L'appellation de cavalerie n'est généralement pas utilisée pour les forces militaires qui utilisent d'autres montures (chameaux oumules par exemple). Quant au concept d'infanterie montée (qui se déplace à cheval mais combat à pied), il apparaît auXVIIe siècle avec lesdragons, une arme initialement à part mais qui s'intégrera par la suite dans lacavalerie dite de « ligne ».
Dès les premiers temps de son utilisation, la cavalerie offre l'avantage de la mobilité, qui en fait un instrument de guerre redoutable car elle permet de déborder et d'éviter l'adversaire, de surprendre et de vaincre, de battre en retraite et d'échapper à l'ennemi en fonction des besoins du moment. C'est aussi l'arme de la reconnaissance et des raids dans la profondeur. La monture confère au cavalier plusieurs avantages sur son adversaire à pied : vitesse, hauteur, masse et inertie lors du choc. Un autre facteur de supériorité résulte de l'impact psychologique de l'apparition du soldat à cheval sur le fantassin.
Durant la période entre les deux guerres mondiales, de nombreuses unités de cavalerie sont converties en infanterie motorisée ou en unités mécanisées et blindées. Cependant, la cavalerie sert encore pendant laSeconde Guerre mondiale, notamment dans les armées allemande, italienne, polonaise et soviétique, généralement sur les arrières du front. Actuellement, la plupart des unités de cavalerie montées servent dans des rôles de prestige, ou - beaucoup plus rarement - comme infanterie montée sur des terrains difficiles comme les montagnes ou les zones densément boisées. L'utilisation moderne du terme se réfère à des unités spécialisées dotées de chars (« cavalerie blindée ») ou d'aéronefs (« cavalerie de l'air »).
LesScythes, peuples indo-européens d'éleveurs nomades enEurasie centrale dans l'Antiquité, développent la cavalerie montée légère et utilisent des arcs à la fois courts et puissants en raison de leur forme. Auparavant, les chevaux servaient surtout à tirer deschars de combat mais n'étaient pas encore montés de façon régulière. Les traditions scythiques de cavalerie montée seront reprises des siècles plus tard au Moyen Âge par les peuplesturcs puismongols, originaires d'Asie orientale, et permettront àGenghis Khan et ses troupes de conquérir l'Asie centrale à leur tour, ainsi que la Chine et une partie de l'Europe auXIIIe siècle en formant ainsi l'Empire mongol[1],[2].
Dans l'Antiquité,Alexandre le Grand fait usage de sa cavalerie pour manœuvrer rapidement par les flancs et attaquer legénéral ennemi ou l'arrière desphalanges selon latactique dumarteau et de l'enclume. Le cavalier est armé d'une lance tenue au-dessus de l'épaule avec laquelle il harponne l'adversaire, mais qui peut aussi servir d'arme de jet, la vitesse du cheval s'ajoutant à celle du lancé.
La cavalerie a longtemps été un moyen de reconnaissance ou de communication entre les différents corps d'armée plutôt qu'une réelle force de combat. Le coût de l'entretien d'un cheval était tel que bien peu de personnes étaient capables de l'assumer. La cavalerie pose aussi d'importants problèmes logistiques. La présence des animaux implique la construction d'enclos, le transport de fourrage, l'emploi de palefreniers… Mais la force d'un corps de cavalerie face à des fantassins est telle que rapidement les armées s’organisent pour avoir un certain nombre de ces soldats en soutien des troupes plus classiques.
Avec l'apparition progressive desrênes, dumors, et surtout desétriers qui permettent de se dresser sur les jambes et donc d'avoir plus de force lors de l'impact d'une charge, la cavalerie devient un enjeu stratégique pour les armées (voir toutefois laGrande controverse de l'étrier). L'infanterie montée, bien qu'elle se batte à pied, permet aussi de déployer des troupes rapidement sur de longues distances.
Dans les armées féodales, la cavalerie était presque exclusivement composée denobles, seuls capables d'acheter et de financer l'entretien de leurs chevaux. Cette tradition perdura assez longtemps mais finira par se restreindre aucorps des officiers (toujours obligés de financer leur équipement, à l'opposé de la troupe). La cavalerie avait donc acquis un statut de prestige.
Face aux murs de boucliers et piques à une main de l'infanterie, la lance du cavalier s'allonge et se cale sous le bras. L'armure se renforce et la cotte de mailles se recouvrera progressivement de plate. La charge coordonnée de chevaliers devient un outil de percussion visant à briser la ligne de l'adversaire. La cavalerie lourde sera considérée pendant tout le Moyen Âge comme une arme décisive et les batailles tournaient souvent à l'avantage du camp qui en possédait le plus grand nombre. C'était particulièrement vrai pour les batailles en plaine.
Pour contrer la cavalerie, la tactique s'oriente vers la défensive, avec des forts en pierres ou des palissades de bois temporaires. ÀCrécy etAzincourt, les chevaux de la cavalerie française se font massacrer par les archers anglais équipés de leur arc long(long bow) en bois d'if, et les pieux et fossés qu'ils ont placés devant eux.
