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Charles de Blois Titre Prétendant au duché de Bretagne –
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Charles de Blois, né en 1319 àBlois et mort le àAuray, neveu du roi de FrancePhilippe VI, est un noble français,baron de Mayenne etseigneur de Guise, devenucomte de Penthièvre en épousant la petite-fille duduc de BretagneArthur II, nièce du ducJean III.
Désigné comme successeur deJean III, mais confronté à l'opposition deJean de Montfort, demi-frère de Jean III, il s'engage dans laguerre de Succession de Bretagne (1341-1364), qui a lieu parallèlement aux débuts de laguerre de Cent Ans entre la France et l'Angleterre. Il meurt sur le champ debataille d'Auray, qui marque la défaite de la maison de Penthièvre, soutenue par le roi de France.
Devenu l'objet d'un culte quelques années après sa mort, il a étécanonisé en 1376, canonisation annulée par le papeBenoît XIV auXVIIIe siècle, puisbéatifié en 1904 parPie X. Sa fête en tant quebienheureux est le 29 septembre.
Il est le deuxième fils ducomte de BloisGuy Ier (1298-1342), membre de lamaison de Châtillon (c'est-à-dire deChâtillon-sur-Marne, enChampagne).
Sa mère estMarguerite de Valois (1295-1342), sœur dePhilippe, roi de France à partir de 1328, le premier de lamaison de Valois, branche cadette desCapétiens.
Le, Charles de Blois épouse à ParisJeanne de Penthièvre[Notes 1], fille deGuy de Penthièvre, lui-même fils du duc de BretagneArthur II, et nièce du ducJean III de Bretagne.
Les conditions du mariage prévoient que Charles de Blois prendra le nom et les armes de Bretagne et qu'il succèdera au duc Jean III, qui n'avait pas d'enfants.
Le duc Jean III n'ayant pas voulu clarifier sa succession de son vivant, sa mort en 1341 déclenche entre les compétiteurs une guerre qui va durer23 ans : laguerre de Succession de Bretagne, à laquelle participent des combattants célèbres :Bonabes IV de Rougé,Gautier de Mauni,Jean III de Beaumanoir,Olivier V de Clisson,Bertrand Du Guesclin,Guillaume Boitel etJohn Chandos,Pierre de Boisboissel.
Par l'arrêt de Conflans, le roiPhilippe VI reconnaît son neveu Charles de Blois comme ducbaillistre (régent) de Bretagne etreçoit[Quand ?] sonhommage à ce titre. La plupart des nobles bretons le reconnaissent aussi comme héritier du duc défunt, mais un demi-frère de Jean III,Jean de Montfort conteste cette succession et se fait reconnaître comme duc par un certain nombre de nobles et de bourgeois réunis à Nantes en mai 1341.
En, une expédition française conduite par l'héritier présomptif de France,Jean,duc de Normandie[1], et par Charles de Blois est lancée pour soutenir ses droits sur la Bretagne. Mais Jean de Montfort bénéficie du soutien du roi d'Angleterre, qui, en 1337, a lancé une offensive pour évincer la maison de Valois du trône de France : on est au début de laguerre de Cent Ans (1337-1453).
Le, Charles de Blois prendQuimper[Notes 2], qui est ensuitepillée par ses soldats.
Le, il est fait prisonnier par les Anglais lors de labataille de La Roche-Derrien. Sa captivité va durer neuf ans (la plus grande partie enAngleterre[pas clair], notamment à la tour de Londres), mais son épouse Jeanne de Penthièvre poursuit la guerre contreJeanne de Flandre (1294-1375), qui, de son côté, devenue veuve du comte de Montfort en 1345, combat au nom de son filsJean, né en 1339.
Charles de Blois est libéré le, après s'être engagé à verser une rançon de700 000 florins d'or, rançon seulement en partie payée au moment de sa mort.
LeJeudi saint de l'an 1357 (), Charles de Blois se rend accompagné de son maître d'hôtel Geoffroy de Pontblanc, chevalier, de sonchâteau de Dinan à sonchâteau de Léhon[pas clair][Notes 3][2].
Charles de Blois meurt le lors de labataille d'Auray contreJean IV de Bretagne.
