Lecerveau est le principalorgane dusystème nerveux desanimauxbilatériens. Ce terme tient du langage courant (non scientifique) et chez leschordés, comme leshumains, il peut désigner l'encéphale, ou uniquement une partie de l'encéphale, leprosencéphale (télencéphale +diencéphale), voire seulement le télencéphale. Néanmoins, dans cet article, le terme « cerveau » prend son sens le plus large.
Le cerveau des chordés est situé dans latête, protégé par lecrâne chez lescraniés, et son volume varie grandement d'uneespèce à l'autre. Pour les animaux d'autresembranchements, certains centres nerveux sont également appelés cerveau paranalogie avec les chordés.
Le cerveau régule les autressystèmes d'organes ducorps, en agissant sur lesmuscles ou lesglandes, et constitue le siège des fonctionscognitives. Ce contrôle centralisé de l'organisme permet des réponses rapides et coordonnées aux variations environnementales. Lesréflexes, schémas de réponses simples, ne nécessitent pas l'intervention du cerveau. Toutefois, les comportements plus sophistiqués nécessitent que le cerveau intègre les informations transmises par lessystèmes sensoriels et fournisse une réponse adaptée.
L'encéphale est une structure extrêmement complexe qui peut renfermer jusqu'à plusieurs milliards deneurones connectés les uns aux autres. Les neurones sont lescellules cérébrales qui communiquent entre elles par le biais de longues fibres protoplasmiques appeléesaxones. L'axone d'un neurone transmet desinflux nerveux, lespotentiels d'action, à des cellules cibles spécifiques situées dans des régions plus ou moins distantes du cerveau ou de l'organisme. Lescellules gliales sont le deuxième type cellulaire du cerveau et assurent des fonctions très diversifiées, centrées autour du support des neurones et de leurs fonctions. Bien que les cellules gliales et les neurones aient probablement été observés pour la première fois en même temps au début duXIXe siècle, contrairement aux neurones dont les propriétésmorphologiques etphysiologiques étaient directement observables pour les premiers investigateurs dusystème nerveux, les cellules gliales étaient considérées, jusqu'au milieu duXXe siècle, simplement comme de la « glu » qui « colle » les neurones ensemble[1].
Malgré de grandes avancées enneurosciences, le fonctionnement du cerveau est encore mal connu. Les relations qu'il entretient avec l'esprit sont le sujet de nombreuses discussions, aussi bienphilosophiques quescientifiques.
Depuis son origine, la recherche sur le cerveau a connu principalement trois phases : phase philosophique, phase expérimentale et phase théorique. Pour le futur des neurosciences, certains auteurs prédisent une phase de simulation[2].
Schéma d'organisation fondamental d'un bilatérien.
Le cerveau est la structurebiologique la plus complexe connue[3] ce qui rend souvent délicate la comparaison de cerveaux de différentes espèces à partir de leur apparence. Néanmoins, l'architecture du cerveau présente plusieurs caractéristiques communes à un grand nombre d'espèces. Trois approches complémentaires permettent de les mettre en évidence. L'approcheévolutionniste compare l'anatomie du cerveau entre différentes espèces et repose sur le principe que lescaractères retrouvés sur toutes les branches descendantes d'un ancêtre donné étaient aussi présentes chez leurancêtre commun. L'approchedéveloppementale étudie le processus de formation du cerveau du stadeembryonnaire au stadeadulte. Enfin, l'approchegénétique analyse l'expression desgènes dans les différentes zones du cerveau.
L'origine du cerveau remonte à l'apparition desbilatériens, une des principales subdivisions durègne animal notamment caractérisée par unesymétrie bilatérale des organismes, il y a environ 550-560millions d'années[4]. L'ancêtre commun de cetaxon suivait unplan d'organisation de typetubulaire,vermiforme etmétamérisé ; un schéma qui continue de se retrouver dans le corps de tous les bilatériens actuels, dont leshumains[5]. Ce plan d'organisation fondamental du corps est un tube renfermant untube digestif, reliant labouche et l'anus, et uncordon nerveux qui porte unganglion au niveau de chaque métamère du corps et notamment un ganglion plus important au niveau du front appelé « cerveau ».
La composition du cerveau desprotostomiens est très différente de celle deschordés (qui sontépineuriens), à tel point qu'il est difficile de comparer les deux structures sauf à se baser sur lagénétique. Beaucoup deprotostomiens sonthyponeuriens ; deux groupes s'en démarquent par un cerveau relativement complexe : lesarthropodes et lescéphalopodes[6]. Le cerveau de ces deux groupes provient de deux cordons nerveux parallèles qui s'étendent à travers tout le corps de l'animal. Les arthropodes ont un cerveau central avec trois divisions et de larges lobes optiques derrière chaqueœil pour letraitement visuel[6]. Les céphalopodes possèdent le plus gros cerveau de tous les protostomiens. Celui des pieuvres est très développé, avec une complexité similaire à celle rencontrée chez les chordés, ce qui permet aux pieuvres de développer des capacités cognitives comme la possibilité d'utiliser un outil[7].
