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Charles V le Sage

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Pour les articles homonymes, voirCharles V.

Charles V
Illustration.
Gisant de Charles V à labasilique Saint-Denis.
Titre
Roi de France

(16 ans, 5 mois et 8 jours)
Couronnement
en lacathédrale de Reims
PrédécesseurJean II
SuccesseurCharles VI
Régent du royaume de France

(4 ans et 7 jours)
MonarqueJean II

(3 mois et 5 jours)
MonarqueJean II
Duc de Touraine

(7 mois et 2 jours)
PrédécesseurPhilippe de France
SuccesseurLouis Ier d'Anjou
Duc de Normandie

(8 ans, 4 mois et 1 jour)
PrédécesseurJean II
SuccesseurRetour à la couronne (1364-1446)

Charles de France

Dauphin de Viennois

(14 ans, 8 mois et 23 jours)
PrédécesseurHumbert II de Viennois
SuccesseurCharles VI
Biographie
DynastieMaison de Valois
Nom de naissanceCharles de France
Date de naissance
Lieu de naissanceChâteau de Vincennes (France)
Date de décès (à 42 ans)
Lieu de décèsBeauté-sur-Marne (France)
SépultureNécropole royale de la basilique de Saint-Denis
PèreJean II
MèreBonne de Luxembourg
FratrieLouis Ier d'Anjou
Jean Ier de Berry
Philippe II de Bourgogne
Jeanne de France
Marie de France
Isabelle de France
ConjointJeanne de Bourbon
EnfantsJeanne de France
Bonne de France
Jeanne de France
Charles VI
Marie de France
Louis Ier d'Orléans
Isabelle de France
Catherine de France
HéritierCharles
(1368-1380)
ReligionCatholicisme
RésidenceParis

Image illustrative de l’article Charles V le Sage
Rois de France
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Charles V[1], ditle Sage, né le àVincennes et mort le auchâteau de Beauté (actuelleNogent-sur-Marne), fils deJean II le Bon, estroi de France de1364 à1380, troisième représentant de ladynastie des Valois, qui règne sur la France depuis 1328.

Son règne marque la fin de la première partie de laguerre de Cent Ans. Il parvient à récupérer la quasi-totalité des territoires perdus par son pèreJean II et son grand-pèrePhilippe VI, à restaurer l'autorité royale et à sortir le royaume d'une période difficile marquée par les défaites deCrécy (1346) et dePoitiers (1356), par un conflit avec le roi de NavarreCharles II le Mauvais et par l'épidémie depeste noire des années 1347-1351, qui touche la quasi-totalité de l'Europe.

Très instruit, il est connu pour avoir fondé la première librairie royale, ancêtre de laBibliothèque nationale de France.

En 1349, il est le premier prince royal à recevoir le titre dedauphin, en tant que fils aîné ethéritier présomptif, à la suite de l'achat duDauphiné de Viennois, jusque là fief duSaint-Empire romain germanique.

Il accède aux responsabilités dès1357, lorsque Jean le Bon, prisonnier des Anglais depuis la défaite de Poitiers, est transféré en Angleterre (pour trois ans). Mais son pouvoir est contesté par leroi de Navarre, qui continue de revendiquer la couronne de France en tant que petit-fils deLouis X le Hutin, et par leprévôt des marchands de Paris,Étienne Marcel, qui souhaite un renforcement du rôle desétats généraux du royaume.

Il réussit à conserver la couronne à lamaison de Valois bien que le pays sombre dans la guerre civile.Sacré roi de France en1364[2] après la mort de son père à Londres, il restaure l'autorité royale en la fondant sur l'État de droit et en poursuivant une politique de monnaie stable instaurée par les conseillers de son père. Un parallèle est très vite établi entre son règne et celui deSaint Louis, référence du bon gouvernement à l'époque.

Il dote ses frères d'apanages afin d'éviter qu'ils complotent contre lui. Le plus célèbre est celui qu'il cède en 1363 àPhilippe le Hardi, leduché de Bourgogne, créant ainsi lamaison de Valois-Bourgogne, avec laquelle ses successeurs seront souvent en conflit, notamment sous les ducsPhilippe le Bon etCharles le Téméraire.

Il instaure des impôts durables qui lui permettent de doter la France d'une armée permanente, qui, associée à celles de ses frères, lui permet de débarrasser le royaume desGrandes Compagnies de mercenaires démobilisés, puis de vaincre les Anglais, victoire aussi acquise grâce à une action diplomatiques auprès de la noblesse de Guyenne (fief de France tenu par le roi d'Angleterre), et en isolant celui-ci du reste de l'Europe. Il promeut aussi le sentiment national, transformant les Anglais en envahisseurs.

Son règne est enfin marqué par leGrand Schisme d'Occident, qu'il n'a pas pu ou voulu empêcher.

Biographie

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Origines familiales

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Charles naît auchâteau de Vincennes le[3].

Il est le fils deJean II le Bon (1319-1364), fils lui-même dePhilippe de Valois (1293-1350), qui devint roi de France en 1328 sous le nom dePhilippe VI, après la mort deCharles IV le Bel, dernier représentant mâle de ladynastie des Capétiens. La cour de France décide à ce moment d'exclure de la succession[4] les princesses royales que sontJeanne (1312-1349), fille deLouis X le Hutin, et surtoutIsabelle, fille dePhilippe IV le Bel, car elle est l'épouse du roi d'AngleterreÉdouard II et la mère d'Édouard III. Philippe de Valois, étant le parent mâle le plus proche du dernier roi, en tant que petit-fils dePhilippe III le Hardi, devient donc roi, mais cette succession est contestée, notamment par Édouard III (1312-1377), roi à partir de 1327.

La mère de Charles V estBonne de Luxembourg (1315-1349), fille deJean de Luxembourg,roi de Bohême, fils de l'empereurHenri VII, et sœur de Charles de Luxembourg (1316-1378), empereur sous le nom deCharles IV[5] à partir de 1347. Jean de Luxembourg, dit l'Aveugle, trouve la mort àCrécy en 1346. Bonne de Luxembourg meurt de la peste, ainsi d'ailleurs queJeanne de Bourgogne (1293-1349), épouse de Philippe VI et mère de Jean le Bon.

Enfance

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Formation

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Il est éduqué à la cour avec d'autres enfants de son âge, desquels il restera proche : son onclePhilippe d'Orléans ; ses trois frèresLouis,Jean etPhilippe ;Louis de Bourbon ;Édouard etRobert de Bar ; Godefroy de Brabant ;Louis d'Étampes ; Louis d'Évreux (frère de Charles le Mauvais) ;Jean etCharles d'Artois ;Charles d'Alençon etPhilippe de Rouvre[6].

Son précepteur est probablementSylvestre de La Cervelle[7], qui lui enseigne lelatin et lagrammaire.

Dauphin de France (1349)

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Charles V et Jeanne de Bourbon,Paris,musée du Louvre. Provenant probablement des décors extérieurs du Louvre, ces sculptures furent restaurées auXIXe siècle parAlexandre Lenoir enLouis IX et Marguerite de Provence, ce qui explique la présence d'une maquette de la Sainte-Chapelle de Paris dans la main gauche du roi.

En 1349, le comteHumbert II, ruiné[8] à la suite d'unecroisade à Smyrne, et sans héritier après la mort de son fils unique, décide de vendre le Dauphiné de Viennois[9], fief relevant duSaint-Empire romain germanique.Philippe VI se porte acquéreur et conclut avec Humbert letraité de Romans, selon lequel leDauphiné de Viennois doit revenir à un fils du prince héritierJean le Bon. C'est Charles, fils aîné de Jean, qui reçoit le fief, ainsi que le titre dedauphin, qui devient ensuite le titre du prince héritier de France.

Cette prise de possession du Dauphiné est la première extension du royaume au delà des limites définies par letraité de Verdun de 843 (ici : le Rhône). Elle permet de mieux contrôler la vallée duRhône, axe commercial majeur entre la Méditerranée et l'Europe du Nord. Elle met les rois de France en contact direct avecAvignon, ville pontificale et centre diplomatique important à cette époque.

Âgé de douze ans, Charles a sa première expérience dans l'exercice du pouvoir lors de son séjour, du àmars 1350, àGrenoble, capitale du Dauphiné. Quelques jours après son arrivée, la population de Grenoble est conviée sur la place Notre-Dame, où une estrade est dressée. Placé à côté de l'évêqueJean de Chissé, Charles y reçoit le serment de fidélité des habitants. En échange, il leur promet de respecter la charte communale de la ville et confirme les libertés et franchises qu'Humbert II a reprises par un statut solennel promulgué avant son abdication. Enfin, il accorde une amnistie à tous les condamnés, exception faite de ceux qui encourent la peine capitale[10].

Au cours de son séjour, le dauphin s'applique, en dépit de son jeune âge, à se faire reconnaître par ses sujets, et intercède pour faire cesser la guerre qui sévit entre deux familles de vassaux[11].

Mariage (1350)

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Le, à l'âge de 12 ans, le dauphin épouse, àTain-l'Hermitage, sa parenteJeanne de Bourbon (âgée de 12 ans également). Un accord du pape a été obtenu pour ce mariage consanguin[11] : Jeanne est en effet la fille d'Isabelle de Valois, sœur dePhilippe VI, grand-père de Charles, ce qui fait de lui sonpetit-cousin. Cette consanguinité est probablement à l'origine[réf. souhaitée] des troubles psychiatriques[réf. souhaitée] deCharles VI et de la fragilité des autres enfants de Charles V.

Le mariage est retardé par les morts deBonne de Luxembourg et deJeanne de Bourgogne, emportées par lapeste pendant son séjour en Dauphiné[12]. Le dauphin a lui-même été gravement malade d'août à décembre 1349[12]. Les rassemblements étant limités, afin de ralentir la diffusion de la peste qui sévissait alors dans toute l'Europe, le mariage a lieu dans l'intimité[11].

Rapprochement du dauphin avec la faction du roi de Navarre (1350-1356)

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Articles détaillés :Charles le Mauvais,Robert Le Coq etGeoffroy d'Harcourt.

L'avènement de Jean le Bon (1350)

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Jean II adoubant deschevaliers, miniature d'un manuscrit desChroniques de Saint-Denis,XVe siècle, BNF.

Le dauphin est rappelé à Paris à la mort dePhilippe VI (22 août 1350), puis est présent le ausacre de son père àReims.

Il est fait chevalier de l'ordre de l'Étoile[13].

Les problèmes politiques du royaume de France

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Lorsque Jean le Bon devient roi, sa légitimité et celle de la dynastie des Valois sont mises en question.Philippe VI a été déconsidéré par les désastres deCrécy et deCalais, et par lesmutations monétaires auxquelles il a recouru pour soutenir les finances royales, ainsi que par lesravages de la peste. Les Valois sont confrontés à diverses oppositions internes au royaume, en plus de celle du roi d'AngleterreÉdouard III, qui détient d'ailleurs en France un fief important, leduché de Guyenne, incluantBordeaux.

La principale est celle duroi de Navarre (depuis 1349)Charles II (1332-1387), dit le Mauvais, petit-fils deLouis X le Hutin par sa mèreJeanne. Noble français de haut rang, Charles de Navarre estime être plus légitime que les Valois pour détenir la couronne de France.Comte d'Évreux (donc un puissant « baron normand »), il revendique aussi lecomté de Champagne (il est l'arrière-petit-fils de la dernière comtesse de Champagne,Jeanne Ire de Navarre) et lecomté d'Angoulême.

Il parvient à rassembler les mécontents du règne de Philippe VI, qui forment autour de lui une faction d'opposition incluant la maison de Boulogne (le comte, le cardinal, leurs deux frères etleurs parents d'Auvergne[pas clair]), les barons de Champagne[14], les fidèles deRobert III d'Artois, chassé du royaume par Philippe VI. Il a aussi le soutien de l'université de Paris etdes marchands du Nord-Ouest pour lesquels le commerce trans-Manche est vital[pas clair][15].

Les problèmes de la Normandie

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LaCharte aux Normands de 1315, confirmée en 1339 par Philippe VI, garantit une large autonomie à la Normandie.Grand Coutumier de Normandie,XIVe siècle,Petit Palais.

La Normandie a une situation particulière dans le royaume du fait de ses liens anciens avec l'Angleterre, établis lors de l'avènement du duc de NormandieGuillaume le Conquérant comme roi d'Angleterre (1066). Sur le plan du droit féodal, les rois d'Angleterre (héritiers de Guillaume) ont cessé d'être simultanémentducs de Normandie en 1204 (le duché, qui fait partie du domaine royal, a été attribué à Jean le Bon en apanage en 1332).

Cependant, l'économie du duché dépendautant des échanges maritimes à travers laManche que de ceux par transport fluvial sur laSeine[réf. nécessaire].

Par ailleurs, un certain nombre de seigneurs fonciers normands ont toujours des terres en Angleterre[16] et ont du mal à prendre clairement parti dans le conflit qui oppose les rois de France et d'Angleterre (risques de confiscation d'une partie de leurs biens).

C'est pourquoi la noblesse normande se regroupe en clans solidaires qui lui permettent de faire front. Ainsi obtient-elle deschartes garantissant au duché une grande autonomie.Raoul de Brienne est un exemple significatif : il mène une politique étrangère indépendante, et s'il commande l'armée française envoyée en Écosse en 1335, c'est en tant que capitaine général engagé par contrat et non comme l’obligé du roi.[pas clair]

La noblesse normande est cependant divisée. Notamment, il existe depuis des générations un conflit entre les maisons de Tancarville et d'Harcourt[17]. Les rois de France soutiennent traditionnellement les comtes de Tancarville, auxquels ils confient la charge de chambellan de l'Échiquier de Normandie. Les échiquiers avaient l'ultime juridiction qui tranchait au civil comme au pénal en dernier ressort. Comme l'Échiquier ne siégeait que deux fois l’année, lorsqu’il y avait des affaires provisoires, en attendant la tenue de l'Échiquier, c'était lesénéchal de Normandie qui y présidait et appelait des membres du clergé et de la noblesse à siéger avec voix délibérative.

Mais afin d’éviter une éventuelle allégeance de seigneurs normands àÉdouard III, dans le cadre de la guerre franco-anglaise,Philippe VI a été contraint de composer avec le clan des Harcourt[18]. Il nommeGodefroy de Harcourt, capitaine souverain en Normandie[19].

En tant que duc de Normandie, Jean le Bon a poursuivi la politique de soutien auxTancarville, associée à la maison de Melun par le mariage (avant 1316) du vicomteJean de Melun (mort en 1350) avec Jeanne de Tancarville, héritière unique ducomté de Tancarville[20]. Par la suite, ce sont les Melun-Tancarville qui forment l'ossature du parti de Jean le Bon, alors que Godefroy de Harcourt est le défenseur historique des libertés normandes. Le rapprochement entre ce dernier et Charles de Navarre,celui-ci se posant en champion des réformateurs[pas clair], va de soi[21],[22].

L’Échiquier de Normandie (XIIe siècle) rend justice en Normandie. La seconde Charte aux Normands de 1339, leur garantit le droit de ne jamais être cités devant une autre juridiction.Aula duchâteau de Caen.

Le, Jean le Bon, à peine sacré roi de France, fait arrêter puis exécuterRaoul II de Brienne,comte de Guînes etconnétable de France. Il semble que celui-ci devait rendre hommage à Édouard III, ce qui aurait été catastrophique pour le nouveau roi car aurait ouvert la porte à d'autres défections vers le camp anglais[23]. Pour éviter ces défections éventuelles, l'affaire est réglée dans le secret. Or, l'opacité totale qui entoure cette exécution a un effet complètement contre-productif et alimente les rumeurs. Une grande partie de la noblesse normande et les nombreux soutiens du connétable se rallient au camp navarrais[24] : les seigneurs normands et la noblesse du Nord-Ouest (dePicardie, d'Artois, duVermandois, duBeauvaisis et deFlandre dont l'économie dépend des importations de laine anglaise), ainsi que les frères dePicquigny, fidèles alliés du connétable[14]. Au lendemain de la mort de ce dernier, Charles le Mauvais écrit au duc de Lancastre, fils d'Édouard III :« Tous les nobles de Normandie sont passés avec moi à mort à vie »[14].

Brillant orateur et habitué à la monarchie contrôlée par sa fréquentation descortes navarraises (l'équivalent desétats généraux), Charles le Mauvais se fait le champion de la réforme d'un État jugé trop arbitraire, ne laissant plus voix ni à la noblesse ni aux villes (Jean le Bon gouverne avec un cercle de favoris et d'officiers d’ascendance parfois roturière). À l'inverse de son père, Charles V ne considère pas le pouvoir du roi comme légitime, mais relevant de l’acquis ; il doit, selon lui, s’obtenir grâce à l'approbation de ses sujets et nécessite une grande capacité d'écoute. Cette vision des choses lui permet de se rapprocher des nobles normands et du courant réformateur, et donc de Charles de Navarre.

Royaume de France en 1350

La puissance du roi de Navarre est telle que, le, il fait assassiner en toute impunité son rivalCharles de la Cerda (le favori du roi), assumant ouvertement ce crime. Il obtient même, lors dutraité de Mantes, des concessions territoriales et de souveraineté grâce à la menace d'une alliance avec les Anglais. Mais àAvignon, Français et Anglais négocient une paix qui empêcherait Charles de Navarre de compter sur le soutien d'Édouard III et l'éloignerait définitivement du pouvoir ; il conclut donc avec les Anglais un traité au terme duquel le royaume de France serait tout simplement partagé[25],[26]. Un débarquement anglais est prévu pour la fin de la trêve qui expire le 24 juin 1355[26].

Le roi Jean missionne le dauphin en mars 1355 pour organiser la défense de la Normandie, ce qui passe par la levée de l'impôt nécessaire[27]. La tâche est difficile du fait de l'influence grandissante de Charles le Mauvais qui, en vertu dutraité de Mantes, a un statut proche de celui de « duc » et, susceptible de s'allier àÉdouard III, peut à tout moment ouvrir les portes de la Normandie à l'Anglais[28]. Le dauphin sait se faire accepter. Les Normands rechignent d'autant plus à faire rentrer les taxes que les Navarrais les y encouragent, mais l'argent récolté est redistribué aux seigneurs qui ont bien voulu consentir à tailler leurs sujets. Il reste peu de finances pour équiper des hommes d'armes, mais le dauphin y gagne des sympathies. Ses capacités d'écoute lui permettent d'éviter la guerre en obtenant en juin une réconciliation entre le Navarrais et le roi qui est scellée par une cérémonie à la cour le24 septembre1355[27]. Édouard III prend ombrage du nouveau revirement de Charles de Navarre (il se méfie désormais de ce concurrent à la couronne de France trop gourmand et trop retors) : le débarquement promis n'a pas lieu[26].

Tentative de fugue

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L'oncle du dauphin et empereurCharles IV, subissant une offensive diplomatique de la part des Anglais, et inquiété par l'influence grandissante des Français sur l'Ouest de l'Empire (laBourgogne, leDauphiné et de nombreuses places fortes sont contrôlés par les Français), menace de renégocier son alliance avec son beau-frère Jean le Bon et émancipe le duc de Bourgogne pour ses possessions en terre d'Empire (du fait de son jeune âge, ses terres sont gérées par son beau-père, le roi de France)[29]. Le roi fait montre d'intransigeance et la tension monte. Charles, qui est très proche de son oncle et risque d'y perdre le Dauphiné, est opposé à la façon de procéder de son père. Monté contre lui parRobert Le Coq (l'un des plus fervents Navarrais, jouant double jeu auprès de Jean le Bon) qui ne cesse de lui assurer que son père cherche à l'évincer du pouvoir, il organise avec le concours du parti navarrais une fugue visant à rencontrer l'empereur, lui prêter l’hommage et apaiser les tensions[24]. Elle doit avoir lieu en décembre1355. Le roi, mis au courant du complot parRobert de Lorris, convoque son fils et lui confie la Normandie enapanage pour le rassurer sur ses sentiments envers lui et contrer le travail de sape des Navarrais[30].

Duc de Normandie

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Le 7 décembre 1355, Charles devient donc duc de Normandie. Mais Jean le Bon, averti du complot de partage du pays ourdi par Charles le Mauvais et les Anglais àAvignon, se décide à mettre le Navarrais hors d'état de nuire.

Le 5 avril 1356, le dauphin Charles convie en son château deRouen toute la noblesse de la province, à commencer par lecomte d'Évreux, Charles le Mauvais, pour fêter son intronisation en Normandie. La fête bat son plein lorsque surgit Jean II le Bon, coiffé d'unbassinet et l'épée à la main, qui vient se saisir de Charles le Mauvais en hurlant :« Que nul ne bouge s'il ne veut être mort de cette épée ! »[31]. À ses côtés, son frèrePhilippe d'Orléans, son fils cadetLouis d'Anjou et ses cousins d'Artois forment une escorte menaçante. À l'extérieur, une centaine de cavaliers en armes tiennent le château[31]. Le roi se dirige vers la table d'honneur, agrippe le roi de Navarre par le cou et l'arrache violemment de son siège en hurlant :« Traître, tu n'es pas digne de t'asseoir à la table de mon fils ! ». Colin Doublet, écuyer de Charles le Mauvais, tire alors son couteau pour protéger son maître, et menace le souverain. Il est aussitôt appréhendé par l'escorte royale qui s'empare également du Navarrais[31]. Excédé par les complots de son cousin avec les Anglais, le roi laisse éclater sa colère qui couve depuis la mort, en janvier1354, de son favori le connétableCharles d'Espagne.

Article détaillé :Assassinat de Charles de la Cerda.
Arrestation deCharles de Navarre à Rouen en 1356 (Chroniques de Froissart, Loyset Liedet,BnF,ms. français 2643fo 197 vo,XVe siècle).