Les armures lourdes se démocratisent et les boucliers deviennent moins utiles, libérant la deuxième main. La cavalerie lourde des chevaliers devient fréquemment tenue en échec par une version modernisée de la phalange grec : des masses solidaires d'infanterie lourde couvertes d'armures de plates et équipées de longues piques ou de hallebardes. Les troupes mercenaires suisses, des professionnels de la guerre, en font leur spécialité. À ces formations défensives viennent s'adjoindre lesarbalètes, puis les armes à feu qui leur donnent des capacités offensives à distance.
Mais si l’apparition desarmes à feu a semblé mettre un terme à la prééminence du choc (c'est-à-dire de la charge), à partir duXVIIe siècle[5], l’arme blanche redevient progressivement l’arme de choix. et le format des escadrons évolue en conséquence. Ainsi, aux lourdsescadrons « carrés » de plusieurs centaines d’hommes sur une dizaine de rangs et plus de l’époque desreîtres et de lacaracole, vont succéder desescadrons sur quatre, puis trois, puis à partir de laguerre de Sept Ans, sur deux rangs.
À cette époque lalance ne joue plus depuis longtemps qu’un rôle marginal (même siNapoléon, impressionné par les lanciers polonais, intégraun de leurs régiments à la Garde impériale et recréa des unités de lanciers). Enfin, en plus du sabre, tous les cavaliers sont équipés d’un ou deux pistolets et d’une carabine ou d’un mousqueton (ou d’un fusil – plus long et plus lourd - dans le cas des dragons qui étaient censés combattre aussi bien à pied qu’à cheval).
Au fil de l'histoire, différentes composantes de cavalerie sont apparues :
Cavalerie légère : (surnommée « les yeux et les oreilles de l'armée »)
Cavalerie de ligne : dans certains pays (comme notamment la France sous Napoléon), on distingue une catégorie supplémentaire, intermédiaire entre la cavalerie légère et la cavalerie lourde, orientée vers la bataille proprement dite.
dragons pouvant à l'origine combattre à cheval (cavalerie) ou à pied (infanterie). Napoléon leur attribua définitivement un rôle de cavaliers qu'ils conserveront par la suite.
lanciers (appelés égalementUhlans ou chevau-légers lanciers) : cavaliers armés d'une lance.
cuirassiers, cavalerie lourde dotée d'une cuirasse, d'uncasque et d'unsabre droit, combattant exclusivement à cheval.
grenadiers à cheval, remplissent la même fonction que les cuirassiers et lescarabiniers, mais ne portent pas de cuirasse. Ils sont équipés d'unmousquet.
L'infanterie est plus lente mais elle dispose désormais des moyens de contrer n'importe quelle charge de cavalerie. Les dernières charges de cavalerie à cheval se soldent par des hécatombes qui forcent les armées à se concentrer sur l'infanterie et l'artillerie.
Le cheval prend alors un rôle nouveau dans l'armée et sert presque exclusivement au transport, avant d'être également remplacé dans ce rôle par le véhicule automobile. Quelques armées conserveront cependant des troupes à cheval jusqu'à laSeconde Guerre mondiale.
En France, les formations héritières de la cavalerie seront regroupées dans l'arme blindée et cavalerie en 1943 (le saint protecteur de la cavalerie française restesaint Georges, de là vient le proverbe : « Par saint Georges, vive la cavalerie ! »).
De nos jours, la cavalerie est utilisée comme symbole de prestige et de nombreuses armées conservent un corps monté pour les défilés et les représentations officielles. Les régiments de l'Arme blindée et cavalerie en sont les héritiers dans les armées modernes.
La défense de Paris a toujours reposé sur un système de complexes fortifiés. Paris n'a jamais eu de grande garnison de cavalerie. Sa garnison fut principalement armée par des troupes à pied, par les servants des pièces d'artillerie et par lessapeurs et unités du génie spécialistes desfortifications[7].
Cependant, la cavalerie demeura bien présente dans la capitale, le cheval étant la monture des hommes de pouvoir et de leur entourage jusqu'au maréchal deMac-Mahon. Omis lors des émeutes populaires où elle fut combattante, la cavalerie àParis fut d'abord un service deCour qui assurait la sécurité, la garde et l'escorte dessouverains dont elle rehaussait le prestige. L'armée montée participait aux manifestations de prestige, aux couronnements et investitures, aux réceptions de chefs d'État, ainsi qu'aux grands évènements sportifs comme les courses. Elle figurait dans les manifestations publiques tels les défilés et les revues[7].
à cette époque, la cavalerie à Paris se confondait avec l'organisation et le service de laMaison du roi. LorsqueLouis XIII créa en 1622 le corps desMousquetaires, seule une partie servait à cheval. Affectés à la garde du roi, ils participaient aux campagnes militaires et quittaient alors Paris. Les chevaux étaient logés et soignés dans les deux hôtels affectés aux mousquetaires, l'hôtel des Mousquetaires gris construit en 1671 dont la façade se situaitrue du Bac, et l'hôtel des Mousquetaires noirsrue de Charenton. Le licenciement des mousquetaires en 1776 parLouis XVI mit fin provisoirement à la présence d'une charge à cheval affectée au souverain. L'École de Mars créée en1794 compta des cavaliers dans ses rangs[7].
