Emblème figurant sur le premier bâtiment de la CIA àWashington, D.C..
La CIA, fondée dans le cadre duNational Security Act entré en vigueur le[3],[4], a son quartier général depuis1961 sur le site deLangley, dans la ville deMcLean enVirginie, auxÉtats-Unis, à environ 40 km deWashington. Auparavant elle occupait des bâtiments délabrés connus sous le nom deFoggy Bottom, situés au 2430 E Street à Washington. Elle a le droit de garder secrètes la plupart de ses caractéristiques : nombre d'employés, budget[1],[note 2], etc.
D'après un document fourni parEdward Snowden, le budget alloué à la CIA pour l'année 2012 s'élève à 15,3 milliards de dollars[2]. Son budget en 2010 avait été évalué à 10 milliards dedollars américains, sur un programme de renseignement national s'élevant à 53 milliards[5]. En 2009, l'ensemble des seize agences - aujourd'hui dix-sept - de l'Intelligence Community avait un budget annuel de 75 milliards de dollars et employait quelque 200 000 personnes dans le monde, y compris des entrepreneurs privés[6].
La CIA s'organise en quatre directions principales[7] :
la direction de l'Analyse (Directorate of Analysis, ex-Directorate of Intelligence), qui constitue la branche analyse de la CIA et qui est responsable de l’exploitation et de la diffusion du renseignement ;
ladirection des Opérations, qui est responsable de la collecte du renseignement. Cette direction est également responsable du recrutement, de la formation et du suivi des agents de renseignements en poste à l’étranger. SaSpecial Activities Division est responsable de la conduite des opérations clandestines ;
la direction du soutien qui est responsable de tout le soutien de la CIA (communications, sécurité, logistique, services médicaux et financiers).
À l'étranger, les antennes de la direction des opérations sont habituellement basées dans les missions diplomatiques américaines. On distingue les postes (stations), typiquement une par pays et basée dans l'ambassade américaine située dans la capitale du pays hôte, et les bases, antennes plus petites situées dans d'autres grandes villes. Lechef de poste de la CIA a autorité sur les éventuelles bases situées dans le même pays.
Parallèlement aux officiers opérant sous couverture diplomatique, la CIA utilise également des officiers utilisant d'autres couvertures (par exemple celles d'hommes d'affaires) ditesnonofficial cover (NOC). Bien que présenté comme le type d'agent idéal à la situation de l'après-guerre-froide dans la presse[8],[9], l'expérience de la CIA avec les NOC a été mitigée, car ils ne sont pas forcément plus efficaces pour approcher ses cibles, sont très coûteux, plus exposés, ce qui n'incite pas à les mêler à des opérations risquées[10].
En 2004, la CIA avait environ 1 100 officiers traitants en service dans le monde, dont environ 160 NOC et 100 DCO (diversified cover officers, contractuels travaillant outre-mer)[11].
La CIA n'est pas autorisée à espionner des Américains. Elle effectue des opérations sur le territoire des États-Unis depuis au minimum lesannées 1960. Parmi ces opérations : le recrutement clandestin de citoyens étrangers se trouvant en territoire américain pour qu'ils fournissent des renseignements sur leur pays d'origine ou des pays tiers. Par exemple, un cas fut rendu public vers 1983-1984 concernant un Afghan recruté sur le territoire américain. Revenu enAfghanistan, il a été retourné par les services secrets afghans et soviétiques. L'opération a abouti à l'expulsion de sonofficier traitant, Richard Vandiver. Ces activités tendent à être coordonnées avec le FBI. Dans les années 1980, le FBI et la CIA ont ainsi collaboré dans le programmeCourtship, concernant les opérations de recrutement et de traitement de Soviétiques en territoire américain.Aldrich Ames a en particulier traité deux informateurs soviétiques de la CIA à New York,Sergueï Fedorenko etArkadi Chevtchenko, puis tenté de recruter des Soviétiques aux États-Unis[12].
Un autre rôle de la CIA aux États-Unis consiste à interroger (« débriefer ») des citoyens américains lui fournissant volontairement des informations, typiquement des personnes revenant d'un voyage dans un pays étranger[13].
En 2001, ces activités étaient regroupées dans laNational Resources (NR) Division qui comptait environ 500 officiers dans 36 grandes villes[14]. Des stations de la CIA ont été signalées entre autres à New York, Washington, Seattle, Dallas[15], Houston[16], Pittsburgh[17] et Chicago. Leurs couvertures sont soit commerciales, soit, à New York, sous couvert de l'ONU, diplomatiques.