Malgré les supplications de son fils qui, à genoux, implore de ne pas le déshonorer, le roi se tourne versJean d'Harcourt, infatigable défenseur des libertés provinciales, mais qui a été mêlé à l'assassinat de Charles de la Cerda. Il lui assène un violent coup de masse d'armes sur l'épaule avant d'ordonner son arrestation. Le soir même, le comte d'Harcourt et trois de ses compagnons, dont l'écuyer Doublet, sont conduits au lieu-dit du Champ du Pardon. En présence du roi, le bourreau, un criminel libéré pour la circonstance qui gagne ainsi sa grâce, leur tranche la tête[26].

Deux jours plus tard, la troupe regagne Paris pour célébrer la fête de Pâques. Charles le Mauvais est emprisonné auLouvre, puis auChâtelet. Mais la capitale n'est pas sûre, aussi est-il finalement transféré à la forteresse d'Arleux, près deDouai, terre d'Empire[32] depuis le mariage en1324 deMarguerite II de Hainaut avecLouis IV de Wittelsbach, l'empereur romain germanique.

Incarcéré, Charles II de Navarre gagne en popularité ; ses partisans le plaignent et réclament sa liberté. La Normandie gronde et nombreux sont les barons qui renient l'hommage prêté au roi de France et se tournent vers Édouard III d'Angleterre. Pour eux, Jean le Bon a outrepassé ses droits en arrêtant un prince avec qui il a pourtant signé la paix. Pire encore, ce geste est perçu par les Navarrais comme le fait d'un roi qui se sait illégitime et espère éliminer un adversaire dont le seul tort est de défendre ses droits à la couronne de France.Philippe de Navarre, frère de Charles le Mauvais, envoie son défi au roi de France le28 mai1356[32]. Les Navarrais, et particulièrement les seigneurs normands, passent en bloc du côté d'Édouard III qui, dès le mois de juin, lance ses troupes dans de redoutableschevauchées, enNormandie, dans leSud puis leCentre de la France. Le 19 septembre, Jean le Bon est fait prisonnier par les Anglais à ladéfaite de Poitiers.

Lieutenant du roi pendant les captivités de Jean le Bon et de Charles de Navarre (septembre 1356-novembre 1357)

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Étienne Marcel, représenté en costume de la fin duXVe siècle[33] (Chroniques deJean Froissart, enluminées parLoyset Liédet,BnF,ms. français 2643fo 230,XVe siècle).
Articles détaillés :Étienne Marcel etGrande ordonnance de 1357.

Lorsque Jean le Bon est fait prisonnier par les Anglais (19 septembre 1356), Charles de Navarre est prisonnier du roi de France depuis le 4 avril. Le dauphin, qui devient responsable du royaume de France, est confronté à l'action des partisans du roi de Navarre, dont la libération est un des enjeux de cette période. Mais aussi aux demandes de ceux qui veulent des réformes institutionnelles renforçant le rôle des états généraux. Les deux factions peuvent d'ailleurs faire alliance contre le dauphin, espérant profiter de cette période d'absence du roi.

Les suites de la défaite de Poitiers

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En1356, lePrince Noir, fils aîné d'Édouard III et lieutenant de Guyenne, attaqué par Jean le Bon au retour d'une chevauchée de pillage, inflige à l'armée française ledésastre de Poitiers. Le roi et son filsPhilippe sont faits prisonniers et gardés d'abord à Bordeaux.

En mars 1357, un accord detrêve est conclu pour un an. Puis les prisonniers royaux sont emmenés à Londres en avril (leur séjour en Angleterre va durer trois ans).

La noblesse française voit son discrédit accru à la suite de ce nouveau désastre militaire : elle a de nouveau démontré qu'elle est incapable d'assumer sa fonction primordiale, faire (et gagner) la guerre.

D'autant plus que cette période correspond à une montée en puissance des bourgeoisies urbaines, qui n'attendent que l'occasion de revendiquer une liberté et un pouvoir proportionnels à leur importance économique au sein de la société. Leur leader est alors leprévôt des marchands de Paris,Étienne Marcel, qui s'est déjà manifesté lors des états généraux de 1355 en tant que représentant du tiers état, c'est-à-dire à cette époque, des villes.

Les états généraux d'octobre-novembre 1356

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Le roi empêché, il revient à son fils aîné de prendre en main le gouvernement. Mais il n'a que18 ans, son prestige personnel est faible, d'autant plus qu'il a quitté le champ de bataille de Poitiers, contrairement à son père et à son frère, et il a peu d'expérience politique. Il reprend à ses côtésles membres duconseil du roi[Qui ?] choisis par son père,qui sont très décriés[réf. nécessaire].

Lesceau delphinal de Charles de France, alorsduc de Normandie,premier desdauphins de Viennois de lamaison de France.

Lesétats généraux sont réunis le. Le dauphin se heurte à l'opposition d'Étienne Marcel, allié avec les amis de Charles le Mauvais, regroupés autour de l'évêque deLaon,Robert Le Coq[34].

Les états proclament Charleslieutenant du roi et défenseur du royaume, mais sous le contrôle d'un conseil de douze représentants de chaque ordre[35].

Ils exigent la destitution des conseillers les plus impopulaires, notamment pour avoirdévalué la monnaie à plusieurs reprises[36], le droit d'élire un conseil pour assister le roi, ainsi que la libération du roi de Navarre.

Le dauphin n'est pas opposé à l'octroi aux états d'un rôle plus important[réf. nécessaire] dans le gouvernement du royaume. En revanche, il refuse la libération de Charles le Mauvais, car le roi de Navarre constitue une menace majeure pour la dynastie des Valois. Pas assez assuré de son pouvoir pour refuser catégoriquement ces propositions, le dauphin ajourne sa réponse en prenant prétexte de l'arrivée de messagers de son père[34]) etajourne les états généraux[Quand ?].

L'ordonnance monétaire de décembre 1356

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Le, il publie uneordonnance établissant une nouvelle monnaie,ce qui lui permettrait de remplir ses caisses[pas clair] sans passer par les états. Il s'agit d'une réévaluation (de 25 %), ce qui avantage les propriétaires fonciers qui perçoivent des loyers et redevances en monnaie, c'est-à-dire la noblesse, le clergé et le patriciat urbain.

Il quitte ensuite Paris pour Metz, laissant à son frèreLouis le soin de régler les affaires courantes.

Cette ordonnance provoque la colère des couches modestes de la population parisienne, qui voit ses loyers réévalués[37]. Des émeutes éclatent. Étienne Marcel prend le parti des compagnons et des boutiquiers contre la grande bourgeoisieet les spéculateurs[pas clair] qu'il considère comme responsables deses malheurs dans la succession dePierre des Essars[pas clair] et devient maître de la rue[37]. Il peut faire pression sur Louis d’Anjou, qui doit révoquer l’ordonnance et rappeler les états généraux[38],[39] et rappelle les états généraux (3 février1357).

Voyage du dauphin en terre d'Empire (décembre 1356-mars 1357)

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Le but de son voyage est de rencontrer l'empereur àMetz,principauté ecclésiastique duSaint-Empire, où il doit faire hommage pour le Dauphiné àCharles IV, son oncle.

Il en profite pour obtenir son soutien diplomatique à la couronne de France.

La grande ordonnance de mars 1357 : une monarchie sous tutelle ?

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À son retour en mars 1357, il accepte de promulguer une « grande ordonnance », qui esquisse un système de monarchie contrôlée et établit un vaste plan de réorganisation administrative.

Une commission est instituée, chargée de contrôler les agents royaux, particulièrement les collecteurs d'impôts, et de les juger le cas échéant.

Neuf conseillers du dauphin sont révoqués (Étienne Marcel tient sa vengeance contreRobert de Lorris[pas clair])[40], et six représentants des états généraux entrent au conseil du roi, qui devient un conseil de tutelle.

L'administration royale est surveillée de près :les finances, particulièrement les mutations monétaires et les subsides extraordinaires, sont contrôlées par les états[pas clair][41].

De son côté, le dauphin obtient le maintien en captivité de Charles de Navarre.

La libération de Charles de Navarre (novembre 1357) et ses conséquences

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Article détaillé :Charles le Mauvais.

Un gouvernement du régent contrôlé par les états avec son assentiment est donc mis en place. Deux conseils cohabitent : celui du dauphin et celui des états. Mais pour les réformateurs et la faction navarraise, cela ne suffit pas : le retour de Jean le Bon libéré pourrait mettre fin à cet essai institutionnel.

Le retour triomphal de Charles de Navarre à Paris (9 novembre-10 décembre)

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La libération du roi de Navarre est organisée par Étienne Marcel et Robert Le Coq. Mais, pour ne pas se compromettre ouvertement aux yeux du dauphin, il donne à cette libération la forme d’un coup de force perpétré spontanément par des fidèles du roi de Navarre, les frèresPicquigny)[42]. Charles de Navarre sort de la forteresse d'Arleux le9 novembre.

Charles V ne peut qu'accepter la réconciliation avec Charles de Navarre libéré.Grandes Chroniques de France de Charles V,BnF.

Son retour à Paris est organisé avec soins : il estreçu avec le protocole réservé au roi[réf. nécessaire] dans les villes qu'il traverse. Le même cérémonial a lieu dans chaque ville d'Amiens à Paris : il est reçu par le clergé et les bourgeois en procession, puis il harangue une foule tout acquise, expliquant qu’il a été spolié et mal traité par Jean le Bon, qui l'a fait jeter en prison bien qu'il soit lui aussi de lignée royale[43]. Le30 novembre, arrivé à Paris, il harangue 10 000 Parisiens réunis par Étienne Marcel auPré-aux-Clercs (actuelVIIe arrondissement, quartier Saint-Germain).

Le3 décembre, a lieu une séance du conseil du roi au sujet de laréhabilitation[pas clair] de Charles de Navarre. Étienne Marcel s'y présente accompagné d'une forte escorte de bourgeois parisiens, sous prétexte d'annoncer que les états, réunis aucouvent des Cordeliers, ont consenti à l'impôt demandé par le dauphin etqu'il ne reste à obtenir que l'accord de la noblesse[pas clair]. Dans ces conditions, le dauphin ne peut que donner son accord à la réhabilitation de Charles le Mauvais[44].

Il est alors prévu que les états se réuniront le14 janvier1358 pour étudier la question dynastique.

Préparatifs politico-militaires du roi de Navarre et du dauphin (décembre 1357-janvier 1358)

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Charles le Mauvais utilise ce délai d'un mois pour renforcer sa position en Normandie[45]. Anticipant le retour de Jean le Bon (qui négocie sa libération avec Édouard III), il lève une armée[46] incluant des mercenaires anglais. À la tête de ses troupes, il prend le contrôle de la Basse-Normandie, puis remonte la vallée de la Seine. Un renfort de 1 400 hommes est débarqué à Rouen parson lieutenantMartin Henriquez[Qui ?][47].

Simultanément,il déploie ses talents d'orateur et de mise en scène pour séduire la noblesse et la bourgeoisie normandes[pas clair][45].

Face à lui, le dauphin ne reste pas passif :il organise la défense du pays contre les nombreuxmercenaires qui, faute de solde, pillent le pays[pas clair]. Les maréchaux de Normandie, de Champagne et de Bourgogne viennent à la cour. Le dauphin fait venir du Dauphiné à Paris une armée de 2 000 hommes, sous prétexte de protéger la capitale contre les exactions desGrandes compagnies[48], ce qui met la population en émoi.

Le11 janvier, il s'adresse aux Parisiens auxHalles en expliquant pourquoi il lève une armée, mettant en cause les états pour leur incapacité à assurer la défense du pays malgré l'argent prélevé lors des levées d'impôts.C’est un succès[réf. nécessaire]. Étienne Marcel est obligé d'organiser d'autres réunionsnoyautées par ses partisans[réf. nécessaire] pour le mettre en difficulté[49].

Les difficultés des états généraux de 1358

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Le14 janvier, les états n’arrivent à s’entendre ni sur la question dynastique ni sur la levée d’un nouvel impôt.On[Qui ?] décide donc une nouvelle mutation monétaire pour renflouer le trésor royal[50].Les esprits[Qui ?] s’échauffent contre les états, pour le plus grand bénéfice du dauphin[50].

L'exécution de l'ordonnance de1357 est vite bloquée.La commission d'épuration est désignée[Quand ?] mais ne fonctionne que cinq mois. Les collecteurs d'impôts nommés par les états rencontrent l'hostilité des paysans et des artisans pauvres. Les six députés entrés au conseil de tutelle sont en minorité et les états généraux manquent d’expérience politique pour contrôler en permanence le pouvoir du dauphin qui, en acquérant du savoir-faire, retrouvel'appui des fonctionnaires[pas clair].

Les déplacements fréquents, coûteux et dangereux à l'époque, découragent les députés de province et les étatssont de moins en moins représentatifs[Quand ?]. Peu à peu, seule la bourgeoisie parisienne vient siéger aux assemblées.

Étienne Marcel constate l'échec de l'instauration par la voie législative d'une monarchie contrôlée, essaie de la faire proclamer par la force. Il ne remet pas en cause la nécessité d'avoir un souverain, mais il cherche à composer avec celui qui lui laissera le plus de pouvoir. Il oscille entre la faiblesse supposée du dauphin et la cupidité de Charles le Mauvais.[pas clair]

Royaume de France entre 1356 et 1363 : Jacqueries etGrandes Compagnies

L'intervention de Jean le Bon : le premier traité de Londres (janvier 1358)

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Article détaillé :Traités de Londres (1358 et 1359).

Depuis sa résidence londonienne (l'hôtel de Savoie[51]), Jean le Bon désavoue le dauphin et interdit l'application de l'ordonnance de 1357.

Afin d'empêcher une prise du pouvoir par Charles de Navarre, il décide de conclure rapidement les négociations avec les Anglais. Unpremier traité de Londres est signé dès janvier 1358[52]. Il accepte :

Lorsque le contenu de ce traité est connu en France, cela provoque un tollé, dont Étienne Marcel va profiter.

La période de l'insurrection d'Étienne Marcel (janvier-juillet 1358)

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L'affaire de l'assassinat du trésorier du dauphin (24 janvier)

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Dans une ambiance assez tendue, survient un fait divers extrêmement grave : le trésorier du dauphin,Jean Baillet, est assassiné le par le valet d'un changeur parisien, appréhendé alors qu'il allait se réfugier dans une église.

Il est jugé et condamné à mort. Le dauphin fait de son exécution un exemple[54].

Mais son point de vue ne fait pas l'unanimité : deux cortèges funèbres vont avoir lieu, celui de la victime suivi par le dauphin, celui du meurtrier suivi par la bourgeoisie parisienne[55] et Étienne Marcel.

L'émeute du 22 février

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Article détaillé :Journée du 22 février 1358.

Le, Étienne Marcel déclenche une émeute en réunissant trois mille personnes qu'il a convoquées en armes[55].

Cette foule rencontre un des négociateurs du traité de Londres, Regnault d'Acy, qui a apporté la nouvelle à Paris. Il essaie de se réfugier dans une boutique, mais y est assassiné avec ses proches.

Au premier plan, le meurtre des deux maréchaux. Au second plan, Étienne Marcel tend un chaperon rouge et bleu au dauphin Charles tandis que ce dernier détourne le regard (Grandes Chroniques de France,BnF,ms. français 2813fo 409 vo, vers 1375-1380).

Puis la foule envahit lepalais de la Cité pour affronter le dauphin[55]. Étienne Marcel et quelques autres de ses partisans parviennent à la chambre où il se trouve. Il lui dit :« Sire, ne vous ébahissez pas des choses que vous allez voir, car elles ont été décidées par nous, et il convient qu'elles soient faites ». Le maréchal de ChampagneJean de Conflans et le maréchal de NormandieRobert de Clermont sont alors tués devant le prince, qui se retrouve couvert de leur sang et croit sa dernière heure venue.

Mais Étienne Marcel l'oblige seulement à coiffer le chaperon rouge et bleu des émeutiers, aux couleurs de Paris, tandis que lui-même coiffe le chapeau du dauphin, puis à reconnaître la validité de l’ordonnance de1357[56]. Le prévôt des marchands épargne le dauphin, persuadé de pouvoir aisément le contrôler (mais c'est une erreur : bien que timide et chétif, Charles va se révéler un homme politique redoutable).

L'ordonnance de février 1358

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Le dauphin accepte un certain nombre de changements institutionnels, définis par une nouvelle ordonnance. Il obtient le statut de régent du royaume, ce qui permet de ne plus tenir compte des décisions du roi tant que celui-ci reste en captivité[57], ce qui rend caduc le premier traité de Londres.

Le conseil du roi est épuré etquatre bourgeois[Qui ?] y font leur entrée. Le gouvernement et les finances sont aux mains des états[58].

Charles le Mauvais reçoit un commandement militaire et les fonds pour entretenir une armée de 1 000 hommes; .

Départ de Paris du dauphin (25 mars)

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Pour ratifier cette nouvelle ordonnance, en particulierson contenu fiscal[pas clair], il faut l’accord de la noblesse dont une partie ne veut plus venir à Paris en raison des assassinats commis le 22 février.

L'assemblée de la noblesse se réunit donc àSenlis, ce qui fournit au dauphin une occasion de quitter la capitale, le25 mars[59], laissant la capitale à Étienne Marcel et à ses partisans.

Il rencontre la noblesse réunie à Senlis, puis participe aux états deChampagne qui ont lieu le9 avril àProvins, y obtenant le soutien de la noblesse de cette province et mettantles délégués parisiens[pas clair] en difficulté[60].

Encerclement partiel de Paris par l'armée du dauphin (avril 1358)

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Fort de ce succès, il s’empare des forteresses deMontereau et deMeaux. L’accès de Paris est donc bloqué à l'est[60], tandis qu'au sud et à l’ouest, lesgrandes compagnies qui écument le pays empêchent la libre circulation. Il ne reste à Étienne Marcel que l’accès nord, très important pour garder le contact avec les villes de Flandre. Les accès fluviaux sont bloqués.

Le18 avril, Étienne Marcel envoie son défi au dauphin. La ville se prépare au combat : on creuse des fossés, le remblai constituant un talus pour arrêter les tirs d’artillerie. On finance ces travaux par une nouvelle mutation monétaire et en levant un impôt, ce qui diminue la confiance des Parisiens dans le gouvernement des états[61].

Les états généraux de Compiègne (mai 1358)

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En mai 1358, le dauphin réunit les états généraux àCompiègne[62],[63].

Il s'enquiert des malversations,il veut qu'annuellement les dépenses publiques soient réglées d'après leur emploi respectif[pas clair]. Il prend des mesures pour protéger le commerce et faciliter les échanges : il supprime un grand nombre depéages et de taxes sur les matières textiles ou sur les objets fabriqués ;il permet auxJuifs de posséder desbiens-fonds[pas clair].

En matière fiscale, sont décidées une diminution de moitié de l'impôt sur le sel, une réduction du nombre desgages et des immunités des agents du fisc[64].

Les états généraux décident enfin la levée d’un impôt sous le contrôle des états et un renforcement de la monnaie, qui doit rester stable jusqu’en1359. En revanche, le contrôle du conseil du dauphin par les états est abandonné[65].

La Grande Jacquerie paysanne (28 mai- 10 juin 1358)

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Article détaillé :Grande Jacquerie.

À ce moment les régions situées au nord de Paris sont épargnées par les ravages des Grandes Compagnies bien que ni le roi de Navarre ni le dauphin ne les contrôlent militairement. Elles vont être le lieu d'une rébellion paysanne de grande ampleur, quoique courte.

Les Jacques et leurs alliés parisiens sont surpris par une charge de chevalerie à bout portant alors qu'ils donnent l'assaut à la forteresse du marché de Meaux où est retranchée la famille du dauphin. Miniature de Loyset Liédet,BnF, Fr.2643.

La rébellion commence le 28 mai1358 lorsque les paysans deSaint-Leu-d'Esserent, près deCreil (actuel département de l'Oise), excédés par les levées d'impôts décidées à Compiègne, se soulèvent[66]. Leur exemple est rapidement suivi et les exactions contre les nobles se multiplient.

5 000 hommes se regroupent autour d’un chef charismatique,Guillaume Carle, plus connu sous le nom de « Jacques Bonhomme » que lui attribueFroissart. Il reçoit très vite des renforts de la part d’Étienne Marcel (300 hommes commandés par Jean Vaillant)[67], afin d'empêcher l’encerclement que le dauphin est en train de réaliser et de maintenir les communications avec les puissantes villes de Flandre[68].

LesJacquess'emparent duchâteau d'Ermenonville[Quand ?] puis se regroupent àMello (à 6 km au nord-ouest de Creil) sous la conduite de Guillaume Carle.

Le 9 juin, une attaque est menée par les hommes du prévôt des marchands et par un millier de Jacques contre la forteresse deMeaux où se trouvent le dauphin et sa famille[69]. Mais c’est un échec : les assaillants sont balayés par une charge de cavalerie menée par lecomte de FoixGaston Fébus et par lecaptal de Buch,Jean de Grailly[70].

Le roi de Navarre décide alors d'intervenir. Écarté du pouvoir par Étienne Marcel, il doit reprendre la main et montrer au prévôt des marchands que son soutien militaire est indispensable[71] (les marchands peuvent aussi voir d'un bon œil que l'on sécurise les routes[67]). Il est aussi poussé par les nobles de son entourage, particulièrement parJean de Picquigny auquel il doit la liberté et dont le frère a été tué par les Jacques[67].

Il prend la tête de la répression, engageant des mercenaires anglais et ralliant la noblesse. Le10 juin, il s’empare par ruse de Guillaume Carle venu négocier avec lui, puis attaque les Jacques à Mello. C’est un massacre, qui marque la fin de la Jacquerie.

La répression qui s'ensuit est très dure : quiconque est convaincu d'avoir été de la compagnie des Jacques est pendu sans jugement[72].

La reconquête de Paris par Charles de Navarre

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Assassinat d'Étienne Marcel par Jean Maillard, (Chroniques de Froissart, Loyset Liedet,BnF,ms. français 2643fo 230,XVe siècle).

