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Chevalerie

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Ne doit pas être confondu avecOrdre de chevalerie ouOrdre militaire.

Illustration d'un chevalier dans leCodex Manesse (1305-1315). Montant un cheval de guerre, il est équipé d'un heaume en fer, d'un grand bouclier (écu) et d'une lance destinée à la charge. Sa panoplie est richement décorée de ses armes, permettant de l'identifier.

Lachevalerie et lecode chevaleresque désignent à la fois legroupe social, constitué dechevaliers, et un ensemble decodes de conduite informels destinés à encadrer la vie chevaleresque idéale.

La chevalerie est un phénomène culturel et militaire d'origine médiévale dont les racines remontent, pour l'Occident, auXIe siècle. Son apogée, l'âge de la chevalerie classique, la connaît entre lesXIIe et XVe siècles, époque de développement desordres militaires et descroisades, dans lesquelles la chevalerie est particulièrement mobilisée. La littérature chevaleresque se développe, et la chevalerie s’intègre — non sans certaines résistances — aux cadres de la chrétienté : elle s'initie aux usages de cour, dans le cadre du développement des monarchies médiévales. À partir de la fin du Moyen Âge, la chevalerie décline fortement comme force militaire, remplacée progressivement par des armées professionnelles.

Les origines de la chevalerie occidentale médiévale se situent dans lemonde franc mérovingien puis dans la cavalerie lourdecarolingienne. Ces peuples germaniques et leurs descendants importent dans le monde romain tardif des modes d'encadrement de la guerre différents, adaptés aux nouveaux modes de pouvoirs locaux qui succèdent à l'Empire romain. À l'origine, le motcaballarius, dont dérivechevalier etchevalerie en français, désigne uniquement lescombattants à cheval, appelécaballus en latin tardif (emprunté au gaulois *kaballos, du protoceltique *kaballos). Ce guerrier monté était investi de l'idéal de l'equites romain, pouvant mener, du fait de son aisance financière et foncière, une carrière publique marquée par le service militaire.

C'est seulement par la suite que l'idée de chevalerie s'est vue associée à un sens moral, éthique, et social, en se voyant greffés les idéaux chevaleresques de la littérature et de lachanson de geste. Le terme sous-entend ainsi une distinction sociale et fonctionnelle entre leschevaliers, combattants professionnels aguerris au métier des armes, force d'élite montés à cheval, et l'infanterie à pied, la « piétaille » qui fournissait la masse des troupes d'infanterie recrutées de manière ponctuelle.

Ces guerriers germano-francs ayant intégré les usages du monde romain exaltent le compagnonnage militaire, liant des combattants d'élite entre eux par des serments de fidélité et d'assistance. Adoptant peu à peu une hiérarchie entre membres de l'aristocratie militaire, ces combattant formèrent les contours de laféodalité et de lavassalité.

Fortement marquée par la tradition chrétienne et par les prescriptions morales, religieuses et politiques de l'Église médiévale, la chevalerie occidentale est intimement liée à ladévotionpieuse, à la pratique des armes et de laguerre, ainsi qu'à uneéthique de l'assistance envers son prochain et de la fidélité. L'imaginaire de la chevalerie a fortement marqué lalittérature, lesarts et est encore aujourd'hui une source de popularité duMoyen Âge auprès du grand public - non sans biais et sans déformations liées aux imaginaires politiques qui firent de la chevalerie un exemple de comportement à suivre.

Les comportements idéaux de la chevalerie étaient régis par des codes chevaleresques plus ou moins institués en normes et en conditions d'appartenance à la chevalerie. Ces codes, le plus souvent tardifs, constituent néanmoins une bonne source pour comprendre le socle idéologique sur lequel la chevalerie médiévale s'est appuyée. Les idéaux de la chevalerie ont été fortement influencés par lathéologie chrétienne et diffusés par la littérature médiévale, qui en forme les contours et lesarchétypes, en particulier dans les cycles littéraires connus sous le nom deMatière de France (ensemble d'épopées littéraires qui se rapporte aux compagnons légendaires de Charlemagne et à ses hommes d'armes, les paladins), et deMatière de Bretagne (alimentée par l'Historia Regum Britanniae deGeoffrey de Monmouth, écrite dans les années 1130), qui a popularisé la légende duroi Arthur et de seschevaliers de la Table ronde.

Au fil du temps, sa signification en Europe a été progressivement affinée pour mettre l'accent sur des vertus sociales et morales plus générales. Le code de la chevalerie, tel qu'il existait à la fin du Moyen Âge, était un système moral qui combinait une éthique guerrière, la piété chevaleresque et les manières de lacour, le tout s'associant pour établir une notion d'honneur et de noblesse, de dévouement pour sonsuzerain auquel les chevaliers sont liés par unserment de fidélité. Il était le résultat de l'anoblissement progressif des chevaliers, de leur confusion avec l'aristocratie, ainsi que de leur proximité avec les milieux de cour dont ils devaient connaître les usages.

La chevalerie, comme force militaire et ordre social, subit de profondes évolutions à la fin du Moyen Âge. Elle se mue en cavalerie professionnalisée dans le cadre de la naissance despremières armées modernes. Lesordres chevaleresques, ou ordre de chevalerie, deviennent alors des groupes sociaux chargés de symboles prestigieux, des cercles de sociabilité et de répétition des codes de lanoblesse de guerre. Formant l'entourage des rois, ces ordres ne comptent plus que quelques centaines d'individus, voire moins pour certains. Ces ordres témoignent d'une volonté d'entourer les souverains de l'aura despreux des chansons de geste et de régénérer les liens de fidélité entre princes et noblesse des États modernes en formation.

Signification

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Étymologie

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Le mot chevalerie est le résultat d'une lente évolution : il se forme enancien français, auXIe siècle, à partir dulatin médiévalcaballārii, nominatif pluriel du termecaballārius « celui qui monte à cheval à la guerre[1],[2] », attesté à partir duVe siècle[3]. Ce mot est formé, enlatin tardif, sur le radicalcaballus « cheval », qu'on pense emprunté augaulois *kaballos, lui-même issu duprotoceltique *kaballos[4],[5],[6].

À l'origine, le terme de « chevalerie » est synonyme d'équitation. Le terme « chevalerie » sert progressivement à désigner les combattants possesseurs de chevaux, mais aussi l'art du combat à cheval au sens large et même les actions propres aux chevaliers[7]. Par extension sémantique ou par métonymie, « chevalerie » acquiert progressivement le sens qu'il a aujourd'hui : il désigne alors non plus la cavalerie ou l'acte chevaleresque, mais l'ensemble des femmes ouhommes d'armes d'élite. Leschevaliers, sont formés à la guerre professionnellement depuis l'enfance, ont reçu l'adoubement, sont souvent d'ascendance noble ou du moins issus des milieux aristocratiques, et disposent des capacités financières pour s'équiper d'un cheval de guerre et des armes d'un cavalier lourd (épée,bouclier,lance, armure corporelle et fourniment)[8].

La signification du terme a évolué profondément au fil du temps vers un sens de plus en plus large : au cours du Moyen Âge, les chevaliers et la chevalerie connaissent une lente évolution sémantique, désignant à l'origine la femme, où pendant la Guerre de Cent ans, des chevaleresses prennent parti pour l’un ou l’autre des camps. Jeanne la flamme, par exemple, combat pour les Anglais et gagne son surnom grâce à un coup d’éclat. Assiégée par les troupes françaises à Hennebont, elle prend la tête d’une petite troupe de soldats et profite de la nuit pour enflammer les tentes de ses ennemis. L'homme d'armes noble possédant un cheval de guerre, la chevalerie finit par revêtir un sens plus général, celui d'un groupe social noble partageant l'idéal de l'éthos guerrier chrétien tel qu'il se donne à voir dans le genreromanesque, devenu populaire auXIIe siècle. La chevalerie embrasse aussi progressivement l'idéal de l'amour courtois propagé dans lachanson de geste et ses genres connexes[8].

Polysémie : entre groupe social et ensemble de valeurs

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Le terme de chevalerie est fondamentalementpolysémique : désignant d'abord la pratique militaire à cheval, puis une forme de groupe de combattants liés entre eux par une éthique, un style de formation, et une pratique sociale, le mot de chevalerie finit ainsi par regrouper non seulement les hommes, mais aussi leurs valeurs : pour les spécialistes, la chevalerie s'entend ainsi à la fois comme un groupe social et comme un corpus idéologique.

« De nos jours, la chevalerie apparaît aux historiens comme une notion double, couvrant à la fois une construction sociale et une représentation mentale : d’une part, un groupe aristocratique combattant à cheval selon la technique de la lance couchée ; d’autre part, une idéologie utilisée pour prendre et conserver le pouvoir, mais aussi un système de valeurs et un code de conduite. »

— Aurell, Martin, Girba, Catalina[9]

« La chevalerie présente deux acceptions, l’une sociale et l’autre idéologique. D’une part, le groupe aristocratique des combattants à cheval, et d’autre part les valeurs qui lui imposent des comportements spécifiques. »

— Aurell, Martin, Girba, Catalina[10]

PourPhilippe Contamine, historien de la guerre au Moyen Âge :

« Le Moyen Âge est l’époque de la chevalerie. Cette grande notion, à la fois sociale et technique, est censée représenter un certain nombre de valeurs : un noble est normalement un chevalier, et il se fait enterrer avec une pierre tombale le représentant en armure, avec éventuellement son épée. »

— Entretien avec Philippe Contamine, propos recueillis par Laurent Testot[11].

Pour le médiévisteNigel Saul, professeur d'histoire médiévale à l'Université de Londres, il y a ambivalence dans la notion de chevalerie, entre groupe social, ensemble de valeurs et code de comportement :

« La chevalerie médiévale était plus un ensemble d'attitudes qu'une doctrine, plus un style de vie qu'un code éthique explicite. Elle englobait à la fois une idéologie et une pratique sociale. Parmi les qualités centrales de la chevalerie figurent la loyauté, la générosité, le dévouement, le courage et la courtoisie, des qualités qui étaient estimées par la gent militaire et que les contemporains considéraient comme étant celles que le chevalier idéal devait posséder. »

— Nigel Saul[12]

Nigel Saul insiste d'ailleurs sur la diversité des définitions dont la chevalerie fait l'objet :

« Pour certains, [la chevalerie] représente un code de guerre, une construction juridique, un ensemble de conventions destinées à minimiser l’horreur des hostilités. Pour d’autres, il s’agit davantage d’un système de valeurs aristocratiques, une collection de qualités idéales : honneur, courage, loyauté. Pour d’autres encore, c’est essentiellement un phénomène littéraire »

— Nigel Saul[13]

Dans son bilanhistoriographique sur la périodisation de l'histoire de la chevalerie, Aude Mairey,directrice de recherche auCNRS au sein duLaboratoire de Médiévistique Occidentale de Paris fait le bilan suivant :

« Depuis la synthèse de Maurice Keen, parue en 1984 et qui est toujours considérée comme une référence, la plupart des historiens considèrent que la chevalerie doit être entendue comme « une éthique (ethos) dans laquelle des éléments guerriers, aristocratiques et chrétiens se sont fondus », autrement dit comme un code consciemment endossé »

— Aude Mairey[14]

PourJean Flori,historien spécialiste de la chevalerie médiévale, auteur de nombreuses synthèses sur les chevaliers et la chevalerie française :

« La chevalerie, c'est d'abord un métier, celui qu'exercent, au service de leurs maîtres, leur seigneur ou leur roi, des guerriers d'élite combattant à cheval. Les méthodes de combat spécifiques de cette cavalerie lourde la transforment bientôt, par le coût des armements et l'entraînement qu'elles nécessitent, en élite aristocratique. La fonction guerrière se concentre sur une classe sociale qui la considère comme son privilège exclusif. Cette fonction a une éthique. À l'ancien code déontologique de la chevalerie guerrière des premiers temps, fondé sur le devoir d'obéissance au seigneur, de courage et d'efficacité au combat se sont mêlés, issus de l'ancienne idéologie royale, les devoirs de défense du pays et de ses habitants, de protection des faibles, veuves et orphelins, que l’Église a fait glisser des rois aux chevaliers lorsque, à l'époque féodale, le déclin du pouvoir central a révélé la puissance effective des châtelains et de leurs chevaliers. »

— Jean Flori[15]

Pour Montserrat Planelles Ivañez, professeure dephilologie française au département de philologie de l'université d'Alicante, la chevalerie présente ainsi une acception plurielle, un terme dont le contenu a évolué au fil du temps :

« Ce (dernier) terme, qui concernait initialement un groupe de guerriers, a fini par dénommer une distinction sociale impliquant la noblesse et par conséquent la générosité, la bravoure et la protection au service de la société, c’est-à-dire, les valeurs qui seront appelées « chevaleresques » surtout à partir duXVIIe siècle, où chevalier désigne un membre de cette catégorie sociale. »

— Montserrat Planelles Ivañez[3]

Une terminologie floue fondée sur la distinction et le prestige

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S'il est difficile de saisir exactement laterminologie médiévale exacte à laquelle renvoie le concept historique de chevalerie, il demeure assez clair que la notion demiles /militia sert à l'origine à distinguer le combattant chevaleresque des autres Hommes d'armes[3] : sergent, écuyer, valet, garçon. Il en va de même pour tout le vocabulaire technique destiné à décrire la réalité matérielle de la chevalerie : guerrier opposé aux piétons, garçons d'armes, sergents d'armes ; l'usage du destrier ou cheval de bataille / palefroi / sommier opposé au chevalroncin ou au courtaud, l'utilisation d'unheaume /helme /bassinet à la place d'un rudimentairechapel de fer, le maniement de la grandeespée et de ladague, l'affichage d'uneoriflamme /gunfanun /bane, bannière royale[3].