Son épouse Jeanne de Penthièvre lui donne cinq enfants :
: Roi de France
: Duc de Bretagne
: Comte de Blois
: Comte de Saint-Pol
Quatre ans après sa mort, le,Urbain V écrit aux évêques bretons, leur reprochant l'établissement d'une fête liturgique sans autorisation pontificale, l'interdisant et fustigeant les pratiques abusives desordres mendiants : « dans leurs sermons saint et martyr de la justice, ils lui offrent le saint sacrifice à son jour anniversaire comme à un saint approuvé par l'Église, ils distribuent aux pèlerins qui viennent prier sur sa tombe des statuettes de plomb à son effigie »[4].
Sans doute sa lettre fait-elle suite à l'active opposition deJean IV de Montfort, concurrent de Charles autrône de Bretagne et son meurtrier[5]. Celui-ci ordonne le de détruire une peinture de Guillaume Breton dans l'église du couvent des Cordeliers à Dinan où il loge, sur laquelle Charles de Blois était représenté agenouillé et en armes (avec l'écu de Bretagne) aux pieds de saint François d'Assise. Il est obéi dans la nuit mais dès le 3 février, les Cordeliers de Guingamp Raoul de Kerguiniou et Payen de Kelen, puis bientôt des centaines de fidèles observent deux filets de sang s'échappant des restes de l'image, autour de la poitrine et du cou, où le vaincu d'Auray avait été blessé. Deux écuyers anglais de Jean IV, Foudrigay et Vroic, frappent l'image d'un couteau, et Geoffroy Budes constate qu'il en sort du sang. De nombreux fidèles le récupèrent sur des linges comme reliques. L'évêque de Saint-Malo, Guillaume Poulart, fils du receveur général de Charles de Blois et qui avait refusé en 1365 de faire allégeance au duc assassin, interdit au gardien du couvent de détruire l'image mais ordonne au contraire de la remettre en état.
Le miracle de Dinan prend ici toute sa signification politique : il symbolise la lutte que continuaient à se mener, trois ans après la signature du traité de Guérande, les deux partis ennemis de la guerre de Succession. Les blésistes vaincus avaient à leur disposition une arme redoutable : la gloire posthume du comte de Penthièvre. Ils mirent tout en œuvre avec le soutien intéressé du puissant ordre franciscain, pour qu'éclatât la sainteté de leur ancien maître. Le miracle de Dinan, qui se produisit au moment et à l'endroit même où Jean IV réunissait la noblesse du duché, servit magistralement leur entreprise. Montfort, fier de sa légitimité chèrement conquise, ne supporta pas l'affront : si l'évêque de Saint-Malo menaçait d'en appeler au pape, lui franchit le pas et écrivit au Saint-Siège dans les mois suivants[6].
Le pape lui répond le 15 septembre 1368 qu’il n’y a encore aucune demande pour l’heure mais que s’il y en avait une il procéderait« comme l’exige le droit et la justice ».
Moins d’un an plus tard, par les bulles du et, le pape prescrit une enquête canonique, signalant qu’on l’avait« détourné de cette affaire plusieurs fois » et ordonnant à ses commissaires de« réprimer par sentence d'excommunication ceux qui entraveraient en cachette ou en public ou de toute autre manière la recherche des renseignements ». Ceux-ci reconnaissent d'ailleurs qu'ils n'ont pu se rendre à Guingamp sans expliciter les raisons évidentes, et nombre de clercs et laïcs bretons n'oseront se rendre à Angers pour témoigner au procès en canonisation, malgré le remboursement du voyage et la menace d'excommunication. Pour éviter celle-ci, un miraculé, Rouland Taillart, obtint un nouveau miracle de Charles de Blois qui le guérit aussitôt de sa goutte.
Grégoire XI renouvelle la prescription de son prédécesseur par bulle du. Une enquête de canonisation est alors diligentée à Angers, dont les actes du au ont subsisté jusqu'à nous[7]. Le, une lettre commande aux commissaires de passer outre aux appels du duc pour interrompre le procès. Ce dernier dépêche à l'été 1372 Maître Jean Y pour entraver la clôture de l'enquête, et deux ralliés, le doyen de Nantes Guillaume Paris et Guy de Rochefort d'Assérac auprès de Charles V pour lui exprimer son mécontentement pour son soutien à Jeanne de Penthièvre (veuve de Charles) et so participation au procès de canonisation, le roi répondant avoir écrit« comme il feroit pour le plus petit de son Royaume, & ne fait riens au droit de la Duchié ; mais font mal ceulx qui telles choses donnent à entendre ».