Une fois laJacquerie écrasée,Charles de Navarre rentre à Paris le14 juin1358[73]. Il pense avoir rallié à lui la noblesse mais une grande partie des seigneurs qui étaient à ses côtés contre les Jacques ne le suit pas dans cette démarche et reste derrière le régent qui a su gagner leur confiance. Charles le Mauvais s’établit àSaint-Denis. Il est fait capitaine de Paris par acclamation et Étienne Marcel envoie des lettres dans toutes les villes du Royaume pour qu’il soit fait « capitaine universel »[73]. L’objectif est de créer une grande ligue urbaine et d’opérer un changement dynastique en faveur du Navarrais.

On engage desarchers anglais pour pallier les nombreuses défections de chevaliers qui ont quitté les rangs de l’armée de Charles le Mauvais etassiègent Paris avec le dauphin à partir du29 juin. Ce dernier se voit encore renforcé par l’arrivée de nombreusescompagnies qui voient dans le pillage de Paris une bonne affaire[74]. Ces troupes remportent quelques escarmouches contre les troupes d'Étienne Marcel ou du Navarrais[75].

Le dauphin veut à tout prix éviter un bain de sang qui le discréditerait et souhaite une solution négociée. Il ne fait donc pas donner l’assaut et continue le blocus en espérant que la situation changera. Mais les mercenaires anglais qui défendent la capitale sont considérés comme ennemis et s’attirent l’inimitié des Parisiens. Le21 juillet, à la suite d’une rixe de taverne qui dégénère en combat de rue,34 archers anglais sont massacrés[76]. Les Parisiens en armes en saisissent 400 qu’ils veulentsoumettre à rançon[76].

Le lendemain, Étienne Marcel,Robert Le Coq et Charles de Navarre réunissent la population place de Grève pour calmer les esprits, mais les événements leur échappent et la foule réclame de les débarrasser des Anglais. Pour maîtriser la foule (8 000 piétons et 1 600 cavaliers en arme), ils la conduisent par groupes distincts vers les mercenaires en embuscade ; ceux-ci taillent les Parisiens en pièces :600 à 700 meurent dans ces affrontements[77],[78]. Les Parisiens suspectent Charles de Navarre d'avoir prévenu les mercenaires de leur arrivée (il les a quittés avant le combat)[79]. Leurs chefs soutenant les ennemis du pays contre le régent et contre la population, les Parisiens se sentent trahis et se désolidarisent d’Étienne Marcel, d’autant que Charles de Navarre attend son frère Philippe et des renforts anglais[80]. La nouvelle du massacre des Parisiens fait vite le tour de la ville, et Étienne Marcel est hué à son retour à Paris[79].

La mort d'Étienne Marcel (31 juillet 1358)

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La rumeur enfle rapidement : on dit quePhilippe de Navarre arrive avec 10 000 Anglais. On redoute qu’ils ne vengent leurs camarades et pillent la ville. Préparant l'entrée des Navarrais, Étienne Marcel fait marquer les maisons de ceux qu'il suspecte de sympathie pour le régent, dans la nuit du 30 au31 juillet. Mais les signes sont interprétés, et la suspicion à son égard augmente encore[81]. L'échevinJean Maillart, le président duParlement de ParisJehan Pastoret et Pépin des Essarts convainquent les bourgeois de demander l’aide du régent[82]. Le31 juillet1358, à l’aube, Étienne Marcel en compagnie du trésorier de Charles de Navarre essaye de se faire remettre les clefs de la porte de Saint-Denis mais se heurte au refus de Jean Maillard. N'insistant pas, il tente sa chance à la porte Saint-Antoine, mais Jean Maillart a sonné l'alerte et rameute le maximum de monde : Étienne Marcel surpris est sommé de crier« Montjoie au roi et au duc ». Après hésitation il s'écrie« Montjoie au roi ». Il est apostrophé, la foule gronde. Son sort est déjà scellé : au signal convenu (« Qu'est ce que ceci ? »), il est massacré avec ses suivants[83].

Après la mort d'Étienne Marcel (août 1358-avril 1359)

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Charles demande à Jean de Duison, grand prieur des hospitaliers de France, capitaine de la ville et de la vicomté de Paris, de faire abattre toutes les forteresses qui pourraient nuire au Royaume et à la ville de Paris, notamment celle de Bolon. Mandement donné au Louvre, 17 mars 1359.Archives nationales de France.

Départ de Paris de Charles de Navarre

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Le dauphin, qui ne croit plus en une reddition, est en train de se diriger vers leDauphiné quand on lui apprend les nouvelles en provenance de Paris[84]. Escorté par Jehan Pastoret, venu le rejoindre et le prier de rentrer à Paris,Charles V entre dans la capitale le2 août triomphalement, il a les mains propres. Pardonnant aux Parisiens (il n’y a que très peu de répression, seules quinze personnes sont exécutées pour trahison), il veille à ne pas spolier les proches des exécutés tout en récompensant ses alliés. Par exemple, la riche veuve de l'échevin Charles Toussac exécuté le2 août est mariée avec Pierre de Dormans : le dauphin récompenseJean de Dormans (un de ses fidèles) en plaçant son frère et il ne spolie pas l'héritage de la veuve de son opposant[85].

Charles de Navarre qui était stationné avec ses hommes à Saint-Denis échappe au revirement des Parisiens. Il reçoit les renforts anglais amenés par son frère. Ces mercenaires n’ont pas été soldés, ils ont du mal à les tenir et les laissent piller Saint-Denis le3 août[86]. Ils se replient sur leurs possessions de la vallée de la Seine où les capitaines anglais s’installent,rançonnant les campagnes et le trafic fluvial. Les troupes anglo-navarraises tentent d'asphyxier Paris en s'emparant de Melun qui contrôle la Seine en amont de la capitale, de Creil sur l'Oise et de la Ferté-sous-Jouarre sur la Marne. Plus de60 places en Île-de-France sont sous contrôle anglo-navarrais ou de mercenaires bretons quirançonnent la population[87]. Le dauphin n’a pas les moyens de tous les déloger, mais il assiège Melun. Charles de Navarre s'en tire encore par un revirement : il rencontre le dauphin à Pontoise le19 août et annonce qu'il se retire. Cependant ses troupes ne quittent pas les places fortes qu'elles contrôlent continuant à rançonner le pays pour leur compte comme les autres compagnies qui mettent à cette époque le pays à feu et à sang[88]. Faute des ressources nécessaires, le conflit tourne à la guerre froide, le roi, puis le dauphin essayent de neutraliser Charles de Navarre qui reste un dangereux prétendant à la couronne, ou pour le moins à l'instauration d'une puissante principauté qui pourrait s'allier aux Anglais.

Deuxième traité de Londres (mars 1359)

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Article détaillé :Traités de Londres (1358 et 1359).

En mars1359, tenant compte de l'approche de la fin de la trêve et du fait que le dauphin s'est déclaré régent du Royaume, Jean le Bon cherche à reprendre les rênes du pouvoir et accepte unsecond traité de Londres, encore plus contraignant :

  • Aux anciennes possessions d'Aquitaine desPlantagenêt, s’ajoutent toutes les terres qui ont un jour appartenu à l'Angleterre : leMaine, laTouraine, l'Anjou et laNormandie ;
  • Le roi d'Angleterre reçoit l'hommage du duc de Bretagne, réglant ainsi laguerre de Succession de Bretagne en faveur de Jean de Montfort, allié des Anglais ;
  • La rançon est fixée à4 millions d'écus avec un échéancier plus bref.

Ces conditions représentent plus de la moitié du territoire et plusieurs années de recettes fiscales. Les accepter discréditerait définitivement les Valois, et risquerait de faire sombrer le Royaume dans une nouvelle guerre civile qui offrirait àÉdouard III la couronne de France sur un plateau. Le traité, qui doit rester secret, arrive à la cour des comptes le27 avril1359. Le25 juin1359, passant outre aux ordres de son père, le régent réunit les états généraux qui déclarent que le traité« n’est ni passable ni faisable »[89]. C'est un coup de maître : en passant par les états généraux, il reconsolide le pays contre les Anglais et dédouane son père qui est aux mains d'Édouard III. Il ressort de cette affaire avec un pouvoir raffermi et le pays derrière lui. Mais, pour les Anglais, il s'agit d'une déclaration de guerre : Édouard III débarque en octobre1359 pour prendreReims, la ville dusacre, et imposer à la chevalerie française une nouvelle défaite qui achèverait de la discréditer.

La tactique de la terre déserte

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Articles détaillés :Chevauchée etTerre déserte.

Mais, en accord avec le roi Jean et son entourage londonien qui ne veulent pas que la mort éventuelle d'Édouard III sur le champ de bataille ne déclenche des représailles à leur encontre, Charles lui oppose la tactique de laterre déserte et mène une guerre d'escarmouches refusant toute bataille rangée. Les portes de Reims restent closes. Or, conformément à sa stratégie qui consiste à forcer les Français à livrer une grande bataille en rase campagne, Édouard III n'a pas emmené de machines de guerre qui l'auraient ralenti. Il se dirige vers la Bourgogne. Cettechevauchée tourne au fiasco pour les Anglais, harcelés, affamés, privés de montures (faute de fourrage). Pendant ce temps, des marins normands mènent un raid sur le port deWinchelsea (mars1360), déclenchant une panique en Angleterre[90].

Fou de rage, Édouard III remonte vers Paris et laisse son armée commettre de nombreuses exactions : il ne s’agit plus de la simple extorsion visant à nourrir son armée, mais de la destruction systématique de toutes les ressources - les pieds de vignes sont arrachés, le bétail abattu et toute âme qui vive massacrée. Ces exactions entraînent un vif ressentiment contre les Anglais. Nombre d’entre elles ont lieu pendant lecarême et laSemaine sainte et, lorsque l’armée anglaise est décimée par un violent orage de grêle le13 avril, nombre de chroniqueurs y voient la main de Dieu[91]. Édouard III se décide alors à négocier. Il signe la paix àBrétigny, où il dissout son armée de mercenaires. Celle-ci, pour se solder, se livre au pillage en Bourgogne, seule région « ouverte », car, contrairement à la Champagne et l'Île-de-France, leur arrivée n'y était pas prévue. Ces mercenaires forment l’embryon desGrandes Compagnies.

Le retour du roi

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Article détaillé :Jean le Bon.

Traité de Brétigny

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Article détaillé :Traité de Brétigny.
1365 : La France après les traités de Brétigny et de Guérande.

Échaudé par le refus du deuxième traité de Londres,Jean le Bon a repris les choses en mains. Le danger d’une prise de pouvoir par les Navarrais ou par les états étant écarté, le roi veut neutraliser au plus vite le dauphin (il craint particulièrement qu'une action d'éclat entraîne la mort du roi d'Angleterre qui menacerait sa sécurité). Alors qu’Édouard III chevauche les terres du village deSours, en France, les rênes du pays sont reprises par son éminence grise Guillaume de Melun, qui met le dauphin en résidence surveillée et dirige le conseil[92]. Le parti royal négocie à la va-vite sur la base du premier traité de Londres, alors que l’armée anglaise est en déroute, évitant que le seul dauphin bénéficie de ce succès.

Par rapport au premier traité de Londres, la rançon est ramenée de4 à 3 millions d’écus, mais les conditions sont très lourdes et le traité est perçu comme honteux. Cet accord met un terme aux quatre années de captivité de Jean le Bon, mais des otages sont livrés pour garantirle paiement de la rançon, dont le plus important est sans doute son ambassadeur et conseiller :Bonabes IV de Rougé et de Derval.

Édouard III obtient laGuyenne et laGascogne en toute souveraineté, ainsi queCalais, lePonthieu et lecomté de Guînes. Il obtient également lePoitou — dont l'un des fils du roi,Jean, est pourtant comte —, lePérigord, leLimousin, l'Angoumois et laSaintonge. Enfin, il devient souverain de toutes les terres du comte d'Armagnac en recevant l'Agenais, leQuercy, leRouergue, laBigorre et lecomté de Gaure.

En revanche, Édouard III renonce aux duchés de Normandie et de Touraine, aux comtés du Maine et d'Anjou et à la suzeraineté sur la Bretagne et la Flandre. Il renonce surtout à revendiquer la couronne de France. Ce traité vise à désamorcer tous les griefs qui ont conduit au déclenchement du conflit.

Charles a besoin de temps pour réorganiser le pays et mettre fin à l'instabilité qui y règne. La rançon ne sera que partiellement versée et letraité de Brétigny ne sera pas durable, mais il permet une trêve de neuf ans.

Son père nomme CharlesLieutenant général en toutes les parties de lalangue d'oïl le. En 1364, ayant regagné l'Angleterre, il le nomme à nouveau son lieutenant et lui assigne leduché de Touraine.

Lutte contre les Grandes Compagnies en Normandie

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Article détaillé :Grandes compagnies.

Le dauphin évincé du pouvoir, comme à chaque fois qu’il est en difficulté, demande conseil à son oncle l’empereur Charles IV. Celui-ci lui recommande de concentrer ses efforts sur la Normandie, région particulièrement touchée par les exactions des Grandes Compagnies tolérées par les Navarrais. Il s’agit souvent de mercenaires anglais qui, en leur nom propre ou en se réclamant du roi de Navarre, prennent le contrôle de forteresses pour le compte d’Édouard III[93].Mantes,Meulan etVernon sont des places fortes navarraises qui contrôlent la vallée de laSeine en aval deParis[94]. Qu’il s’agisse de forces navarraises, anglaises ou de simples brigandages, les effets sont les mêmes :la population est rançonnée et les échanges fortement perturbés.

Le dauphin lève un impôt direct, lefouage, pour organiser la défense du duché. Il peut ainsi financer une flottille de guerre qui protège les échanges entre Paris et Rouen[94]. Depuis 1362, il peut compter surBertrand du Guesclin pour défendre la Basse-Normandie. Il rachète le donjon deRolleboise, qui contrôle la Seine, à Jean Jouël, un capitaine anglais qui l'a pris en son nom pour le compte d’Édouard III[93]. Les paysans le rasent pour empêcher qu'il serve à nouveau de base pour de nouvelles exactions.

Mais le danger le plus menaçant resteCharles de Navarre : en1363, Jean le Bon confie àPhilippe le Hardi enapanage le duché de Bourgogne, vacant depuis la mort dePhilippe de Rouvre en1361, évinçant le Navarrais pourtant bien placé héréditairement[95]. Ce dernier, profitant du retour du roi à Londres pour tenter une nouvelle fois de faire valoir ses droits à la couronne, masse une armée en Basse-Normandie[96]. Sur instruction de son père, le duc prend les devants : du Guesclin attaque les forteresses navarraises, prenant Mantes et Meulan les7 et 11 avril, et prend le contrôle de la Seine[97]. Pour éviter queBlanche de Navarre, sœur de Charles le Mauvais, n’ouvre les portes de Vernon, Pontoise, Neauphles, Chateauneuf-de–Lincourt, Gisors ou Gournay, le dauphin marche sur Vernon où elle est retranchée et négocie sa neutralité dans le conflit qui l’oppose aux Navarrais. Il nomme les capitaines qui contrôleront les châteaux et leur fait jurer qu’ils ne feront pas la guerre contre lui[98].

Le roi s’éloigne du pouvoir

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Retour de Jean le Bon en Angleterre,Grandes Chroniques de France de Charles V.

En1362, après ledésastre de Brignais où les Grandes Compagnies infligent une défaite amère à l'armée qu'il a pu réunir avec l'argent des impôts,Jean le Bon, voyant un pays ruiné à feu et à sang, cherche une porte de sortie. Envisageant de reconquérir son honneur en croisade contre les Turcs, il reçoit la croix d’Outremer des mains d'Innocent VI, pape à Avignon, le30 mars1363[99]. Cette croisade financée par le pape permettrait d’emmener les Grandes Compagnies se battre contre les Turcs et serait financée par lesdécimes, le roi comptant bien en récupérer une partie pour financer le remboursement de sa rançon. Mais le pape impose que les décimes soient prélevées par les évêques eux-mêmes, ce qui ôte tout espoir de plus-value à Jean le Bon[100]. Finalement, il repart pour Londres le pour renégocier letraité de Brétigny pour lequel il a du mal à payer la rançon et la libération des otages (son filsLouis d’Anjou, lassé d’attendre sa libération, s'est déjà enfui de Londres)[101].

Avant de partir, il réunit les états àAmiens fin décembre1363 pour leur faire part de sa décision[101]. Le dauphin, convié et recevant l'instruction d'attaquer Charles le Mauvais avant qu'il ne mette en branle les troupes qu'il masse en Normandie, y obtient de pouvoir lever l'impôt nécessaire pour lever 6 000 hommes pour lutter contre les Grandes Compagnies. Jean le Bon meurt à l'hôtel de Savoie, à Londres, le.

Début de règne

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Le sacre et la fin de la guerre civile

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Article détaillé :Bataille de Cocherel.
Bataille de Cocherel et Sacre de Charles V, miniature duMaître des Entrées parisiennes tirée d'uneHistoire de la Toison d'or deGuillaume Fillastre, vers 1468, BnF.

Son éviction de la succession de Bourgogne au profit de Philippe le Hardi en septembre 1363 est pour Charles de Navarre inacceptable. En 1364, Jean le Bon, libéré à la suite du traité de Brétigny, est retourné se constituer prisonnier en Angleterre car son filsLouis laissé en otage pour garantir lesaccords de Brétigny s'est échappé. Comme le dauphin Charles doit assurer la régence, Charles le Mauvais croit alors en son étoile. Il se lance dans des tractations diplomatiques qui laissent clairement entrevoir ses intentions. Il rencontre lePrince Noir à Bordeaux. Il négocie la paix avecPierre IV d'Aragon, lui promettant des terres appartenant au roi de France : le Bas-Languedoc, les sénéchaussées de Beaucaire et de Carcassonne (mais son frère Louis combat côté castillan ce qui ralentit les négociations qui ne sont finalisées qu'en août 1364)[102]. Pour prendre à revers le duché de Bourgogne, il recrute des troupes parmi les Grandes Compagnies. Il fait même broder sa bannière aux armes de France et de Navarre[102].

Entrée triomphale de Charles V dans Paris le.
Grandes Chroniques de France enluminées parJean Fouquet, vers 1455-1460. Paris,BnF,Département des Manuscrits,ms. Français 6465,fo 417 (Livre de Charles V).

Les Valois ne sont pas dupes et prennent les devants. Le dauphin Charles, averti par son père avant de repartir se constituer prisonnier à Londres, lance l'offensive : les forteresses normandes du Navarrais sont conquises par du Guesclin, Charles le Mauvais contre-attaque, et tente d'empêcher le sacre de Charles en lui coupant la route de Reims[103].Bertrand du Guesclin, à la tête de l'armée levée grâce aux impôts votés par les états généraux de1363, lui reprend, en avril 1364, les villes deMantes et deMeulan puis le bat le à labataille de Cocherel, ce qui met fin à la guerre civile et rétablit l'autorité royale aux yeux de la population, montrant que les sacrifices financiers consentis par la population pour l'effort de guerre ont été suivis d'effets sur le terrain[104], et permet le sacre du roi de France le dans lacathédrale de Reims. Le nouveau roi prend alors une décision qui marque clairement sa volonté politique : les prisonniers français pris à Cocherel sont décapités et non mis à rançon comme il est d'usage dans la guerre féodale. Ce qui signifie que la guerre privée contre le roi est à présent considérée comme de la trahison[105].

Par letraité d'Avignon, en mars1365, Charles le Mauvais abandonne à Charles V ses possessions en Basse-Seine (comté d'Évreux) en échange de la ville deMontpellier. Cet accord ne sera cependant réellement appliqué que5 ans plus tard.

Guerre de Succession de Bretagne

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Article détaillé :Guerre de Succession de Bretagne.

Depuis1341, la maison de Montfort, soutenue par l'Angleterre, et la maison deBlois, protégée par la France, se disputent le duché de Bretagne. Les Anglais occupent Brest depuis1342, mais la situation était bloquée depuis la mort deJean de Montfort en 1343. En 1363, son filsJean IV rentre en Bretagne après avoir été éduqué à la cour d'Édouard III qu'il n'apprécie guère : il escompte s'entendre avecCharles de Blois pour obtenir la paix et le partage de la Bretagne[106]. MaisJeanne de Penthièvre ne l'entend pas de cette oreille et relance le conflit, rejetant Jean IV dans le camp anglais[106]. La guerre reprend donc en 1363 où Charles de Blois secondé parBertrand du Guesclin remporte quelques succès, mais, quand son stratège doit le quitter pour se rendre maître des places fortes navarraises en Normandie, son avancée s'arrête : il assiège en vainBécherel[106]. L'occasion est belle de négocier un accord àÉvran, mais Jeanne de Penthièvre fait capoter une nouvelle fois les négociations[106].Jean IV peut alors s'organiser et en septembre1364, assiègeAuray avec l'AnglaisJohn Chandos. Ils vainquentCharles de Blois etBertrand du Guesclin arrivés au secours des assiégés à labataille d'Auray, le[107]. Cette bataille marque la fin de ce long conflit : Charles de Blois y est tué et Jeanne de Penthièvre se retrouvant veuve voit sa cause s'effondrer. La paix est avalisée le par lepremier traité de Guérande qui établit Jean IV comme héritier légitime[107]. Il ne repousse pas totalement les prétentions desPenthièvre, puisqu'il établit ainsi la loi successorale en Bretagne :

  • le duché se transmettra de mâle en mâle dans la famille des Montfort ;
  • en cas d'absence de descendance mâle, il passera aux mâles de la famille de Penthièvre.