Le cerveau de quelques hyponeuriens a été particulièrement étudié. Par la simplicité et l'accessibilité de sonsystème nerveux, l'aplysie (unmollusque) a été choisie comme modèle par leneurophysiologisteEric Kandel pour l'étude des bases moléculaires de la mémoire qui lui valut unprix Nobel en2000[8]. Cependant, le cerveau d'hyponeurien le plus étudié demeure celui de ladrosophile (unarthropode). Du fait de l'important panel de techniques à disposition pour étudier leurmatériel génétique, les drosophiles sont tout naturellement devenues un sujet d'étude sur le rôle desgènes dans le développement du cerveau[9]. De nombreux aspects de la neurogénétique des drosophiles se sont avérés être également valables chez l'humain. Par exemple, les premiersgènes impliqués dans l'horloge biologique furent identifiés dans lesannées 1970 en étudiant des drosophiles mutantes montrant des perturbations dans leurcycle journalier d'activité[10]. Une recherche sur legénome des chordés a montré un ensemble degènes analogues à ceux de la drosophile jouant un rôle similaire dans l'horloge biologique de la souris et probablement également chez l'humain[11].
Un autre protostomien, lever nématodeCaenorhabditis elegans, a fait l'objet, comme la drosophile, d'études génétiques approfondies[12] car son plan d'organisation est très stéréotypé : le système nerveux du morphehermaphrodite possède exactement 302neurones, toujours à la même place, établissant les mêmesliaisons synaptiques pour chaque ver[13]. Au début des années 1970, du fait de sa simplicité et de sa facilité d’élevage,Sydney Brenner le choisit commeorganisme modèle pour ses travaux sur le processus de régulation génétique du développement qui lui valurent un prix Nobel en2002[14]. Pour ses travaux, Brenner et son équipe ont découpé les vers en milliers de sections ultra fines et photographié chacune d'entre elles aumicroscope électronique afin de visualiser les fibres assorties à chaque section et ainsi planifier chaque neurone et chaque synapse dans le corps du ver[15]. Actuellement, un tel niveau de détail n'est disponible pour aucun autre organisme, et les informations récoltées ont rendu possibles de nombreuses études.
Le cerveau de l'ensemble des chordés présente fondamentalement la même structure[17]. Il est constitué d'untissu mou d'une texturegélatineuse[18]. De manière générale, le tissu cérébral vivant est rosâtre à l'extérieur et blanchâtre à l'intérieur. Le cerveau des chordés est enveloppé d'unsystème membranaire detissu conjonctif, lesméninges, qui sépare lecrâne du cerveau[19]. De l'extérieur vers l'intérieur, les méninges sont composées de trois membranes : ladure-mère, l'arachnoïde et lapie-mère. L'arachnoïde et la pie-mère sont étroitement connectées entre elles et peuvent ainsi être considérées comme une seule et même couche, la pie-arachnoïde. Compris entre l'arachnoïde et la pie mère, l'espace sous-arachnoïdien contient leliquide cérébro-spinal qui circule dans l'étroit espace entre les cellules et à travers les cavités appeléessystème ventriculaire. Ce liquide sert notamment de protection mécanique au cerveau en absorbant et amortissant les chocs et à transporterhormones etnutriments vers le tissu cérébral. Lesvaisseaux sanguins viennent irriguer lesystème nerveux central à travers l'espace périvasculaire au-dessus de la pie-mère. Au niveau des vaisseaux sanguins, les cellules sont étroitement jointes, formant labarrière hémato-encéphalique qui protège le cerveau en agissant comme unfiltre vis-à-vis destoxines susceptibles d'être contenues dans lesang.
Les cerveaux des chordés possèdent la même forme sous-jacente, caractérisée par la manière dont le cerveau se développe[20]. Pendant leneurodéveloppement, le système nerveux commence à se mettre en place par l'apparition d'une fine bande de tissu neural parcourant tout ledos de l'embryon. La bande s'épaissit ensuite et se plisse pour former letube neural. C'est à l'extrémité avant du tube que se développe le cerveau, l'émergence de celui-ci chez les premiers chordés aquatiques étant en relation avec le développement de leur sens de l'olfaction lié à leurs capacités exploratrices à la recherche de proies. Au départ, le cerveau se manifeste comme trois gonflements qui représentent en fait leprosencéphale, lemésencéphale et lerhombencéphale. Chez de nombreux groupes de chordés, ces trois régions gardent la même taille chez l'adulte, mais le prosencéphale des mammifères devient plus important que les autres régions, le mésencéphale étant lui plus petit[21].
La corrélation entre la taille du cerveau et la taille de l'organisme ou d'autres facteurs a été étudiée sur un grand nombre d'espèces de chordés. La taille du cerveau augmente avec la taille de l'organisme, mais pas de manière proportionnelle. Chez lesmammifères, la relation suit uneloi de puissance, avec unexposant d'environ 0,75[22]. Cette formule s'applique pour le cerveau moyen des mammifères mais chaque famille s'en démarque plus ou moins, reflétant la complexité de leur comportement. Ainsi, lesprimates ont un cerveau cinq à dix fois plus gros que ce qu’indique la formule. De manière générale, lesprédateurs tendent à avoir des cerveaux plus gros. Quand le cerveau des mammifères augmente en taille, toutes les parties n'augmentent pas dans la même proportion. Plus le cerveau d'une espèce est gros, plus la fraction occupée par lecortex est importante[23], 80 % de l'activité cérébrale dépendant des signaux visuels chez lesprimates[21].
