michel s'est illustré dans le cross-over Jazz- classique avec des ventes de disques considérables en France et à l'étranger[70].
En 2019, le batteurGuillaume Nouaux a réuni onze des plus grands spécialistes internationaux du jazz traditionnel à la clarinette dans un double album intituléGuillaume Nouaux & The Clarinet Kings. Ce double album a notamment reçu le Prix Special du Jury duHot Club de France 2019.
Les clarinettes sont également utilisées en jazz funk, ces instruments supportent bien les effetswah-wah, et deréverbération.
Le cinéma emploie la clarinette dans divers films. Il peut s'agir de musiques pour clarinette composées de manières indépendantes du film (concerto pour clarinette en la majeur deMozart dansOut of Africa), mais également de nombreuses musiques écrites spécialement pour le film (La Désillusion deBruno Coulais dansLes Choristes).
L'instrument est utilisé comme accompagnement. On le retrouve dans ce rôle dansWest Side Story (Leonard Bernstein), notamment dans les scènes « Jet Song », « Something's Coming », ainsi que très discrètement dans la scène « Cool » et dans le célèbre thème « America ». La clarinette y évoque l'ambiancejazz deNew York des années 1950.
Dans une lettre datée du[71] adressée à son pèreLeopold,Wolfgang Amadeus Mozart dépeint son admiration de la sonorité de la clarinette :
« J’étais hier soir à l’Opéra de Mannheim – J’étais assis au-dessus de l’orchestre – Il y avait tout un ensemble d’instruments à vent – Parmi ceux-ci, deux clarinettes – Père, vous ne pouvez imaginer la beauté du son de la clarinette ! [...] Si seulement nous avions aussi des clarinettes ! Vous ne pouvez pas imaginer la sonorité ainsi produite dans une symphonie par le mélange des flûtes, hautbois et clarinettes[71]. »
Le compositeur franco-belgeAndré Grétry (1741-1813) donne un descriptif plus sombre de l'instrument[72] :
« La clarinette en si bémol est un instrument qui exprime la douleur. Lorsqu'elle exécute des airs gais, il y mêle encore une certaine teinte de tristesse. Si l'on dansait dans les prisons, je voudrais que ce fût au son de la clarinette. »
« La clarinette est peu propre à l’idylle, c’est un instrument épique, comme les cors, les trompettes et les trombones. Sa voix est celle de l’héroïque amour ; et si les masses d’instruments de cuivre, dans les grandes symphonies militaires éveillent l’idée d’une troupe guerrière couverte d’armures étincelantes, marchant à la gloire ou à la mort, les nombreux unissons de clarinettes, entendus en même temps, semblent représenter les femmes aimées, les amantes à l’œil fier, à la passion profonde, que le bruit des armes exalte, qui chantent en combattant, qui couronnent les vainqueurs ou meurent avec les vaincus. Je n’ai jamais pu entendre de loin une musique militaire sans être vivement ému par ce timbre féminin des clarinettes, et préoccupé d’images de cette nature, comme après la lecture des antiques épopées. Ce beau soprano instrumental, si retentissant, si riche d’accents pénétrants quand on l’emploie par masses, gagne dans le solo en délicatesse, en nuances fugitives, en affectivités mystérieuses ce qu’il perd en force et en puissants éclats. Rien de virginal, rien de pur comme le coloris donné à certaines mélodies par le timbre d’une clarinette jouée dans le médium par un virtuose habile. C’est celui, de tous les instruments à vent, qui peut le mieux faire naître, enfler, diminuer et perdre le son. De là la faculté précieuse de produire le lointain, l’écho, l’écho de l’écho, le son crépusculaire. Quel plus admirable exemple pourrai-je citer de l’application de quelques-unes de ces nuances, que la phrase rêveuse de la clarinette, accompagnée d’un trémolo des instruments à cordes, dans le milieu de l’allegro de l’ouverture duFreyschütz !!! N’est-ce pas la vierge isolée, la blonde fiancée du chasseur, qui, les yeux au ciel, mêle sa tendre plainte au bruit des bois profonds agités par l’orage[73] ? »
Le compositeur et musicologue belgeFrançois-Auguste Gevaert, en 1885, dans sonNouveau traité d'instrumentation[74], décrit ainsi la sonorité de l'instrument :
« Son timbre réalise à un degré éminent les qualités maîtresses de cette voix instrumentale, pureté et mordant joint l'éclat à la douceur. »
« … Zola de célébrer la clarinette et de proclamer que c'est l'instrument qui représente l'amour sensuel, tandis que la flûte représente tout au plus l'amour platonique. « Comme le hautbois représente le paysage ironique » jette un blagueur dans l'esthétique musicale de Zola. »
Ambrose Bierce (1842-1914), écrivain et journaliste américain, en donne une autre vision plus humoristique :
« Clarinette : instrument de torture utilisé par une personne qui a du coton dans les oreilles. Il y a deux instruments qui sont pires qu'une clarinette – deux clarinettes[76]. »
De même qu'Alphonse Karr :« La clarinette rend sourds ceux qui l'écoutent et aveugles ceux qui en jouent[77]. »
À propos d'humoriste,Raymond Devos (1922–2006) jouait souvent de la clarinette dans ses sketchs et déclarait[78] :
« Je me suis remis à la clarinette. C'est ce qui rapproche le plus de l'anglais. »
↑Ces clarinettes en métal sont conçues sur la base de la clarinette moderne. D'autres modèles de clarinettes en métal existent, telle laclarinette turque.
↑Nettoyer un bec en ébonite à l'eau chaude le fait jaunir.
↑Dans le chapitre VI de son romanL'Œuvre (1886), Zola cite un passage duTraité de Berlioz consacré à la clarinette.« Ah ! ce qu’il a dit des clarinettes : « Les clarinettes sont les femmes aimées », ah ! cela m’a toujours fait couler un frisson sur la peau… » (Texte disponible sur wikisource,p. 264).
↑Ainsi les premiers chapitres de laméthode complète pour clarinette de H. Klosé (ou méthode Klosé) insistent particulièrement sur ce point de technique.
« Le facteur d'instruments Fritz à Brunswick, Lefevre à Paris, le musicien de la cour Stadler à Vienne et la fabrique d'instruments Kriesling et Schlott à Berlin, importante à l'époque, travaillèrent sans relâche à l'amélioration et au perfectionnement de cet instrument, si bien que mon père (Heinrich Baermann) jouait déjà en 1809 une clarinette à 10 clés provenant de cette dernière fabrique. »
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↑Amand Vanderhagen,nouvelle méthode pour la clarinette moderne à 12 clefs, Paris, Ignace Pleyel,, 107 p.(BNF43312007,lire en ligne).
↑Igor Stravinsky, trois pièces pour clarinette solo.
Paul Rougnon,Dictionnaire général de l'art musical : les mots, leur origine,leurs sens, suivi d'un Dictionnaire biographique des musiciens célèbres, Paris, Delagrave,, 384 p.
La version du 29 octobre 2015 de cet article a été reconnue comme « bon article », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.