Charles V ne s'oppose pas à l'élévation du comte de Montfort, dans la crainte qu'il ne fasse hommage de la Bretagne à Édouard III, son protecteur et beau-père. Il le reconnaît pour duc, reçoit ses serments, sans être dupe ; mais il gagne par cette politique l'amitié de la noblesse bretonne, etOlivier de Clisson passe à son service. En fait, il officialise très habilement deux points :

  • en recevant son hommage en décembre 1366 (qui n'est qu'unhommage simple et non unhommage lige), il fait reconnaître la souveraineté de la France sur la Bretagne, même si dans les faits le duché est très autonome ;
  • Il consolide l'introduction de la masculinité dans le droit successoral, délégitimant ainsi les prétentions d'Édouard III à la couronne de France[107].

Jean IV, qui épouse une sœur puis une belle-fille du Prince noir, est un allié des Anglais, et donc un ennemi de Charles V, lequel mène une reconquête patiente de tout le territoire français. Une fois débarrassé des Anglais qui ne contrôlent plus que quelques places fortes sur le continent et n'ont plus la maîtrise des mers depuis labataille de La Rochelle, le roi de France reprend les hostilités et confisque le duché de Bretagne en 1378. Soutenu par le peuple breton et par la volonté d'indépendance des barons, Jean IV se maintient de fait.

Lutte contre les Grandes Compagnies

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Article détaillé :Grandes compagnies.

Le rétablissement de l’autorité royale et de l’économie passe par l’éradication desGrandes Compagnies qui saignent le pays. Charles V doit faire comprendre que le Royaume n’est plus un havre pour les pillards. Il traite le problème avec la plus grande rigueur et fermeté : il fait appliquer la loi et ne négocie pas avec les truands. Le roi et ses frères organisent la réponse militaire au sein de chaque principauté[108]. C’est rapidement tout le pays qui s’organise contre les Grandes Compagnies. Chevaliers, villes, paysans envoient des contingents. Les routiers français sont exécutés et les étrangers de quelque valeur soumis à rançon[109].

Une fois que la situation des Grandes Compagnies est devenue inconfortable sur le sol français, il est plus facile de les convaincre de les envoyer combattre sous d'autres cieux. Laguerre de Succession de Bretagne ayant pris fin avec labataille d'Auray de nombreux Bretons démobilisés viennent grossir les rangs des Grandes Compagnies. Charles V paye donc la rançon deBertrand du Guesclin, capitaine breton respecté et lui confie la mission de les emmener combattre enCastille pour le compte de son alliéHenri de Trastamare. Cela a un double effet : débarrassé des Grandes Compagnies, l’économie du pays se relance, et entraîne bientôt le prince de Galles dans un conflit ruineux contre son allié. En décembre1367, revenu victorieux de Castille mais exsangue, ce dernier lâche ses mercenaires aux frontières de la Guyenne. Marchant sur Paris, ces derniers sont repoussés par les Français. Mais cet acte est considéré comme uncasus belli et il va relancer la guerre[110].

Première guerre civile de Castille

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Article détaillé :Première guerre civile de Castille.

Charles V, qui prévoit déjà la reconquête, voit d’un mauvais œil la présence d'un allié des Anglais aux frontières. Il souhaite le faire remplacer par un solide allié qui pourra le temps voulu faire peser une menace sur la principauté d'Aquitaine. Les Anglais ne peuvent pas reprendre les hostilités directement contre la France avant la fin des transferts de souveraineté décidés autraité de Brétigny : ils y perdraient toutes les concessions territoriales extrêmement avantageuses qu'ils y ont obtenues[111]. Les Anglais ayant les poings liés, le roi de France a le libre choix de la reprise des hostilités, mais il n’en a pas les moyens économiques, le pays étant ravagé par les Grandes Compagnies et saigné par l'exorbitante rançon de Jean le Bon. Pour se refaire une santé financière, il faut se débarrasser desGrandes compagnies qui bloquent tous les axes commerciaux et pressurent la population de tout ce qu’elle aurait pu donner en taxes à l'État. Avignon étant menacée et rançonnée par les compagnies, le pape voit d'un bon œil le projet de croisade en Espagne proposé par Charles V. L'objectif officiel est le suivant : mener une croisade contre l'émirat de Cordoue, ce qui nécessite de passer par la Castille. Le pape n'est pas dupe, mais ses intérêts convergent avec ceux de Charles V : il faut se débarrasser des Grandes Compagnies. Il finance donc l'expédition[112].

Charles V chargeBertrand du Guesclin de rassembler les Grandes Compagnies et de les mener en Castille. La croisade arrive en Catalogne en janvier 1366 et obtient de rapides succès.Henri de Trastamare est couronné le[113].

Henri de Trastamare, portrait réalisé vers 1360,Madrid,musée du Prado.
Pierre le Cruel, vers 1504,musée archéologique national de Madrid.

Rapidement chassé du trône castillan,Pierre le Cruel prépare son retour. En toute logique, il trouve des alliés chez les adversaires de la France et peut s'appuyer sur le Prince noir etCharles le Mauvais. Il active son alliance anglaise, promettant au Prince noir de financer le conflit[113]. Ce dernier lève donc une armée embauchant les Grandes Compagnies qui ravagent le Languedoc[113]. Charles le Mauvais, roi de Navarre, autorise le passage de cette armée. Elle franchit le col de Roncevaux enfévrier 1367. Henri de Trastamare lui barre la route àNájera et livre combat aux archers anglais contre l’avis de Bertrand du Guesclin le[114]. L’arc long anglais y est une fois de plus décisif : les Franco-Castillans, écrasés sous une nuée de flèches, sont taillés en pièces. Bertrand du Guesclin est fait prisonnier. Henri doit de nouveau s'enfuir en France etPierre le Cruel reprend le pouvoir. Cependant le roi de France tire plusieurs bénéfices de l’expédition castillane : d’une part, il est définitivement débarrassé des Grandes Compagnies qu’il avait engagées avec l’argent du pape et, d'autre part, cette victoire coûte très cher aux Anglais, car Pierre le Cruel n’a pas les moyens de payer l’armée qui l’a remis sur le trône. C’est ruiné et devant se débarrasser des Grandes Compagnies que le Prince noir regagne l’Aquitaine.

Pierre le Cruel n'ayant pas versé les contreparties promises au Prince Noir dans letraité de Libourne, les troupes anglaises retournent enGuyenne, laissant le champ libre à Henri de Trastamare, toujours allié du roi de France par letraité d'Aigues-Mortes. En1367, Henri et du Guesclin assiègentTolède et battent l'armée de Pierre le Cruel arrivée en renfort lors de labataille de Montiel.

Pierre le Cruel et Henri de Trastamare s'affrontent en un combat singulier dont la conclusion est la mort de Pierre de Castille. Henri devient roi de Castille sous le nom d'Henri II, et la couronne de Castille passe des mains de lamaison d'Ivrée à celle de Trastamare. La France dispose désormais d'un allié à la tête du royaume de Castille. Cet allié se révèle tout à fait décisif lors de labataille de La Rochelle, en1372, qui voit l'anéantissement de la flotte anglaise par l'alliance franco-castillane.

Réorganisation de l’armée

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Détail du tombeau d'Olivier de Clisson (château de Josselin).

Charles V, qui prépare la reconquête, a mis à profit les années de répit obtenues en profitant du conflit castillan : ses finances sont redressées grâce à l’instauration d’un impôt permanent. Il faut à présent mettre sur pied l’armée de la reconquête.

La lutte contre lesGrandes Compagnies permet de mettre au point une nouvelle organisation des troupes et de repérer des capitaines fiables et fidèles, commeBertrand Du Guesclin et son cousinOlivier de Mauny, nommé chambellan par le roi, ouOlivier de Clisson. On organise autour d’eux de petites armées composées deroutiers d'une centaine d'hommes[115]. On solde ainsi une armée permanente de 5 000 à 6 000 hommes, dont on est sûr qu’ils ne deviendront pas des pillards pendant les périodes de trêve. Ces effectifs sont largement suffisants pour mener la guerre faite de coups de main et de sièges nécessaires pour mettre au pas les Grandes Compagnies. Les effectifs sont composés de volontaires français (souvent de petite noblesse) et d'arbalétriers italiens[115]. Il faut combler leretard pris sur les Anglais en archerie. Charles V encourage les concours de tir à l’arc comme l’ont fait les rois d’Angleterre, et engage de nombreux arbalétriers entre 1364 et 1369[116].

Cette armée peut être levée en janvier 1364 grâce à l'impôt consenti par les états généraux réunis à Amiens. Menée par Bertrand du Guesclin, elle remporte immédiatement sa première grande victoire àCocherel. Son efficacité doit être prouvée pour justifier son financement par des impôts : le nombre de combattants et la qualité de leur équipement sont contrôlés par des fonctionnaires, et la solde n’est versée qu'une fois par mois, lors de lamontre, uniquement si l’équipement est satisfaisant. Il faut que ces armées soient extrêmement mobiles et très réactives : elles sont montées bien que combattant à pied. Elles sont informées par des chevaucheurs et messagers qui font la liaison entre le roi et le front.

Pour prendre rapidement les forteresses, uneartillerie importante est formée : en 1375, le château deGeoffroy de Harcourt capitule sous le feu de40 canons[117].

La reconquête

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Isolement diplomatique de l’Angleterre

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L'Europe en 1360.

Charles V déploie une activité diplomatique intense. Il a toujours été proche de son oncle maternel, l’empereur germaniqueCharles IV[118] et a toujours veillé à ce que ces liens ne refroidissent jamais[119]. Il obtient de son oncle, en 1372, qu’il interdise aux mercenaires allemands de s’enrôler dans l’armée anglaise.

Avignon,résidence pontificale, est le centre diplomatique de l’Europe. Or, le FrançaisGrégoire XI, ancien précepteur de l’empereur, a été élu en1370 grâce aux efforts de Charles V et Louis d’Anjou, avec lesquels il est également proche[120].

Le roi de France envoie Thibaut de Hocie en1368 nouer des alliances espagnoles. Il échoue enAragon. MaisHenri II, le nouveau souverain de Castille, fortement soutenu par Charles V dans la guerre de succession qu’il mène contre son demi-frèrePierre le Cruel, est un allié indéfectible et un farouche ennemi des Anglais qui ont, eux, soutenu son rival. Thibaut de Hocie revient donc avec un solide traité d’alliance, précieux après la victoire deMontiel et la victoire définitive sur Pierre le Cruel[121].

En 1371, Charles V réactive laAuld Alliance et obtient également le soutien des Écossais, après leur avoir promis qu’il n’y aurait plus de paix sans leur accord, comme ce fut le cas àBrétigny[122]. De même, il soutientOwain Lawgoch, prétendant à laprincipauté de Galles réfugié à sa cour, et pourra compter sur lui lors de la reconquête[123]. Il cherche à obtenir la suprématie maritime pour couper l’arrivée de renforts anglais en Aquitaine, d'où l'importance de pouvoir compter sur les flottes castillane et galloise et de se rapprocher du roi du Danemark.

Charles de Navarre, confronté à la mise en place d'Henri de Trastamare en Castille, s'empresse de faire la paix avec Charles V : il lui rend hommage lige et lui cède ses places normandes contre Montpellier.Grandes Chroniques de France de Charles V.

L’isolement diplomatique des Anglais implique également la neutralisation de leurs alliés. Charles le Mauvais est la première menace pour la couronne de France : il est vaincu àCocherel en 1364 et Charles V fait pression sur sa sœurJeanne, l'épouse de Charles le Mauvais, pour que ses forteresses ne puissent être utilisées par les troupes de son beau-frère rival[98]. Il propose dès 1365 d’échangerMantes,Meulan etLongueville contreMontpellier. Les négociations durent5 années, durant lesquelles le Navarrais tente d’obtenir un traité d’alliance perpétuelle avec les Anglais. Mais ceux-ci sont rendus méfiants par les revirements incessants du Navarrais.

Constatant que la Navarre est cernée par l’alliance franco-castillane et que les Anglais sont en difficulté, il revient en France pour signer, le, un traité par lequel il accepte les conditions de1365 et fait hommage lige pour toutes les terres qu’il détient en France, ce qu’il avait toujours refusé[124].

En Flandres,Louis de Male est, dans un premier temps, sensible à la nécessité économique : les drapiers flamands sont dépendants des importations de laine anglaises. Le, il fiance sa filleMarguerite, héritière des comtés deFlandre, deNevers, deRethel et deBourgogne, avecEdmond de Langley, le fils d’Édouard III. Edmond recevrait en outre de son père Calais et le comté de Ponthieu ce qui, avec l'Artois, le Rethel et la Flandre, constituerait une principauté anglaise équivalente à la Guyenne au nord de la France[125]. Mais pour cela, il doit obtenir une dispense pontificale car les fiancés sont consanguins au4e degré. Après un ballet diplomatique à Avignon, où Français et Anglais argumentent sur le sujet,Urbain V refuse d’accorder cette dispense. La bataille diplomatique continue jusqu’en1367, date à laquelle Charles V obtient une dispense pour marier Marguerite de Male avec son frère Philippe le Hardi. Il reste toutefois à obtenir l’accord deLouis de Male pour ce mariage. Ce qui se fait, non sans mal, grâce à l’intervention énergique deMarguerite de France, la mère du comte de Flandres et fille dePhilippe V et à la cession de plusieurs villes (Lille,Douai etOrchies) par le roi de France.

Les appels gascons

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Charles, du fait des événements de 1358 et de sa difficile prise de pouvoir, comprend qu’un souverain doit avoir le soutien de ses sujets. Il doit reconquérir les cœurs avant les territoires perdus autraité de Brétigny. S’il doit reprendre ces terres, c’est dans son bon droit et avec le soutien de la population qui l’accepte comme souverain.

C’est une lente procédure juridique qui relance la guerre. Le prince de Galles, Édouard de Woodstock (le Prince Noir) qui revient vainqueur mais ruiné de Castille, ne peut solder ses troupes, il doit donc lever des impôts sur son duché d’Aquitaine qu’il dirige en principauté. Il le fait sous forme d’unfouage par ordonnance du[126]. Mais certains seigneurs n’ont accepté qu’à contrecœur le changement de suzeraineté imposé par letraité de Brétigny et en particulierJean d’Armagnac qui était proche deJean le Bon. En décembre1367, revenu ruiné d'Espagne où son armée a combattu pour le Prince noir son suzerain, il lui réclame en vain les 200 000 florins que le prince anglais lui devait pour payer ses hommes[127].

Édouard III accorde la Guyenne à son fils Édouard de Woodstock, dit le Prince noir, 1362 (British Library, Londres,ms. latin Cotton Nero D.VIfo 31, fin duXIVe siècle).

Son ressentiment tourne à l'exaspération quandÉdouard de Woodstock, lui aussi ruiné par le conflit castillan, démobilise les Grandes Compagnies qu'il n'a pu solder et qui se payent en pillant leRouergue, possession de Jean d'Armagnac. Ce dernier refuse de payer l’impôt que veut percevoir le prince de Galles déjà endetté vis-à-vis de lui et qui, en tant que suzerain, aurait dû le protéger des Grandes Compagnies. Il fait appel à Édouard III qui répond négativement[128]. Il se tourne alors (en mai1368) vers Charles V : d’après le traité de Brétigny, le transfert de souveraineté ne doit se faire qu’une fois les territoires transférés et la rançon versée, ce qui est loin d’être le cas[129]. Dès lors, en acceptant de répondre à son appel, le, Charles V fait acte de souveraineté sur laGuyenne[126]. Le prince de Galles peut donc être jugé pour avoir voulu prélever un impôt auquel il ne pouvait dès lors pas prétendre ! Un beau jour, selon les chroniques deJean Froissart, Édouard de Galles reçoit à Bordeaux un court message du roi Charles :

« Mandons notre beau cousin, le duc Édouard d'Aquitaine, de moult vaillance et valeur reconnue, à se rendre en notre bonne ville de Paris à propos de certaines affaires pour présenter sa défense à nous, Charles, par la grâce de Dieu, roi de France, et son suzerain.
Le prince Édouard fut comme hébété et dolent de ce langage. Il finit par se lever, furieux, et déclara au héraut du roi :
— Nous irons à Paris, s'il le faut, mais ce sera bassinet en tête et avec 60 000 hommes d'armes ! »

Le roi laisse laCour de Justice de Paris mener la lente procédure qui doit condamner le Prince noir, et profite du délai pour essayer d’obtenir qu’un maximum de seigneurs gascons se joignent aucomté d'Armagnac. Les Anglais essayent à tout prix de bloquer l’appel et de sauver la paix pour ne pas perdre tout l’acquis de Brétigny. Le temps gagné est occupé à fairetourner français les seigneurs gascons. Ça commence par les proches du comte d'Armagnac : dès mai1368, le mariage de son neveu, le comte d'Albret, est doté par le roi de France, qui lui accorde en outre une rente contre l'hommage lige[128]. Le roi exempte d'impôts pendant10 ans ceux qui le rejoignent, sous prétexte qu'ils auront besoin d'argent pour lutter contre le prince de Galles. Les villes, les évêques et les seigneurs périgourdins, que Charles V sait séduire par sa diplomatie (alors qu'Édouard de Galles est jugé hautain), rallient le camp français[130]. Légalement, rien ne s’oppose à la reprise du conflit ; celui-ci reprend avec la Bataille de Mondalazac en janvier 1369 qui permet au comte d'Armagnac de chasser les Anglais duRouergue. Le roi d’Angleterre se proclame de nouveau roi de France le[131], Charles V prononce la confiscation de l’Aquitaine le de la même année. La guerre a donc repris, mais Charles V, en excellent juriste, a su mettre le droit de son côté ; d'autant plus que l'habile diplomate a rallié une grande partie des Gascons dans son camp.

Froissart, dans ses chroniques, rapporte ces mots révélateurs :

« Lors les barons anglais dirent à Édouard que le roi de France était un sage et excellent prince, et de bon conseil.Jean de Gand, le duc de Lancastre, fils du roi Édouard, s'empourpra et lança avec mépris :
— Comment ? Ce n'est qu'un avocat !
Lorsque le roi Charles le Cinquième apprit ces paroles, il rit, et déclara d'une voix joyeuse :
— Soit ! Si je suis un avocat, je leur bâtirai un procès dont ils regretteront la sentence ! »

1369 : ralliement des terres pro-françaises

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Charles V tourne le conflit à son avantage. Ayant en mémoire ladébâcle de Poitiers où la chevalerie a chargé de manière désordonnée sans attendre les ordres de son pèreJean le Bon, transformant une victoire facile en désastre, et considérant qu'il n'a pas de talent militaire, il décide de confier le commandement de petites armées formées de volontaires aguerris à des chefs expérimentés et fidèles (commeBertrand du Guesclin). Il renonce aux batailles rangées et les lance dans une guerre d’escarmouches et desièges, grignotant patiemment le territoire ennemi. Les Grandes Compagnies, qui, revenues d’Espagne en 1367, pillent le Languedoc, sont incorporées dès 1369 à l’armée française, ce qui soulage les territoires qui choisissent detourner français et met sous pression ceux qui restent fidèles au prince de Galles[132].

 : remise de l'épée de connétable à Bertrand du Guesclin. Miniature desGrandes Chroniques de France attribuée àJean Fouquet, vers 1455-1460,BnF, Fr.6465.

L’endettement du Prince noir pose un réel problème. Du fait des appels gascons, l’impôt rentre mal. Il n’a pas les moyens de lever une armée pour s’opposer aux Français. Édouard III lui envoie donc cent trente mille livres tournois[116]. Mais le parlement se montre réservé et ne souhaite pas financer la guerre en Guyenne, qui semble coûter plus qu’elle ne rapporte. Il ne finit par y consentir qu’après acceptation qu’il ne soit plus obligatoire de faire transiter la laine par Calais (la taxe sur la laine est le principal revenu de la couronne à l’époque)[133]. Les revenus fiscaux sont diminués de 25 % en 1369, du fait de la réminiscence de lagrande peste en Angleterre. Les agents du roi d'Angleterre ne sont pas en mesure de lever des montants d'impôts — pouvant atteindre jusqu'à 1 600 000 francs par an — comparables à ceux levés par Charles V en France pour entretenir des armées permanentes équipées pour une guerre de siège dont les soldats ne se transformeront pas en Grandes Compagnies à la première trêve. Les Anglais vont être soumis à une pression permanente sur tous les fronts pendant des années[134]. Les Anglais s'efforcent de contrer le renversement de situation réalisé par Charles V. Une grande partie des territoires qu'ils pensaient contrôler s'est rebellée et ils ont perdu les recettes fiscales que leurs possessions de Guyenne auraient pu leur fournir. Ils plaident devant leur Parlement pour obtenir les ressources pour contre-attaquer, mais ne peuvent obtenir le financement de garnisons pour toutes les villes d'Aquitaine, qu'ils ne sont plus d'ailleurs certains de tenir. Au total, le roi d’Angleterre est loin d’avoir les moyens financiers de Charles V : le parlement ne lui donne que les moyens d’une guerre autofinancée par le pillage, d’autant que la chevauchée du duc de Lancastre versHarfleur en 1369 est un relatif succès, et sachant que dans la première phase de la guerre elles ont entraîné de grandes victoires sur l'ost français écrasé par la supériorité tactique en bataille rangée apportée par l'arc long anglais. Début août 1369, Jean de Gand débarque àCalais et lance unechevauchée jusqu'à Harfleur, oùPhilippe le Hardi est en train de préparer un débarquement franco-flamand en Angleterre[135]. On lui oppose la stratégie de laterre déserte et la chevauchée ne peut s'emparer de la ville. L'armée anglaise est harcelée par les troupes duduc de Bourgogne et, craignant d'être piégée, regagne Calais[135]. Les raids anglais, s'ils sont dévastateurs pour les campagnes, ne permettent pas de regagner le terrain perdu.

