La maison forte du Châtelard, lieu de naissance de Charles Dullin.
Charles Édouard François Marie Dullin est né àYenne (Savoie) le 12 mai 1885, fils de Jacques Dullin, notaire et juge de paix, et de Camille Vouthier son épouse[1]. Il est le dernier né de dix-huit enfants[2]. Ses parents vivent à lamaison-forte du Châtelard à Yenne dont a hérité son père[3].
Selon le vœu de sa mère, qui souhaitait faire de lui un prêtre, il entre en 1896 aupetit séminaire dePont-de-Beauvoisin (Savoie). Il y part contraint et pleurant de rage[4]. Ce n'est qu'après la mort de ses parents que Charles Dullin, âgé de17 ans, quitte le séminaire et commence à s'orienter vers le théâtre. Il habite d'abord Lyon, chez l'une de ses sœurs, et exerce différents emplois (chez unhuissier de justice, dans unebonneterie, etc.) qui ne lui conviennent guère. Il se lie d'amitié avecHenri Béraud,Albert Londres, Achille Berger etGeorges Rouquayrol, tous jeunes et désargentés. En 1903, ils décident de quitter Lyon pour Paris.
Charles Dullin joue son premier rôle authéâtre des Gobelins dans lesAventures du Capitaine Corcoran (1904). Ce n’est qu’un très modeste début et, dans le même temps, il déclame des vers (notammentBaudelaire,Verlaine etVillon) au cabaret duLapin Agile. Il joue également de petits rôles pour lethéâtre de Grenelle (sous la direction de Larochelle). Il entre en 1906 authéâtre de l'Odéon dirigé parAndré Antoine (qui l’avait remarqué au Lapin Agile), où il interprète le rôle de Cinna dansJules César. Mais c’est en 1911 que Charles Dullin rencontre son premier véritable succès. Il est remarqué au Lapin Agile parRobert d'Humières que sa récitation de la « Ballade des Pendus » de Villon impressionne. C’est donc authéâtre des Arts (dirigé par d’Humières), que Dullin crée son premier grand rôle, celui de Smerdiakov dansLes Frères Karamazov deFiodor Dostoïevski, mis en scène parJacques Copeau.
Sous l’égide de ce dernier et en collaboration avecLouis Jouvet (qui tenait aussi un rôle dans les Frères Karamazov), Charles Dullin participe à la création duthéâtre du Vieux-Colombier en 1913. Devenu le bras droit de Copeau, il séjourne chez lui dans sa propriété du Limon où se réunit la troupe qu’ils ont su constituer :Blanche Albane, Jane Lory,Roger Karl,Jean Villard,Suzanne Bing etLouis Jouvet. Il perfectionne son jeu du personnage d’Harpagon dans l’Avare de Molière, qui sera vraiment sa « spécialité » tout au long de sa carrière, ayant même le physique adéquat puisqu’un début de convulsions dans sa petite enfance avait laissé à Dullin une colonne vertébrale voutée qui lui donnait un aspect particulier. Il joue aussiL'Annonce faite à Marie dePaul Claudel. C’est durant cette période qu’il réfléchit sur la nécessité de fonder personnellement une école d’art dramatique et une compagnie théâtrale. Sa compagne d'alors, la danseuseCaryathis, future épouse deMarcel Jouhandeau, l'encourage à prendre son autonomie.
En 1914, il est réformé mais il rejoint le front comme engagé volontaire dans unrégiment de dragons à pieds. Durant deux ans, il vit dans les tranchées et récite des vers pour les soldats. Il est blessé en 1917 et démobilisé. Dullin quitte donc la France et rejoint la troupe du Vieux-Colombier aux États-Unis. C’est avec Copeau, auGarrick Theater de New York, qu’il continue l’aventure.
De retour en France en 1919, il quitte leVieux-Colombier et entre dans la troupe deFirmin Gémier, avec qui il joue notammentLa Mégère apprivoisée deShakespeare. Il part en tournée avec Gémier en Allemagne occupée. Mais l’idée d’avoir personnellement une compagnie théâtrale le tente. Il quitte donc Gémier à son retour en France et part en juillet 1921 pour le hameau de Néronville (Château-Landon, Seine et Marne) où il joue sur des tréteaux. Génica Athanasiou (jeune comédienne roumaine),Marguerite Jamois (ancienne comédienne de Gémier),Magdeleine Bérubet, Jean Mamy, Vassili Kouchitachchvili (dit Kouchita) etLucien Arnaud l’accompagnent[5].