La principale difficulté, pour l'étude des prémices de la chevalerie et donc de sa naissance, provient du fait que la formation de la chevalerie comme phénomène social, technique, guerrier, s'observe par le biais d'une multiplicité de termes servant à désigner les combattants des débuts de la féodalité. Nombre de ces termes coexistent ainsi dans les sources[16] :miles qui est le plus fréquent, et qui finit par prendre le dessus sur d'autres termes,vassus,vasseur,vasallus,nobilis, caballarius, parfois composés comme pourvassus dominicus,nobilissimus miles,vir nobilissimus,miles optimus. La diversité de ces termes dans les actes normatifs et les actes de la pratique du début de l'âge féodal, ainsi que dans la documentation littéraire, témoigne avant tout de préférences locales et de traditions terminologiques variées à l'échelle de l'Occident médiéval[16].

PourDominique Barthélémy, la documentation littéraire permet de distinguer plusieurs usages du motmiles : un « sens technique » dans les récits de chevauchées, désignant les guerriers à cheval utilisant la lance pour la charge, et un « sens protocolaire » dans les passages décrivant les rites royaux de lamonarchie capétienne[16]. Selon lui pour expliquer la diversité des termes et la difficulté d'identifier ce qui constitue la chevalerie des premiers temps,« il ne faut pas prendre les sources comme de simples reflets, mais saisir toutes les contraintes formelles qui pèsent sur elles, de la langue à la diplomatique. Il faut, d'autre part, reconnaître leur pouvoir symbolique, mais aussi ses limites, dans une société où l'écrit n'a guère l'autorité d'un "titre" »[16]. Il rappelle par ailleurs que le degré de développement de l'État et de l'administration auXIe siècle ne leur permet pas de contrôler la revendication de tels titres et de contrôler leur diffusion. Lamilitia desXIe et XIIe siècles n'a ainsi« rien d'un « grand corps de l’État, ni la discipline, ni le professionnalisme à temps plein. Elle couvre d'un vernis de romanité des relations de type vassalique. À tout le moins, en un temps d'interpénétration du « public » et du « privé », privilégie-t-elle « à tort » le premier aspect. »[16], tandis que« leXIe siècle a connu beaucoup moins une « diffusion du titre chevaleresque » (une appellation, au moins, préexistait clairement et noblement), qu'une révélation de la chevalerie concrète. »[16].

Origines antiques de la chevalerie

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À Rome : un ordre social privilégié au service de l'Empire

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Article détaillé :Chevalier romain.
Relief funéraire représentant un chevalier romain (v. 170apr. J.-C.).

Le principal précédent à la chevalerie médiévale est la chevalerie romaine[17]. Les chevaliers romains constituent à l'époque républicaine uneclasse censitaire définie par le niveau de richesse le plus élevé de la société romaine, la possession d'un cheval public, la participation à lalégion dans les rangs les plus équipés et la participation à lacavalerie romaine sur lechamp de bataille. L'appartenance à l'ordo equester permettait à ses membres d'entrer en politique en renonçant au cheval public et en intégrant les cerclessénatoriaux, à l'instar dePompée le Grand en70 av. J.-C. À partir de l'époque impériale, ces deux groupes (chevaliers et sénateurs) sont structurés en ordre juridiques définis, en partie héréditaires, les chevaliers disposant d'un cens de 400 000 sesterces embrassant tantôt la carrière administrative, tantôt la carrière militaire, lessénateurs, d'un cens d'un million de sesterces, embrassant la carrière politique (gouvernorat de province, magistratures publiques)[18].

Les points culminants de la carrière équestre étaient, sous l'Empire, les postes delégats d'Auguste propréteurs, les grandes préfectures (préfecture de l'annone,préfecture de la Ville,préfecture du prétoire) en passant par diverses charges administratives au sein dupalais impérial, des procurations provinciales, et dans les tribunaux de justice. Les chevaliers romains constituent depuis leIIe siècle av. J.-C. la principale force économique du monde romain, se partageant de nombreux marchés publics paradjudication, affermant les impôts dans diversesprovinces.

« Suivant une carrière strictement hiérarchisée, un chevalier doit, avant de parvenir aux affaires, commander des troupes auxiliaires de l’armée romaine pendant près de dix ans. Il peut ensuite briguer la fonction de procurateur et le titre d’homme remarquable (vir egregius). Les procurateurs de l’empereur assurent des fonctions fiscales et administratives d’une grande variété, du recensement à la perception des impôts en passant par le recrutement de gladiateurs et le gouvernement de provinces mineures. La carrière procuratorienne achevée, les chevaliers les mieux en cour accèdent aux grandes préfectures qui leur permettent de gouverner l’Égypte, d’assurer la police ou le ravitaillement de Rome et leur octroie le titre de perfectissime (vir perfectissimus). Enfin, le sommet de la carrière équestre est la préfecture du prétoire qui donne au chevalier, devenu éminentissime (vir eminentissimus), le commandement des cohortes prétoriennes et fait de lui le deuxième personnage de l’Empire. »

— Vincent N'Guyen-Van[19]

Dans l'Antiquité tardive, la rencontre entre l'armée impériale et lesforces germaniques fut la source d'un constat d'inadéquation de l'appareil militaire des Romains des premiers siècles de l'Empire. De nombreuxauxiliaires utilisaient déjà alors des équipements différents, comme laspatha. SousGallien (r. 253-268), on mit en place des corps spécialisés de cavalerie détachés des légions (vexillations). Le recrutement local d'étrangers au service de la légion s'amplifia sousAurélien (r. 270-275). Les habitudes militaires germaniques finirent, à terme, par s'imposer progressivement dans les pratiques de la légion[20].

Dans le cadre de l'éclatement de l'Empire romain naît une nouvelle société, celle desroyaumes francs et germaniques, fondée à la fois sur les traditions romaines qui n'ont pas disparu et ont été intégrées aux rites politiques, aux langages sociaux, et sur le primat des relations privées d'homme à homme, issues des anciens peuples germaniques. Le rapport parfois étroit entre souverains germano-francs etÉglise romaine accélère la diffusion de lareligion chrétienne au sein des espaces de l'Europe occidentale[20].

Les sociabilités guerrières germaniques

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Si les chevaliers romains ont longtemps été considérés comme les ancêtres directs de la chevalerie médiévale, l'historiographie contemporaine tend plutôt à voir dans le monde germanique de l'Antiquité et de l'Antiquité tardive les structures sociales, juridiques et les traits culturels les plus proches de la chevalerie médiévale. Les témoignages sur cet espace culturel sont hélas très fragmentaires, partiaux et externes pour l'Antiquité. L'auteur antique qui fournit le plus de renseignement sur le sujet estTacite. Dans son ouvrageLa Germanie, cet historien romain duIer siècle s'attache à décrire une partie des rituels sociaux, des croyances religieuses et des structures politiques du monde germanique auquel Rome a été confronté lors de son expansion. Il utilise ainsi le termecomitatus, dans son sens générique de suite ou d'escorte, pour désigner une pratique germanique : les chefs sont entourés d'une bande de guerriers qui leur doivent une fidélité complète. Selon lui, il est honteux pour les membres de cecomitatus, de cette bande, de revenir vivants d'un combat où leur chef a péri[21]. On a souvent vu dans ce passage le témoignage d'une organisation sociale et militaire qui serait à l'origine de laféodalité médiévale et des liens devassalité qui l'organisent[22].

Tacite décrit de même un rite de passage des Germains marquant leur entrée dans l'âge de la guerre :« Affaires publiques ou affaires privées, ils ne font rien sans être en armes. Mais la coutume veut que nul ne prenne les armes avant que la cité ne l'en ait reconnu capable. Alors, dans l'assemblée même, un des chefs ou le père ou ses proches décorent le jeune homme du bouclier et de la lance : c'est là leur toge, ce sont là les premiers honneurs de leur jeunesse »[23].

De nombreux liens ont donc été recherchés entre les sociétés du haut Moyen Âge et la description de Tacite afin d'illustrer une continuité de cette institution, en particulier dans le mondeanglo-saxon[24]. Steven Fanning a toutefois souligné la fragilité de cette construction historiographique. Il remarque que pas une seule fois le motcomitatus n'apparaît pour désigner une telle institution dans les sources de la période des royaumes anglo-saxons et surtout les exemples avancés pour soutenir l'idée d'une continuité entre la pratique germanique connue par Tacite et le haut Moyen Âge anglo-saxon n'ont pas la valeur qui leur est souvent attribuée : lecomitatus anglo-saxon dépeint par l'historiographie moderne est une fiction et n'est pas une description pertinente des cortèges guerriers anglo-saxons[25]. Selon lui, l'interprétation du texte de Tacite a souvent été forcée pour le rapprocher des réalités féodales, sans tenir compte du contexte et des buts propres à l'œuvre de Tacite[26].

Lecomitatus de Tacite a aussi occupé, sous le nom deGefolgschaft, une place importante dans l'historiographie allemande mais avec des interprétations très divergentes. AuXIXe siècle, lecomitatus était présenté comme la preuve d'une organisation germanique égalitaire, puis il fut vu au contraire comme le signe d'une société profondément aristocratique et hiérarchisée, lecomitatus devenant sous le régime nazi l'illustration duFührergefolgschaft[27]. On considère en général que lecomitatus germanique de la description de Tacite correspond aumännerbund mis en évidence par les études comparatistes dans les sociétés indo-européennes.

D'autres éléments issus de la culture guerrière germanique mentionnés par Tacite au sujet des Germains transitèrent et s'implantèrent en Europe occidentale après la disparition de l'Empire romain : la pratique de lafaide, vengeance privée fondée sur le partage des inimitiés au sein des familles, lewergeld, ou la possibilité de racheter un crime en or, etc[28]... La Germanie décrite par Tacite n'est cependant pas la même que celle de l'Antiquité tardive : il faut en effet attendre plusieurs siècles pour que les Germains, principalement les Francs et les Alamans, les Suèves et les Vandales, pénètrent durablement le monde romain, pour s'y implanter.

Le rôle du cheval et son utilisation guerrière

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De nombreux auteurs ont souligné la force de continuité qui réside dans la pratique de la guerre à cheval et la constitution de groupes de combattants d'élite montés, servant dans la cavalerie de guerre des grands royaumes et empires antiques. F. Cardini identifie ainsi chez lesScythes et chez lesSarmates, ainsi que chez les « peuples des steppes » les « racines lointaines de la chevalerie médiévale »[20]. Le monde celtique et la Germanie antiques ne sont pas en reste et témoignent eux-aussi d'une forte symbolique sociale de la possession du cheval chez les élites[29]. Ces groupes culturels mettaient en effet particulièrement en avant le cheval, l'exploit guerrier personnel, éléments de base qui constituèrent plus tard les bases de l'idéologique chevaleresque[30]. Du mondehunnique aux confins germaniques du monde romain, de nombreux peuples comme lesGoths pratiquent ainsi l'inhumation rituelle du cheval comme accompagnement funéraire des membres de l'aristocratie[30]. La mise en scène, dans le vivant comme dans la mort, du cavalier lourdement armé concentre alors des attributs qui tendent à le présenter comme inexorable, invincible au combat.