Enneuroanatomie des chordés, le cerveau est généralement considéré comme constitué de cinq régions principales définies sur la base du développement du système nerveux à partir dutube neural : letélencéphale, lediencéphale, lemésencéphale, lecervelet, et lebulbe rachidien[24]. Chacune de ces régions possède une structure interne complexe. Certaines régions du cerveau, comme lecortex cérébral ou le cervelet, sont formées de couches formant des replis sinueux, lescirconvolutions cérébrales, qui permettent d'augmenter la surface corticale ou cérébelleuse tout en logeant dans laboîte crânienne. Les autres régions du cerveau représentent des groupes de nombreuxnoyaux. Si des distinctions claires peuvent être établies à partir de la structure neurale, la chimie et la connectivité, des milliers de régions distinctes peuvent être identifiées dans le cerveau deschordés.
Encéphale et moelle épinière d'une truite.
Dans plusieurs branches des chordés, l'évolution a amené des changements importants sur l'architecture du cerveau. Les composants du cerveau desrequins sont assemblés de façon simple et directe, mais chez lespoissons téléostéens, groupe majoritaire des poissons modernes, leprosencéphale est devenu éverté. Le cerveau des oiseaux présente également d'importants changements[25]. Un des principaux composants du prosencéphale des oiseaux, la crête ventriculaire dorsale, a longtemps été considéré comme l'équivalent duganglion basal des mammifères, mais est maintenant considéré comme étroitement apparenté aunéocortex[26].
De nombreuses régions du cerveau ont gardé les mêmes propriétés chez tous les chordés[3]. Le rôle de la plupart de ces régions est encore soumis à la discussion mais il est malgré tout possible de dresser une liste des régions principales du cerveau et le rôle qu'on leur attribue selon les connaissances actuelles :
Les principales divisions de l'encéphale représentées sur un cerveau derequin et uncerveau humain.
l'hypothalamus est un petitorgane situé dans lediencéphale. Il est composé de nombreux petits noyaux possédant chacun ses propres connexions et uneneurochimie particulière. L'hypothalamus régule et contrôle de nombreuses fonctions biologiques essentielles telles que l'éveil et lesommeil, lafaim et lasoif, ou la libération d'hormones[28] ;
lecervelet joue un rôle majeur dans la coordination des mouvements en modulant et optimisant les informations provenant d'autres régions cérébrales afin de les rendre plus précises. Cette précision n'est pas acquise à la naissance et s'apprend avec l'expérience[30] ;
letectum, partie supérieure dumésencéphale, permet de diriger les actions dans l'espace et de conduire le mouvement. Chez les mammifères, l'aire du tectum la plus étudiée est lecolliculus supérieur qui s'occupe de diriger le mouvement desyeux. Le tectum reçoit de nombreuses informations visuelles, mais aussi les informations d'autres sens qui peuvent être utiles pour diriger les actions comme l'ouïe. Chez certains poissons, comme lalamproie, le tectum occupe la plus large partie du cerveau[31] ;
l'hippocampe, au sens strict, n'est présent que chez les mammifères. Néanmoins, cette région dérive du pallium médial commun à tous les chordés. Sa fonction est encore mal connue mais cette partie du cerveau intervient dans la mémoire spatiale et la navigation[33] ;
lesganglions de la base sont un groupe de structures interconnectées situées dans le prosencéphale. La fonction principale de ces ganglions semble être lasélection de l'action. Ils envoient des signaux inhibiteurs à toutes les parties du cerveau qui peuvent générer des actions et, dans les bonnes circonstances, peuvent lever l'inhibition afin de débloquer le processus et permettre l'exécution de l'action. Lesrécompenses et lespunitions exercent, au niveau des ganglions de la base, des effets neurologiques importants sur ce dernier[34] ;
lebulbe olfactif est une structure particulière qui traite les signaux olfactifs et envoie l'information vers la zone olfactive du pallium. Chez beaucoup de chordés, le bulbe olfactif est très développé mais il est plutôt réduit chez lesPrimates[35].
Lecortex cérébral est la région du cerveau qui distingue au mieux le cerveau desmammifères de celui des autresvertébrés, celui desprimates de celui des autres mammifères, et celui deshumains de celui des autres primates. Lerhombencéphale et lemésencéphale des mammifères est généralement similaire à celui des autres vertébrés, mais des différences très importantes se manifestent au niveau duprosencéphale qui n'est pas seulement beaucoup plus gros mais présente également des modifications dans sa structure[36]. Chez les autres chordés, la surface dutélencéphale est recouverte d'une simple couche, lepallium[37]. Chez les mammifères, le pallium a évolué en une couche à six feuillets appeléenéocortex. Chez les primates, le néocortex s'est grandement élargi, notamment au niveau de la région deslobes frontaux. L'hippocampe des mammifères a également une structure bien particulière.
L'histoire évolutive de ces particularités mammaliennes, notamment le néocortex, est difficile à retracer[37]. Lessynapsides, ancêtres des mammifères, se sont séparés dessauropsides, ancêtres desreptiles actuels et desoiseaux, il y a environ 350 millions d'années. Ensuite, il y a 120 millions d'années, les mammifères se sont ramifiés enmonotrèmes,marsupiaux etplacentaires, division qui a abouti aux représentants actuels. Le cerveau des monotrèmes et des marsupiaux se distingue de celui des placentaires (groupe majoritaire des mammifères actuels) à différents niveaux, mais la structure de leur cortex cérébral et de leur hippocampe est la même. Ces structures ont donc probablement évolué entre -350 et -120 millions d'années, une période qui ne peut être étudiée qu'à travers lesfossiles mais ceux-ci ne préservent pas les tissus mous comme le cerveau.