Grâce à sa gestion des appels gascons, Charles V a su se rallier une grande partie de l'Aquitaine. Le comte d'Armagnac tenant la majeure partie des forteresses sur ses terres, il ne reste à rallier que quelques villes craignant des représailles des sénéchaux anglais, mais toutes finissent par accepter les conditions de plus en plus avantageuses offertes par les envoyés du roi (Jean de Berry, Louis d'Anjou et la noblesse gasconne déjà ralliée qui bat le pays). Le roi de France prend soin d'entretenir le patriotisme des régions libérées par l'octroi de nombreux privilèges : il use en particulier de l'anoblissement[136], la noblesse française ayant été décimée par lapeste,Crécy etPoitiers[137]. De même, la reconquête se fait grandement par le retournement des villes d'Aquitaine souvent monnayé contre des promesses de fiscalité plus légère[138]. En quelques mois, plus de soixante villes rallient les Français.Millau cède en dernier en décembre, après avoir obtenu du roi de France une exemption fiscale de vingt ans[139]. Quelques garnisons anglaises subsistent, mais leur isolement ne leur permet pas de tenir le terrain, Louis d'Anjou progresse en Guyenne pendant que Jean de Berry contient les Anglais enPoitou àla Roche-sur-Yon[140].

Pendant ce temps, au nord, lePonthieu est repris en une semaine : le 29 avril,Abbeville ouvre ses portes à Hue de Châtillon (maître desarbalétriers), et les jours suivants les localités voisines reviennent sous l'autorité du roi de France, qui confirme leurs privilèges[140].

Durcissement du conflit (1370)

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La reconquête par Charles V des territoires concédés au traité de Brétigny.
  • Domaine royal
  • Apanages des frères du roi
  • Comté de Foix-Béarn autonome
  • Bretagne alliée aux anglais
  • Possessions de Charles de Navarre allié des Anglais
  • Chevauchée de Lancastre en 1369
  • Chevauchée de Robert Knowles en 1370
  • Chevauchée de Lancastre en 1373

Les Anglais, attaqués de toutes parts et pris de court en 1369, contre-attaquent. Dans les premiers mois de 1370, les Français continuent à avancer dans les plaines de laGaronne sur deux axes :Agen,Villeneuve-sur-Lot,Pujols,Penne,Fumel etPuymirol au nord etTarbes,Bagnères etVic-en-Bigorre au sud se soumettent au roi de France[141]. Le duc de Berry entre dans Limoges le, accueilli par les habitants en liesse (l'évêqueJean de Cros a négocié le ralliement de la ville). Mais il quitte la ville le jour même, ne laissant que quelques hommes d'armes, alors que la garnison anglaise est restée retranchée autour du château vicomtal[142]. Le prince de Galles fait payer très cher leur ralliement aux Limougeaux : le19 septembre, après5 jours de siège pendant lesquels les murailles sont sapées et minées, il reprend la ville, épaulé par les ducs de Lancastre et de Cambridge, et fait massacrer la population puis incendier la cité[141]. L'objectif est de faire un exemple dissuasif pour arrêter l'hémorragie de villestournant françaises, mais c'est l'effet inverse qui se produit : cette conduite encourage l'anglophobie et renforce le sentiment national naissant[143].

Robert Knowles, à la tête d'une chevauchée de 2 500 archers et 1 600 hommes d'armes[144], part deCalais finjuillet 1370 et pille les campagnes contournantAmiens,Noyon,Reims etTroyes. Le calcul du roi de France est que les chevauchées ne permettent pas de tenir le terrain et attisent l'anglophobie dans les territoires pillés. Charles V continue de miser sur une guerre de siège et de propagande, qui lui permet de reprendre du terrain, ville après ville, le plus souvent sans combat[142]. Il renforce le prestige de la couronne de France par ces victoires, malgré les souffrances engendrées par la tactique de laterre déserte (il laisse les chevauchées anglaises piller les campagnes dont la population s'est réfugiée dans les forteresses qui ont été reconstruites dans tout le Royaume) et par le retour de lapeste. Ainsi la chevauchée de Knowles est refoulée de Bourgogne. Elle passe2 jours devant les portes de Paris, pillant les faubourgs sous les yeux des Parisiens à l'abri derrière les murs de la capitale[145]. Charles V doit montrer que les impôts prélevés pour conduire la guerre sont utiles, d'autant que la nouvelle du sac de Limoges vient d'arriver : les esprits s'échauffent.Olivier de Clisson lui déconseille formellement une bataille rangée. Pour rassurer le pays mis à feu et à sang par la chevauchée deRobert Knolles, Charles V fait connétable le très populaireBertrand du Guesclin, qui vient de rentrer victorieux de Castille ayant vaincuPierre le Cruel, l'allié des Anglais àMontiel[146] ; il lui confie une armée levée grâce à un emprunt forcé pour harceler les Anglais. Du Guesclin harcèle Robert Knowles et le bat àPontvallain, le surprenant alors qu'il s'apprête à franchir leLoir[147]. La zizanie ayant gagné les capitaines anglais, la chevauchée se désagrège arrivée en Bretagne.

Maîtrise des mers (1372)

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Après une année plus calme, où Charles V s'applique à nouer des alliances et isoler toujours plus Édouard III (il raffermit les liens avec les Écossais, les Gallois, les Castillans et le Saint-Empire, tout en acceptant la paix avec Charles de Navarre dont le royaume cerné par l'alliance franco-castillane pourrait être menacé)[148], l'année1372 voit le conflit basculer.

La flotte anglaise est détruite le à labataille de La Rochelle privant la Guyenne de soutien logistique. Miniature deLoyset Liédet tirée desChroniques de Froissart, BnF, Fr.2643.

Le roi de Castille est allié à Charles V, d'autant que celui-ci l'a aidé à renverserPierre le Cruel, mais ce sont les revendications des couronnes de Castille et de Léon en 1372 parJean de Gand, gendre de feu Pierre le Cruel, qui le décident à se jeter dans le conflit. La flotte castillane intercepte le corps expéditionnaire anglais àla Rochelle le et l'anéantit le 23, usant de canons et de brûlots dérivants (il a attendu la marée basse pour que ses navires à faibles tirant d'eau aient un avantage sur les lourds bâtiments anglais gênés à la manœuvre par les hauts fonds sablonneux rochelais)[149]. C'est un désastre pour l'Angleterre, qui perd la maîtrise des mers.

La campagne pour la reconquête du Poitou, de l'Aunis, de la Saintonge et de l'Angoumois commence aussitôt après labataille de La Rochelle. Mais la reconquête ne se fait pas facilement : les barons poitevins ont massivement choisi le parti anglais (le Poitou exporte du sel vers l'Angleterre)[150]. L'armée royale assiège la forteresse deSainte-Sévère-sur-Indre, qui capitule le31 juillet. Pendant ce temps, Montcontour est repris, puis Poitiers ouvre ses portes à Du Guesclin le7 août.

Les forces françaises progressent le long de la côte, vers le sud. Lecaptal de Buch est capturé le23 août alors qu'il allait secourirSoubise assiégée : son armée est interceptée par la flotte galloise et castillane qui remonte laCharente. Les îles de et d'Oléron font leurs soumissions le26 août, mais les barons poitevins restent fidèles aux Anglais et se retranchent dansThouars.

Du Guesclin continue à progresser le long du littoral jusqu'à La Rochelle, qui est prise le8 septembre. Ainsi isolées, les villes se rendent tour à tour :Angoulême (la capitale du Prince Noir) etSaint-Jean-d'Angély le20 septembre,Saintes le 24[151].

Occupation de la Bretagne

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Si letraité de Guérande a clos le problème de la succession, il ne règle pas le contentieux franco-breton. La noblesse bretonne tend à la neutralité après le long conflit qui a déchiré le duché. MaisJean IV a des accords à respecter et, s'il épouse une sœur puis une belle-fille duPrince Noir, il temporise pour accepter le traité d'alliance qui était prévu dès 1362 avec le roi d'Angleterre. En 1369, dès le début de la reconquête, des renforts anglais (400 hommes d'armes et400 archers) conduits par les comtes dePembroke,Jean de Hastings, et deCambridge,Edmond de Langley, débarquent àSaint-Malo et rejoignent lePoitou et laGuyenne après avoir recruté quelques compagnies[152]. L'alliance finit par être ratifiée à la réprobation de la noblesse bretonne alors que300 archers et300 hommes d'armes anglais ont débarqué àSaint-Mathieu-de-Fineterre en 1372[152]. Aussitôt, une troupe française commandée par deux Bretons (Bertrand du Guesclin et Olivier de Clisson) entre dans le duché, provoquant le rembarquement précipité des Anglais[153].

En mars 1373, c'est une véritable armée qui débarque àSaint-Malo : 2 000 hommes d'armes et 2 000 archers sous les ordres ducomte de Salisbury,William Montagu[153]. Pour une telle opération, l'accord du duc est indispensable. C'est uncasus belli, et Charles V donne l'ordre d'attaquer. Son armée entre en Bretagne avec l'appui d'une bonne partie de la noblesse qui s'enrôle massivement sous la bannière de Bertrand du Guesclin. En deux mois, la quasi-totalité du duché est occupée : à la Saint-Jean, les Anglais ne tiennent plus queBrest,Auray,Bécherel et la forteresse deDerval[153]. Jean IV quitte la Bretagne dès le28 avril[153].

Chevauchée du duc de Lancastre

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N’ayant pas les moyens logistiques et financiers de soutenir la guerre de siège que lui impose Charles V et qui semble conduire à la reconquête progressive de toute l’Aquitaine, Édouard III tente d’affaiblir l’effort français en Guyenne par l’ouverture de nouveaux fronts.

portrait de trois-quart, coupé au niveau des jambes, du duc, tenant une épée et portant une couronne
Jean de Gand,duc de Lancastre
(vue d'artiste, vers 1593,Badminton House,Gloucestershire).

Édouard III tente une chevauchée censée ruiner la France dans ses forces vives. Le, il institue son fils, le duc de LancastreJean de Gand, lieutenant spécial et capitaine général dans le royaume de France[154]. Accompagné deJean IV de Bretagne, il conduit à travers la France une chevauchée des plus dévastatrices. Mais celle-ci reste sous contrôle :Philippe le Hardi tient les ponts et les châteaux sur son aile droite, du Guesclin la suit et empêche tout repli vers Calais. Elle traverse la Picardie et le Vermandois mais, ne pouvant aller vers l’ouest, elle se dirige vers Reims, puis Troyes où elle trouve portes closes[155]. Battu par Clisson à Sens, le duc de Lancastre ne peut rejoindre la Bretagne, il tente donc de rallier la Guyenne en traversant le Limousin[155]. Ses hommes sont affamés, les chevaux crevés (ou mangés), la fin de l’expédition se fait à pied et perd la moitié de ses effectifs (les défections sont nombreuses). Trop lourdes, les armures ont été jetées[155]. Elle est sauvée d’un désastre plus complet par les villes de Tulle, Martel et Brive qui ouvrent leurs portes sans coup férir. Mais le moral n’y est plus, la zizanie gagne les chefs : Montfort lâche la chevauchée[155]. L'arrivée piteuse des troupes affaiblies et diminuées de Jean de Lancastre à Bordeaux brise le moral des fidèles au roi d’Angleterre : les Français avancent nettement, reprenant Tulle, Martel et Brive, mais surtout en entrant dans La Réole qui verrouille le bordelais et dont les bourgeois savent ne plus pouvoir compter sur aucun secours[156]. Au total, entre1369 et1375, les Français reprennent aux Anglais la quasi-totalité des concessions faites et des terres possédées par l’ennemi avant même le début de la guerre, exceptions faites deCalais,Cherbourg,Brest,Bordeaux,Bayonne, et de quelques forteresses dans leMassif central. Mais parvenu à ce point Charles V sait ne pouvoir reprendre plus de terrain, les Bordelais étant trop anglophiles du fait des liens commerciaux (ils exportent massivement leur vin vers l'Angleterre). Toute sa stratégie étant fondée sur la reconquête des cœurs avant celle des territoires, il ne souhaite pas s’encombrer d’une ville prête à se rebeller à la première occasion[156]. Tout est ouvert pour finalement négocier, àBruges, un traité mettant fin à la guerre en reconnaissant la souveraineté des Français sur les territoires reconquis.

En 1375,Jean IV de Bretagne débarque à Saint-Mathieu-de-Fineterre avec 6 000 hommes sous le commandement du comte de Cambridge[117]. Le succès est rapide mais éphémère : à peine latrêve de Bruges signée entre Français et Anglais que les troupes anglaises quittent la Bretagne et que les places bretonnes retournent françaises[117]. Jean IV doit retourner en Angleterre.

1375 : trêve de Bruges

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Article détaillé :Trêve de Bruges.

La guerre étant arrivée à unstatu quo où il devient difficile de faire bouger les lignes, les deux partis sont réunis à Bruges. Mais ils n’arrivent cependant pas à trouver un point d’accord. Sous l'influence deGrégoire XI, les belligérants signent le une trêve qui dure jusqu'en juin1377. À la signature de latrêve de Bruges, les Anglais ne possèdent plus en France qu'une Guyenne étriquée et Calais ; la France récupère leduché de Bretagne à l'exception de trois villes.

Durant cette trêve se produisent deux événements qui contribuent à éloigner la menace que font peser les prétentions dynastiques anglaises sur la couronne de France. En1376 meurtle Prince Noir, héritier du trône d'Angleterre. En1377 disparaît à son tourÉdouard III. Le nouveau roiRichard II a10 ans, l'Angleterre entre dans une période de troubles[n 1] qui empêche les Anglais de reprendre sérieusement les hostilités en France avant l'avènement d'Henri V.

Offensive maritime et terrestre (1377)

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Attaques deJean de Vienne et l'amiralcastillan Fernando Sánchez de Tovar contre l'Angleterre (1374-1380).

Jean de Vienne réorganise la flotte (il remplace Aimery de Narbonne en décembre 1373). Il nomme un maître duclos aux galées chargé de l’achat, de la construction et de l’entretien des navires dans tous les ports royaux[157]. En 1377, la flotte royale compte120 navires de guerre dont35 vaisseaux de haut bord équipés d’artillerie lourde[157] (contre seulement 10 en 1376[158]). En 1379, elle compte21 navires de plus, auxquels il faut ajouter huit galères castillanes et cinq portugaises[158]. Il instaure une stratégie de raids côtiers dévastateurs, pendant maritime deschevauchées anglaises[159]. De 1377 à 1380, une dizaine de ports anglais dontRye,Hastings,Dartmouth,Plymouth, Wight,Winchelsea, Lewes,Portsmouth ouYarmouth subissent des raids franco-castillans[157]. Londres est mise en état d’alerte à plusieurs reprises[157]. Mais, comme les chevauchées, ces raids, s'ils permettent de peser sur l'économie adverse et sur le moral des populations, ne permettent pas de reprendre du terrain à l'adversaire.

Dans la pratique, la trêve de Bruges se termine à la Saint-Jean 1377, et les Anglais sont immédiatement attaqués sur tous les fronts : par mer (avec un premier raid en juillet et un deuxième en août), en Bretagne et en Guyenne[159]. Louis d'Anjou et Du Guesclin, chacun à la tête d'une armée progressant sur une rive de laDordogne, reprennentBergerac,Saint-Émilion,Libourne etBlaye. Mais, bousculés, les Anglais parviennent à tenir leurs ports et restent maîtres deBordeaux,Bayonne,Brest,Cherbourg etCalais, leur permettant de débarquer des troupes à leur guise[160].

Article connexe :Histoire de la marine française pendant la guerre de Cent Ans.

Fin de règne

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Visite de l'empereur Charles IV

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Banquet donné lors de la venue de l'empereur. À gaucheCharles IV, au centre Charles V, et à droiteWenceslas le roi de Rome.Grandes Chroniques de France, Fr.6465,fo 444 vo.

En janvier1378, alors qu'il est victorieux sur tous les fronts, Charles V reçoit son oncle l'empereur germaniqueCharles IV. Pour Charles V, ne parvenant pas à obtenir des Anglais reconnaissance de sa victoire, il s'agit de faire avaliser sa souveraineté et sa victoire par un des souverains les plus puissants d'Europe. D'autre part, il souhaite le soutien de l'empereur pour l'extension du royaume vers l'est : sa famille contrôle le Dauphiné et le comté de Bourgogne (qui sont en terre d'Empire), et il lorgne sur la Provence (ces territoires permettraient de contrôler le très lucratif axe commercial Rhône-Saône). Il soigne ses rapports avec les princes allemands des régions frontalières en fiançant en 1373 sa fille Marie au futur comte de Hainaut,Guillaume, fils du ducAlbert Ier de Bavière, et promettant sa filleCatherine àRobert de Bavière,comte palatin du Rhin[160]. Pour Charles IV vieillissant, il s'agit d'obtenir le soutien diplomatique du roi de France pour l'investiture comme empereur de son filsWenceslas, déjà roi des Romains, et surtout pour obtenir la main deMarie de Hongrie pour son fils cadetSigismond[161]. En effet,Louis le Grand de Hongrie est issu de la première maison d'Anjou et détient les couronnes de Hongrie et de Pologne. Cependant, il n'a pas de fils. Il doit donc trouver des gendres pour ses3 filles. Charles V souhaiterait que l'aînéeCatherine épouse son filsLouis, qui deviendrait alors roi de Hongrie et qui aurait des droits sur le royaume de Naples (et donc sur la Provence) dont la reine Jeanne est angevine et sans héritier elle aussi[162]. Sigismond, lui, deviendrait roi de Pologne[161].

La visite est l'occasion de montrer que le roi de France est l'égal de l'empereur (le protocole est étudié minutieusement pour cela), pour asseoir la couronne des Valois. L'empereur, après avoir entendu l'historique de laguerre de Cent Ans, soutient son neveu, condamne l'Angleterre, et considère publiquement la reconquête comme juste[163]. La paix avec l'Angleterre n'est pas obtenue mais l'empereur en légitimant la reconquête affirme la souveraineté des Valois sur ces territoires.

Le schisme

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Articles détaillés :Papauté d'Avignon etGrand schisme d'Occident.
Carte historique du grand schisme d’Occident.
  • Pays reconnaissant le pape de Rome
  • Pays reconnaissant le pape d'Avignon

En refusant d'accepter le principe d'une supériorité du pouvoir spirituel sur le pouvoir temporel,Philippe le Bel a empêché l'instauration parBoniface VIII d'unethéocratie en Europe[164]. Depuis1309, les papes résidant enAvignon sont majoritairement français (généralement proches du roi de France), et nomment des Français commelégats et gouverneurs des provinces ecclésiastiques d’Italie. Or, les Français ne sont pas familiers des affaires locales et sont détestés des Italiens.Grégoire XI commet l’erreur de perpétuer cette mauvaise habitude. À sa mort, les Italiens spoliés fomentent desémeutes pour influer sur le vote et faire élireUrbain VI, le.

Il s'agit du premier pontife italien depuis que la papauté s'est installée à Avignon. Son élection s'est faite sous la pression de la rue, mais les cardinaux l'ont choisi pensant que, peu puissant, il ne remettrait pas leurs privilèges en jeu. À peine élu, Urbain VI se brouille avec les cardinaux d'Avignon en voulant leur imposer de vivre conformément à l'Évangile, en réduisant leur train de vie, en renonçant à leurs pensions et en investissant dans la restauration de l'Église. Les membres duSacré Collège, en majorité français, habitués aux fastes et aux intrigues de couloirs grâce auxquels ils ont pu accéder à leurs charges si rémunératrices, voient d'un très mauvais œil ce pape moralisateur[165].

Urbain VI (gravure duXVIIe).
Clément VII, sculpture dumusée du Petit Palais (Avignon).

Ils contestent son élection sous la pression de la population romaine en insurrection. Profitant de sa brouille avec la reine de Naples, ils se réunissent à nouveau àNaples et le somment d'abdiquer le2 août[166]. Le18 septembre, àRome, Urbain VI nomme29 nouveaux cardinaux dont20 italiens[166]. Les cardinaux français disposent d'un puissant réseau d'influence, très introduit à la cour de Charles V de France (le Saint-Siège est l'épicentre diplomatique de l'Occident)[167]. Les cardinaux contestataires obtiennent d'abord le soutien de la reineJeanne de Naples (issue de lamaison d'Anjou et opposée aux Visconti depuis laguerre des guelfes et des gibelins)[168]. Ils font jouer leurs réseaux d'influence et réussissent à convaincre les conseillers de Charles V, puis le roi lui-même, de la non-validité de l'élection d'Urbain VI. Le roi adresse son accord aux cardinaux rebelles le. Ceux-ci, très bien renseignés et15 jours avant réception de cette lettre confirmant l'accord du roi, élisentClément VII (1378-1394) lors d'un conclave à Fondi, dans la région de Rome. Ce pape français n'ayant pu s'imposer en Italie s’installe à Avignon en 1379[166]. L'Occident chrétien se divise alors : une moitié de l'Europe reste fidèle à Rome (l'Italie du Nord, l'Angleterre, les Flandres, leSaint-Empire et la Hongrie), tandis que l'autre moitié (France,Naples, l'Écosse, duchés de Lorraine, d'Autriche et de Luxembourg) en tient pour le pape d'Avignon. Le territoire de la Suisse actuelle est particulièrement touché du fait de sa situation entre les blocs et de son morcellement politique. Dans la plupart des diocèses suisses, il y a alors deux évêques d'obédience opposée[169]. Les royaumes espagnols restent neutres dans un premier temps mais réclament un concile[166]. Par son soutien à Clément VII, Charles V est largement responsable du schisme puisque sans son appui, l'antipape n'aurait eu aucune légitimité.

Le complot de 1378

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Depuis la défaite de Cocherel en1364, les désirs de Charles de Navarre de ceindre la couronne de France sont compromis. Il se tourne alors vers l'Espagne, et a de longs démêlés avecPierre le Cruel etHenri de Trastamare, qui se disputent laCastille. Engagés contre le roi de CastilleHenri II, dit Henri de Trastamare (qui sera empoisonné en 1379 à son instigation), les troupes du Navarrais défaites n'ont d'autre issue que d'appeler les Anglais à la rescousse[170]. C'est une aubaine pour le jeuneRichard II d'Angleterre, qui comprend aussitôt l'intérêt d'une telle alliance. Le roi de Navarre, qui possède le comté d'Évreux et le Cotentin, peut, en contrepartie de renforts, mettre à la disposition des Anglais le port deCherbourg. L'accord est conclu en février1378. En échange d'une troupe de 1 000 hommes (500 archers et500 hommes d'armes), Charles de Navarre cède Cherbourg àRichard II pour trois ans[170].