Cum permissu superioris, un Franciscain de Périgueux explique avoir consacré une chapelle rénovée au prince breton. Mais les témoignages manifestent aussi que Charles ne fait pas l'unanimité dans le clergé, séculier ni même régulier, comme les Cordeliers manceaux. Onze miraculés avaient été au service de Charles de Blois, mais étonnamment,« pas moins de cinq partisans des Montforts, dont trois Anglais, bénéficièrent des faveurs » du défunt duc, dont Guy de Trévil retrouvant ses écus d'or, Jamien guéri d'hémiplégie, Antoine Houlz, maître d'hôtel du nouveau duc et à la jambe guérie, l'Anglais Comiton à la fille ressuscitée. À l'inverse son compatriote Jean François tombe gravement malade et muet après s'être moqué du sieur Charles, puis guéri totalement en l'invoquant ; il arriva la même chose au Bénédictin Jean Louénan. Bertrand de Beaumont et l'Anglais ayant raclé l'image sont tués au siège de Bécherel, immédiatement après avoir sali sa mémoire[6].
Le, il demande par bulle à ses commissaires de passer outre certains vices de forme que comportait l’enquête afin de pouvoir procéder à lacanonisation[8]. Car la dernière grande affaire du moment à la Cour papale d'Avignon, avant le retour imminent à Rome sous la pression desainte Catherine de Sienne, est la canonisation de Charles de Blois, comme en témoigne, du 9 mai 1372 au 7 septembre 1376, la correspondance deChristophe de Plaisance, procureur à Avignon du ducLouis IIde Mantoue[9]. Ce dernier indique en effet à sa Cour le nouveau programme papal[7] :
Mercredi, qui sera le 10 de ce mois, il canonisera le duc de Bretagne, qui, d'après ce que j'ai entendu, était un seigneur juste ; jeudi, il célébrera la messe de canonisation en l'église Saint Dominique ; vendredi douze de ce mois, il fera un consistoire public et là, recevra chacun, bénira tous les courtisans et se prononcera sur le transfert de la cour d'Avignon à Rome.(In die mercurri qui eritX presentis mensis, ducem Britanie[10] qui, uti audio, fuit iustus dominus, canonizat, et in die jovis celebravit[sic] misam canonizationis in Sancto Dominico, in die veneris duodecima presentis mensis faciet publicum consistorium et ibi recipiet licentiam ab omnibus et dabit benedicionem omnibus cortesanis et pronunciabit sicut transfert curiam de civitate Avenionense ad Urbem)[9].
Les cérémonies de canonisation reportent en effet de quelques jours le départ du Pape à Rome prévu le 8 septembre[11], du fait de la présence à Avignon du ducLouis Ier d'Anjou, frère du roiCharles V de France et gendre de Charles de Blois dont il est le principal postulateur de la canonisation, de laquelle il avait défrayé les enquêtes à Angers cinq ans plus tôt. Louis d'Anjou, admirateur de sainte Catherine de Sienne, soutient d'ailleurs ce retour pontifical qu'il finance en avançant 60 000 florins[12].
L'original de la bulle de canonisation n'a pas été retrouvé. Mais une partie des archives pontificales a disparu lors du naufrage d'une partie de la flotte pontificale aux abords de l'île d'Elbe, et les troubles de cette époque tragique (troubles en Italie, mort du pape, Grand Schisme, aventures inouïes de Louis d'Anjou, etc.) expliquent aussi les disparitions de documents importants[7].
Selon la tradition, Charles de Blois aurait ressuscité29 personnes, notamment : Guillaume du Parc, orfèvre à La Roche-Derrien, assassiné ; le garçon noyé de Denys Hureau) ; une fillette d'un an noyée àPlestin, et il aurait protégé de nombreuses personnes des flammes, des éboulements et des loups[16].
Depuis 1367, Olivier Sellier confectionnait des statuettes d'étain de Charles de Blois pour les pèlerins, puis s'exila un temps par crainte de Jean IV.