Le monde germanique montre, dès leIIIe siècleapr. J.-C., des traits proches de ce qui se retrouva par la suite dans le monde médiéval : sacralisation rituelle des cavaliers, du cheval, exaltation de la grande épée de fer érigée en marqueur social[30]. Paradoxalement, dans les sources de l'Antiquité tardive, la réputation de ces guerriers est cependant plutôt celle d'excellents piétons que celle d'excellents cavaliers[31]. La ressemblance entre monde germanique tardo-antique et chevalerie médiévale doit à ce titre être pondérée et remise dans le contexte d'évolution des pratiques militaires.Ammien Marcellin, historien romain duIVe siècle, évoque même l'idée que tout aussi habiles que furent les cavaliers germains, ils n'étaient pas de taille en combat singulier face auxclibanarii et auxcataphractaires romains et devaient ainsi démonter de cheval et se battre à pied pour faire un usage optimal de leur force[31]. Il arrive même que des Germains dénoncent l'usage du cheval dans l'aristocratie : ainsi, les protestations des piétons Alamans face à la suite du roiChnodomaire en 357, accusant les cavaliers de pouvoir fuir plus facilement en cas de revers[31].

Si les héritages germaniques ont un rôle déterminant dans le substrat idéologique qui donne naissance à la chevalerie médiévale, il ne se sont pas transmis selon une droite lignée unique, et Dominique Barthélémy souligne que les antiques Germains ne sont pas les seuls ancêtres de la chevalerie médiévale, née, selon lui, de la fusion de traditions portées par des familles des élites romaines, germaniques, gallo-romaines, gallo-germaniques, constituant la société du haut Moyen Âge occidental[32].

La sacralisation des épées

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La sacralisation de l'épée est attestée chez lesAlains notamment, chez lesquels on fichait parfois une épée en terre lors de pratiques rituelles : l'épée était affublée d'une origine merveilleuse, d'une personnalité, d'un nom, et on jurait et prêtait des serments sur elle[30]. Dans lesmythes et épopées liées à la chevalerie, élaborés au cours duMoyen Âge central, certaines d'entre elles sont même façonnées par des forgerons mythiques, comme celle que reçutGeoffroy Plantagenêt en 1127 ; certains autres souverains et chevaliers de chansons manièrent des épées aux noms légendaires : « Joyeuse », « Excalibur » ou « Durendal »[33]. Le christianisme récupéra par la suite ce rite à sa façon, par le biais de l'insertion rituelle dereliques dans les poignées etpommeaux d'épées. Le fond d'origine de certaines pratiques rituelles et symboliques de la chevalerie médiévale se situe donc dans les pratiques magico-religieuses de la fin de l'Antiquité[30].

Naissance de la chevalerie à l'époque médiévale

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Époque franque et mérovingienne

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L'installation de nombreuses populations germaniques dans le monde romain occidental a pour conséquence de transformer non seulement une partie des pratiques militaires, mais aussi un certain nombre de pratiques socio-culturelles du quotidien : le droit, les statuts juridiques personnels, les coutumes funéraires[34]. La présence des armes dans lesrites funérairesfrancs et germaniques est un des grands changements de traditions en regard despratiques mortuaires romaines, qui privilégiaientl'incinération des morts et ne donnaient pas d'importance symbolique à l'éclat des armes déposées auprès des morts. Dans les coutumes germaniques et franques, au contraire, la présence des armes aux côtés du mort constitue un marqueur de statut particulièrement important, qui est attesté au moins jusqu'à la fin duVIe siècleapr. J.-C. Les sources du début du Moyen Âge, à l'époque mérovingienne, font souvent la part belle à l'éclat des armes des premiers souverains barbares d'Occident, mais font aussi l'éloge de la douceur, de la justice, de la sagesse de ces souverains qui reprennent à leur compte des traditions politiques venant des deux mondes, germanique et romain[34].

L'époque mérovingienne et franque est donc marquée par des idéaux politiques et des modèles devertus qui préfigurent d'une certaine façon les valeurs chevaleresques ultérieures. Dominique Barthélémy note d'ailleurs que les auteurs hostiles aux souverains de la troisième génération mérovingienne, commeGrégoire de Tours, font montre d'un jeu demiroir entre un idéal de vertu guerrière et politique et un contre-modèle pétri de barbarie et de violence incontrôlée, mû uniquement par le droit defaide et la vengeance obstinée[34]. Il faut finalement attendre plutôt leVIIe siècle et la naissance de laroyauté carolingienne auVIIIe siècle pour que de nouveaux idéaux de comportement du souverain se fassent jour, au gré de la christianisation des monarchies franques : défense des faibles,équité, justice, protection des pauvres, condamnation del'homicide entre chrétiens, recul de la "vengeance germanique"[34].

Selon Dominique Barthélémy, on peut aussi voir dans certains rituels sociaux mérovingiens les prémices de l'adoubement tel qu'il se développe plusieurs siècles plus tard[35] : on peut ainsi mentionner la remise de la lance et du bouclier àChildebertII parGontran qui le désigne comme son héritier, en 580, sous la forme d'un rite d'alliance entre parents, en guerre contreChilpéric[35]. Le renouvellement de ce vœu est d'ailleurs fait publiquement en 585, après la mort de leur ennemi. Cet adoubement à la mérovingienne se retrouve plus tard auVIIe siècle, lorsque la plupart des souverains mérovingiens sont jeunes, mineurs, et passent par une cérémonie de remise des armes par leurs aînés, permettant de revêtir l'habit et le rôle d'un guerrier entré dans l'âge adulte[35]. Le don ou la confiscation des armes occupent ainsi une place prépondérante dans le façonnage des identités militaires mérovingiennes, comme cela fut le cas dans les pratiques de la chevalerie à l'époque féodale[35].

Époque carolingienne

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Les habitudes chevaleresques qui se sédimentent et se définissent à partir duXIe siècle puisent directement leurs racines dans les sièclescarolingiens, où naît progressivement la figure du chevalier classique, des combattantspreux, emplis de piété, du service pour le faible, et de courage guerrier. En effet, le monde carolingien cultive, sur le mode de l'identification au monde romain, l'idéalisation du cavalier - pétri de bravoure militaire, fort de l'entraînement individuel le plus poussé, mû par le service aux autres.

Un des cœurs de naissance de l'éthos chevaleresque dans le monde carolingien est en particulier laFrancie, où les soldats à cheval de la cavalerie deCharlemagne constituent rapidement un modèle de corps militaire dévoué, redoutable, noble et auréolé de gloire. L'époque carolingienne est en effet celle de la transformation de l'aristocratie franque et du développement de la cavalerie lourde, grâce aux évolutions de l'armement offensif et défensif et - en partie seulement - grâce à l'introduction de l'étrier[36]. En outre, les idéaux moraux connaissent une évolution de fond : la mise en valeur d'un tempérament de justice et de piété remplace la férocité franque. L'accent est désormais aussi mis sur la soumission au roi et aux comtes, sur la nécessité du service au peuple, plutôt que sur la lutte pour son honneur privé[36].

C'est auIXe siècle carolingien que les termes demiles et demilitia connaissent un premier fleurissement dans les sources écrites[36]. Ils entrent en concurrence avec d'autres termes, comme vasseur,vassus, jusqu'à les effacer complètement vers les années 980 - 1050[37]. Le régime carolingien, fortement teinté de morale chrétienne, déploie alors des rituels politiques et des institutions régulières plus stables :palais royaux et impériaux, plaids publics,ost royal, lois etcapitulaires,expansion militaire et unification du monde franc, sont autant de facteurs qui permettent aux guerriers de discipliner leurs pratiques, d'introduire la défense de l'Église - alliée par excellence de la couronne impériale - comme une nécessité.

Charlemagne peut alors lever, vers800, environ 35 000 cavaliers enFrancie, pour 100 000 fantassins, ce qui correspond aux proportions observables à l'époque des croisades[38]. Les cavaliers sont alors ceux qui sont réputés posséder 12manses, soit l'équivalent d'une petite seigneurie d'un notable local, lié à un grand laïc ou un abbé à qui il sert d'escorte militaire, en échange d'armement de qualité[38]. La cavalerie carolingienne est encore bien différente de la chevalerie classique au niveau de son équipement : le blindage complet du cheval et des combattants n'est pas à l'ordre du jour, pas plus que la charge totale à la lance.

Les principales évolutions de l'équipement tiennent au développement du casque, le heaume, qui se renforce et se perfectionne ; labroigne composée de cuir doublé de plaques de métal rivetées ou lacées, se raffine, devient sujet de capitulaires interdisant leur exportation. La protection des jambes (jambières de fer), des bras (brassières) se développe aussi[39]. Du point de vue de l'armement offensif, la fabrication desépées connaît un fort raffinement et un perfectionnement. Les épées longues, de 90–100 cm, se développent, dotées de lames longues, effilées, destinées à achever les ennemis, elles complètent désormais le glaive court, de 65–80 cm qui équipait jusque lors les guerriers francs.

Le prix de cet équipement est cependant très élevé, et pour se maintenir au niveau, la plupart des guerriers carolingiens de haut rang se doivent de continuer de fréquenter les cercles du pouvoir local, afin d'y entretenir des relations économiques fructueuses : le cavalier, qui a le statut devassal, reçoit en effet entretien et protection de la part de son seigneur. Cette époque voit le développement des serments de fidélité et de sociabilités militaires nouvelles : il faut être agréable et doux avec ses compagnons de vassalité, lescommilitiones mentionnés parDhuoda dans un petit manuel éducatif qu'elle écrit pour son fils vers 840[40].

Les conquêtes carolingiennes, qui battent alors leur plein auxVIIIe et IXe siècles, furent l'objet d'une mise en récit et en épopée auXIIe siècle : elles formèrent alors un corpus littéraire particulièrement fécond pour l'idéologie chevaleresque duMoyen Âge central : les actes - fictifs - du valeureuxRoland, du traîtreGanelon, de Charlemagne, et d'autrespreux, deviennent une source d'inspiration pour leurs lointains devanciers de l'époque capétienne.

Début de l'époque féodale

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Illustration du combat monté à la lance, typique de la chevalerie médiévale. Sur cette image,Richard le Maréchal désarçonne le comteBaudoinIII de Guînes lors de la Bataille de Monmouth en1233 -Manuscrit enluminé de l'Historia Major deMatthieu Paris, Cambridge, Bibliothèque duCorpus Christi College,vol. 2, MS 16, fol. 88r.

La fin duIXe siècle marque le début de l'époque féodale : la mort deCharles le Gros, en888, marque la fin de l'unité de la Francie sous l'égide des Carolingiens. De nombreuses principautés et dynasties (rollonides,bosonides,hugonides,ramnulfides,robertiens,réginarides, etc.) émergent dans l'ancien empire, les royautés se désagrègent et perdent peu à peu le contrôle territorial qui leur venait des structures provinciales romaines, au profit du développement des autorités locales. Les nouvelles figures de l'autorité locale sont les seigneurs, clercs et laïcs, et leurs vassaux, qui gravitent autour des comtes et des principautés régionales[41].

La multiplication des dynasties locales et des seigneuries marque le début d'un âge de l'enchâtellement (multiplication des fortifications urbaines et des places fortes), caractérisé par la hausse de la conflictualité, les guerres de voisinage, les conflits privés entre seigneurs. L'hérédité des seigneuries se met en place et va de pair avec un ancrage sur le long terme des lignages de propriétaires terriens[41]. Toujours fortement marqué par les structures idéologiques de la société carolingienne, l'âge de la féodalité n'est pas pour autant synonyme d'anarchie : les relations vassaliques et l'ancrage croissant de la chrétienté participent pleinement à l'encadrement des hommes et des espaces[41]. Le service des armes et la participation à la guerre sont désormais liés aux sollicitations des seigneurs qui mobilisent leurs vassaux : les liens de fidélité, les serments d'homme à homme, définissent le cadre dans lequel les combattants, plus ou moins aisés, équipés, entraînés et spécialisés, font de la guerre une activité régulière pour honorer la fidélité dont à laquelle ils se sont engagés.