En fait, la pierre d'achoppement entre le Valois et le Navarrais est celui de la souveraineté sur la Normandie. C'est en effet l'un des principes importants de gouvernement pour Charles V. Il est prêt à passer sur les turpitudes passées de son beau-frère, pour peu que celui-ci se reconnaisse comme vassal du roi de France pour ses terres de Normandie. C'était en substance la signification des accords de 1371, où Charles de Navarre avait prêté l'hommage lige. Cela, Charles de Navarre, qui s'est toujours considéré comme spolié de la couronne de France, ne peut le tolérer[171]. En ouvrant les portes de la Normandie aux Anglais, il remet en cause ce principe de souveraineté, ce qui ne peut être toléré par Charles V et ses conseillers[170].

Fin mars 1378, le comte de Foix, qui dispose d'un efficace réseau d'espions, informe Charles V que son cousin Navarre négocie un accord secret avec les Anglais[171]. Grâce à ces informations, le chambellan de Charles le Mauvais,Jacques de Rue, est arrêté alors qu'il se rend à Paris. La perquisition de ses effets permet de découvrir les instructions confiées par son maître. Le Navarrais, écarté des affaires françaises depuis 1364, n'a pas pu faire grand-chose contre les exactions continues des garnisons anglo-gasconnes qui défendent depuis 1355 ses forteresses normandes. Grâce à sa politique énergique contre les Grandes Compagnies et les occupants anglais, c'est Charles V qui apparaît comme le protecteur et donc le souverain de la Normandie[172]. L'occasion est belle de mettre Charles de Navarre hors d'état de nuire et de récupérer ses possessions normandes. Pour que cette réaffirmation de souveraineté soit bien acquise par tous, il importe de bien mettre à jour les griefs que la couronne a contre le Navarrais : il y aura donc un grand procès avec le plus de publicité possible[173]. Pris au piège, le chambellan passe aux aveux. Outre l'affaire de Cherbourg, Jacques de Rue confesse un projet de mariage entre Richard II et une infante de Navarre, confirme la rumeur du complot visant à empoisonner Charles V[174].

La réaction est alors foudroyante : la trahison et la tentative de régicide étant clairement établies, toutes les possessions de Charles de Navarre sont attaquées simultanément. En Normandie, les hommes de du Guesclin investissent tour à tour Conches, Carentan, Mortain, Avranches[170]. La forteresse de Bernay, tenue parPierre du Tertre, le secrétaire du Navarrais, résiste un temps. Mais ce dernier n'a d'autre idée que d'obtenir une reddition honorable et de sauver sa vie. Il rend les armes le20 avril. Mais Cherbourg résiste et reste aux mains des Anglais. Le20 avril, Montpellier, possession du roi de Navarre depuis 1371, est occupée par les troupes royales, alors que les Castillans se préparent à attaquer Pampelune, capitale du royaume navarrais.

Tout l'édifice de Charles le Mauvais s'effondre en même temps que ses rêves de pouvoir. L'épreuve n'est pourtant pas finie. Le roi de Navarre doit encore essuyer l'humiliation du procès de ses hommes de confiance et la révélation publique de ses crimes. Cependant, Charles V veille à ne pas s'aliéner les Navarrais : il rencontre l'infantCharles à Senlis. Ce dernier, comme doit le faire un seigneur loyal, prend la défense deJacques de Rue. Le roi l'avertit que les châteaux de son père vont être saisis, mais que l'infant ne sera pas privé du revenu de ses terres[170].

Le procès de Jacques de Rue et de Pierre du Tertre s'ouvre en juin devant le Parlement[173]. Outre les aveux du chambellan, les hommes de Charles V ont découvert dans la tour de Bernay d'autres éléments à charge ; documents codés destinés aux Anglais, instructions pour la défense des places normandes, ordre de ne point se rendre aux Français. Les Navarrais plaident la fidélité à leur roi et rejettent les accusations detrahison et delèse-majesté. C'est faire peu de cas du serment de 1371, par lequel Charles le Mauvais a promis« foi, loyauté et obéissance » à Charles V. Les juges n'acceptent pas cette défense et, le16 juin, condamnent à mort les deux hommes. Après que le roi de France eut refusé leur grâce, les condamnés sont décapités, leurs têtes sont exposées augibet de Montfaucon, leurs membres en huit points de Paris[175].

Charles de Navarre a définitivement perdu son duel contre Charles V. Il est à présent isolé, dépossédé de ses biens et lâché par ses sujets, las de payer pour des desseins aventureux qui ne les concernent guère. Après avoir trahi tous les partis à la fois, il s'est fait tant d'ennemis qu'il est forcé pour se tirer d'affaire d'abandonner une portion de ses États (1379). Ainsi, le plus résolu des ennemis des Valois tombe dans une déchéance qui va l'obliger, jusqu'à sa mort en 1387, à vivre d'expédients et d'emprunts. Instruit enfin par l'adversité, il passe ses dernières années en paix, ne s'occupant plus que de l'administration de son royaume.

Le fait de Bretagne

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Les Anglais ne contrôlent plus que quelques ports tels Calais, Bordeaux, Bayonne. Par contre, ils gardent le contrôle de plusieurs places fortes en Bretagne et en particulier Brest et d'où ils mènent des attaques répétées sur Saint-Malo. La prise d'un nouveau port est inacceptable pour Charles V. Aussi le roi et sa cour décident-ils de confisquer le duché.Jean IV a été chassé de Bretagne depuis 1373. Il n'a remis les pieds sur le continent que pour participer à des raids ou des chevauchées anglaises. Jean IV ayant été déconsidéré par les Bretons, Charles V peut penser que ces derniers réagiront comme les Normands en cas de confiscation du duché. Ceci se fait en toute transparence, et elle est annoncée après un jugement rendu par la cour des pairs le[176].Louis Ier d'Anjou est nommé lieutenant du roi en Bretagne[177]. Mais le duché n'aspire qu'à la neutralité et les barons se refusent à livrer leurs châteaux aux rois. Le, ils constituent une ligue qui met sur pied un gouvernement provisoire et rappelle Jean IV avec l'aval de Jeanne de Penthièvre[178]. Le gouvernement est formé de4 maréchaux et de4 responsables des affaires civiles dont la mission prioritaire est de prélever des fonds (via une taxe de 1 franc par foyer) pour lever une armée destinée à défendre le duché. Jean IV débarque le sur la plage de Saint-Servant, accueilli par une foule enthousiaste[177] : il s'agit d'un des moments historiques fondateurs de l'identité bretonne. Charles V ne peut que constater la volonté d'autonomie du duché et il sait que sans l'approbation de la population, une conquête militaire n'aurait aucun résultat à long terme[177]. Il ne veut pas prendre le duché de force. Il meurt avant la fin des tractations, et ce sont ses frères qui signent ledeuxième traité de Guérande qui reconnaît Jean de Montfort comme duc de Bretagne, contre l’hommage prêté au roi de France, le versement d’une indemnité et le renvoi des conseillers anglais, mettant définitivement fin au conflit le[179].

Mort de Charles V

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Ordonnance du roi Charles V fixant la majorité des rois de France à14 ans et l'organisation de la régence,Archives nationales.

La reine meurt le, après avoir mis au monde Catherine. Selon tous les chroniqueurs de l'époque, le roi est très affecté car, bien que leur mariage ait été arrangé, l'amour que se portait le couple royal n'en était pas moins sincère[161]. Le corps de la reine est inhumé à Saint-Denis à côté de la place prévue pour le roi. Son cœur est, lui, conservé dans l'église des célestins[161].

Voyant son état de santé décliner (il était probablement atteint de tuberculose pulmonaire), Charles V prépare sa succession. Par l'ordonnance de Vincennes (1374), il fixe la majorité des rois de France à leur quatorzième année, donc à13 ans.

En 1379, le Languedoc se révolte contre les impôts devenus de plus en plus lourds. En effet, la diminution de la démographie entraîne une hausse des taxes : unfouage de 12 francs par foyer est décidé[180]. Or, cette province est l'une des dernières encore saignées par les Grandes Compagnies lesquelles tiennent encore quelques forteresses du Massif central. À Nîmes, les commissaires envoyés par Louis d'Anjou sont massacrés[181]. Ce dernier réagit par une démonstration de force : les Nîmois doivent supplier publiquement sa clémence (il les a fait condamner à mort) pour qu'il commue leur peine en une amende de 130 000 francs[182].

Le roi Charles est plus clément. Il institue l'appel contre les abus, crée la Chambre du Trésor, et supprime des impôts lourds en1379 par souci d'apaisement[182].

Son conseillerPhilippe de Mézières essaye d'organiser unecroisade qui serait menée par Charles, mais le roi la refuse, arguant de sa mauvaise santé. En fait, il a décidé qu'il n'épuiserait pas les forces du royaume régénéré par une quête chimérique.

Détail du gisant de Charles V à labasilique Saint-Denis, aux côtés du monument aux entrailles de Jeanne de Bourbon.

Charles V meurt le àBeauté-sur-Marne, sa résidence préférée, affaibli par la mort de sa femme survenue deux ans plus tôt. Le roi succombe vraisemblablement à un accident coronarien aigu[n 2], en pleine épidémie depeste, loin de ses filsCharles etLouis qui ont été mis à l'abri à Melun[184].

Sa dépouille fut divisée en trois parties : le corps allant à Saint-Denis, les entrailles aux côtés de sa mère Bonne de Luxembourg à l'abbaye de Maubuisson (le gisant du tombeau aux entrailles, daté de1374, est aujourd'hui conservé au musée du Louvre), et le cœur à lacathédrale de Rouen (Charles V, qui était avant tout duc de Normandie, opère ainsi un placement stratégique de ses restes, dans une région dont la souveraineté est fréquemment contestée par la couronne anglaise. Commandé en1368 au sculpteurJean de Liège, le tombeau du cœur a été détruit en1737, mais est connu par un dessin de la collection Gaignières[185]). Son corps est inhumé avec celui de sa femmeJeanne de Bourbon dans labasilique de Saint-Denis. Son épitaphe est le suivant :« Cy gist le roy Charles le Quint, sage et éloquent… »[186]. Le gisant avait été commandé de son vivant (en1364), au sculpteurAndré Beauneuveu. Sa tombe, comme celle de tous les princes et dignitaires reposant en la basilique, fut profanée par lesrévolutionnaires en1793.

Son filsCharles VI lui succède, mais il est trop jeune pour gouverner, ses oncles se partagent donc le pouvoir, jusqu'à son émancipation en 1388.

Restauration de l'autorité royale

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Le plus grand défi du règne de Charles V est de restaurer l'autorité de la couronne après les événements de 1357-1358. Le Royaume est aux mains des Grandes Compagnies et en état de non droit. La monnaie, longtemps garantie par les Capétiens, est en chute libre jusqu'en 1360. Les pillages récurrents, l'insécurité des routes par les pillards (surnommés eux-mêmesécorcheurs, routiers,Tard-Venuss[64]) et l'insécurité monétaire entravent le commerce ; l'économie est au plus mal. Enfin, les défaites s'enchaînent depuis le début de laguerre de Cent Ans et le règne de Jean le Bon, qui doit se défendre des complots ourdis par Édouard III et Charles le Mauvais, est marqué par l'arbitraire : les Valois n'ont plus aucune autorité.

Relance économique

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Lefranc à cheval représente le roi Jean le Bon sur undestrier, armé d'unécu àfleur de lys et brandissant l'épée, avec le terme « Francorum Rex » (roi des Francs).

Le franc n'est pas une invention de Charles mais de son père et de son conseil. Prisonniers à Londres, Jean le Bon et ses conseillers constatent les bienfaits d’une monnaie forte. Ils préparent donc les réformes nécessaires et Jean le Bon crée lefranc, le, sur le chemin du retour à Paris[187]. Il s’agit d’une monnaie à très forte teneur en or (3,88 grammes d'or fin), valant unelivre et dont le nom indique qu’il ne s’agit pas d’une monnaie au titre dévalué[188]. Il montre le roi chargeant à cheval dans la droite ligne de l’idéal chevaleresque : l’objectif est de restaurer l’autorité royale en mettant fin auxmutations monétaires qui ont entraîné de nombreuses dévaluations pendant toute la première moitié duXIVe siècle[104]. Une monnaie forte constitue la demande principale des états généraux, illustrée par la théorie élaborée parNicolas Oresme. L’abandon des mutations monétaires prive l’État d’une source importante de revenus. Pour payer la rançon, le conseil du roi compte sur la fiscalité indirecte : l’ordonnance de Compiègne du institue une taxe de 5 %, prélevée sur tous les échanges[189]. Ce choix favorise la noblesse qui n’est pas touchée par cet impôt et plus généralement les propriétaires fonciers (clergé, noblesse et grand patriciat urbain) dont les revenus sont calculés en monnaie de compte. En revanche, le commerce, l’agriculture et l’industrie sont durement pénalisés et l’économie est ralentie par cette mesure. De la même manière, les locataires et paysans qui doivent payer aux propriétaires une somme fixe sont très pénalisés par le renforcement monétaire.

Franc à cheval du Dauphiné à légende fautée sous Charles V le Sage.
Lefranc à pied représente le roi Charles V couronné debout sous un dais gothique, tenant une épée et la main de Justice.

Charles V, en garantissant la stabilité du franc[190], favorise au contraire les échanges. Il se porte ainsi garant de la stabilité monétaire et met fin aux mutations tant décriées[104]. En contrepartie, il fait accepter la création d'une fiscalité contrôlée par des officiers royaux pour financer l'effort de guerre et le paiement de la rançon de Jean le Bon[104],[191]. Et surtout, elle se trouve justifiée par ses effets sur le terrain : l'armée permanente que les impôts financent débarrasse le pays des Grandes Compagnies, ce qui relance les échanges. Il recourt en plus à desaides, aufouage qui touche les foyers : cette fiscalité a une assiette plus large et pénalise moins les échanges[192]. Charles V continue cette politique de stabilité monétaire et rend permanente une fiscalité initialement provisoire et renégociée tous les ans aux états généraux[193].

Christine de Pizan note que Charles V applique une politique de grands travaux (surtout des fortifications) qui crée du travail (évitant donc les émeutes ou que des vagabonds aillent grossir les rangs des Grandes Compagnies) et permet de réinjecter des liquidités dans l'économie[194]. Au total, il relance l'économie en quelques années et peut compter sur des entrées fiscales très abondantes : 1,6 million de Francs par an.

Un nouveau mode de gouvernement

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Témoin des malheurs causés par la captivité de son père, Charles V se fait une loi de ne point commander ses troupes en personne et dirige tout du fond de son cabinet. Il a pour générauxOlivier de Clisson,Bertrand du Guesclin, qu'il faitconnétable de France le, etJean de Boucicaut, lesquels l'aident à reconquérir la quasi-totalité du royaume. Charles le Sage est un gestionnaire, un diplomate, un juriste. Rendu prudent et réfléchi par les épreuves de sa jeunesse, il sait s’appuyer sur de bons conseillers : Jean etGuillaume de Dormans,Pierre d'Orgemont sont seschanceliers successifs.Nicolas Oresme le conseille sur les questions économiques etNicolas Braque esttrésorier de France à partir de 1351[195]. Participe également à son conseilPierre Aycelin de Montaigut,évêque de Nevers, puis, à partir de1370évêque-duc de Laon, qu'il utilise parfois comme ambassadeur. Ainsi, en1368, il envoie le futurcardinal deLaon auprès dupapeUrbain V. En1379, Montaigut joue un rôle important dans le soutien apporté par la France à l'antipapeClément VII.

Décentralisation

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La politique desapanages a été imaginée comme une décentralisation pour améliorer la gestion des provinces éloignées de la capitale. Ces dernières sont possédées par la famille proche du roi, et reviennent à la couronne en l'absence d'héritier mâle, ce qui évite d'en perdre le contrôle après un mariage. Les princes reçoivent leurs finances des impôts permanents récoltés par le roi, ce qui permet à celui-ci de les garder théoriquement sous contrôle. Chaque apanage lève une armée comprenant chevaliers et troupes envoyées par les villes, voire des paysans, et peut ainsi chasser lesGrandes compagnies qui ravagent le pays et relancer l'économie. Dans un deuxième temps, les impôts rentrant, ces armées sont professionnalisées et soldées en permanence, ce qui permet la reconquête des terres concédées au traité de Brétigny. L'autorité du roi et des princes en sort donc renforcée et les levées d'impôts sont justifiées.

L'État de droit

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Comme la stabilité monétaire, la Justice est l'un des points marquants du règne deSaint Louis, qui est la référence pour l'époque. Charles V remet donc le droit au centre de son mode de gouvernement : il s'entoure de juristes et fait appel à la Cour de justice pour rendre certaines décisions. Il garantit ainsi l'équité à ses sujets, et restaure l'autorité royale. Il matérialise la séparation des pouvoirs entre gouvernement et administration en quittant le palais de la Cité qu'il laisse aux juristes, emmenant sa cour à l'hôtel Saint-Pol, au Louvre ou au château de Vincennes, ce dernier lieu devenant une véritable cité administrative[196]. Il tranche ainsi avec l'arbitraire du règne de son père. C'est grâce à une décision de la Cour de justice qu'il peut confisquer la Guyenne aux Anglais et par une autre qu'il se débarrasse des Melun.

Ordonnance sur les forêts

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Enseignement de la chasse par les veneurs.Livre de chasse deGaston Fébus.Maître des Adelphes, BnF, Fr.616, f.51v.

Dès leXIIIe siècle, on prend conscience de l'importance des forêts[197]. D'une part, le bois se raréfie et se renchérit du fait des défrichages intensifs réalisés en Occident depuis leXe siècle. Le bois est, au début du Moyen Âge, le principal combustible et matériau de construction[198], disponible aisément à proximité immédiate et facile à transporter parflottage. Le renchérissement du bois a conduit à une utilisation plus systématique de la pierre pour la construction et le charbon comme combustible industriel[199] (principalement pour les forges). D'autre part, la forêt menace de ne plus remplir son rôle nourricier pour la population et de terrain de chasse pour la noblesse. Les autorités prennent donc des mesures pour mieux contrôler les défrichages. Charles V s'inscrit dans cette démarche en promulguant en 1376 une ordonnance de52 articles sur les forêts, élaborée sur son ordre par laChambre des comptes après une enquête minutieuse[200]. Les forêts royales sont confiées à6 maîtres forestiers devant inspecter2 fois par an les forêts dont ils ont la charge[200]. Ils doivent en décrire l'état et en présenter la situation comptable à la Chambre des comptes, y compris les amendes perçues par leurs sergents[200]. Ils sont payés400 livres annuelles et en livraisons de bois[200]. À l'échelon subalterne sont institués desgruyers et des verdiers (gardes forestiers). Une exploitation forestière régulière placée sous haute surveillance est aussi instituée[200].

Politiquement, l'affaire a aussi pour objet de débarrasser leConseil du roi des Meluns (ils y sont depuis Jean le Bon) devenus trop puissants politiquement pour que Charles V puisse les évincer. Les habitants de Sens, utilisant les recours judiciaires permis par la mise en pratique de l'État de droit par le roi, portent plainte devant leParlement de Paris contre des abus de pouvoir de la part deJean de Melun, qui avait récupéré la charge de souverain des eaux et forêts. Les communautés villageoises bénéficiaient depuis des temps immémoriaux dudroit d'usage de ses bois (pâture, ramassage des branches mortes, charbon de bois, glanée…) ; or les gardes forestiers, protégés par des commissions royales délivrées par l'archevêque Guillaume de Melun, les saisissaient, les mettaient aux fers et les soumettaient à rançon[201]. L'arrêt de la cour de justice royale tombe le : les droits d'usage sont restitués aux communautés, la justice temporelle de l'archevêché est confisquée par le roi et Jean de Melun se voit retirer sa charge de souverain des eaux et forêts[201]. Les Melun sont alors écartés du pouvoir et l'autorité royale en sort une fois de plus renforcée, montrant qu'elle est juste et que, s'appuyant sur le droit, elle ne privilégie pas les puissants.

Naissance du sentiment national

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Jusqu'à cette époque, il était possible d'annexer des portions énormes d'un territoire étranger, c'est ce que fait Édouard III autraité de Brétigny. Mais, alors que le roi d'Angleterre en est resté au concept féodal qui veut que le pouvoir se résume à une simple pyramide féodale, le fait de recevoir l'hommage pour une terre suffisait pour en être souverain ; Charles V est éclairé par le discrédit initial des Valois et les événements de 1357 et 1358 : il ne suffit pas d'occuper une terre, il faut que ses habitants veuillent reconnaître le nouveau propriétaire comme souverain. Dès lors, la reconquête se fait avant tout en convainquant les territoires de rejoindre le royaume de France, en octroyant par exemple des facilités fiscales aux villes susceptibles detourner français. Ces mesures conciliatrices contribuent à rendre populaire la couronne, d'autant que, depuis le siège de Paris, le dauphin a pris le parti d'éviter si possible de prendre les villes d'assaut, car les pillages qui s'ensuivent habituellement sont très délétères pour l'image du roi. Il n'hésite pas, par exemple, à payer rubis sur l'ongle la reddition des troupes qui défendent le château de Saint-Sauveur-le-Vicomte, quand les troupes anglaises se livrent à un massacre envers la population de Limoges qui a osé laisser entrer les troupes françaises. Les Anglais ne peuvent être perçus que comme les occupants.