Le cerveau des primates possède la même structure que celui des autres mammifères, mais il est considérablement plus large proportionnellement à la taille de l'organisme[23]. Cet élargissement provient essentiellement de l'expansion massive ducortex, notamment au niveau des régions servant à lavision et à laprévoyance[38]. Le processus de perception visuelle chez les Primates est très complexe, faisant intervenir au moins trente zones distinctes et un important réseau d'interconnexions, et occupe plus de la moitié dunéocortex[39]. L'élargissement du cerveau provient également de l'élargissement ducortex préfrontal dont les fonctions sont difficilement résumables mais portent sur laplanification, lamémoire de travail, lamotivation, l'attention, et lesfonctions exécutives.
Chez les humains, l'élargissement des lobes frontaux est encore plus extrême, et d'autres parties du cortex sont également devenues plus larges et complexes.
Letissu cérébral est composé de deux types decellules, lesneurones et lescellules gliales[40]. Les neurones jouent un rôle prépondérant dans le traitement de l'information nerveuse tandis que les cellules gliales, ou cellules de soutien, assurent diverses fonctions annexes dont lemétabolisme cérébral. Bien que ces deux types de cellules soient en même quantité dans le cerveau, les cellules gliales sont quatre fois plus nombreuses que les neurones dans lecortex cérébral[41].
Le point de jonction entre l'axone d'un neurone et un autre neurone, ou une cellule non-neuronale, est lasynapse où le signal est transmis[43]. Un axone peut avoir jusqu'à plusieurs milliers de terminaisons synaptiques. Lorsque le potentiel d'action, après avoir parcouru l'axone, parvient à la synapse, cela provoque la libération d'un agent chimique appeléneurotransmetteur. Une fois libéré, le neurotransmetteur se lie auxrécepteurs membranaires de la cellule cible. Certains récepteurs neuronaux sont excitateurs, c'est-à-dire qu'ils augmentent la fréquence de potentiel d'action au sein de la cellule cible ; d'autres récepteurs sont inhibiteurs et diminuent la fréquence de potentiel d'action ; d'autres ont des effets modulatoires complexes.
Les axones occupent la majeure partie de l'espace cérébral[44]. Les axones sont souvent regroupés en larges groupes pour former des faisceaux de fibres nerveuses. De nombreux axones sont enveloppés d'une gaine demyéline, une substance qui permet d'augmenter fortement la vitesse de propagation du potentiel d'action. La myéline est de couleurblanche, de telle sorte que les régions du cerveau essentiellement occupées par ces fibres nerveuses apparaissent comme de lasubstance blanche tandis que les zones densément peuplées par les corps cellulaires des neurones apparaissent comme de lasubstance grise. Lalongueur totale des axones myélinisés dans le cerveau adulte d'un humain dépasse en moyenne les 100 000kilomètres[45].
Principales subdivisions du cerveau embryonnaire deschordés.
Le développement du cerveau suit une succession d'étapes[47]. Beaucoup de neurones naissent dans des zones spécifiques contenant descellules souches et migrent ensuite à travers le tissu pour atteindre leur destination ultime[48]. Ainsi, dans lecortex, la première étape du développement est la mise en place d'une armature par un type decellules gliales, lescellules radiales, qui établissent des fibres verticales à travers le cortex. Les nouveaux neurones corticaux sont créés à la base du cortex et « grimpent » ensuite le long des fibres radiales jusqu'à atteindre les couches qu'ils sont destinés à occuper.
Chez les chordés, les premières étapes du développement sont communes à toutes les espèces[47]. Tandis que l'embryon passe d'une forme ronde à une structure de type vermiforme, une étroite bande de l'ectoderme se décolle de la ligne médiane dorsale pour devenir laplaque neurale, précurseur dusystème nerveux. La plaque neurale se creuse, s'invagine de manière à former lagouttière neurale puis, lesplis neuraux qui bordent la gouttière fusionnent pour fermer la gouttière qui devient letube neural. Ce tube se subdivise ensuite en une partie antérieure renflée, la vésicule céphalique primitive, qui se segmente en troisvésicules qui deviendront leprosencéphale, lemésencéphale, et lerhombencéphale[47]. Le prosencéphale se divise ensuite en deux autres vésicules, letélencéphale et lediencéphale tandis que le rhombencéphale se divise enmétencéphale etmyélencéphale. Chacune de ces vésicules contient des zones prolifératives dans lesquellesneurones etcellules gliales sont formés. Ces deux types de cellules migrent ensuite, parfois sur de longues distances, vers leurs positions finales.