La production écrite n'est pas en reste et témoigne de l'avènement d'une nouvelle figure sociale, plus nettement identifiée dans les sources : le chevalier, combattant serviable et loyal, parfois turbulent et indomptable, qui gravite autour des ducs et des seigneurs.

À la fin duXe siècle et au début duXIe siècle, on observe dans la langue écrite une transformation terminologique, voyant le triomphe sémantique dumiles sur ses concurrents, vasseur etvassus. Ces mots servent désormais à désigner non seulement une position sociale mais surtout une catégorie spécifique de combattants :miles,chevalier,ritter,knight, autant de termes qui triomphent dans les usages courants (chartes, actes privés et chroniques) pour créer une séparation entre leschevaliers et les autres hommes. Les auteurs dechartes et de documents normatifs ressentent ainsi la nécessité de formuler dans l'écrit une nouvelle catégorie sociale, soit que celle-ci préexiste suffisamment, soit que la pratique des textes tend désormais à faire figurer ces informations statutaires[42].

Le titre prend d'abord une dimension militaire. La vocation des chevaliers était le combat : les évolutions des pratiques de guerre à la fin de l'époque carolingienne avaient consacré progressivement le primat ducavalier lourd et du soldat lourdement armé, spécialiste, chèrement équipé, sur le champ de bataille. Lecheval occupe une place centrale dans cette panoplie de guerre nouvelle. Entre progrès de la technologie duharnois, de l'étrier, et naissance de l'escrime à la lance montée, la supériorité technique descavaliers lourds s'impose nettement auXIe siècle, creusant d'autant plus le fossé socio-technique entre chevaliers et piétons classiques[42]. Les chevaliers constituent dès lors uneclientèle de combattants professionnels qui gravitent autour d'un grand, unseigneurféodal, dont le nombre va croissant au gré de la féodalisation de la société et de la mise en place d'unréseau castral important en Europe occidentale. La pratique des armes libérait par ailleurs les détenteurs d'une telle charge de certaines taxes qui pesaient sur le travail de la terre[42].

À la fin duXe siècle, la montée en puissance de l'idéologie de lapaix de Dieu impose de séparer, en l'espèce, lesinermes, les hommes dépourvus d'armes, des armés, accusés de propager laviolence et le désordre : on imposa progressivement à cesmiles de prêter desserments de protection, de lier leur pratique des armes à une éthique de la violence bien délimitée, afin de protéger les plus fragiles. La chevalerie en gestation se retrouve alors autour deprivilèges fiscaux, les préservant des exactions seigneuriales, et de devoirs militaires encadrés par une forme de code de conduite[42].

Statut social et économique

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Le statut socio-économique de la chevalerie et des chevaliers est difficile à saisir. Même si les romans courtois désignent la chevalerie comme un « Ordre » (ordo) constitué, la chevalerie est socialement composite et est formée d'un personnel aux origines variées. Elle entretient d'ailleurs des rapports assez complexes et fluctuants avec la « noblesse » (l'aristocratie) franque et capétienne. La noblesse au Moyen Âge n'est en effet pas encore un statut ou unprivilège mais une « qualité d'intensité variable », selon George Duby : elle n'est alors réglementée par aucune forme de texte normatif.Nobilis est alors avant tout un adjectif : on peut être plus ou moins noble ; alors quemiles est un substantif : on est chevalier ou on ne l'est pas.

Tous les chevaliers n'étaient cependant pas des guerriers à plein temps : la plupart d'entre eux font partie de lapaysannerie propriétaire aisée, dégageant des surplus et faisant exploiter une partie de leur terre par d'autres, et participent à la naissance de l'économie féodale. Les chevaliers-paysans, cultivateurs et combattants occasionnels, sont nombreux autour de l'an mil[43], vivant en groupe dans de grosses maisons fortes[42]. Le chevalier se doit de fréquenter sonsuzerain et d'adopter un train de vie presque similaire tout en restant moins fastueux, et est souvent lui-même seigneur d'une terre modeste, qui lui assure unrevenu foncier cependant suffisant pour entretenir et payer son équipement. Les chevaliers sont donc, pour beaucoup, dans une position économique favorisée, si ce n'est très favorisée. S'il existe des chevaliers peu argentés et ne roulant pas sur l'or, ils occupent, quoi qu'il arrive, les strates les plus élevées et les plus privilégiées de la société médiévale.

Quelles que soient les origines du chevalier, la vie chevaleresque et le mode de vie militaire a un prix économique de plus en plus important au cours du Moyen Âge[44]. AuXIIe siècle, les équipements de base du chevalier (cheval, soin à l'écurie et alimentation, sellerie,heaume,haubert, épée et bouclier), ainsi que son entretien, représentent le revenu annuel d'une propriété terrienne de 150hectares. Trois siècles plus tard, l'équipement nécessaire engloutit le produit du travail de plus de 500 hectares[45].

Chevalerie et noblesse : une hérédité construite au cours du temps

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À l'origine, la chevalerie n'est pas exclusivement synonyme denoblesse, mais elle en devient l'expression de sa force armée au cours du second Moyen Âge. Avant leXIe siècle, la plupart des grands seigneurs et princes mènent sur le champ de bataille leurs guerriers, et ne s'intitulent pas eux-mêmes chevaliers. Cette dénomination apparaît plus tardivement, traduisant une militarisation de la société, ainsi que la mise en valeur accrue de la fonction guerrière et l'essor de la chevalerie[46]. Pour le philosophe et alors pressenti évêque de Chartes, d'origine anglaise,Jean de Salisbury (v. 1115-1180), les chevaliers sont les « mains armées » du prince : ils doivent combattre pour faire régner son ordre sur ses terres[46].

Les rapports entre ces deux groupes, chevalerie et noblesse, évoluent au fil du temps. AuxXIe et XIIe siècles, la plupart des hommes d'armes montés sont au service des princes et de leurs suzerains ; ils ne font cependant pas partie de la noblesse, à laquelle ils aspirent pourtant par le truchement de mariages hypergamiques, d'alliances économiques et politiques, ainsi qu'en récompense d'importants services rendus, à la guerre ou non. La chevalerie a donc été pour certains hommes du début duXIe siècle unascenseur social, permettant d'intégrer les rangs les plus privilégiés de l'aristocratie. Une fois l'agrégation entre cette chevalerie et lanoblesse consommée, moins d'un siècle après, cet effet d'ascenseur social se tarit fortement[42]. La noblesse s'intéressant de plus en plus à la chevalerie, à laquelle elle s'assimile, en exaltant désormais ses valeurs comme définitoire de leur statut supérieur, elle s'érige en un ordre plus fermé, dans lequel on ne peut pas faire irruption par la simple force de son courage guerrier[46].

AuXIIIe siècle, la noblesse tend ainsi progressivement à réserver à ses fils l'entrée en chevalerie : progressivement, des lois et édits interdisent l'adoubement de jeunes hommes non-nobles, sauf dérogation accordée par le souverain. À la même époque, des législations royales deFrance, d'Allemagne et d'autres royaumes d'Europe disposent que l'on ne peut accéder à l'honneur chevaleresque que si l'on est soi-même de lignée chevaleresque[47], figeant dans le droit et dans l'hérédité une situation socio-technique qui faisaient des familles les plus privilégiées les détentrices de la force armée. Vers 1250, chevalerie et noblesse en viennent alors à se confondre progressivement. Tous les nobles, à quelques exceptions près, sont « faits chevaliers » au cours de leur jeunesse et de leur formation aux armes, mais tous les chevaliers en titre ne sont pas nobles ni seigneurs pour autant. La situation s'inverse ensuite, après leXIIIe siècle : dès lors tous les chevaliers sont nobles à quelques exceptions près, mais tous les nobles ne se font plus chevaliers. AuxXIVe et XVe siècles, les adoubements de noble se raréfient. Puis, tout à la fin du Moyen Âge, la noblesse héréditaire se passe progressivement assez largement de la chevalerie : de plus en plus de nobles ne revêtent ainsi aucune fonction militaire[46].

Les chevaliers de la fin du Moyen Âge et du début de l'époque moderne sont, pour beaucoup, les cadets célibataires et sans héritage, voire les bâtards reconnus par un père noble, seuls les fils aînés héritant alors[46].

Influences de lafurûsiyya arabe

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La chevalerie chrétienne occidentale n'est pas la seule à se développer dans les siècles centraux du Moyen Âge. On considère traditionnellement qu'une partie des valeurs morales et chevaleresques, ainsi qu'une partie de la littérature latine consacrée à la chevalerie à partir duXIIe siècle est fortement influencée par la littérature arabo-musulmane d'Espagne, qui se développe à partir duVIIIe siècle sous l'égide du califat Omeyyade de Cordoue.

Lafurūsiyya naît et s'épanouit depuis l'Orient dans la deuxième moitié duVIIe siècle, en Arabie, puis connaît un fort développement auIXe siècle dans le monde islamique sous l'impulsion des milieux militaires d'Asie Centrale et duKhorassan dont l'importance va grandissante dans l'Empire abbasside en voie de militarisation accrue[48]. Elle a pour ambition principale de perpétuer les traditions hippiques irano-sassanides, sur lesquelles les califes abbassides s'appuyaient pour former l'élite de leur armée[48]. Elle mêle, dès ses origines, les héritages de la culture de cour sassanide, les pratiques équestres de la noblesse sassanide (la chasse, le polo…), les théories militaires des tacticiens et stratèges grecs et byzantins, y intègre la jeune poésie arabe et les valeurs portées par lesfawāris (« chevaliers ») arabes préislamiques[48].

Dans la culture arabe classique, le chevalier,Fáris (فارس), doit être un homme maîtrisé, baigné de dignité, d'éloquence, de douceur, sachant monter à cheval, il doit avoir des talents artistiques, il doit jouer de la musique et maîtriser les armes avec habileté. Les origines de la chevalerie arabe remontent à l'établissement ducalifat abbasside enIrak pendant la seconde moitié duVIIIe siècle. L'art de lafurûsiyya se ramifie progressivement en unefurûsiyya supérieure (al-ulwiyya) qui se pratique sur le cheval, et unefurûsiyya inférieure (al-sufliyya) qui se pratique à terre. Lafurûsiyya est le propre des guerriers et des pratiquants de la guerre (al-harbiyya) et le propre de la noblesse arabe (al-nabilah). Le Furûsiyya al-nabilah, chevalerie des nobles arabes qui entourent les califes, regroupe les concepts deshaja'a (courage),shahama (galanterie),muruwwa (virilité) etsakha (générosité)[49]. Cet idéal se rapproche fortement du chevalier noble romanesque, homme de cour, de raffinement, pratiquant l'amour courtois et les arts en prime de son engagement militaire[50].

L'art de lafurūsiyya formait une culture se rapportant à l'ensemble des techniques et pratiques entourant la guerre, ou étant susceptible de servir aux guerriers : volerie, chasse, recettes du feu grégeois, façon de monter à cheval, escrime[48]. L'intégration et la connaissance de ces pratiques étaient des signes distinctifs d’une élite militaire de cavaliers, qui irriguait l'ensemble du champ social du monde islamique[48]. En plus de revêtir une dimension technique, la formation du guerrier islamique se devait d'être aussi religieuse et morale : lafurūsiyya était donc aussi fortement marquée par un accent religieux dont elle ne se départit jamais[48]. S'effaçant un temps à partir duXe siècle, lafurūsiyya connaît une forte poussée et une remise en avant auXIIe siècle, en réaction à l'irruption des arméescroisées en Orient : dans ce cadre, les pouvoirs locaux des provinces levantines et syriennes du domaine abbasside mènent un réarmement moral, dont le pivot était ledjihad. Ces pouvoirs mirent progressivement en place des armées semi-professionnelles, puis professionnelles, notamment chez lesAyyoubides puis chez lesMamelouks, afin de faire face auxÉtats latins d’Orient et aux attaquesmongoles duXIIIe siècle.