À l'inverse, la reconquête s'arrête à Bordeaux et Calais, sachant que pour des raisons économiques ces villes sont farouchement pro-anglaises (Bordeaux exporte massivement son vin en Angleterre et toute la laine anglaise à destination du continent passe par Calais[202]). Édouard III, lui, impose en 1361 l’anglais comme langue nationale (jusqu’à cette date, la langue officielle à la cour anglaise était le franco-normand)[203] ; cette mesure renforce en retour l’anglophobie dans les territoires conquis. De la même manière, Charles V souhaite que la couronne rassemble l'ensemble despatries du territoire (à cette époque chaque région est une patrie) et que Paris en soit le liant matériel. Cette nouvelle vision de la souveraineté est une évolution très nette vers le concept de nation. Le désir d'appartenance nationale à la France est l'un des facteurs qui permet la résolution du conflit en 1475 : l'annexion de territoires de l'adversaire étant perçue comme vaine par les belligérants.

L'image du roi

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Charles V,le Parement de Narbonne, vers 1375, musée du Louvre, Département des Arts graphiques, Paris (France).

Le roi sage

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À l'époque, la noblesse doit conjuguer richesse, pouvoir et bravoure sur le champ de bataille : vivant du labeur paysan, le maître se doit de manifester sa largesse en entretenant la masse de ses dépendants[204]. Privé de prouesses sur les champs de bataille du fait de l'infirmité dont souffre sa main droite[193], Charles V doit faire montre de noblesse autrement. Les chroniqueurs et ses hagiographes sont marqués par ce roi qui reconquiert par la sagesse ce que ses prédécesseurs ont perdu sur les champs de bataille.Jean Froissart écrit : le roi Charles« fut rudement sage et subtil et il le montra bien tant qu'il vécut. Car tout coi, en étant dans sa chambre et ses déduits, il reconquérait ce que ses prédécesseurs avaient perdu sur les champs, la tête armée et l'épée à la main. Ce dont il [est] grandement à louer. »Christine de Pizan n'est pas en reste :« Ce roi, par son sens samagnanimité, sa force, sa clémence et sa libéralité, désencombra son pays de ses ennemis tant qu'ils n'y firent plus leurs chevauchées. Et lui, sans se mouvoir de ses palais et sièges royaux, reconquit, refit et augmenta son royaume qui, auparavant avait été désolé, perdu et dépris par ses devanciers portant les armes et très chevalereux »[205].

La monarchie de droit divin

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Le roi et ses conseillers ancrent l'idée que le roi est de droit divin ce qui élimine définitivement toute contestation de la légitimité des Valois par les Anglais ou les Navarrais. Il s'agit de bâtir l'image d'un roi sage, à la fois saint et savant et aussi d'une nouvelle vision de la monarchie.Le Songe du Vergier, ouvrage attribué àÉvrart de Trémaugon[206], est inspiré directement par Charles V et contribue à peindre cette image de roi qui s'efface derrière les institutions et les officiers. L'auteur y passe en revue toutes les affaires du règne sous la forme d'un dialogue et détaille les arguments qui font du roi un personnage hors normes[207]. Il écrit :« Qui doutera que le très puissant roi de France ne soit ordonné et établi de par Dieu ? »

Le roi s'insère dans lasainte lignée desaint Louis et modèle sur lui son existence publique. Les clercs de son entourage mettent en valeur l'aspect religieux de la cérémonie du sacre, ils recueillent et diffusent les récits de miracles que cette idée fait naître[193]. Le sens du sacre, de l'onction et de la guérison des écrouelles est explicité à la demande du roi par le carmeJean Golein dans leTraité du Sacre pour prouver l'origine divine de la monarchie[207].

… et lesnouvelles décidées par Charles V.

La décoration des différents logis du roi fait appel à force images saintes, les salles sont emplies de reliquaires, de statuettes ou de tableaux figurant la Vierge ou des saints : il convient de rappeler que le pouvoir du roi est d'origine divine[208]. Il est fait une large place à la Trinité jusque dans lesarmoiries royales de France qu'il fait changer : à l'origine, l'écu royal est un semis de fleurs de lys dont le nombre n'était pas déterminé. Charles V le simplifie et prescrit le nombre précis de trois fleurs de lys. On distingue désormais les armes de Franceanciennes et les armes de Francemodernes : la plupart des grands seigneurs et villes arborant des fleurs de lys adoptent cette nouvelle norme.

La prestance royale

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Il veille à s'exprimer avec magnificence et manifeste un goût pour le luxe[193]. Les journées du roi sont codifiées par des rituels cérémonieux, qui seront imités en Bourgogne puis en Espagne pour donner larigideétiquette desHabsbourg[209]. De la même manière, lors de la visite de son oncle l'empereurCharles IV, tout est fait pour que le roi soit l'égal de l'empereur : le roi de France est empereur en son royaume. Ainsi Charles IV doit entrer dans les villes françaises sur un cheval noir, alors qu'il le fait sur un cheval blanc en terre d'Empire, tout l'apparat est présent, mais l'empereur entre en visiteur de marque et non en souverain.

Il prend comme symbole le lion, qui est roi des animaux, le sigle desaint Marc, et celui desrois de Bohême dont il descend (il est petit-fils deJean l'Aveugle). Il reste très proche de son oncle, l'empereurCharles IV. Il fait installer à l'hôtel Saint-Pol ou au Louvre des ménageries où figurent des lions et qui ont un grand succès dans la capitale[210]. Il veille à ce que son image soit partout : il figure sur lefranc à pied (la monnaie), sa statue est placée en différents points de Paris…

Arts et architecture

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Miniature du mois de décembre desTrès Riches Heures du duc de Berry montrant le Château de Vincennes.Musée Condé, Chantilly, ms.65,fo 12, vers 1440.

Durant le règne de Charles V, le soutien des arts et de l'architecture tient une large place. Il s'agit d'un moyen de figurer la restauration de l'autorité royale[211]. La construction d'un puissant et très haut donjon, auchâteau de Vincennes, où il crée une cité administrative, symbolise l'autorité royale. À l'instar de ses prédécesseurs, il fait ériger auchâteau de Vincennes uneSainte Chapelle qui reçoit une épine de la couronne du Christ[212]. Cela est prestigieux à double titre : c'est un clair rappel au règne de Saint Louis qui est la référence de l'époque et cela matérialise la proximité entre la puissance divine et la couronne de France. Les constructions royales sont pratiquement toutes réalisées à Paris et dans ses environs : la capitale matérialise l'unification du royaume par la couronne[212]. Il cherche d'ailleurs à obtenir que la capitale devienne un archevêché (et non plus un évêché dépendant de l'archevêque de Sens), maisGrégoire XI se méfie du risque de voir l'Église gallicane prendre plus d'autonomie et refuse. L'image du roi est partout : on trouve des statues du souverain au Louvre, auChâtelet, sur le portail des célestins, à laBastille, ce qui constitue à l'époque une nouveauté[213].

Les grands travaux ont un rôle utilitaire : l'extension des fortifications parisiennes ou la mise en service du premierégout de Paris rue Montmartre parHugues Aubriot, en 1370, font partie des aménagements rendus nécessaires par l'accroissement rapide de la population parisienne. La construction de fortifications matérialise l'action du roi contre les exactions des Grandes Compagnies ou les raids anglais, comme les égouts matérialisent son action contre l'insalubrité qui est grande partie responsable de la propagation d'épidémies récurrentes. Cela valide dans l'opinion la bonne utilisation des ressources que procure l'instauration d'un impôt permanent.Christine de Pizan note que ces investissements massifs font partie d'une politique de grands travaux destinée à relancer l'économie. En effet, Charles V, qui a pu constater la menace que peut constituer les hommes désœuvrés qui se regroupent en place de grève, leur donne ainsi du travail. Leurs salaires sont dépensés, et créent ainsi de l'activité.

Places fortes et fortifications

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Sa régence et son début de règne étant marqués par les désordres dus aux Grandes Compagnies et par la menace dechevauchées anglaises, il fait améliorer les fortifications des villes qui pourraient être attaquées et raser celles qui pourraient être prises pour éviter qu'elles ne soient utilisées par les compagnies.

Charte de Charles V faisant défense d'aliéner l'hôtel Saint-Paul, juillet 1364.Archives nationales AE/II/383.

En 1356,Étienne Marcel fait construire de nouveaux remparts autour des quartiers situés au nord de la Seine ; cependant cet imposant travail s'arrête avec sa mort en 1358. Charles V, fidèle à sa stratégie de laterre déserte, veut améliorer les fortifications de la ville et continue l'œuvre du prévôt. Sur la rive gauche, pour protéger Paris des Anglais, il fait couronner de créneaux l'enceinte dite « de Philippe Auguste ». Sur la rive droite, il fait construire unnouveau rempart, dit « de Charles V », dont la construction s'achèvera en 1383. Les fortifications rive droite ont un tracé long de 5 kilomètres et un rempart de maçonnerie aurait été hors de prix et vulnérable à l'artillerie qui vient d'apparaître sur les champs de bataille, et remet en cause l'architecture militaire médiévale[214]. Une solution ingénieuse est développée : le réseau de fortifications est constitué d'un ou deux fossés, puis d'un premier remblai de terre, puis un gros fossé de 12 m de large sur 4 de profondeur rempli d'eau, et enfin d'un gros remblai de terre de 25 m de large surmonté d'un petit mur. L'ensemble des fortifications fait 90 mètres de profondeur, ce qui est supérieur à la portée des machines de guerre et des bombardes de l'époque ; et les remblais sont capables d'encaisser les tirs de l'artillerie. De la même manière, les talus et le fossé inondé rendent ces fortifications très peu vulnérables auxsapeurs[214].

Le donjon duchâteau de Vincennes.

Profondément marqué par les révoltes parisiennes de 1358, Charles V fait ériger laBastille sur ses fonds propres[214]. Cette forteresse a deux fonctions : elle prévient toute invasion par laporte Saint-Antoine, protégeant aussi l'hôtel Saint-Pol, lieu de séjour préféré de la famille royale ; et, en cas d'insurrection dans la capitale, elle couvre la route qui mène auchâteau de Vincennes qui lui sert de résidence hors de Paris[214] et est sur la route du Dauphiné, fief de Charles V en terre d'Empire. Le nouveau prévôt de Paris,Hugues Aubriot (auquel on doit également l'édification duPetit Châtelet, dupont au Change et dupont Saint-Michel), est chargé d'en diriger la construction, et la pose de la première pierre intervient le22 avril1370. Les travaux, considérables, vont durer douze ans. Aubriot fera les frais de sa diligence à exécuter les ordres du roi. Accusé delibertinage et d'impiété pour avoir rendu à leurs parents des enfantsjuifs enlevés pour lesconvertir[215], il est emprisonné à la Bastille en 1381, alors que la construction n'est pas encore terminée. Quant à Charles V, il mourait l'année précédente sans avoir pu en contempler l'achèvement.

Charles V aménage tous ses logis de manière à pouvoir les quitter facilement en cas de menace. Ainsi l'hôtel Saint-Pol jouxte les jardins du couvent des Célestins et il entretient d'excellents rapports avec les moines qui y vivent, ce qui lui garantit une sortie de secours discrète. De la même manière, il fait aménager un pont-levis au Louvre, ce qui permet de fuir précipitamment, le cas échéant[216].

Résidences royales

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LeLouvre de Charles V

Charles V fait faire des travaux de rénovations dans les diverses résidences royales deSaint-Ouen,Creil,Melun,Montargis etSaint-Germain-en-Laye. En1361-1364, il fait construire l'hôtel Saint-Pol[217], et fait ériger ourestaurer[218] en1373 (ou1375) lechâteau de Beauté en bord deMarne[219],[220]. Enfin, c'est surtout les travaux de transformation qu'il engage à partir de1367 auchâteau du Louvre, métamorphosé en résidence royale, qui marquent les mémoires, comme en témoignent lesTrès Riches Heures du duc de Berry.

La librairie du roi

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Charles V dans unecathèdre de bois, en train de lire un ouvrage posé sur uneroue à livres, tandis qu'une main céleste bénit le souverain. Sous cette enluminure, le prologue du traducteur Denis Foulechat compare le roi àSalomon.
Pagefrontispice d'une traduction française duPolicraticus deJean de Salisbury,BnF,ms. Français 24287,fo 2 ro, vers 1372.

Charles est un patron des arts : lors de la reconstruction duLouvre en1367, il y fonde la premièreLibrairie royale, qui deviendra quelques siècles plus tard laBibliothèque nationale de France. Charles V fait aménager dans la tour de la Fauconnerie des pièces où il transfère une partie de ses livres (à l'époque965 notices), et il confie la garde de cette bibliothèque àGilles Mallet (1368). Parmi lesmanuscrits mentionnés dans les inventaires après-décès, se trouvent laBible historiale de Jean de Vaudetar, lePsautier d'Ingeburge,Bréviaire de Belleville, leBréviaire dit de Charles V, leBréviaire de Jeanne d'Évreux, lesHeures de Savoie, laVie de saint Denis, lesGrandes Chroniques de France de Charles V[221] et l'Atlas catalan.

Il entreprend une politique de vulgarisation et fait traduire enfrançais de nombreux ouvrages scientifiques et techniques, des traités d’astrologie et d’histoire, des textes d’Aristote accompagnés des commentaires explicatifs de leur traducteurNicolas Oresme, lePolicraticus deJean de Salisbury, leLivre des propriétés des choses deBarthélémy l'Anglais (traduit par Jean Corbechon), ou encore des œuvres religieuses commeLa Cité de Dieu, desaint Augustin traduite en1370 par le juristeRaoul de Presles, qui y ajoute ses propres commentaires et ceux de ses prédécesseurs.

Les textes latins sont traduits en français et des prêts sont accordés pour les copier. Disposée sur trois étages, la Librairie royale répond à un projet politique : elle doit former une élite administrative. Elle compte jusqu’à un millier de manuscrits.

Évolution sous ses successeurs

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Apanages et principautés à la fin de la guerre de Cent Ans.

Guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons

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La politique desapanages a été imaginée comme une décentralisation pour améliorer la gestion des provinces éloignées de la capitale. Ces dernières sont possédées par des familles proches du roi et reviennent à la couronne en l'absence d'héritier mâle, ce qui évite d'en perdre le contrôle après un mariage. Les princes reçoivent leurs finances des impôts permanents récoltés par le roi, ce qui permet à celui-ci de les garder théoriquement sous contrôle[222]. C'est dans cet esprit que Charles V fixe en 1374 la majorité des rois à treize ans et un jour (leur quatorzième année, donc), afin que son fils Charles VI prenne le pouvoir et que l'équilibre ne se rompe. Prévoyant la possibilité que son fils ne soit pas assez âgé pour gouverner, il met en place un système pour que ses frères ne puissent accaparer le pouvoir. La reine a la garde des enfants royaux, mais elle n'a pas le gouvernement du Royaume. L'aîné, le duc d'Anjou, a le gouvernement, mais pas les finances. La plus grande partie des revenus royaux est affectée aux enfants et donc à la Reine. Tout mariage des enfants ne peut se faire qu'après accord d'un conseil de tutelle comprenant les frères de Charles V, son cousin Louis de Bourbon et la reine[222]. Ce conseil est assisté par des fidèles conseillers de Charles V.

Mais, à sa mort en 1380, son fils Charles VI est mineur ; jusqu'en 1388, ce sont ses oncles qui se partagent la régence et donc les recettes fiscales. Dès lors, leurs principautés deviennent indépendantes de fait. C'est la lutte pour le contrôle des recettes de l'État qui entraîne laguerre civile entre Armagnacs et Bourguignons puis les tentatives d'indépendance de la Bourgogne, qui ne cesseront qu'avec la mort deCharles le Téméraire en 1477. Mais cette principauté composée de territoires issus de la France et duSaint-Empire devient alors un enjeu de conflits entre lesHabsbourgs et lesValois. La lutte pour le contrôle de ces terres entraîne deux siècles de guerres entre la France d’une part, et l’Autriche et l’Espagne d’autre part.

Article détaillé :Duché de Bourgogne.

Absolutisme

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Cabochiens,Les Vigiles de la mort de Charles VII, vers 1484.

Constatant l'échec de la tentative de mise en place par lagrande ordonnance de 1357 d'une monarchie contrôlée qu'il a soutenue au départ, Charles V opte pour un autre régime monarchique. Il est fondé sur l'État de droit (la justice étant l'un des piliers du prestige royal depuisSaint Louis), la décentralisation (via la politique desapanages) et la garantie par l'État de la sécurité physique (par l'instauration d'une armée permanente) et monétaire (par la création du franc).

AuXVe siècle, les Parisiens tentent une nouvelle fois d'instaurer un régime de monarchie contrôlée : lescabochiens, soutenus parJean sans Peur et l'université de Paris imposent àCharles VI l'ordonnance cabochienne en 1413, qui tente de rendre vie à lagrande ordonnance de 1357. Sa durée de vie sera aussi éphémère car les promesses démagogiques de fiscalité faible deJean sans Peur ne peuvent être tenues[223].

Au contraire, les monarques français financent une politique qui restaure l'autorité royale par la mise en place d'impôts permanents et l'entretien d'une armée soldée[224]. Le commerce en France ne pouvant se faire sans la sécurisation des axes commerciaux terrestres, la bourgeoisie finit par accepter un État fort financé par une fiscalité lourde, qui évolue progressivement vers une nécessité[224].

Impôts et armée permanente

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Bertrand du Guesclin à la bataille de Cocherel, dans une peinture historiciste duXIXe siècle.

L'établissement d'une armée permanente pour éviter les pillages dus aux mercenaires démobilisés est un indéniable progrès. Toutefois, il porte atteinte à la fonction sociale de la noblesse, dont l’importance sur le champ de bataille diminue au profit deroturiers.

Durant laguerre de Cent Ans, de nombreuses révoltes paysannes et bourgeoises ont lieu en Angleterre (révolte des paysans) et en France (Jacqueries). En Angleterre, la formation de toute la population au maniement de l’arc est même une erreur : durant la révolte des paysans anglais de 1390, ce sont 100 000 paysans qui menacent Londres[225]. L’ordre social féodal est menacé : cette révolte est réprimée dans le sang, tout comme les Jacqueries. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’en France, sousCharles VI, la noblesse demande et obtient la suppression des Grandes Compagnies soldées instituées après décision de Charles V.

C'est son petit-filsCharles VII qui réorganise son armée de manière similaire pour pouvoir vaincre les Anglais. Il obtient progressivement des états de la langue d'oïl (1438 et 1443) puis d'oc (1439) la possibilité de reconduire lesaides sans réunir les états annuellement : il réinstaure la permanence de l'impôt[226]. Il a alors les moyens d'entretenir une armée permanente et d'éviter que les mercenaires démobilisés ne se livrent au pillage. Il envoie le dauphinLouis à la tête de plus de 20 000 écorcheurs combattre les cantons suisses révoltés contre le duc d'Autriche. Cela lui permet de tester ses hommes et de se débarrasser des éléments douteux ou mal équipés. Beaucoup deroutiers périssent face aux Suisses et aux Alsaciens[227]. Il renvoie ensuite un grand nombre d'éléments indésirables dans leur pays d'origine (en particulier en Espagne), ou les recycle dans l'administration, les disperse par petits groupes leur ayant accordé des lettres de rémission[227]. Au total, il ne retient à son service que la moitié environ des combattants[228]. Par l'ordonnance de Louppy-le-Châtel de 1445, il les organise enlances : unité de base où les compétences de chacun se complètent. Chacune est constituée d'un homme d'arme accompagné de deux archers à cheval, d'uncoutilier (armé d'une épée et d'une longue dague), d'unpage et d'un valet (ces derniers ne combattant pas en règle générale).100 lances forment unecompagnie. Les15 compagnies totalisent 9 000 hommes, dont 6 000 combattants qui forment lagrande ordonnance[228]. Bientôt, trois nouvelles compagnies sont créées. Cette armée est entretenue de façon permanente : elle est mise en garnison dans des villes du Royaume[228]. Celles-ci ont la charge de l'entretenir : le coût ne repose pas sur les finances royales. En 1448, il créela petite ordonnance : en cas de mobilisation, chaque paroisse (cinquante feux[229]) est tenue de mettre à la disposition du roi un archer bien équipé et bien exercé. Pour compenser les charges qui pèsent sur lui, il est dispensé d'impôt (lataille[229]) : on l'appellefranc-archer. Choisi par les agents du roi, il est tenu au service de ce dernier. Le Royaume en compte environ 8 000 et possède enfin une archerie comparable à l'armée anglaise[228]. Grâce à une armée moderne appuyée par une véritable artillerie de campagne, il vainc définitivement les Anglais, qui en 1453 ne contrôlent plus que Calais sur le continent.

Bibliothèque nationale

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Article détaillé :Histoire de la Bibliothèque nationale de France.
Charles V ordonnant la traduction d'Aristote. Frontispice dePolitiques, Économiques, Éthique d'Aristote traduits parNicole Oresme, vers 1370. Miniature duMaître du Rational,BnF, Fr.204, f.347r.
Jean Corbechon, présente sa traduction duLivre des Propriétés des choses, au roi Charles V, œuvre initialement manuscrite par lemoinefranciscainBarthélemy l'Anglais, BnF,no Fr.16693,no MF.19931[230].

La Bibliothèque nationale de France tire son origine de labibliothèque du roi, constituée auLouvre par Charles V qui suscite des traductions, nommeGilles Mallet commegarde et fait réaliser uninventaire. Toutefois, cette bibliothèque sera dispersée après la mort du roiCharles VI[231].

C'est à partir deLouis XI qu'une nouvelle bibliothèque est constituée et (plus important pour la continuité de l'établissement) se transmet de roi en roi[231], d'abord àCharles VIII, qui y fait entrer les premiers ouvragesimprimés, puis àLouis XII. Cette bibliothèque est installée àAmboise, puis àBlois.

