Dès son entrée en littérature, Laurence Ruel[8] choisit le pseudonyme deCamille Laurens.
AprèsIndex, publié en 1991 chez P.O.L, paraissentRomance (1992),Les Travaux d'Hercule (1994) etL'Avenir (1998). Ces quatre romans, bien qu'ils puissent se lire séparément, forment une tétralogie. Leurs chapitres suivent l'ordre alphabétique, depuisAbri, qui ouvreIndex jusqu'àZygote, qui clôtL'Avenir ; et tissent des motifs récurrents autour de la figureborgésienne du labyrinthe[9]. Selon Philippe Savary, l'œuvre de Camille Laurens se distingue alors par sa fantaisie imaginative et « une réflexion constante autour du rapport entre la fiction et la réalité, l'illusion et la vérité[10] ».
Entre le troisième et le quatrième volet, survient le drame personnel qu'elle a vécu en 1994 : la perte d'un enfant. Cette douleur sera à l'origine dePhilippe (1995). Elle reviendra sur ce décès dansCet absent-là.
Alors que Camille Laurens avait commencé son travail littéraire par lafiction, ce choc existentiel et l'écriture inhérente à son traitement littéraire l'ont conduite à un travail d'écriture dans lequel elle renonce, pour une part, à la fiction au sens classique, pour s'approcher de l'autofiction. Après1996, elle entame donc une forme de travail introspectif sur le sujet humain, son rapport à lui-même et ses désirs. C'est ainsi qu'elle publie successivement :Dans ces bras-là,L'Amour, roman,Ni toi ni moi etRomance nerveuse[11].
Parallèlement à son entreprise romanesque, Camille Laurens poursuit un travail littéraire qui se veut avant tout textuel, s’intéressant à « la langue, matière vivante »[12]. C'est ainsi qu'elle publie d'abordQuelques-uns (1999), dont le titre est emprunté àBeckett : « Les mots ont été mes seules amours - quelques-uns »[13] Puis elle rassemble dansLe Grain des mots les textes qu'elle a écrits pendant deux ans dans le journalL'Humanité[14]. Enfin,Tissé par mille (2008) reprend l'ensemble des émissions qu'elle a produites surFrance Culture entre janvier 2005 et juillet 2006[15]. Dans ces trois ouvrages, l'auteure tente de déchiffrer, de manière souvent ludique, la part cachée des mots[16], ce qui se trame sous leurs sens. De sa chronique radiophonique naît aussi un CD,Tissé par mille, dans lequel le compositeur expérimentalPhilippe Mion mêle sa partition électro-acoustique à la voix de Camille Laurens, qui lit ses propres textes[15].
Camille Laurens est l'auteure de plusieursessais. En 2011, dansLes Fiancées du Diable, elle s'intéresse à la représentation des femmes terrifiantes dans l'art[17]. En 2013,Encore et jamais explore le thème de la répétition sous toutes ses formes, que celle-ci soit positive (les séries en peinture, la rime en poésie, les reprises musicales…) ou négative (la répétition névrotique, notamment)[18],[19]. En 2017,La petite danseuse de quatorze ans retrace l'histoire deMarie van Goethem, modèle de la célèbre sculpture d'Edgar Degas[20].
Depuis 2002, Camille Laurens a également une activité de chroniqueuse dans différents quotidiens :Le Monde en 2014 et 2015[21]. De septembre 2015 à juin 2019, elle tient une chronique mensuelle, « Écritures », dansLibération[22]. En elle reprend« le feuilleton » hebdomadaire duMonde des livres supplément auMonde[23].
Il lui est parfois reproché une certaine forme de conformisme littéraire, notamment celle de l'autofiction, comme le notePierre Jourde en 2002 dansLa Littérature sans estomac. Camille Laurens lui a répondu dans un article parodique deLa Revue littéraire[27],[28].
En 2003, à la suite de la publication deL'Amour, roman, Yves Mézières, son ex-mari, l'assigne en justice pour atteinte à la vie privée[29]. Il est débouté : « Camille Laurens n'a pas porté atteinte à la vie privée de son mari », a déclaré la vice-présidente dutribunal de grande instance de Paris le vendredi 4 avril 2003, mettant en avant que l'utilisation des vrais prénoms ne suffit pas « à ôter à cette œuvre le caractère fictif que confère à toute œuvre d’art sa dimension esthétique, certes nécessairement empruntée au vécu de l’auteur, mais également passée au prisme déformant de la mémoire et, en matière littéraire, de l’écriture »[30][réf. à confirmer]. En 2009, Yves Mézières publieMosaïque de seuil, livre dans lequel il revient sur cette affaire[31].
En, lors de la publication deTom est mort deMarie Darrieussecq (elle écrit aussi chez P.O.L), Camille Laurens, dans un texte publié dansLa Revue littéraire « Marie Darrieussecq ou le syndrome du coucou », accuse cette dernière de « plagiat psychique[32][réf. à confirmer] ». Camille Laurens lui reproche en outre d'avoir rédigé un « livre sur le deuil » et non un « livre de deuil », singeant ainsi une expérience qu'elle n'a pas personnellement éprouvée. Marie Darrieussecq estime que cette polémique est un « ignoble concours de douleurs, et que, quel qu'en soit le sujet, un roman n'a pas à se légitimer d'une expérience vécue ». Elle est soutenue par leur éditeur communP.O.L, qui a choisi de ne plus publier Camille Laurens[33].
En septembre 2021, alors qu'elle est membre du jury duprix Goncourt, elle est soupçonnée de conflit d'intérêts, l'un des auteurs figurant dans la première sélection du prix, le philosopheFrançois Noudelmann étant alors son compagnon.« Ce qui nous intéresse, c'est l'œuvre et elle seule », assure cependantDidier Decoin, le président de l'Académie Goncourt[34],[35]. En revanche, Didier Decoin n'a« pas aimé du tout, du tout » la violente chronique que Camille Laurens a consacrée dansLe Monde du à un livre qui est également dans la première sélection du Goncourt, et dont les thèmes sont proches de ceux abordés par Noudelmann. Selon Decoin, l'Académie ayant choisi cet ouvrage, Laurens devait se montrer« solidaire » :« Elle n’a pas à décréter tout à coup que ce livre est une nullité […] Je n'ai pas apprécié du tout. Et nous en parlerons ![34] »
2008 : écriture d'un texte, « Le bout de la langue » pour le spectacle théâtralCorpus Eroticus, mis en scène par Virginie Deville,Maison des Métallos[44].
2010 : collaboration avec la compagnie Vendaval et la chorégraphe Carmela Acuyo pour le spectacleLa mer dans un verre[45].