Une fois qu'ils sont en place, les neurones commencent à étendre leursdendrites et leuraxone autour d'eux[49]. L'axone doit généralement s'étendre sur une longue distance à partir du corps cellulaire du neurone et doit se connecter sur des cibles bien spécifiques, ce qui lui nécessite de croître d'une manière plus complexe. À l'extrémité de l'axone en développement se trouve une région parsemée derécepteurschimiques, le cône de croissance. Ces récepteurs recherchent des signaux moléculaires dans l'environnement alentour qui guident la croissance de l'axone en attirant ou en repoussant le cône de croissance et dirigent ainsi l'étirement de l'axone dans une direction donnée. Le cône de croissance navigue ainsi à travers le cerveau jusqu'à ce qu'il atteigne sa région de destination, où d'autres signaux chimiques engendrent la formation desynapses. Des milliers degènes interviennent pour générer ces signaux de guidage mais le réseau synaptique qui en émerge n'est déterminé qu'en partie par lesgènes. Dans de nombreuses parties du cerveau, les axones connaissent d'abord une surcroissance proliférative qui est ensuite régulée par des mécanismes dépendants de l'activité neuronale[50]. Ce processus sophistiqué de sélection et d'ajustement graduel aboutit finalement à la forme adulte du réseau neuronal.
Chez les mammifères les neurones sont produits avant lanaissance (principalement entre la6e et la18e semainegestationnelle chez l'humain). Le cerveau dunouveau-né contient donc substantiellement plus de neurones que celui de l'adulte car au cours du développement puis encore pendant le vieillissement, un grand nombre de ces cellules vont être détruites. La disparition des cellules nerveuses correspond à un phénomène nécessaire de sélection/stabilisation dans lesréseaux de neurones au cours de la mise en place de circuits cérébraux.
Cependant quelques zones continuent de générer de nouveaux neurones tout au long de la vie, telles que lebulbe olfactif ou legyrus dentatus de l'hippocampe. En dehors de ces exceptions, le nombre de neurones présents à la naissance est définitif, contrairement aux cellules gliales qui sont renouvelées tout au long de la vie, à la manière de la plupart des cellules de l'organisme. Bien que le nombre de neurones évolue peu après la naissance, les connexions axonales continuent de se développer et de s'organiser pendant encore un long moment. Chez l'humain ce processus n'est pas terminé avant l'adolescence et il continue de se poursuivre avec l'acquisition de nouveauxapprentissages.
De nombreuses questions restent en suspens concernant ce qui relève de l'inné et de l'acquis à propos de l'esprit, de l'intelligence et de lapersonnalité[51]. Bien que de nombreux points restent à éclaircir, lesneurosciences ont montré que deux facteurs sont essentiels. D'un côté, les gènes déterminent la forme générale du cerveau, et la manière dont le cerveau répond à l'expérience. D'un autre côté, l'expérience est nécessaire pour affiner la matrice de connexions synaptiques. À bien des égards, la qualité et la quantité d'expériences joue un rôle[52]. L’enrichissement environnemental montre que le cerveau d'un animal placé dans un environnement plus riche et stimulant a un nombre plus important de synapses que celui d'un animal dans un milieu plus pauvre[53].
La fonction principale du cerveau est de contrôler les actions de l'organisme à partir desinformations sensorielles qui lui parviennent[54]. Les signaux sensoriels peuvent stimuler une réponse immédiate, moduler un schéma d'activité en cours, ou être emmagasinés pour un besoin futur. Ainsi, par le rôle central qu'il exerce dans la captation desstimuli externes, le cerveau occupe le rôle central dans la création de réponses à l'environnement. Le cerveau a aussi un rôle dans larégulation hormonale.
Le cerveau des chordés reçoit des signaux par les nerfs afférents de la part des différentes régions de l'organisme. Le cerveau interprète ces signaux et en tire une réponse fondée sur l'intégration dessignaux électriques reçus, puis la transmet. Ce jeu de réception, d'intégration, et d'émission de signaux représente la fonction majeure du cerveau, qui explique à la fois lessensations, lemouvement, lamémoire et, on le suppose, laconscience.
Pour mener à bien sa complexe tâche, le cerveau est organisé en sous-systèmes fonctionnels, c'est-à-dire que certaines régions cérébrales traitent plus spécifiquement certains aspects de l'information. Cette division fonctionnelle n'est pas stricte et ces sous-systèmes peuvent être catégorisés de plusieurs façons : anatomiquement, chimiquement ou fonctionnellement. Une de ces catégorisations repose sur lesneurotransmetteurs chimiques utilisés par les neurones pour communiquer. Une autre se base sur la manière dont chaque zone du cerveau contribue au traitement de l'information : les zones sensorielles amènent l'information au cerveau ; les signaux moteurs envoient l'information du cerveau jusqu'auxmuscles et auxglandes ; les systèmes excitateurs modulent l'activité du cerveau en fonction du moment de la journée et de divers facteurs.
Le cerveau utilise principalement leglucose commesubstrat énergétique et uneperte de conscience peut survenir s'il en manque. La consommation énergétique du cerveau n'est pas particulièrement variable, mais les régions actives du cortex consomment plus d'énergie que les inactives.
Selon leprincipe de Dale, chaque neurone du cerveau libère constamment le mêmeneurotransmetteur chimique, ou la même combinaison de neurotransmetteurs, pour toutes les connexions synaptiques qu'il entretient avec d'autres neurones[55]. Un neurone peut donc être caractérisé en fonction des neurotransmetteurs qu'il libère bien qu'il existe quelques exceptions à ce principe. Les deux neurotransmetteurs les plus fréquents sont leglutamate, qui correspond généralement à un signal excitatoire, et l'acide γ-aminobutyrique (GABA), généralement inhibitoire. Les neurones utilisant ces deux neurotransmetteurs se retrouvent dans presque toutes les régions du cerveau et forment un large pourcentage des synapses du cerveau[56].