Cette compagnie nouvelle prend le nom d’Atelier, par un manifeste qui indique que « l’Atelier n’est pas une entreprise théâtrale, mais un laboratoire d’essais dramatiques ». Elle s’installe à Paris auno 7rue Honoré-Chevalier, près de Saint-Sulpice, rue des Ursulines, au Vieux-Colombier (invité par Copeau) avant de se fixer définitivement, en octobre 1922, place Dancourt, dans l’ancien théâtre Montmartre, qui devient leThéâtre de l'Atelier. Ce nouveau théâtre, où Dullin transmet les leçons reçues de Copeau (formation des comédiens et priorité du texte), rencontre un vif succès avecChacun sa Vérité dePirandello etVoulez-vous jouer avec moa ? deMarcel Achard. Il monte aussi des auteurs contemporains commeArmand Salacrou, sans exclure les classiques telShakespeare ouAristophane, et rencontre des succès critiques grâce aux mises en scène deVolpone deBen Jonson (1928, adapté parJules Romains etStefan Zweig) et deL’Avare[6] deMolière. Dans son école "laboratoire", Dullin forme alors des comédiens tels qu'Antonin Artaud (qui y rencontre son grand amour, Génica Athanasiou),Tania Balachova, Raymond Rouleau,Julien Bertheau,Marcel Herrand, Étienne Decroux, Jean-Louis Barrault, Jean Marais, Madeleine Robinson, Jean Vilar...
Durant cette période, il habite à Paris auno 49rue de La-Tour-d'Auvergne, dans un appartement qu'avait occupé, au siècle précédent,Juliette Drouet, et fait de fréquents séjours dans la maison que possède Simone Jollivet à Férolles (Crécy-la-Chapelle). Il y retrouveSimone de Beauvoir et Jean Paul Sartre, cousin de S. Jollivet.
À la suite de graves démêlés avec la ville de Paris, Charles Dullin quitte la direction du théâtre de la Cité en 1947. Il refuse la direction d’un théâtre européen à Genève, et rejoint l’équipe duthéâtre Montparnasse, dirigé par une de ses anciennes élèves de l'Atelier,Marguerite Jamois. Il y crée l'Archipel Lenoir deSalacrou. Au cours d’une tournée à Lyon (où il montela Marâtre de Simone Jollivet), il tombe gravement malade.
1934 :Les Misérables deRaymond Bernard : l'aubergiste Thénardier ; film tourné en trois époques :Une tempête sous un crâne,Les Thénardier etLiberté, liberté chérie.
Souvenirs et notes de travail d'un acteur, Odette Lieutier éditeur, 1946,(BNF32055087) ; réédition Librairie théâtrale, 1985(ISBN273490022X)
Ce sont les dieux qu'il nous faut, édition établie et annotée par Charles Charras, préface d'Armand Salacrou, collectionPratique du théâtre, Éditions Gallimard, 1969,(BNF32987929)
Charles Dullin, choix de textes par Joëlle Garcia, collectionMettre en scène, Actes Sud, 2011(ISBN2330001797 et9782330001797)
lesRencontres Charles Dullin[12] qui deviennentLes Théâtrales Charles Dullin enVal-de-Marne
laBiennale Charles Dullin[13] àAix-les-Bains (Savoie) dans le cadre prestigieux du théâtre du Casino Grand Cercle, remise du prix national de théâtre amateur Charles Dullin.
Cie Théâtre de l'horizon / l'Industrie théâtre àBourg-en-BresseAin situé au 7 rue de l'Industrie[14].
En 1957, la Place Dancourt, située devant le théâtre de l'Atelier, devient en son hommage laplace Charles-Dullin.Depuis 1979, une rue Charles-Dullin existe à Reims.On trouve également une rue Charles-Dullin ainsi qu'une impasse Charles-Dullin àCrécy-la-Chapelle (Seine-et-Marne).Enfin la place principale de son village deYenne, en Savoie, porte maintenant son nom.
↑Monique Surel-Tupin,Charles Dullin, Presses Universitaires de Bordeaux, 1984, page 11.
↑Pauline Teillon-Dullin et Charles Charras,Charles Dullin ou les Ensorcelés du Châtelard, Paris, Publications de la Société d'histoire du théâtre, 1955, page 27.
↑Monique Surel-Tupin,Charles Dullin, Presses Universitaires de Bordeaux, 1984, page 13.
Lucien Arnaud,Charles Dullin, préface deJean Vilar, volume 2 de la collectionLe Théâtre et les Jours, L'Arche éditeur, Paris, 1952.
Pauline Teillon-Dullin et Charles Charras,Charles Dullin ou les Ensorcelés du Châtelard, préface de Jean-Louis Barrault, suivi de lettres de Charles Dullin à sa sœur Pauline, Société d'histoire du théâtre, Paris, éditions Michel Brient, 1955. Réédition en 1980 sous le titreLes Enfants du Chatelard, éditions du Prieuré.
Clément Borgal,Metteurs en scène, éditions Fernand Lanore, 1963.
Paul-Louis Mignon,Charles Dullin, éditions de La Manufacture, Paris, 1990.
Marie-Françoise Christout, Noëlle Guibert et Danièle Pauly,Théâtre du Vieux-Colombier, 1913-1993, éditions Norma, 1993.
Chantal Meyer-Plantureux,Les Enfants de Shylock, ou l'Antisémitisme sur scène, Paris, éditions Complexe, 2005(ISBN2804800245 et9782804800246)Lire en ligne sur Google livres
Min Tian, "Theater of Transposition: Charles Dullin and the East Asian Theater",Comparative Drama 48.4 (Winter 2014): 333-370.