En1518, François Ier décide la création d'un grand « cabinet de livres », abrité à Blois et confié au poète de la courMellin de Saint-Gelais. Les progrès de l'imprimerie favorisent la publication d'un nombre croissant de livres. Il instaure, en1537, le dépôt légal qui permet d'enrichir la bibliothèque[232], dont il nomme intendant l'humanisteGuillaume Budé avec mission d'en accroître la collection. C'est en1540 qu'il chargeGuillaume Pellicier, ambassadeur à Venise, d'acheter et faire reproduire le plus possible de manuscrits vénitiens. CommeFrançois Ier installe sa propre bibliothèque àFontainebleau, il existe un temps deux bibliothèques royales, mais celle deBlois est déménagée àFontainebleau dès1544.

Imprimerie duXVe siècle. Grâce à François Ier, les imprimeries françaises vont se perfectionner et accroître considérablement le nombre d'ouvrages de la bibliothèque royale.

SousCharles IX, la nouvelle bibliothèque, issue de la fusion des deux précédentes, est rapatriée àParis.Henri IV l'installe aucollège de Clermont (1594) puis aucouvent des Cordeliers (1603).

Labibliothèque se développe réellement sousLouis XIV, époque qui voit de nombreuses nouveautés : installation rue Vivienne, non loin de l'actuel site Richelieu, intégration de plusieurs collections d'origine privée (Gaston d'Orléans, Michel de Maroilles, Loménie de Brienne), ouverture à lagravure et à lamusique imprimée, création du classement deNicolas Clément (utilisé jusqu'en1996), ouverture au public (1692)[231].

LeXVIIIe siècle est important pour la bibliothèque avec les réalisations decatalogues systématiques. C'est à cette époque que la bibliothèque s'installerue Richelieu, à l'actuel emplacement du site Richelieu. Cette nouvelle implantation facilite, à partir de1720, la fréquentation du public et la bibliothèque reçoit les visites assidues de plusieurs desphilosophes desLumières.

À la faveur du déménagement, l'organisation interne est améliorée avec la constitution de cinq départements : département des manuscrits, département des imprimés, département des titres et généalogies (plus tard intégré aux manuscrits), département des planches gravées et recueils d'estampes, département des médailles et pierres gravées[231].

Les enrichissements se poursuivent, tant par un meilleur contrôle du dépôt légal, que par l'intégration de nouvelles collections particulières : collectionBaluze, collection musicale deSébastien de Brossard, bibliothèque deColbert.

À laRévolution française, l'établissement prend le nom debibliothèque de la Nation. Malgré quelques déprédations et limogeages, c'est une période d'enrichissements par l'intégration de fonds de provenances diverses (la bibliothèque a alors compté240 000 livres, 14 000 manuscrits et 85 000 estampes)[231] :

  • de Paris : la bibliothèque a récupéré une bonne partie de ce qui se trouvait dans lesdépôts littéraires de la capitale, intégrant ainsi les collections de nombreuses communautés religieuses (abbaye Saint-Victor) et une partie de celles de l'université (plus de 800 000 pièces en tout) ;
  • de la province : si les fonds des dépôts littéraires provinciaux ont été la plupart du temps dévolus aux écoles centrales avant d'être attribués aux communes, la Bibliothèque de la Nation se réservait les pièces les plus remarquables, qui devaient illustrer les richesses de la France. C'est ainsi que des pièces venues des quatre coins de la France (Chartres,Amiens,Soissons) se sont retrouvées à la Bibliothèque nationale ;
  • de l'étranger : au fur et à mesure des conquêtes révolutionnaires, les troupes françaises s'emparent de collections jugées utiles ou prestigieuses. Une partie en a été rendue aux pays concernés en1814, mais la Bibliothèque en a gardé d'importants fonds[231].

Au fil des changements de régimes, la bibliothèque devientBibliothèque impériale puisbibliothèque royale, puisBibliothèque nationale en 1848, de nouveauimpériale et définitivementnationale en 1871.

L'établissement continue à être enrichi au cours duXXe siècle[233] pour devenir ce qu'elle est aujourd'hui : la Bibliothèque nationale de France.

Gallicanisme

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Charles VII représenté en roi mage parJean Fouquet.Livre d'heures d'Étienne Chevalier.

Le règne de Charles V est marqué par l'affirmation du royaume de France comme un État souverain et indépendant du Saint-Empire ou de l'Église. DepuisPhilippe le Bel, le royaume s'émancipe de la tutelle que le souverain pontife aurait voulu imposer sur l'Occident. Legrand schisme d'Occident va grandement contribuer à affirmer l'autonomie du royaume de France vis-à-vis du Saint-Siège. Charles V a toujours veillé à ce que l'État ne dépende pas de l'Église, dissociant bien ses convictions religieuses et la politique. En soutenantClément VII, l'objectif est surtout d'avoir un (anti)pape pro-français dans sa lutte contre le royaume d'Angleterre, Mais le schisme a des conséquences bien plus importantes pour les rapports entre le royaume et Rome.

Déjà, pendant le gouvernement des oncles, les tentatives de soustractions d'obédiences menées parPhilippe le Hardi soutenu par l'université de Paris aboutissent à une indépendance de fait de l'église de France entre 1398 et 1403[234]. Un grand pas est alors fait vers le gallicanisme.

Plus tard, la résolution du schisme par leconciliarisme affaiblit la papauté et permet àCharles VII de s'imposer en 1438 comme le chef naturel de l’Église de France, qui entre ainsi dans l'ère dugallicanisme[235]. Dans son préambule, laPragmatique Sanction de Bourges dénonce les abus de la papauté. Dans son premier article, elle déclare la suprématie desconciles généraux sur le Saint-Siège et limite les pouvoirs du pape. Ainsi la libre élection des évêques et des abbés par les chapitres et les monastères est rétablie : elle supprime les nominations par le Saint-Siège et son droit de réserve. La royauté obtient de pouvoir « recommander » ses candidats aux élections épiscopales et abbatiales auprès des chapitres. L'ordonnance de Bourges établit aussi des juridictions permettant de limiter les appels (souvent onéreux) faits à Rome. Enfin, elle fixe un âge minimum pour devenir cardinal, réduit la possibilité du pontife de lever un certain nombre d'impôts (suppression desannates) et restreint les effets de l'excommunication et de l'interdit.

Fin politique, Charles VII réussit ce que Philippe le Bel a vainement tenté de réaliser. Bien que se référant à Rome, l'Église de France acquiert une grande autonomie. Le roi s'assure la loyauté du clergé français.

Généalogie

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Article détaillé :Généalogie des Valois, des Médicis et des Bourbons.

Ascendance

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Ascendance de Charles V de France
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
32=22.Louis IX de France
 
 
 
 
 
 
 
16.Philippe III de France
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
33=23.Marguerite de Provence
 
 
 
 
 
 
 
8.Charles de Valois
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
34.Jacques Ier d'Aragon
 
 
 
 
 
 
 
17.Isabelle d'Aragon
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
35.Yolande de Hongrie
 
 
 
 
 
 
 
4.Philippe VI de France
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
36.Charles Ier de Sicile
 
 
 
 
 
 
 
18.Charles II d'Anjou
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
37.Béatrice de Provence
 
 
 
 
 
 
 
9.Marguerite d'Anjou
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
38.Étienne V de Hongrie
 
 
 
 
 
 
 
19.Marie de Hongrie
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
39.Élisabeth la Coumane
 
 
 
 
 
 
 
2.Jean II de France
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
40.Eudes III de Bourgogne
 
 
 
 
 
 
 
20.Hugues IV de Bourgogne
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
41.Alix de Vergy
 
 
 
 
 
 
 
10.Robert II de Bourgogne
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
42.Robert III de Dreux
 
 
 
 
 
 
 
21.Yolande de Dreux
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
43.Aénor de Saint-Valery
 
 
 
 
 
 
 
5.Jeanne de Bourgogne
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
44.Louis VIII de France
 
 
 
 
 
 
 
22.Louis IX de France
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
45.Blanche de Castille
 
 
 
 
 
 
 
11.Agnès de France
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
46.Raimond Bérenger IV de Provence
 
 
 
 
 
 
 
23.Marguerite de Provence
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
47.Béatrice de Savoie
 
 
 
 
 
 
 
1. Charles V de France
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
48.Henri V de Luxembourg
 
 
 
 
 
 
 
24.Henri VI de Luxembourg
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
49.Marguerite de Bar
 
 
 
 
 
 
 
12.Henri VII du Saint-Empire
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
50.Baudoin d'Avesnes
 
 
 
 
 
 
 
25.Béatrice d'Avesnes
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
51.Félicité de Coucy
 
 
 
 
 
 
 
6.Jean Ier de Bohême
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
52.Henri III de Brabant
 
 
 
 
 
 
 
26.Jean Ier de Brabant
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
53.Adélaïde de Bourgogne
 
 
 
 
 
 
 
13.Marguerite de Brabant
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
54.Gui de Dampierre
 
 
 
 
 
 
 
27.Marguerite de Dampierre
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
55.Mahaut de Béthune
 
 
 
 
 
 
 
3.Bonne de Luxembourg
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
56.Venceslas Ier de Bohême
 
 
 
 
 
 
 
28.Ottokar II de Bohême
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
57.Cunégonde de Souabe
 
 
 
 
 
 
 
14.Venceslas II de Bohême
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
58.Rostislav IV de Kiev
 
 
 
 
 
 
 
29.Cunégonde de Slavonie
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
59.Anne de Hongrie
 
 
 
 
 
 
 
7.Élisabeth de Bohême
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
60.Albert IV de Habsbourg
 
 
 
 
 
 
 
30.Rodolphe Ier du Saint-Empire
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
61.Edwige de Kybourg
 
 
 
 
 
 
 
15.Judith de Habsbourg
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
62.Bouchard V de Hohenberg
 
 
 
 
 
 
 
31.Gertrude de Hohenberg
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
63.Mathilde de Tübingen
 
 
 
 
 
 
 

Charles V est issu de la branche royale desValois de ladynastie capétienne. Charles V fut le premier roi à se donner un numéro d’ordre,« qui faisait de lui un héritier[236] ».

Il est le fils deJean II dit le Bon et deBonne de Luxembourg, fille du roiJean Ier de Bohême et sœur de l'empereurCharles IV. Il est le frère deLouis Ier,duc d'Anjou, deJean Ier,duc de Berry et dePhilippe II, dit le Hardi,duc de Bourgogne.

Descendance

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Marié àJeanne de Bourbon, avec laquelle il partage des liens de consanguinité[237], le8 avril1350 ; il a huit enfants dont deux seulement atteignent l'âge adulte :

Charles V aurait eu deux bâtards :

Généalogie simplifiée

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Généalogie simplifiée
 
 
 
Charles V
de France
(1338-1380)

(1364-1380)
 

Jeanne
de Bourbon

(1338-1378)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Charles VI
de France

(1368-1422)

(1380-1422)
 

Isabeau
de Bavière

(1371-1435)
 
 
 

Louis Ier
d'Orléans

(1372-1407)
 

Valentine
Visconti

(1368-1408)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Charles VII
de France

(1403-1461)

(1422-1461)
 

Marie
d'Anjou

(1404-1463)
 

Charles Ier
d'Orléans

(1394-1465)
 

Marie
de Clèves

(1426-1487)
 

Jean
d' Orléans

(1400-1467)
 

Marguerite
de Rohan

(nc-1496)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Louis XI
de France

(1423-1483)

(1461-1483)
 

Charlotte
de Savoie

(1440-1483)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Charles VIII
de France

(1470-1498)

(1483-1498)
 

Anne
de Bretagne

(1477-1514)
 
Louis XII
de France

(1462-1515)

(1498-1515)
 

Louise
de Savoie

(1476-1531)
 

Charles
d'Orléans

(1459-1496)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Claude
de France

(1499-1524)
 
 
 
 
 
François Ier
de France

(1494-1547)

(1515-1547)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Louise
de France

(1515-1518)
 

Charlotte
de France

(1516-1524)
 

François III
de Bretagne

(1518-1536)
 
Henri II
de France

(1519-1559)

(1547-1559)
 

Madeleine
de France

(1520-1537)
 

Charles II
d'Orléans

(1522-1545)
 

Marguerite
de France

(1523-1574)
 

Aspect physique et personnalité

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Portrait de Charles V figurant dans une lettre C ornée au début d'une charte royale datée de 1367. Paris, Archives nationales, J/358/12.

Portant les séquelles d'une maladie de jeunesse contractée en1349[n 3], il n'est pas si chétif qu'on l'a écrit (73 kg en 1362 après une longue maladie et 77,5 kg en 1368[n 4]), mais sa santé fragile l'écarte des tournois et des champs de bataille : sa main droite est si enflée qu'il ne peut manier d'objets pesants[193]. Il n'en a pas moins un sens aigu de la majesté royale. Il a l'esprit vif, et il est proprement machiavélique : sa biographeChristine de Pizan le décrit« sage et visseux » (retors) etJean de Gand le qualifie de« royal attorney »[193]. Son tempérament tranche avec celui de son pèreJean le Bon, dont la grande sensibilité se traduit par des explosions de colères non contenues, et qui ne s'entoure que de personnes avec lesquelles il a des liens d'amitié[243]. Très tôt, la mésentente est manifeste entre père et fils aux personnalités si dissemblables[239].

Charles V est très instruit : Christine de Pizan le décrit comme un intellectuel accompli maîtrisant les septarts libéraux[246]. C'est aussi un roi très pieux. Sa dévotion l'aide à supporter les épreuves, le sort s'acharnant longtemps à ne pas lui donner d'héritier, et étant sujet à de nombreux problèmes de santé devant lesquels la médecine de l'époque reste démunie[247]. Il soutient notamment l'expansion de l'ordre des Célestins[248].

Comme son pèreJean le Bon, Charles V manifeste un vif intérêt pour laBible. Il lit la Bible entière dans l'année à raison de quelques pages chaque jour. À une époque où les exemplaires de la Bible en français sont très rares, il fait réviser la traduction de la Bible enfrançais. Il distribue des exemplaires de la Bible dans différents dialectes à plusieurs de ses seigneurs, afin de répandre le Livre saint dans les provinces du Royaume. Ses successeurs ont conservé la bible dont il se servait pendant plusieurs générations[249].

Il est également adepte de l'astrologie et de diverses sciences occultes. L'inventaire de sa bibliothèque en 1380 fait état de trente ouvrages traitant degéomancie, et le septième des livres de sa bibliothèque sont des ouvrages d'astronomie, d'astrologie ou d'art divinatoire[250]. Cependant, cela va à l'encontre de la doctrine de l'Église et de l'Université à l'époque ainsi que celle de ses conseillers : ces croyances restent dans la sphère privée du roi et n'interfèrent pas dans ses décisions politiques[251].

Notes et références

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Notes

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  1. Ces troubles d'ordre dynastique seront à l'origine de laguerre des Deux-Roses en1455.
  2. En 2013, le docteur Jacques Deblauwe émet initialement l'hypothèse d'un« infarctus du myocarde, compliqué très rapidement d'unœdème aigu du poumon » mais il privilégie ensuite la thèse de la« dissection aortique », avant d'ajouter que« seules des constatations, lors de l'autopsie, nous auraient permis de trancher mais nous n'en possédons pas de relation »[183].
  3. Françoise Autrand conclut qu'il s'agissait d'une typhoïde[243] mais la longueur d'évolution et les séquelles ne sont pas en faveur de ce diagnostic. Les séquelles font évoquer unproblème lymphatique peut-être dû à un accès depeste bubonique (un tiers de la population européenne en est morte cette année-là) mais l'évolution semble bien lente. L'hypothèse la plus séduisante serait uneadénite tuberculeuse qui aurait fini par guérir en fistulisant et aurait laissé les séquelles lymphatiques. Pour l'historienne, Charles V aurait été aussi atteint de lagoutte qui est une affection chronique pouvant donner des fistules[244]. Les sources manquent pour permettre de trancher entre ces différentes hypothèses.
  4. Charles V s'est fait peser avec la grande balance deTournai[245].

Références

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  1. Sa généalogie sur le site Medieval Lands.
  2. Il est, conformément à la tradition, sacré dans lacathédrale de Reims le 19 mai 1364 par l'archevêque de ReimsJean III de Craon.
  3. Delachenal 1903,p. 94-98.
  4. Par la suite, des juristes justifieront ce choix en s'appuyant sur la « loi salique », le code desFrancs saliens.
  5. La fonction d'empereur, de chef du Saint-Empire, n'est pas héréditaire, mais élective.
  6. Autrand 1994,p. 26.
  7. Autrand 1994,p. 27.
  8. Autrand 1994,p. 72.
  9. Autrand 1994,p. 70.
  10. Paul Dreyfus,Histoire du Dauphiné,p. 107 (livre de la chaine, folio 329).
  11. ab etcAutrand 1994,p. 76.
  12. a etbAutrand 1994,p. 75.
  13. Autrand 1994,p. 85.
  14. ab etcAutrand 1994,p. 107-108.
  15. Autrand 1994,p. 108.
  16. Favier 1980,p. 140.
  17. Autrand 1994,p. 153.
  18. Georges Bordonove,La guerre de600 ans, Laffont, 1971,p. 135.
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  240. Geoffroy G. Sury, « Bayern Straubing Hennegau : la Maison de Bavière en Hainaut.XIVeXVe s. », (2e éd.), éd. Geoffroy G. Sury, Bruxelles, 2010,p. 153 : - Trésor des Chartes,RegistreVI, folio 271, « Traité de mariage entre Guillaume d’Ostrevant (futur Guillaume IV, comte de Hainaut) et Marie de France, en date du », dansHistoire généalogique des pairs de France, vol. 12, Paris. Il s’agit dans le cas présent d’un accord de promesses de mariage.
  241. Sury Geoffroy G., « Bayern Straubing Hennegau : la Maison de Bavière en Hainaut.XIVeXVe siècles », (2e éd.),  éd. Geoffroy G. Sury, Bruxelles, 2010,p. 153 : - Bibliothèque Ste-Geneviève à Paris, Ms 2068, fol. 44, (Contrat de mariage entre Guillaume (II) de Bavière (alias Guillaume d'Ostrevant en Hainaut) et Marie de France, année 1375.), Manuscrit duXVIIe siècle.- À Paris, le, Charles (V), roi de France, fait connaître les termes d’un traité d’alliance conclu entre lui-même et son fils aîné, d’une part, et de l’autre, le duc Albert de Bavière et son fils aîné (Guillaume d'Ostrevant, futur Guillaume IV, comte de Hainaut), ladite alliance concernant également les mariages à contracter par les enfants (Marie de France et Guillaume d'Ostrevant) des principaux intéressés. Dans G. Wymans, « Inventaire analytique du chartrier de la Trésorerie des comtes de Hainaut », aux A.E. Mons,no  d’ordre (cote) 1113, Éditions A.G.R., Bruxelles, 1985,p. 236. (Or. sur pch. ; seul contre-sceau, détaché.)- À Paris, en juin 1375, Charles (V), roi de France, fait connaître les modalités du règlement de la dot de 100 000 francs d’or qu’il destine à sa fille Marie, en exécution de son traité de mariage avec Guillaume (Guillaume d'Ostrevant), fils aîné du duc Albert de Bavière. Dans G. Wymans, « Inventaire analytique du chartrier de la Trésorerie des comtes de Hainaut », aux A.E. Mons,no  d’ordre (cote) 1114, Éditions A.G.R., Bruxelles, 1985,p. 236. (Or. sur pch. ; sc. ébréché avec contre-sceau.)- À Paris, en juin 1375, Charles (V), roi de France, renonce, pour lui-même et pour sa fille Marie, à toutes prétentions sur les comtés de Hainaut, de Hollande, de Zélande, et sur la seigneurie de Frise, à l’exception des « adhéritements », assignations, douaire et provisions prévus par les clauses du contrat de mariage évoqué ci-avant et rappelés ici en détail. Dans G. Wymans, « Inventaire analytique du chartrier de la Trésorerie des comtes de Hainaut », aux A.E. Mons,no  d’ordre (cote) 1115, Éditions A.G.R., Bruxelles, 1985,p. 236. (Or. sur pch. ; sc. ébréché avec contre-sceau.)- À Paris, le, Charles (V), roi de France, ratifie par son serment les termes du contrat de mariage évoqué dans les deux actes précédents et s’engage à les faire observer par sa fille Marie, et ce, en contrepartie du serment équivalent prêté en sa présence par le duc Albert de Bavière, bail, gouverneur et héritier des comtés de Hainaut, etc., et son fils aîné Guillaume (Guillaume d’Ostrevant). Dans G. Wymans, « Inventaire analytique du chartrier de la Trésorerie des comtes de Hainaut », aux A.E. Mons,no  d’ordre (cote) 1116, Éditions A.G.R., Bruxelles, 1985,p. 237. (Or. sur pch. ; sc. ébréché avec contre-sceau.)
  242. Cité par Patrick Van Kerrebrouck, dans « Les Valois », 1990. Ce fils bâtard est cité par Pierre Cochon dansChronique normande, 1870, page 136, témoignage à caution.
  243. a etbAutrand 1994,p. 18-19.
  244. Autrand 1994,p. 478-481.
  245. Autrand 1994,p. 471-472.
  246. Autrand 1994,p. 751.
  247. Autrand 1994,p. 489-490.
  248. Autrand 1994,p. 749-750.
  249. « La Bible : 3000 ans de manuscrits », surbible-et-histoire.com.
  250. Autrand 1994,p. 745.
  251. Autrand 1994,p. 747.

Annexes

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Sources imprimées

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Bibliographie

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Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.Si de nombreux ouvrages ont été utilisés, une part importante des sources provient du livre deFrançoise Autrand. Ce livre cite les travaux antérieurs (ceux deRaymond Cazelles par exemple) et apporte des précisions nombreuses (il a été publié14 ans plus tard). Cet ouvrage a été largement recoupé avec ceux deJean Favier et deGeorges Minois.

Ouvrages anciens

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Biographies

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Autres travaux

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Articles connexes

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Liens externes

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