Une exposition consacrée aux liens entre chevalerie arabe et chevalerie occidentale s'est tenue auLouvre Abu-Dhabi, du au. Coorganisée par lemusée de Cluny - Musée national du Moyen Âge et lemusée du Louvre, cette exposition proposait d'explorer un sujet souvent méconnu, en dressant un panorama de la culture chevaleresque médiévale. Les commissaires de l'exposition présentaient ainsi les liens étroits et souvent oubliés entre les deux mondes[50].

« L’art des cavaliers d’élite, la furûsiyya en Orient, la culture chevaleresque en Occident, nés parallèlement vers lesVIIIe – XIe siècles et puisant à des sources en partie communes, ont tissé tout au long du Moyen Âge des liens multiples, encore largement méconnus. Ce ne sont pas seulement les principales armes défensives ou offensives, mais aussi les valeurs et les ambitions, les substituts et les formes parallèles à l’affrontement guerrier, les épopées, romans et poèmes mêlant récits de prouesses au combat et d’aventures amoureuses que l’exposition propose de mettre en regard. »

— Elisabeth Taburet-Delahaye et Michel Huynh[51]

Les objets présentés dans l'exposition sont issus d'un vaste espace comprenant Proche et Moyen-Orient, Irak, Iran, Égypte, ainsi que l'Europe occidentale, notamment la France et les pays germaniques, en accordant une attention particulière aux centres qui furent lieux de rencontres pour les cultures chevaleresques médiévales, notamment le sud de l'Espagne, la Sicile et la Syrie[52].

Pour Souraya Noujaim, directrice scientifique de l'exposition, responsable des collections et des expositions du Louvre Abu-Dhabi[53] :

« Prenant leurs sources dans des valeurs similaires –le courage, l’honneur, la discipline et la foi – la furūsiyya orientale et la chevalerie occidentale exigeaient les mêmes aptitudes, à la fois physiques, sportives, religieuses et intellectuelles. […] Par-delà la guerre et les joutes, l’exposition se propose d’éclairer le développement de la culture de la chevalerie en lien avec les mutations de la société médiévale –à travers la littérature, la musique et les arts, au fil d’une exposition intellectuellement stimulante et visuellement captivante. »

— Souraya Noujaim[54]

Chevalerie et chrétienté : des relations complexes

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Un rejet initial de la violence

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Aux origines de la chrétienté, l'idée de service militaire est profondément incompatible avec la doctrine religieuse[55]. Le serment militaire de la légion romaine, associé au culte de la figure agissante de l'empereur, sont perçus par les auteurs chrétiens comme de l'idolâtrie[20]. Les premiers chrétiens rejettent assez massivement le service militaire et la participation passive ou active à des actes de guerre ou de violence. Ils refusent d'assister aux jeux du cirque ou de condamner à mort. L'Église des premiers temps juge incompatible la profession de soldat avec l'état de chrétien. Bon nombre de martyrs le furent d'ailleurs car ils refusaient de faire leur service militaire. AuIVe siècle, avec la conversion progressive des souverains romains, la transformation du christianisme en religion licite, eta fortiori en religion du pouvoir, l'antimilitarisme des premiers temps devient suspect, voire critiqué[20]. Ainsi, le synode d'Arles en 314 condamne ouvertement les fidèles refusant de se battre et jetant leurs armes en temps de paix, les incitant ainsi à effectuer leur service militaire en tout temps. L'acculturation religieuse et politique des peuples germaniques entrés dans l'Empire consacre le rapprochement entre service de la Cité de Dieu et pratique des armes : lutter contre les barbares païens devient un devoir[20].

Naissance de l'idéal du milicien chrétien

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Les premiers textes défendant la vocation chevaleresque et l'établissement d'une classe de combattants dont le rôle serait de défendre la chrétienté et de se battre pour Dieu se développent à partir duXe siècle, dans le cadre de la féodalisation progressive de la société médiévale, ainsi que de l'accélération de la christianisation. La Vie de SaintGéraud d'Aurillac, rédigée parOdon, second abbé de Cluny, dans les années 930, fait ainsi mention de l'utilisation légitime de l'épée et de la violence contre l'ennemi du Christ, dont il faut défendre l'Église[56]. La notion demiles Christi commence alors à se répandre.

À la même époque, malgré le mouvement de laPaix de Dieu, l'Église adopte progressivement une position plus tolérante à l'égard de la guerre pour la défense de la foi, embrassant la pratique de la « guerre juste » ; des cérémonies de bénédiction des épées des combattants se développent, ainsi que des immersions rituelles de chevaliers pour se purifier de la violence et du sang versé, afin de recevoir l'onction de Dieu[57]. L'idée d'une chevalerie compatible avec la vocation chrétienne naît alors du mariage entre pratiques militaires héritées du monde antique et germano-franc et vocation de défense du Christ et de son enseignement à travers le monde, sur le modèle des héros de l'Ancien Testament[58].

Le rôle des croisades

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Miniature d'un manuscrit enluminé représentant un combat de la deuxième croisade deLouisVII, venu à l'aide du roi de JérusalemBaudoinIII contre les armées arabes, au milieu duXIIe siècle. -Guillaume de Tyr, Histoire d'Outremer,XIVe siècle, Paris, BnF, département des Manuscrits, Français 22495fo 154 vo.

À ses débuts, la chevalerie ne fait pas l'objet d'un discours unanimement valorisant de la part de l'Église. Si cette dernière soutenait et accordait sa bénédictions aux chevaliers partant encroisade, elle dénonçait aussi ceux qui risquaient leur vie non pas pourDieu mais pour la renommée et la gloire. L’Église a, dès la fin duXIe siècle, fortement contribué à influencer la chevalerie et à modifier ses valeurs, ses devoirs, pour la rendre compatible, si ce n'est tolérable, par la doctrine chrétienne : les chevaliers sont d'abord des guerriers, des hommes dont la profession impliquait la mort d'autres humains, parfois même d'autres chrétiens, il fallait donc rationaliser cette contradiction interne. L'Église a ainsi par exemple choisi d'assurer larémission des péchés à tous les chevaliers désirant combattre lesinfidèles enTerre sainte. Les croisades ont joué un rôle central dans la réconciliation entre l'Église et la chevalerie. Il était désormais possible à partir duXIIe siècle, notamment lors de lapremière croisade prêchée parUrbainII en 1095 d'être chevalier et de combattre pour Dieu, et d'infliger la mort en son nom.

Naissance des ordres militaires

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La chevalerie recouvre en partie, à partir de la fin duXIIe et XIIIe siècles, la notion d'ordre militaire, à l'instar desTempliers puis desHospitaliers par exemple, dans lesquels la pratique de la guerre est encadrée et liée à desvœux religieux. Ces ordres rassemblent des combattants à cheval dont le but est de travailler à la sécurisation des pèlerinages, à l'escorte des croyants enTerre Sainte.

L'impulsion croisée

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Avec laprise de Jérusalem et la défaite de l'arméefatimide à Ascalon, au terme de lapremière croisade, leroyaume latin de Jérusalem est mis en place.Godefroy de Bouillon est choisi par ses pairs comme prince de Jérusalem. Il refuse d'être nommé roi du royaume de Jérusalem. Certaines sources, notamment Daimbert de Pise, mentionnent à son sujet le titre d'avoué du Saint Sépulcre, mais ce titre ne fut en réalité jamais utilisé par Godefroy[59]. En, il reste seul dans ses nouvelles possessions avec seulement 300 chevaliers et 2 000 piétons. Ces hommes d'armes, issus de la croisade, se mirent au service du nouveau souverain, à Jérusalem afin de protéger leSaint-Sépulcre[60]. Une institution similaire constituée de chevaliers, appeléschevaliers de Saint-Pierre (milites sancti Petri), fut créée en Occident pour protéger les biens des abbayes et églises. Ces chevaliers étaient deslaïcs, mais ils profitaient des bienfaits des prières. Par extension, les hommes chargés d'assurer la protection des biens du Saint-Sépulcre ainsi que de la communauté des chanoines étaient appelésmilites sancti Sepulcri (chevaliers du Saint-Sépulcre).

Les établissements francs sont dangereusement isolés les uns des autres et mal reliés à la mer[61]. La plupart des guerriers croisés considéraient en effet leur vœu accompli et retournèrent enEurope[62], convaincus d'avoir instauré une paix solide et durable enPalestine. Cependant des bandes de « grands ou petits chemins », des incursionssarrasines, font régner une insécurité constante. Une grande partie descroisés étaient rentrés au pays après la conquête; il existe bien une soldatesque, mais trop souvent limitée aux villes, les chemins nécessitaient dès lors des déplacements en groupe.

Après la mort de Godefroy, son frère Baudouin,comte d'Édesse, se fait couronner roi de Jérusalem par le patriarche latin de la ville. Il étend le royaume de Jérusalem par les conquêtes d'Arsouf, deCésarée, deBeyrouth et deSidon. De son côté, Raymond de Toulouse, avec l'aide deGênes, fait la conquête ducomté de Tripoli[63]. Les marchands italiens, d'abord réticents à l'idée d'une aventure guerrière risquant de détériorer leurs relations commerciales avec l'Orient, commencent à voir dans les croisades un moyen d'élargir le champ de leurs activités et d'acheter les produits d'Orient à la source, sans passer par l'intermédiaire des musulmans ou des Byzantins[64]. La nécessité de protéger les routes commerciales, les pèlerins, et les marchands, apparaît donc de plus en plus forte. Dans ce contexte, plusieurs ordres religieux se dotent de règles et de structures permettant d'intégrer dans leurs rangs des chevaliers, combattants prêtant serment et recevant les sacrements leur autorisant à exercer la violence au nom de dieu et du Christ.

Les Hospitaliers : du monastère aux chevaliers

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Sous l'impulsion de ces nouveaux rapports de force militaire, l'ordre des Hospitaliers amorce une transformation fonctionnelle et structurelle. L’origine de l'Ordre se trouve auXIe siècle, dans le cadre du monastère bénédictin deSainte-Marie-Latine, fondé àJérusalem au milieu duXIe siècle par des marchandsamalfitains, auquel s'ajoute un peu plus tard le monastère féminin deSainte-Marie-Madeleine ; chacun d'eux est pourvu d'unxenodochium, un hospice ou une hostellerie, dont le rôle est d’accueillir et de soigner les chrétiens accomplissant unpèlerinage enTerre sainte. En 1113,Frère Gérard demande que son hospice soit reconnu comme autonome par rapport aux couvents bénédictins. Le papePascalII promulgue unebullePie postulatio voluntatis en ce sens le[65],[66] en faisant de cet hôpital, « L'Hospital », une institution, une sorte decongrégation[66], sous la tutelle et protection exclusive du pape. Gérard est reconnu comme chef de cette congrégation et le pape précise dès le départ qu'à la mort de ce dernier, les membres de l'Ordre choisiront eux-mêmes son successeur[67]. En 1123,Raymond du Puy prend la tête de l'Ordre[68], il dote les Hospitaliers d'une règle reposant sur celles desaint Augustin et desaint Benoît[69]. Cette règle organise l'Ordre en trois fonctions, les frèresmoines etclercs, les frères laïcs et les frèresconvers qui tous doivent les soins aux malades.

Le, une catégorie de frères prêtres ou chapelains est établie, accordée par le papeAnastaseIV[70] ; le personnel soignant, médecins et chirurgiens, est officialisé dans les statuts deRoger de Moulins du[71] ainsi que les frères d'armes, qui apparaissent pour la première fois dans un texte. Selon Alain Demurger, « c'est à cette date donc que l'Ordre est devenu, en droit, un ordre religieux-militaire »[72].

SousAlphonse de Portugal en 1205, ils sont répartis en frères prêtres ou chapelains, frères chevaliers et frères servants (« servant d’armes et servants de services ou d’office »[73]). Cette organisation en trois classes restera celle desHospitaliers[74].

Les Templiers : une milice du Christ

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L'autre grand ordre militaire lié aux croisades et rassemblant des chevaliers est l'ordre du Temple. Il œuvra pendant lesXIIe et XIIIe siècles à l'accompagnement et à la protection despèlerins pourJérusalem dans le contexte de laguerre sainte et descroisades. Il participa activement aux batailles qui eurent lieu lors des croisades et de laReconquête ibérique. Afin de mener à bien ses missions et notamment d'en assurer le financement, il constitua à travers l'Europecatholique d'Occident et à partir dedons fonciers, un réseau demonastères appeléscommanderies, pourvus de nombreuxprivilèges notammentfiscaux. Cette activité soutenue fit de l'Ordre un interlocuteurfinancier privilégié des puissances de l'époque, le menant même à effectuer des transactions sans but lucratif, avec certainsrois ou à avoir la garde detrésors royaux.