Le personnel de la CIA était prévu à 22 000 employés en 2012, en augmentation depuis le où il était estimé à 17 000.
En2003, la plus importante promotion de nouveaux agents de la CIA depuis 50 ans est arrivée. Elle est composée à 70 % de civils n'ayant jamais travaillé pour le gouvernement et d'un tiers de femmes, 12 % des recrutés sont issus de minorités ethniques et presque tous pratiquent avec aisance une langue étrangère.
La CIA est chargée de deux rôles : d'une part fournir et analyser desinformations sur les gouvernements, les entreprises et les individus detous les pays du monde pour le compte du gouvernement américain, d'autre part conduire des opérations clandestines à l'étranger. Ces dernières, bien que souvent citées, ne représenteraient qu'environ 3 % des dépenses de l'agence[21].
Son efficacité dans l'accomplissement de ces deux fonctions est critiquée.
En ce qui concerne la fonction informative, on peut relever que la CIA a été incapable de prévenir le président de nombreux évènements tels que« la première bombe atomique soviétique (1949), l'invasion de la Corée du Sud (1950), les soulèvements antisoviétiques en Allemagne de l'Est (1953) et en Hongrie (1956), le déploiement de missiles soviétiques à Cuba (1962), la guerre israélo-arabe de 1967 et l'invasion du Koweït par Saddam Hussein en 1990. » Elle a surestimé les capacités militaires soviétiques dans les années 1950 puis les a sous-estimées dans les années 1970. Le bilan des opérations secrètes est également très critiquable. Le« service le moins secret » était tenu en piètre estime par plusieurs présidents dontRichard Nixon qui disait de ses analystes qu'ils étaient« des clowns lisant des journaux »[22]. La CIA n'a pas pu non plus avoir des informations précises les jours précédant lesattentats du contre leWorld Trade Center, lePentagone etShanksville.
Concernant la partie des actions clandestines, si elle a bénéficié d'une réussite favorisée par des conditions spécifique au cours des années 1950, au Guatemala avec l'opérationPBSuccess, puis en Iran pour rétablir le Shah d'Iran pour protéger les investissements des compagnies pétrolières, elle a en revanche montré un grave niveau d'incompétence à partir des années 1960 et notamment lors de l'opération dedébarquement de la baie des Cochons, planifiée sousDwight Eisenhower et exécutée sur le mandat deJohn F Kennedy, en avril 1961, qui visait la neutralisation du régime de Fidel Castro sur l'île de Cuba. L'opération qui fut un désastre militaire, politique et diplomatique fut qualifiée de "perfect failure" ou échec parfait. Elle marque l'échec de la mission première de la CIA à savoir la collecte et l'analyse des renseignements pour laquelle elle avair été instituée avant de dériver vers les actions clandestines[23].
Actuellement la CIA est sérieusement réglementée et surveillée par les pouvoirs exécutifs et législatifs américains, ce qui n'a pas toujours été le cas par le passé. Elle conclut en 1954 avec le ministère de la Justice un accord afin d’empêcher toute poursuite à l'encontre des agents qui auraient commis des crimes et pourraient faire des révélations confidentielles lors d'une éventuelle audience[24].
Depuis la création de la CIA jusqu'au milieu des années 1970, aucun contrôle parlementaire n'a été établi sur « l'agence » (ni sur les autres services de renseignements américains)[25]. En revanche en1975, dans le contexte de la défaite de laguerre du Vietnam, deux commissions d'enquête parlementaires sont instaurées par le Congrès, ditescommissions Church etCommision Pike avec le droit d'enquêter sur les activités passées des services de renseignement. En parallèle, fut instaurée laCommmission Rockfeller par le présidentGérald Ford pour éviter les dégâts collatéraux des révélations grandissantss sur les agissements illégaux des services secrets dans l'opinion publique américaine, passablement échaudée par les révélations duscandale du Watergate, desPanama Papers. Ces travaux vont révélés les agissements illégaux de la CIA sur le sol des Etats-Unis comme le fichage des opposants à la guerre du Vietnam, l'interception et espionnage des communications (projet Shmarock).