Roland de Coatgoureden (mort après 1374)[17], qui futsénéchal de Charles de Blois, se fait représenter agenouillé devant son maître dans l'attitude d'unorant priant un saint sur lebas-relief de sonenfeu dans l'église Notre-Dame de Guingamp[18].
Dans son testament de 1380, le connétable de FranceBertrand du Guesclin demande deux pèlerinages pour lui : àSaint-Yves-de-Tréguier et à Saint-Charles-de-Guingamp, établissant la reconnaissance contemporaine de sa canonisation. De même la pratique des mercenaires bretons au service du pape :
le cri de guerre des Bretons au service du pape Grégoire XI : « Vostre mercy, Charles et Yves ! » n'aurait pas été très pontifical si le premier personnage n'avait pas été canonisé, alors que le second l'était si bien[7].
Dans sesChroniques contemporaines,Jean Froissart écrit que la canonisation a été effectuée par Urbain V, et les annalistes le répéteront après lui. MaisAndré Duschesne parle en 1621 d'un successeur immédiat de ce pape.
AuXVIIe siècle, le procès-verbal d'une reconnaissance desreliques relève l'indication sur le tombeau d'une élévation des reliques — équivalent d'une canonisation — entre les années 1372 et 1450.
AuXVIIIe siècle,Benoît XIV, lecteur desAnnales Ecclesiastici deRinaldi et réformateur du calendrier comme des procédures debéatification etcanonisation, supprime la fête de Charles de Blois. LesBollandistes s'abstiennent alors de publier comme prévu la documentation rassemblée. L'évêque de Blois répond en 1756 à celui de Tréguier que labulle de canonisation se trouve sans doute àChartres ou àRome[7].
Charles de Blois semble être alors le seul saint moderne honoré officiellement en France sans l'aval de Rome.
AuXIXe siècle, legallicanisme finissant, les diocèses de Blois et de Saint-Brieuc effacent la fête de Charles.
DébutXXe siècle,dom François Plaine,moinebénédictin deLigugé, transmet à Rome les documents postérieurs à la lettre d'Urbain V : ses bulles pour l'enquête (1369 et 1370), celle de Grégoire XI (1371) les renouvelant et les procès-verbaux de l'enquête (1371). Deux exemplaires du dossier sont conservés par laBibliothèque vaticane et par les Archives des Basses-Pyrénées[7]. Le P. Antoine de Sérent s'appuie sur ce dernier document pour sa publier sesMonuments du procès de canonisation du bienheureux Charles de Blois en 1921[19].
Le 14 décembre 1904, le pape saintPie X accorde de nouveau la reconnaissance de culte à Charles de Blois, ainsi officiellement bienheureux, du fait de sa piété sans faille et ses neuf années d'emprisonnement àLondres. L'historienBarthélémy Pocquet du Haut-Jussé fait connaître la bulle de Grégoire XI de 1376 confirmant la remise des procès-verbaux du procès et levant six doutes de forme, dernière étape avant les consistoires et la canonisation liturgique.
L'autel de la8e chapelle Sud de lacathédrale Saint-Louis de Blois lui est dédié. Le chanoine Porcher charge le peintreBottoni de réaliser la peinture du retable[20].

Une égliseart déco,Saint-Charles-de-Blois, construite en 1930 par Guy Caubert de Cléry à l'initiative du recteurLéon Chevassu, lui est dédiée en 1939 àAuray[21], sous le titre de saint.
En 1951, le P. Marie-Hyacinthe Laurent[22] soutient que la procédure était encore en cours au temps de Clément VII, citant le testament de Louis d'Anjou du 26 septembre 1383 où il indiquerait vouloir poursuivre les démarches pour la canonisation. Laurent Héry explique en 1996 que Baudoin de Gaiffier[23] et Barthélémy Pocquet du Haut-Jussé[24] ont rallié cet avis, et estime que la trouvaille par Noële Maurice-Denis de la lettre pourtant explicite de l'ambassadeur de Mantoue « lui [avait laissé] penser que la reconnaissance officielle du prince breton avait pur être prononcée les 10 et 11 septembre 1376 ».
Charles de Blois est inscrit aux calendriers des diocèses de Blois et de Tréguier, et de la province de France de l'ordre des Frères mineurs.