Les autres neurotransmetteurs, comme lasérotonine ou lanoradrénaline, proviennent de neurones localisés dans des zones particulières du cerveau. D'autres neurotransmetteurs, comme l'acétylcholine ou ladopamine, proviennent de plusieurs endroits du cerveau, mais ne sont pas distribués de façon aussi ubiquitaire que le glutamate et le GABA. La grande majorité desdroguespsychotropes agissent en altérant les systèmes de neurotransmetteurs qui ne sont pas directement impliqués dans les transmissions glutamatergiques ou GABAergiques[57].
Une fonction importante du cerveau est de traiter l'information reçue par lesrécepteurs sensoriels[58]. Contrairement aux idées reçues, lessens que peut capter le cerveau ne sont pas limitées à cinq. Outre lavue, l'ouïe, letoucher, l'odorat, et legoût, le cerveau peut recevoir d'autres informations sensorielles comme latempérature, l'équilibre, la position des membres, ou lacomposition chimique dusang. Toutes ces variables sont détectées par des récepteurs spécialisés qui transmettent les signaux vers le cerveau. Certaines espèces peuvent détecter des sens supplémentaires, comme la visioninfrarouge desserpents, ou utiliser les sens « standards » de manière non conventionnelle, comme l'écholocation du système auditif deschauves-souris.
Chaque système sensoriel possède ses propres cellules sensorielles réceptrices. Ces cellules sont des neurones mais, contrairement à la majorité des neurones, ceux-ci ne sont pas contrôlés par les signaux synaptiques d'autres neurones. Au lieu de cela, ces cellules sensorielles possèdent desrécepteurs membranaires qui sont stimulées par un facteur physique spécifique comme lalumière, latempérature, ou lapression. Les signaux de ces cellules sensorielles réceptrices parviennent jusqu'à lamoelle épinière ou le cerveau par lesnerfs afférents.
Pour la plupart des sens, il y a un noyau sensitif principal dans letronc cérébral, ou un ensemble de noyaux, qui reçoit et réunit les signaux des cellules sensorielles réceptrices. Dans de nombreux cas, des zones secondaires sous-corticales se chargent d'extraire et de trier l'information. Chaque système sensoriel a également une région duthalamus qui lui est dédié et qui relaie l'information aucortex.
Pour chaque système sensoriel, une zone corticale primaire reçoit directement les signaux en provenance du relai thalamique. Habituellement, un groupe spécifique de zones corticales supérieures analyse également le signal sensoriel. Enfin, des zones multimodales du cortex combinent les signaux en provenance de différents systèmes sensoriels. À ce niveau, les signaux qui atteignent ces régions du cerveau sont considérés comme des signaux intégrés plutôt que comme des signaux strictement sensoriels[59].
Toutes ces étapes ont leurs exceptions. Ainsi, pour le toucher, les signaux sensoriels sont principalement reçus au niveau de la moelle épinière, au niveau de neurones qui projettent ensuite l'information au tronc cérébral[60]. Pour l'odorat, il n'y a pas de relai dans le thalamus, le signal est transmis directement de la zone primaire, lebulbe olfactif, vers le cortex[61].
Les systèmes moteurs sont les zones du cerveau responsables directement ou indirectement des mouvements du corps, en agissant sur lesmuscles. À l'exception des muscles contrôlant lesyeux, tous lesmuscles squelettiques de l'organisme sont directement innervés par desneurones moteurs de lamoelle épinière. Ils sont donc le dernier maillon de la chaîne dusystème psychomoteur[62]. Les neurones moteurs spinaux sont contrôlés à la fois par des circuits neuronaux propres à la moelle épinière, et par des influx efférents du cerveau. Les circuits spinaux intrinsèques hébergent plusieursréactions réflexes, ainsi que certains schémas de mouvements comme les mouvements rythmiques tels que lamarche ou lanage[63]. Les connexions efférentes du cerveau permettent quant à elles, des contrôles plus sophistiqués.
Un certain nombre de zones du cerveau sont connectées directement à la moelle épinière[64]. Au niveau le plus bas se trouvent les zones motrices situées dans lebulbe rachidien et lepont. Au-dessus se situent les zones dumésencéphale, comme lenoyau rouge, qui sont responsables de la coordination des mouvements. À un niveau supérieur se trouve lecortex moteur primaire, une bande de tissu cérébral localisée à la lisière postérieure du lobe frontal. Le cortex moteur primaire transmet ses commandes motrices aux zones motrices sous-corticales, mais également directement à la moelle épinière par le biais dufaisceau pyramidal. Les influx nerveux de ce faisceau cortico-spinal transmettent les mouvements fins volontaires. D'autres zones motrices du cerveau ne sont pas directement reliées à la moelle épinière, mais agissent sur les zones motrices primaires corticales ou sous-corticales. Quelques-unes de ces zones secondaires les plus importantes sont lecortex prémoteur, impliqués dans la coordination des mouvements de différentes parties du corps, lesganglions de la base, dont la fonction principale semble être la sélection de l'action, et lecervelet, qui module et optimise les informations pour rendre les mouvements plus précis.