Depuis 1975, leCongrès maintient deux commissions chargées de superviser les activités des services de renseignement américains, l'une, le SSCI (Senate Select Committee on Intelligence)[26] dépendant duSénat, l'autre, le HPSCI (House Permanent Select Committee on Intelligence), constituée par des membres de lachambre des représentants. Depuis cette époque, l'exécutif américain a établi un certain nombre de lois restreignant notamment les possibilités de mener des opérations clandestines, notamment par desExecutive Orders émis par les présidentsGerald Ford (Executive Order 11 905),Jimmy Carter (E.O. 12 036) etRonald Reagan (E.O. 12 333). La CIA n'a actuellement pas le droit de mener des actions sur le territoire des États-Unis, de mener des opérations clandestines sans en informer préalablement lescommissions parlementaires, et, sauf ordre spécial duprésident des États-Unis, de procéder ou de contribuer à un assassinat.
LeMemorial Wall de la CIA honorant la mémoire des officiers de la CIA morts durant leur service, une étoile représente une personne. En 1997, il y avait 70 étoiles, 79 en 2002, 83 en 2004, 102 au 1er juin 2010, et 137 en mai 2021.
OpérationPBJointly ou opérationGold : un tunnel creusé à partir deBerlin-Ouest pour mettre sur écoute des câbles souterrains de communications militaires soviétiques sous Berlin-Est[29] ;
Projet Aquatone : programme de l'avionLockheed U-2 ;
Projet Coldfeet : fouille d'une base arctique soviétique abandonnée en 1962[30] ;
Projet Corona : premiers satellites espions de la sérieCorona ;
OpérationRubicon : 120 gouvernements à travers le monde s'en sont remis à l'entreprise suisseCrypto AG pour assurer la confidentialité des communications de leurs espions, militaires et diplomates. Propriété de la CIA et desrenseignements ouest-allemands, l'entreprise a permis à ces deux services de déchiffrer les messages codés entre les années 1960 et 2010. L'Union soviétique et laChine, méfiantes, n'ont jamais compté parmi les clients de Crypto. La CIA a cependant pu prendre connaissance d'une partie de leurs échanges grâce à des pays tiers munis d'appareils trafiqués. La CIA estime avoir pu lire 80 à 90 % des messages codés iraniens envoyés à la fin des années 1980. Elle a également pu espionner les communications égyptiennes lors desnégociations de Camp David en 1978, les messages argentins pendant laguerre des Malouines en 1982, ou encore collecter des informations décisives lors de l'invasion du Panama en 1989[31].
La CIA a influencé parfois de façon décisive l'histoire politique des États dans lesquels elle est intervenue au nom des intérêts desÉtats-Unis. Elle a créé ou soutenu plusieurs mouvements insurrectionnels, qu'ils soient armés ou non (particulièrement enAmérique latine, dans lemonde arabe ou enAsie).
Parmi les opérations connues :
Manipulation des élections dans l'Italie et l'Allemagne des années 1940 (post-Seconde guerre mondiale) et 1950[32].
En1954, auGuatemala, renversement du présidentJacobo Arbenzvia l'opérationPBSuccess - bien que les rebelles organisés par les États-Unis soient indigents, le pouvoir craint une intervention militaire directe et le président préfère démissionner, ce qui débouche sur la mise en place du dictateurCarlos Castillo Armas.
Le coup d'État du maréchalLon Nol auCambodge le pour renverser le roiNorodom Sihanouk pourrait avoir été appuyé par des agents de la CIA (implication non prouvée).
Souvent allégué à la CIA, le soutien aucoup d'État du 11 septembre 1973 au Chili renversantSalvador Allende est réfuté par la commission parlementaire Church qui conclut à l'absence d'implication directe. En revanche, il existait des plans contre Allende en 1970 qui échouent dans leurs premiers stades.
Soutien à la guérilla desContras auNicaragua et minage des ports du pays[33]. La CIA permit également aux Contras de se livrer autrafic de drogue en direction des États-Unis[34].
Depuis lesannées 1990, elle est soupçonnée de pratiquer l'extraordinary rendition, pratique consistant à enlever une personne et à l'envoyer en secret dans un pays où latorture est pratiquée pour qu'elle y soit interrogée. L'Italie a pour la première fois engagé des poursuites en justice contre ces actions en2005[37], à la suite de l'enlèvement d'unÉgyptien àMilan.
LeCongrès pour la liberté de la culture fut un organe culturel financé secrètement par la CIA basé à Paris. La CIA a exercé dans les années 1950 et 1960 en Europe une influence culturelle occulte par l'intermédiaire de ce Congrès. Elle a financé et soutenu secrètement des revues culturelles commePreuves en France,Monat en Allemagne où écrivaitHeinrich Böll,Encounter auRoyaume-Uni et des personnalités commeHeinrich Böll,Raymond Aron, ou l'écrivain italienIgnazio Silone, et soutenu l'art abstrait et informel.Des personnalités commeAlberto Moravia etPablo Neruda furent visés par des campagnes de calomnie orchestrées par la CIA par l'intermédiaire d'intellectuels commeRené Tavernier.[réf. nécessaire] La CIA a cherché à réduire l'influence dumarxisme parmi les intellectuels et les journalistes européens[38]. Le scandale éclate en 1967 : le financement de la CIA devient public bien que la grande presse soit discrète sur le sujet. La revueMonat est ensuite vendue au journalDie Zeit.