Lorsque l'ordre de l'Hôpital, reconnu en 1113, fut chargé de s'occuper des pèlerins venant d'Occident, une idée naquit : créer une milice du Christ (militia Christi) qui ne s'occuperait que de la protection de la communauté de chanoines du Saint-Sépulcre et des pèlerins sur les chemins de Terre sainte, alors en proie aux brigands locaux. Ainsi, les chanoines s'occuperaient des affairesliturgiques, l'ordre de l'Hôpital des fonctions charitables et la milice du Christ de la fonction purement militaire de protection des pèlerins. Cette répartition ternaire des tâches reproduisait d'une certaine façon l'organisation de la société médiévale, qui était composée de prêtres et moines (oratores, littéralement ceux qui prient), de guerriers (bellatores) et de paysans (laboratores)[75].

SuivantGuillaume de Tyr,Hugues de Payns, un baron champenois, faisant très certainement partie des chevaliers du Saint-Sépulcre dès 1115[76], propose àBaudouinII, roi deJérusalem, la création d'une communauté des « Pauvres Chevaliers du Christ » pour assurer la sécurité des routes. Lors duconcile de Naplouse, en 1120, ces « chevaliers » sont invités à reprendre les armes. La nouvelle confrérie est installée par Baudouin etGormond de Picquigny,patriarche de Jérusalem, sur l'anciennemosquée al-Aqsa, dite aussi,temple de Salomon. Ils tiennent de là leur nom demiles Templii, les chevaliers du Temple, lesTempliers[77]. C'est ainsi que l'ordre du Temple, qui se nommait à cette époquemilitia Christi, prit naissance avec l'ambiguïté que cette communauté monastique réunit dès le départ à la fois desoratores et desbellatores.

Très vite ces chevaliers, qui prononcent les vœux d'obéissance, de pauvreté et de chasteté, mais qui combattent efficacement les infidèles, posent problème au regard des principes de l'Église ; ces « chevaliers du Christ » sont en état de pécher les armes à la main. Hugues fait appel à son parent, l'abbé deClairvaux, pour intercéder auprès du pape.Bernard de Clairvaux composeDe laude nove militie dans laquelle il développe l'idée demalicidium, de malicide en tuant le mal en l'homme et non l'homme.

Bernard y souligne l'originalité du nouvel ordre : le même homme se consacre autant au combat spirituel qu'aux combats dans le monde.

« Il n’est pas assez rare de voir des hommes combattre un ennemi corporel avec les seules forces du corps pour que je m’en étonne ; d’un autre côté, faire la guerre au vice et au démon avec les seules forces de l’âme, ce n’est pas non plus quelque chose d’aussi extraordinaire que louable, le monde est plein de moines qui livrent ces combats ; mais ce qui, pour moi, est aussi admirable qu’évidemment rare, c’est de voir les deux choses réunies. (§ 1) »

De plus, ce texte contenait un passage important où Bernard de Clairvaux expliquait pourquoi les Templiers avaient le droit de tuer un être humain :

« Le chevalier du Christ donne la mort en toute sécurité et la reçoit dans une sécurité plus grande encore. […] Lors donc qu'il tue un malfaiteur, il n'est point homicide mais Malicide. […] La mort qu'il donne est le profit de Jésus-Christ, et celle qu'il reçoit, le sien propre[78]. »

Mais pour cela, il fallait que la guerre soit « juste ». C'est l'objet du§ 2 de L'Éloge de la Nouvelle Milice. Bernard est conscient de la difficulté d'un tel concept dans la pratique, car si la guerre n'est pas juste, vouloir tuer tue l'âme de l'assassin :

« Toutes les fois que vous marchez à l’ennemi, vous qui combattez dans les rangs de la milice séculière, vous avez à craindre de tuer votre âme du même coup dont vous donnez la mort à votre adversaire, ou de la recevoir de sa main, dans le corps et dans l’âme en même temps. […] la victoire ne saurait être bonne quand la cause de la guerre ne l’est point et que l’intention de ceux qui la font n’est pas droite. (§ 2) »

Bernard fait donc bien l'éloge de laNouvelle Milice, mais non sans nuances et précautions… Tous ses§ 7 & 8 (dans lechap. IV) tracent un portrait volontairement idéal du soldat du Christ, afin de le donner comme un modèle qui sera toujours à atteindre.

Hugues reprend ces propos dans sa lettreChristi militibus qu'il soumet, en, auconcile de Troyes qui approuve le nouvel ordre[77]. Les chevaliers qui intègrent l'ordre prononcent les trois vœuxde pauvreté,de chasteté et d'obéissance. Ils reçurent dupatriarche Gormond de Picquigny la mission de« garder voies et chemins contre les brigands, pour le salut des pèlerins » (« ut vias et itinera, ad salutem peregrinorum contra latrones »[79]) pour la rémission de leurs péchés, mission considérée comme unquatrième vœu habituel pour les ordres religieux militaires.

Évolution de la chevalerie au Moyen Âge

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La chevalerie, au cœur de l'ost médiéval

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Chevaliers français autour du roiPhilippeII Auguste en marche pour laBataille de Bouvines - détail d'un manuscrit enluminé desChroniques de Saint-Denis,British Library, Royal 16 G VI f. 377.

Lors duMoyen Âge central, les structures de laféodalité évoluent, au gré de la progressive construction des pouvoirs royaux. Les monarques s'instituent non plus comme des suzerains mais comme des souverains au-dessus des autres, dont le rôle est d'assurer la conservation et la protection du royaume. Pour cela, ils instituent leban, un système par lequel la pyramide de la vassalité permet de rassembler une armée noble autour du roi. Les chevaliers sont ainsi tenus d'être disponibles pendant quarante à soixante jours consécutifs, au sein d'une troupe de campagne appelée l'ost.

Cette forme de service militaire obligatoire était exigé de tous les seigneurs et chevaliers. S'ils n'étaient pas en mesure de le faire, un paiement, l'écuage, pouvait être effectué à la place au suzerain, ce dernier utilisant cette taxe pour s'offrir le service occasionnel de mercenaires (appelésroutiers à cette époque) afin d'épauler l'ost (cas fréquent pour l'ost royal)[80]. Finalement, parce que le service de chevalier standard comprenait 40 jours pour leursuzerain[81],[82], les guerres plus longues de laGuerre de Cent Ans ont conduit les rois à compter de plus en plus sur les mercenaires et lescompagnies libres, et former de nouvellescompagnies permanentes, conduisant à la disparition de l'ostmédiéval et la chevalerie. Pendant la Guerre de Cent ans, de nombreuses chevaleresses prennent parti pour l’un ou l’autre des camps. Jeanne la flamme, par exemple, combat pour les Anglais et gagne son surnom grâce à un coup d’éclat. Assiégée par les troupes françaises à Hennebont, elle prend la tête d’une petite troupe de soldats et profite de la nuit pour enflammer les tentes de ses ennemis[83].

Transformations et création des armées permanentes

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À partir duXIVe siècle, la nature de la guerre changeant, avec l'apparition de nouvelles armes — arbalètes,artillerie — on assiste à la création de véritables compagnies demercenaires, composées de soldats professionnels, qui s'engagent pour le compte du plus offrant. Le lien qui unissait le seigneur et ses vassaux dans l'ost s'estompe ainsi progressivement, en même temps que le système féodal se transforme. Pour ces raisons, la tradition chevaleresque s'estompe et s'efface au profit d'armées professionnelles, parfois permanentes, attachées non plus à la tradition féodale, mais au service du souverain, du roi et de l'État. La chevalerie prend alors de plus en plus une teinte symbolique et tend à se démilitariser dans ses codes et rituels sociaux.

Profitant d'une accalmie dans laguerre de Cent Ans, le roiCharlesVII crée, par l'ordonnance de1445, les premières unités militaires permanentes à disposition du roi de France, appeléescompagnies d'ordonnance. Elles visent à la fois une plus grande efficacité au combat de l'armée royale, et une diminution des dégâts causés par l'armée en déplacement. Elles joueront un grand rôle dans la victoire de la France à la fin de la guerre de Cent Ans en1453[84].

Ces 15 compagnies sont composées de 100 lances, une lance étant un groupe de 6 hommes à cheval :

L'homme d'armes est recruté au sein de la noblesse (chevalier ou non) et doit veiller au recrutement des autres gens de guerre de sa lance. Il perçoit leurs gages et doit veiller à l'entretien de leur équipement ainsi qu'aux montures. Les pages n'étant pas des combattants. Ces lances forment ainsi une armée permanente de 9 000 hommes dont 7 500 combattants. Le nombre de compagnies, ainsi que la composition de la lance évoluera selon les époques. En parallèle, sont créées les troupes dites de petite ordonnance, mais qu'on appellera rapidementmortes-payes. Formées elles aussi autour de la lance (quoique réduite à 3 combattants et un valet et privées de leurs chevaux), elles ont pour tâche de servir de garnison dans les places fortes, à leur création elles sont 900 lances soit 3 600 (2 700 combattants). Le successeur deCharlesVII,LouisXI rajoutera en 1481 lesbandes françaises ou bandes de Picardie, d'environ 12 000 fantassins, en remplacement desfrancs-archers (lesquels étaient unemilice et non une armée de métier). L'innovation est non seulement d'avoir des troupes permanentes en lieu et place d'une armée mobilisée à la demande ou de mercenaires, mais également que celles-ci sont directement sous l'autorité du roi et pas de ses vassaux, ce qui modifie totalement le rapport de force avec ceux-ci.

Culture littéraire et technique

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La pratique de la chevalerie s'entoure rapidement, à partir duXIIe siècle, d'un vaste corpus littéraire décrivant les idéaux du chevalier, ses savoirs et ses pratiques, et les codes de la chevalerie. Ces écrits peuvent être en vers, en prose, relever du genre romanesque ou du traité théorique, technique et déontologique. Ces savoirs et pratiques guerrières sont l'objet d'une émulation entre pairs, dans le cadre de rencontres démonstratives, fondées sur l'ostentation et la performance : les tournois.

La chanson de gestes

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Article détaillé :Chanson de geste.

La chanson de geste est ungenre littéraire européen du Moyen Âge. Il s'agit d'un récitversifié (un long poème) le plus souvent endécasyllabes ou, plus tardivement, enalexandrins. Ces chansons sont écrites enlangue d'oïl par lestrouvères, enlangue d'oc, par lestroubadours, et enlangue franco-vénitienne en Italie[87],[88]. Elles chantent et célèbrent la valeur martiale des chevaliers, les héros de l'ère deCharles Martel et deCharlemagne, et leurs batailles contre lesMaures. À ces légendes historiques s'est ajoutée une forte touche de merveilleux : desgéants, de lamagie et desmonstres apparaissent parmi les ennemis avec lesSarrasins. Avec le temps, les aspects historiques et militaires se sont affaiblis en faveur des aspects merveilleux.

Les chansons de gestes sont centrées sur les actes militaires et les cycles guerriers de l'époque carolingienne : les principaux protagonistes sont ainsi Charlemagne et son entourage. Les chansons de geste constituent une transposition poétique des guerres carolingiennes contre les Lombards, Bretons, Saxons, Sarrasins. L'esprit et les articles de foi se résument en quelques points saillants : barons serviteurs du roi, service féodal dû au suzerain, honneur féodal, vaillance combative, intrépidité.

Le roman courtois

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Article détaillé :Roman courtois.

Le roman courtois se développe parallèlement à la chevalerie, dans le courant desXIe et XIIe siècles en Europe. Il s'agit d'une œuvre littéraire, poétique, en langue romaine, le plus souvent enversoctosyllabiques mais parfois enprose. Il met en scène des chevaliers qui combattent pour leurs dames.

Dans ces œuvres où les chevaliers sont les protagonistes, les aventures fabuleuses et galantes dominent largement le récit. Dès la fin duXIe siècle, des copistes remanient au goût du jour, sans souci d'anachronisme, des légendes antiques ou bretonnes, commeLe Roman d’Alexandre,Le Roman de Troie ou les récits sur les exploits duroi Arthur et desChevaliers de la Table Ronde. Ces œuvres remaniées représentent, en quelque sorte, la transition entre lachanson de geste et le roman courtois.