Un des aspects les plus visibles du comportement animal est le cycle journalier veille-sommeil-rêve. L'éveil et l'attention sont aussi modulés à une échelle de temps plus fine, par un réseau de zones cérébrales[65].
Un composant clé du système d'éveil est lenoyau suprachiasmatique, petite région de l'hypothalamus localisée directement au-dessus du point de croisement desnerfs optiques[66]. Le noyau suprachiasmatique renferme l'horloge biologique centrale de l'organisme. Les neurones de ce noyau montrent un niveau d'activité qui augmente ou diminue sur une période d'environ 24 heures, lerythme circadien : cette activité fluctuante est dirigée par des changements rythmiques exprimés par un groupe de gènes horlogers. Le noyau suprachiasmatique reçoit généralement des signaux en provenance des nerfs optiques qui permettent de calibrer l'horloge biologique à partir des cycles jour-nuit.
Le noyau suprachiasmatique se projette dans un ensemble de zones cérébrales (situées au niveau de l'hypothalamus et dutronc cérébral) qui sont impliqués dans la mise en œuvre des cycles jour-nuit. Un composant important du système est laformation réticulée, un groupe d'amas neuronaux s'étendant dans le tronc cérébral[65]. Les neurones réticulés envoient des signaux vers lethalamus, qui répond en envoyant des signaux à différentes régions ducortex qui régule le niveau d'activité.
Lesommeil implique de profondes modifications dans l'activité cérébrale[67]. Le cerveau ne s'éteint pas pendant le sommeil, l'activité cérébrale se poursuit mais est modifiée. En fait, il existe deux types de sommeil : lesommeil paradoxal (avecrêves) et le sommeil non paradoxal (généralement sans rêves). Ces deux sommeils se répètent selon un schéma légèrement différent à chaque sommeil. Trois grands types de schéma d'activité cérébrale peuvent être distingués : sommeil paradoxal, sommeil léger, et sommeil profond. Pendant le sommeil profond, l'activité du cortex prend la forme de larges ondes synchronisées tandis que ces ondes sont désynchronisées pendant l'état de rêve. Les niveaux denoradrénaline et desérotonine tombent au cours du sommeil profond, et approchent du niveau zéro pendant le sommeil paradoxal, tandis que les niveaux d'acétylcholine présentent un schéma inverse.
Le cycle du sommeil se divise en 5 stades. Au stade 1, le sommeil lent apparaît lorsque l'on s'allonge et ferme les yeux, des rêves courts ou de brèves pensées sont parfois rapportés durant ce stade qui dure de 3 à 12 minutes. La seconde phase du sommeil lent est un sommeil léger, c'est la phase la plus longue occupant près de 50 % du temps de sommeil d'une nuit. Le stade 3 est le passage du sommeil moyennement profond à profond, les muscles ont encore du tonus mais on est très peu réactif aux stimulations extérieures. Au niveau 4, nous sommes au plus profond de notre sommeil, l'activité neuronale est à son plus bas, la température du cerveau est également basse, la respiration, le rythme cardiaque et la pression sanguine sont ralentis. Le stade 5 est le dernier, le sommeil est paradoxal, l'activité électrique du cerveau est très importante, les yeux bougent rapidement, bien que le reste du corps se trouve en état d'atonie musculaire. Un cycle du sommeil dure de 70 à 90 minutes et se reproduit 4 à 6 fois en une nuit[68].
La compréhension de la relation entre le cerveau et l'esprit est un problème aussi bienscientifique quephilosophique[70]. La relation forte entre la matière cérébrale physique et l'esprit est aisément mise en évidence par l'impact que les altérations physiques du cerveau ont sur l'esprit, comme letraumatisme crânien ou l'usage depsychotrope[71].
le dualisme postule que l'esprit existe indépendamment du cerveau ;
le matérialisme postule, quant à lui, que lephénomène mental est identique au phénomène neuronal ;
l'idéalisme postule que seul le phénomène mental existe[73],[74].
Outre ces questions philosophiques, cette hypothèse de relation entre l'esprit et le cerveau soulevait un grand nombre de questions scientifiques, comme la relation entre l'activité mentale et l'activité cérébrale, le mécanisme d'action des drogues sur lacognition, ou encore la corrélation entre neurones etconscience.
Historiquement, un grand nombre de philosophes considéraient inconcevable que la cognition puisse être mise en place par une substance physique comme le tissu cérébral[75]. Des philosophes commePatricia Churchland ont postulé que l'interaction entre la drogue et l'esprit est un indicateur de la relation intime entre le cerveau et l'esprit mais que les deux entités sont distinctes[76].
Depuis l'avènement des neurosciences, et les travaux de nombreuses équipes internationales de recherche, cette question n'est plus d'actualité en sciences[77].
Antonio Damasio, dans son livreL'Erreur de Descartes notamment, montre que le corps et l'esprit fonctionnent de manière indissociable. Il explique par ailleurs que le raisonnement, la mémorisation, l'acquisition de nouveaux apprentissages ne peuvent pas s'effectuer sans intégrer les émotions dans les processus[78].