À partir d', conformément à l'Intelligence Reform and Terrorism Prevention Act de 2004, le poste de directeur est remplacé par ceux de directeur de la CIA (Director of the Central Intelligence Agency) et dedirecteur du renseignement national (Director of National Intelligence, DNI, directeur de lacommunauté du renseignement).
David S. Cohen directeur adjoint de la CIA de 2021 à 2024.
Le directeur adjoint (Deputy Director of Central Intelligence, DDCI) est le sous-directeur de la CIA. Le premier, Kingman Douglass, avait été nommé par le directeur. En avril 1953, le Congrès a amendé leNational Security Act pour permettre au président des États-Unis de nommer lui-même le directeur adjoint. L'amendement stipule que le directeur et le directeur adjoint ne peuvent être simultanément des officiers militaires. Avec l'adoption de l'Intelligence Reform and Terrorism Prevention Act en 2004, cette fonction est supprimée et remplacée par celle de directeur adjoint de la CIA.
Le directeur adjoint de la CIA (Deputy Director of the Central Intelligence Agency, DD/CIA) remplace le directeur adjoint de l'agence et a pour mission d'assister le directeur et de le remplacer en cas d'indisponibilité ou par intérim.
La saga cinématographiqueJason Bourne (2002-2016) a pour toile de fond des programmes secrets de la CIA. Elle se base sur les romans deRobert Ludlum.
Dans les romans de la saga Jack Ryan deTom Clancy, la CIA joue un rôle proéminent. D'ailleurs, Jack Ryan lui-même est membre de la CIA jusqu'à la fin du romanLa somme de toutes les peurs.
La série Homeland (8 saisons de 2012 à 2020) avec les acteurs principaux Claire Danes et Mandy Patinkin se veut hyperréaliste dans l’écriture du scénario avec des agents de la CIA qui font face aux défis du monde actuel.
Dans le premier opus de la série de jeux vidéosTom Clancy's Splinter Cell, le personnage principalSam Fisher est chargé d'infiltrer les bureaux de Langley pour y déceler la présence d'une taupe au service des géorgiens.
↑Le chiffre de 28 milliards est parfois cité car révélé en1987 mais il s'agit du budget de toute l'Intelligence Community, dont la part de la CIA à l'époque n'était que d'un milliard.
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Comment sera le monde en 2020 ?, rapport de la CIA présenté par Adler Alexandre, Hel Guedj Johan-Frédérik, Éditions Robert Laffont, 2005.(ISBN978-2-221-10530-6)
(en)Robert M.Gates,From the Shadows : The Ultimate Insider's Story of Five Presidents and How They Won the Cold War, New York, Simon & Schuster,, 604 p.(ISBN0-684-81081-6)
Larry J. Kolb,Overworld : confessions d'un espion malgré lui, Albin Michel, 2005.
Joël Kotek,La Jeune Garde, Éditions du Seuil, 1998.
Frédéric Lert,Les Ailes de la CIA, Histoire & Collection, 1998.(ISBN2-908182-65-3)
Victor Marchetti et John D. Marks,La CIA et le culte du renseignement [« The CIA and the Cult of Intelligence »], Robert Laffont, coll. « Notre époque », 1975
Trevor Paglen, A. C. Thompson,Kidnappés par la CIA : Les charters de la torture, Saint-Simon, 2007
Jean-Marc Pillas,Nos agents à La Havane, Albin Michel, 1995
John Prados,Histoire de la CIA, Perrin, 2019.
Raphaël Ramos,De l'OSS à la CIA : la centralisation du renseignement américain au lendemain de la Seconde Guerre mondiale à travers l'expérience du Central Intelligence Group, Publications de l'université Paul-Valéry Montpellier-III, 2006?(ISBN2-84269-715-4)
Mission impossible (1996), avecTom Cruise,Jean Reno etEmmanuelle Béart. Une scène du film montre la pénétration du bâtiment et le piratage d'un ordinateur de typetour d'ivoire, c'est-à-dire dépourvu de toute connexion informatique vers l'extérieur.