Exemples de romans courtois

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Matière de Rome
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Matière de Bretagne
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Le roman de chevalerie

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Article détaillé :Roman de chevalerie.

Les romans de chevalerie sont des œuvres romanesques, le plus souvent enprose, inspirées ou adaptées desromans courtois et deschansons de geste envers desXIe et XIIIe siècles. Les premières œuvres de ce type sontLancelot, ou le chevalier de la charrette etYvain ou le Chevalier au lion, tous deux deChrétien de Troyes, auXIIe siècle. Cegenre littéraire est très populaire en Europe au cours du Moyen Âge, mais encore plus à partir duXVIe siècle enItalie avec la parution duRoland furieux deL'Arioste, ou de laLa Jérusalem délivrée duTasse, ainsi qu'enEspagne et en France (Amadis de Gaule) et auPortugal.

L’univers chevaleresque mis en scène dans les romans courtois et les romans de chevalerie ayant trait à la légende arthurienne relève d’une « chevalerie de littérature », selon l'expression que l'on doit à Jean de Meung dans le « Roman de la Rose » (écrit vers 1275). Dans ces œuvres, la Bretagne revêt les traits d'un paysage fictif, parsemé de merveilles et d'enchantements. Le roi Arthur entend et reçoit les récits rapportés par ses chevaliers, qui font montre de prouesse et qui par l'éclat de leur bravoure, définissent les contours informels d'un code de comportement idéal. Dans les romans de la légende arthurienne, le merveilleux est une source de sens pour l'action chevaleresque : en donnant un terme aux aventures de Bretagne, en dissipant les enchantements, donc les manifestations du démon, qui s'y déploient, les chevaliers obéissent à un comportement idéal[89].

Traités militaires et arts de la guerre

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Dès leXIIIe siècle, l'œuvre du tacticien romain tardif,Végèce,De re militari, est traduit parJean de Meung, sous le titre de « l'Art de la chevalerie ». Il y a donc assimilation et identification entre art de la guerre en général, et pratiques socio-techniques des chevaliers.

D'autres auteurs font progressivement leur apparition dans la littérature médiévale liée à l'art militaire :l'Arbre des Batailles, d'Honorat Bovet, ainsi que le travail deChristine de Pizan, leLivre des Faits d'Armes et de Chevalerie, combinant la lecture de Végèce, Bovet, etFrontin.

L’Arbre des batailles écrit en français et en prose, est une vaste synthèse de sources diverses (historiques, philosophiques, juridiques et littéraires) sur le droit de la guerre. Deux versions sont rédigées, la première en 1386-87, la seconde (plus longue, contenant des développements historiques inspirés des œuvres de Martin de Troppau et dePtolémée de Lucques) est achevée en 1389 et dédiée àCharlesVI. Dans les troisième et quatrième parties de l'ouvrage il traite des batailles et du droit des gens de guerre, s'inspirant largement du traité latin deJean de Legnano. Il fait de la guerre une donnée naturelle du monde et un phénomène bénéfique pour la société, dans le cadre d'une guerre juste, respectueuse de l'immunité des non combattants (reprenant iciSaint Thomas d'Aquin). À l'héroïsme chevaleresque, au duel et à la vengeance, comportements particuliers fixés par l'usage, il oppose la discipline, la loyauté au roi, le service du bien commun, notion héritées de la tradition ecclésiastique.

L’Arbre des batailles connut une vaste diffusion auxXVe et XVIe siècles, ainsi que l'atteste le nombre important de manuscrits conservés - au moins 90 en langue française[90], ainsi que les multiples traductions dont l'ouvrage fit l'objet auXVe siècle, notamment en 1456, en anglais au château de Rosslyn par Gilbert de la Haye, chancelier d'Écosse.Christine de Pizan le copia de nombreuses fois, le citant parmi ses sources principales[91]. L'héraldiste sicilien Jean Courtois, travaillant pourAlphonseV d'Aragon, se réfère beaucoup à Bovet dans son ouvrage, leBlason des Couleurs.

Naissance du code chevaleresque

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Représentation allégorique d'un chevalier s'apprêtant à affronter les sept péchés capitaux, muni du « bouclier de la foi », le « scutum fidei ». Extrait d'un manuscrit enluminé de 1255-1265 de la Summa Vitiorum ou "Traité des Vices" deGuillaume Peyraut - MS 3244, folios 27-28.

Trois principaux ouvrages médiévaux résument les idéaux de la chevalerie :

  • le poème anonymeL'Ordene de chevalerie, racontant l'emprisonnement deHuguesII de Saint-Omer (appelé également Hugues de Tibériade ouHues de Tabarie) parSaladin après labataille de Marj Ayoun le[92]. Celui-ci lui demanda une rançon de 100 000besants d'or et de l'armer chevalier de sa main en lui expliquant les différentes phases de l'adoubement. Hues de Tabarie accepta (hormis la collée qu'il n'osa porter sur la personne du sultan par crainte de sa garde) puis lui demanda de payer sa rançon au titre de l'aide aux quatre cas, secours que le chevalier était obligé d'apporter à son suzerain en cas de demande de rançon. Piqué par l'intelligence du raisonnement et de la manœuvre,Saladin paya la moitié de la rançon qu'il avait lui-même fixée et obligea ses gouverneurs à payer le reste.
  • Le premier code de chevalerie, à proprement parler, est leLibre del ordre de cavayleria, écrit parRaymond Llulle (1232-1315). Il s'agit d'un opuscule didactique écrit entre 1274 et 1276. Il fait partie des premières productions de l'écrivain après le virage personnel qui le conduit d'une vie de profane à une vie de mystique et de dévot prosélyte. À cette époque il étudiait les caractéristiques sociales de la classe des chevaliers, c'est-à-dire, dans l'acception qu'en fait Lulle, un être armé, courageux et dont l'objectif ultime est de rencontrer la présence de Dieu dans tous les faits du monde[93]. Les sept chapitres qui le composent traitent des différents domaines ayant trait au chevalier en tant que personne, son rôle, les savoirs requis, les rituels et la cérémonie de l'adoubement, le sens des armes, les règles de l'honneur. Il donne également à la fin les droits et obligations du chevalier et lui impose comme objectif d'étendre l'honneur chrétien, la noblesse d'esprit et l'observation d'une stricte piété[93]. L'ouvrage est combatif, voire agressif. Il recommande de convertir les infidèles au bâton et à l'épée en même temps que de leur prêcher la vérité du Christ.
  • LeLivre de Chevalerie deGeoffroi de Charny (1300-1356), porte-oriflamme et conseiller des rois de FrancePhilippeVI etJeanII, mort à labataille de Poitiers et considéré par ses contemporains comme l'un des meilleurs chevaliers de son temps. Il fait ainsi référence comme « théoricien » de la chevalerie par les œuvres qu'il a écrites[94]. Écrit vers1350, il constitue l'une des meilleures sources pour comprendre comment les chevaliers se percevaient et accordaient la priorité aux valeurs chevaleresques auXIVe siècle Si leLivre de chevalerie est aujourd'hui l'ouvrage le plus célèbre de Charny, il n'en était pas de même au Moyen Âge, où il semble avoir été le moins diffusé parmi les œuvres de l'auteur, contenus dans seulement deux manuscrits qui nous sont parvenus[95].

Aucun des auteurs de ces trois textes ne connaissait les deux autres[96], et les trois traités se complètent et donnent à voir une conception générale de la chevalerie, sans qu'il n'y ait d'harmonie stricte et d'équivalence entre les trois blocs de valeurs décrits. À des degrés différents, avec des hiérarchisations différentes et des détails choisis différents, tous ces ouvrages parlent à leur façon et à leur époque de la chevalerie tels qu'ils la perçoivent et la veulent voir se réaliser, comme d'un mode de vie dans lequel le militaire, la noblesse et la religion se combinent dans un but donné, la conversion du monde pour les uns, la victoire contre les Anglais pour les autres[96]. Le « code de la chevalerie » est donc un produit littéraire duMoyen Âge tardif, qui a surtout été écrit et conçu après la fin descroisades. Il repose en partie sur une idéalisation des chevaliers historiques combattant enTerre Sainte et sur les idéaux de l'amour courtois, développés aux siècles précédents[96].

Les tournois

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Articles détaillés :Tournoi (Moyen Âge) etNaissance des armoiries.

Un entraînement guerrier entre chevaliers

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Les tournois font partie des usages sociaux les plus emblématiques de la chevalerie. Ils regroupent un ensemble d'épreuves équestres ou pédestres au cours desquelles les chevaliers font démonstration de leurs aptitudes militaires, de leurs talents aux armes et à cheval[97]. L'art du tournoi est pratiqué en Occident entre lesIXe et XVIe siècles, soit les siècles d'apogée de la chevalerie. Les tournois connaissent eux leur apogée entre les années1125 et1225[98].

Les enjeux des tournois sont nombreux, parfoiscourtois (on se bat pour une belle ou sacouronne de fleurs), parfois pour de l'argent et parfois aussi symboliques, mimant ceux d’un véritable duel ou d’une guerre en réduction. Outre l’entraînement militaire, le tournoi est l’occasion de faire preuve de sa valeur, et pour les meilleurs combattants de s’enrichir, grâce aux armes des chevaliers vaincus et aux rançons versées par les prisonniers[99].

Au commencement, le tournoi est pratiqué essentiellement par des chevaliers « jeunes »,bacheliers (au sens médiéval), qui ont été adoubés mais ne possèdent pas encore de fief. On recrute aussi des compagnies de soldats professionnels non-nobles pour se battre dans des joutes à grande échelle. Certains grands tournois rassemblent ainsi jusqu’à trois mille chevaliers et leur suite, soit dix mille combattants. Le tournoi deChauvency-le-Château, immortalisé parJacques Bretel, rassemblait plus de 500 chevaliers. Par la suite, (auXVe siècle), les bourgeoisies urbaines se prennent au jeu et se mettent à jouter[100]. Bien que plusieurs classes sociales pratiquent lajoute, ils ne peuvent pas s'affronter entre eux[101].

Un divertissement fondé sur la démonstration et la performance

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Les tournois, haut-lieu d'échanges et de sociabilité pour la chevalerie, sont principalement organisés par les nobles détenteurs des principautés territoriales les plus prestigieuses (les comtes et les ducs), le plus souvent à la lisière de deux de ces principautés. Les tournois ressemblent véritablement à des situations deguerre, dont le but est de mettre les chevaliers dans les conditions des batailles auxquelles ils participeront. Ces compétitions revêtent cependant la forme despectacles divertissants. Lesjoutes quant à elles, se distinguent des tournois dans le sens où elles n'opposent que deux adversaires. Moins meurtrières, ces dernières apparaissent vers leXIIIe siècle et sont de fait mieux acceptées par les autorités civiles et religieuses.

Les tournois, conçus comme des substituts à la guerre permettant de s'entraîner, de se faire voir, repérer, admirer[102], sont organisés en un véritable calendrier sportif tout au long de l’année, sauf en temps de guerre, et durant les grandes fêtes religieuses. La belle saison, qui limite la rouille aux armures de fer, est cependant privilégiée.

Le but est d'y réaliser des prouesses, pour l’honneur et la réputation, mais aussi de capturer son ennemi, ou son cheval, et ainsi de réaliser un gain, par la revente ou la rançon. Ce gain est généralement dilapidé dans les fêtes qui suivent le tournoi. Celui-ci rassemble ainsi, outre les combattants, nombre d’artisans, prêteurs, qui tous s’enrichissent. Les chevaliers s’organisent en équipes régionales : Français (du duché de France) contre Normands, Angevins, etc. Ces équipes régionales s’allient parfois à plusieurs les unes contre les autres, selon les affinités : Français-Champenois contreAnglais-Normands, reproduisant les luttes politiques réelles. Les chevaliers arrivent souvent déjà organisés en équipes au tournoi, chacune menée par un grand seigneur. Ces équipes peuvent s’allier entre elles pour aboutir à une situation où seuls deux camps s’affrontent[103].

Quelques tournois célèbres

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L'entrée en chevalerie

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Article détaillé :Adoubement.