La plus ancienne méthode d'étude du cerveau est l'anatomie. Au milieu duXXe siècle, les progrès des neurosciences proviennent de l'amélioration des techniques demicroscopie et decoloration[81]. Les neuroanatomistes étudient la structure du cerveau aussi bien à grande échelle qu'à l'échelle microscopique. Parmi d'autres outils, ils emploient une large gamme de colorants qui permettent de révéler la structure neurale, lesréactions chimiques, et la connectivité. Le développement plus récent de techniques d'immunocoloration a permis de colorer les neurones qui exprime spécifiquement un groupe degènes. Également, la neuroanatomie fonctionnelle utilise les techniques d'imagerie médicale pour corréler les variations dans la structure du cerveau avec les changements decognition ou decomportement.
Les neurophysiologistes étudient les propriétés chimiques, pharmacologiques et électriques du cerveau. Leurs principaux outils sont les drogues et les dispositifs d'enregistrement. Des milliers de drogues expérimentalement développées affectent le système nerveux, plusieurs le font de manière très spécifique. L'enregistrement de l'activité cérébrale peut se faire par l'utilisation d'électrodes, soit collées aucrâne comme dans le cas d'électro-encéphalographie, soit implantées à l'intérieur du cerveau pour des enregistrements extracellulaires, qui peuvent détecter lespotentiels d'action générés par des neurones individuels. Comme le cerveau ne contient pas denocicepteurs, il est possible d'utiliser ces techniques sur un animal éveillé sans causer dedouleur. Il est aussi possible d'étudier l'activité cérébrale par unexamen non invasif en utilisant des techniques d'imagerie fonctionnelle comme l'IRM. Ainsi latomographie à émission de positons met en évidence qu'en l'absence de toute focalisation particulière de l'attention, l'activité du cerveau (activité intrinsèque du réseau du mode par défaut, nommée « énergie sombre du cerveau » par analogie à l'énergie sombre du cosmos[82] et qui consiste en des vagues d'ondes électriques lentes) correspond à une dépense de 60 à 80 % de toute l'énergie consommée par le cerveau, soit une énergie 20 fois supérieure à celle consommée par le cerveau lorsqu'il réagit consciemment, la réalisation d'une tâche particulière (activité consciente moins fréquente que l'activité inconsciente) exige une énergie qui n'excède pas 5 % de celle consommée par l'activité de fond[83].
Une autre approche est d'examiner les conséquences de l'endommagement de zones spécifiques du cerveau. Bien que protégé par le crâne et les méninges, et isolé du flux sanguin par labarrière hémato-encéphalique, le cerveau est tout de même vulnérable à de nombreuses maladies et à différents types de dégâts. Chez les humains, les effets des dégâts cérébraux sont une source importante d'informations sur la fonction cérébrale[84]. Comme il n'y a pas la capacité de contrôler expérimentalement la nature de ces dégâts, cette information est néanmoins souvent difficile à interpréter. Chez les animaux, lesrats étant les plus fréquents sujets d'étude, il est possible d'utiliser des électrodes ou d'injecter localement des produits chimiques pour produire des types de dégâts bien précis et observer ensuite leurs conséquences sur le comportement.
Lesneurosciences computationnelles regroupent deux approches : l'utilisation d'ordinateurs pour comprendre le cerveau et l'étude de la façon dont le cerveau réalise lacomputation[85]. D'un côté, il est possible decoder unprogramme informatique pour permettre desimuler le fonctionnement d'un groupe de neurones en utilisant des systèmes d'équations décrivant l'activité électrochimique ; ces simulations sont appelées « réseaux de neurones biologiquement réalistes ». D'un autre côté, il est possible d'étudier lesalgorithmes de computation neurale par lasimulation ou l'analyse mathématique d'« unités » simplifiées ayant plusieurs des caractéristiques des neurones mais en faisant abstraction de la plupart de leur complexité biologique. Les fonctions computationnelles du cerveau sont étudiés à la fois par les neuroscientifiques et les informaticiens.
Les dernières années ont vu les premières applications des techniques d'ingénierie génétique pour l'étude du cerveau[86]. Les sujets d'études les plus fréquents sont les souris, car c'est sur cette espèce que les outils techniques à disposition sont le plus au point. Il est désormais possible d'inactiver ou de muter une grande variété de gènes, et ensuite examiner les effets sur la fonction cérébrale. Des approches plus sophistiquées sont également utilisées, comme larecombinaison Cre-Lox qui permet d'activer ou d'inactiver les gènes dans des zones spécifiques du cerveau à des moments spécifiques.
Des équipes américaines, bénéficiant d'un financement fédéral de 28 millions d'euros, utilisent desscanners dernier cri pour créer une banque de « connectomes ». Ces cartes des circuits cérébraux promettent de révéler comment les organes réagissent au vieillissement, à l'apprentissage et à d'autres événements. Les données duHuman Connectome Project laisseraient présager des avancées sur les traitements de l'autisme et de laschizophrénie.
La question se pose actuellement de savoir si une Intelligence artificielle est réellement capable de fonctionner plus vite que les neurones et les synapses du cerveau humain[87].
« Over half of the neocortex in non-human primates is occupied by visual areas. At least 25 visual areas beyond the primary visual cortex (V1) have been identified with a combination of microelectrode mapping, tracer injections, histological stains, and functional studies »