Les unités de cavaleries revinrent réellement à Paris avec la création de laGarde consulaire, remplacée par laGarde impériale. La cavalerie de la Garde préposée au service est logée dans l'abbaye de Penthémont, à l'angle desrues de Grenelle et deBellechasse qui pouvait contenir au maximum169 chevaux. Ces locaux furent occupés jusqu'en 1848. Les autres nombreux régiments de la Garde, dont les détachements se succédaient à Paris, y tinrent peu garnison. Ils venaient pour les revues et les réceptions aux troupes après les campagnes. Napoléon avait envisagé en 1812 de faire construire de part et d'autre duChamp de Mars une cité administrative comprenant des quartiers de cavalerie, mais n'eut pas le temps de mener ce projet à son terme[7].
La cavalerie des coalisés envahit Paris en 1814. Lescosaques bivouaquèrent alors sur lesChamps-Élysées.
Durant cette période, la garnison parisienne comprenait laGarde impériale et une division de cavalerie logée à Paris ou à proximité. Plusieurs unités tenaient garnison aux environs et étaient susceptibles de se déplacer pour les services et manifestations programmées. Lesdragons de l'impératrice étaient ainsi àFontainebleau ; lesguides, leschasseurs et lescuirassiers se déplaçaient entreMeaux,Compiègne,Melun etFontainebleau. Seuls l'escadron desCent gardes et les gendarmes d'élite demeuraient en permanence dans Paris, à Penthémont, dans la nouvelle caserne de la Cité à partir de 1867 et pour un seul escadron, à Orsay et auxCélestins. La cavalerie de ligne était cantonnée dans les forts de l'enceinte et àVincennes. Les deux régiments de dragons étaient dans Parisintra muros. L'importance des troupes montées ne cessa de grandir sousNapoléon III. Ledécret du limitait lacavalerie de la Garde à deuxrégiments, lescuirassiers et les guides. Dès 1855, son effectif est accru à une division de cavalerie comportant trois brigades. Elle comprit au total deux régiments de cavalerie lourde composée de cuirassiers, et quatre régiments de cavalerie légère, un de dragon, un de lanciers, un de chasseurs et un de guides. Les guides escortaient l'empereur et son entourage lors des solennités. Lors de l'attentatd'Orsini en 1858, une quinzaine de cavaliers furent blessés[7].
Le cheval de cavalerie doit être un cheval de guerre possédant une grande vitesse, une puissance de choc, une aptitude à la poursuite, à la reconnaissance et aux patrouilles. Contre une batterie ou un carré de fantassins, la cavalerie ne peut l'emporter que par une extrême rapidité dans l'approche, le contact permettant de disloquer les rangs ennemis. Pour ce faire, la cavalerie doit donc exécuter de grandes actions coordonnées[9].
La cavalerie légère,chasseurs ethussards, était montée en chevaux légers et la cavalerie lourde,cuirassiers et dragons, en chevaux puissants. Le travail des cavaliers se focalisait principalement sur les manœuvres et les mouvements d'ensemble[10].
Jusqu'à la Renaissance, ledestrier était caparaçonné, robuste et fort. Le dressage du cheval est une nécessité du commandement individuel et est basé sur la croyance que le cheval est un être pensant[11].
À partir du règne de Louis XIII, les grands seigneurs abandonnent l'élevage pour fréquenter la Cour. Les races françaises de chevaux dégénèrent et se perdent, l'armée recourt aux races étrangères et notamment auxandalous. Pour remédier à cet état et normer leschevaux utilisés par les troupes à cheval,Colbert crée lesétalons royaux le. Ces étalons sont marqués d'un « L » couronné à la cuisse. Les troupes à cheval se hiérarchisent et s'uniformisent sous l'autorité du roi pour devenir un corps homogène, la Cavalerie[11].
Frédéric Chauviré,La Charge de cavalerie des origines à nos jours, de Bayard à Seidlitz, Thèse de doctorat, Université de Nantes, 382 p., 2009, édité en 2013 chez Perrin.
(Gal.) Louis Susane,Histoire de la Cavalerie Française, tome 1, Paris, J. Hetzel etCie, 1874.
(Gal. Baron) Bardin,Dictionnaire de l’Armée de terre, Paris, Coréard, 1843.
André Corvisier,Histoire militaire de la France (4 tomes), Quadrige/PUF.
Jean-Pierre Béneytou,Histoire de la cavalerie française des origines à nos jours, éditions Lavauzelle, Panazol, 2010.
(Colonel Dugué) Mac Carthy,La Cavalerie au temps des chevaux, Éditions Pratiques Automobiles (EPA), 327 p., 1989.(ISBN2851203134 et978-2851203137)