Formation et entrainement

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La formation des chevaliers se structure comme un parcours éducatif commençant dès l'enfance. Cet apprentissage comprend un long entrainement aux armes, mais aussi aux coutumes morales et à l'éthique chevaleresque. L'adolescent, souvent fils de chevalier à partir duXIIIe siècle, accède au titre de chevalier après une cérémonie appeléeadoubement. La cérémonie de l'adoubement est empreinte de symboles sociaux et religieux forts, permettant de donner aux chevaliers la pleine aura justifiant de leur prépondérance sociale.

Avant l’adoubement, vers l’âge de sept ans, l'enfant destiné aux armes est placé chez un seigneur qui sera son parrain. Il y gravit peu à peu tous les degrés de l'éducation qui vise à en faire un guerrier :galopin (il nettoie l’écurie),page (il s’occupe des chevaux, est au service de la dame du château, suit un entrainement équestre, apprend à chasser) et enfinécuyer,damoiseau (il aide les chevaliers autournoi et à la guerre et il a l'immense privilège de lui porter son écu).

L'adoubement

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Le roiJeanII le Bon adoubant des chevaliers. Enluminure d'un manuscrit desXIVe – XVe siècles ; BnF, Paris : MS Français 73, folio 386.

Vers 17-21 ans, lebachelier / l'écuyer formé et ayant passé les épreuves des armes passe par l’adoubement, cérémonie officielle à laquelle de nombreux nobles assistaient et qui consistait à consacrer un homme comme chevalier. L'adoubement était une cérémonie qui marquait de manière ritualisée le passage de l'état d'écuyer à celui de chevalier. Cette cérémonie a lieu en général en septembre ou en octobre.

La nuit précédant son adoubement, le futur chevalier passe une nuit de prière dans une chapelle en compagnie de son parrain, revêtu d'une tunique blanche, avec une croix rouge, le blanc symbolisant la clarté et le rouge symbolisant le sang que le chevalier est prêt à verser. Puis le seigneur organise une fête dans son château, à laquelle les vassaux sont conviés. Au fond du château, sur une estrade, le chevalier était prêt à se faire adouber chevalier. Agenouillé, le bachelier prête à haute voix leserment des chevaliers, une main sur l'Évangile ; ses armes de chevalier lui sont ensuite remises par son seigneur et parrain, bénies par un prélat qui encadre la cérémonie. Une fois revêtu de son équipement, il s'agenouille à nouveau pour recevoirl'accolade ou colée. Après la cérémonie, on organise dans les grandes familles des tournois auxquels se joignent les chevaliers adoubés et les vassaux du seigneur et desbanquets pour célébrer l'occasion.

Selon les théologiens du Moyen Âge central, les chevaliers, lesmiles ont pour principale vocation de défendre le faible et de faire régner la justice divine, instaurant grâce aux armes la paix du Christ. Cette théologie politique marque fortement l’évolution de l’adoubement, qui emprunte dès lors à l’onction royale et aux sacrements chrétiens de nombreux éléments de rituel, dans sa temporalité et sa scénographie[120].

Le nouveau chevalier intègre un ordre de valeurs et un groupe social, tout comme les hommes d'Église sont ordonnés. La prédication qui lui est donnée est censée lui rappeler les devoirs spécifiques qui sont désormais les siens, dans le cadre de l'idéal chevaleresque promu par l'Église : contrôler sa violence, exercer sa force avec droiture et modération. Les nouveaux chevaliers sont encouragés à partir en croisade pour défendre la Chrétienté par les prélats de l'époque[120]. La cérémonie de l'adoubement confère à celui qui le reçoit un pouvoir principalement militaire puisqu'il obtient le droit deban (rassemblement de l'ost, autrement dit de l'armée) pour partir encampagne militaire, la remise de l'épée signifiant par ailleurs pour le chevalier l'exercice de la force armée, à savoir le maintien de lapaix et de l'ordre public, mais également un caractère pluspolitique et judiciaire puisqu'il accède à la fonction de gouvernement des hommes soumis à sa juridiction, à son pouvoir, manifesté par ses armes.

Chevaleresses : une réalité méconnue

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Si la chevalerie est un phénomène très majoritairement masculin, il ne le fut pas exclusivement comme le rappelle les écrits d'Orderic Vital[121].DuXIIe au XVe siècle, un certain nombre de femmes de l’aristocratie, dans différents confins de l'Europe médiévale, en France, Écosse, Espagne et Italie, furent connues et remarquées pour avoir pris un temps les armes pour défendre leur château, leur domaine, ou leur lignage. Parfois mal vues, elles étaient désignées comme desvirago, sorte d'« hommasses » transgressant les normes de genre. Cette participation des femmes à la guerre, plus fréquente qu'on ne le pense, est effectivement liée à un contexte spécifique, à des circonstances extraordinaires, comme la captivité ou la mort de l'époux. Ainsi, la chevalerie féminine n’est pas une règle, ni une norme, mais elle n’est pas toujours considérée pour autant comme un scandale ou un affront, un débordement outrancier des normes, à condition que les guerrières prennent les armes pour la bonne cause, dans un contexte juridique bien précis[122],[121],[123],[124].

Les chevaleresses ont existé en Europe tout au long du Moyen Âge, mais c’est surtout dans l'empirePlantagenêt que cette fonction était répandue. Cette valorisation des femmes combattantes disparaît progressivement à la Renaissance et les chevaleresses seront surtout tournées en dérision. Selon l'historienne Sophie Brouquet« En France, tout s'arrête avec Louis XIV. Il a vraiment mis fin à ça, sans doute en lien avec les souvenirs de sa jeunesse : la fronde et les frondeuses. Tout ça est passé sous silence, de façon très brutale. Cela concerne également les représentations de femmes chevaleresses »[121].

Mathilde de Toscane, la comtesse combattante

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Un exemple célèbre de femme chevaleresse est celui deMathilde de Toscane. Fille dumarquis de ToscaneBonifaceIII et deBéatrice de Bar, fille deFrédéricII,duc de Haute-Lotharingie, et deMathilde de Souabe, elle naît vers1045-1046. Son enfance est troublée par le meurtre de son père au cours d'une chasse en 1052 et les morts mystérieuses de sa sœur aînée Béatrice en 1053 et de son frèreBonifaceIV en 1055[125]. Mathilde demeure la seule héritière de sa famille et détient des possessions à la fois en Italie — avec en particulier lechâteau de Canossa et lemarquisat deToscane, ainsi qu'une partie de laLombardie avecModène,Reggio,Mantoue,Ferrare,Crémone — et enLorraine, avec le comté de Briey. Issue d’un lignage de chevaliers et de guerriers nobles, elle a sans doute appris l’art de la guerre auprès de son père Boniface et de son beau-père Geoffroi[126].

En1073, lemoine Hildebrand, conseiller des papes depuis le pontificat deLéonIX, et qui entend purifier les mœurs du clergé, est lui-même élu sous le nom deGrégoireVII. Il active vigoureusement ce que l'on appellera laréforme grégorienne. Béatrice et sa fille Mathilde, « dévote, riche, puissante », s'attachent immédiatement à son parti et lui apportent leur total soutien[127]. Mathilde prend le parti de la défense du souverain pontife, armes à la main. Pendant laquerelle des Investitures, elle soutient très fermement le parti du pape (lesguelfes, opposés auxgibelins). Le, c'est ainsi sous l'œil de Mathilde, dans la cour du château de Canossa, que l'empereurHenriIV« fit amende honorable » lors d'une rencontre avec le papeGrégoireVII. Après la mort de Grégoire, elle soutient avec son armée son successeurVictorIII, réfugié aumont Cassin, contre l'antipape impérialClémentIII. Mathilde remporte par la suite une victoire éclatante contre les alliés lombards de l’empereur le àSorbara (it), près de Modène. Pendant les six années qui suivent, elle domine militairement la vallée du Pô, adoptant une stratégie particulièrement offensive[126]. En 1087, Mathilde mène ainsi une attaque musclée sur Rome pour y installer Victor, mais la contre-attaque de l’empereur oblige le pape à se retirer. Après sa mort, une quarantaine d'évêques et d'abbés, réunis sous la protection des troupes de Mathilde, élisent l'évêque d'Ostie pour lui succéder. Le nouveau pape, qui prend le nom d'UrbainII, est un Français, proche comme elle d'Hugues de Cluny[128]. Mathilde inflige une défaite militaire àHenriIV au château de Canossa en 1092. En 1095, il tente de prendre son château de Nogara, mais l’arrivée de la comtesse à la tête d’une armée l’oblige à battre en retraite, après quoi Mathilde ordonne ou mène avec succès une série d’attaques pour restaurer son autorité dans des villes restées fidèles à l’empereur.

La carrière militaire de Mathilde, auréolée de nombreux succès sur le champ de bataille, provoque chez nombre de ses contemporains la stupeur, la gêne et l’admiration. Tous les témoins de l’époque soulignent l’importance de l’activité militaire de la comtesse et ses qualités de stratège, sachant amender ses stratégies et ses choix militaires en fonction du contexte, maîtrisant les différentes partitions de l'art militaire médiéval[126]. Les partisans de la réforme grégorienne, dont elle est la fervente thuriféraire, construisent même autour d'elle une nouvelle image du soldat et de la guerre, celle alors en gestation dumiles Christi et de la guerre sainte au service de la papauté, dont l'avatar le plus connu fut par la suite le combattant croisé parti défendre Jérusalem.GrégoireVII va même plus loin en bâtissant un parallèle entre les combats de Mathilde et le sacrifice du Christ sur la croix et le combat contre l’infidèle, l’hérétique et le schismatique, ouvrant ainsi la porte au droit de la Croisade[126].

Notes et références

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  10. présentation de l'ouvrage
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  17. On pourra se référer à de nombreuses synthèses sur la chevalerie romaine :Claude Nicolet,L'ordre équestre à l'époque républicaine (« Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome », 207), Paris, De Boccard, 1966. ; du même auteur,L'ordre équestre. Histoire d'une aristocratie (IIe siècle av. J.-C. -IIIe siècleapr. J.-C.), Actes du colloque international Bruxelles-Leuven, 5- (« Collection de l'École française de Rome », 257), Paris, De Boccard, 1999,694 p., 9 pl. ; Ségolène Demougin, « « L'ordre équestre sous les Julio-claudiens » »,Publications de l'École française de Rome,no 108, 1988 ;
  18. Ce niveau de cens a probablement été fixé auIIe siècle av. J.-C. après la deuxième guerre punique, cf. Nicolet, C. (1977). Les classes dirigeantes romaines sous la République : Ordre sénatorial et ordre équestre.Annales. Histoire, Sciences Sociales, 32(4), 726-755. doi:10.3406/ahess.1977.293851
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  85. Nota : lancier ou homme d'armes. Il avait une cuirasse, des cuissards, des brassards, des jambières, un casque, une épée et la lance. Il était parfois appelé maître parce qu'à l'origine c'était un cavalier entouré de ses vassaux.Machiavel écrivait :Les hommes d'armes français sont les meilleurs qui existent parce qu'ils sont tous nobles et fils de seigneurs et qu'ils aspirent à devenir possesseurs de terres seigneuriales. Dans sesCommentaires, Monluc a écrit que le maréchal de Foix lui a donné une place d'archer dans sa compagnie« ce qu'on estimait beaucoup en ce temps-là, car il se trouvait de grands seigneurs qui estaient aux compagnies et deux ou trois en place d'archers ». Les archers pouvaient devenir hommes d'armes (Revue de l'Agenais).
  86. Nota : soldat portant un coutil ou couteau.
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  103. Au Moyen Âge, les tournois sont un ensemble d’épreuves guerrières. Les tournois étaient l’alliance du code d’honneur de la chevalerie et de l’amour courtois.
  104. C'est l'analyse que faitPhilippe-André Grandidier (L'Histoire de l'Église et des princes-évêques de Strasbourg,p. 161) de la description de larencontre à Strasbourg en 842 deLouis le Germanique et deCharles le Chauve dans l'ouvrage de« Nithard -Histoires » (histoire en 4 livres des fils de Louis le Pieux).
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  128. (it)Indro Montanelli, Roberto Gervaso,op. cit.,p. 103.

Voir aussi

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Bibliographie générale

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