Vous lisez un « bon article » labellisé en 2011.
Groupe | Folklore populaire |
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Sous-groupe | Croque-mitaine |
Caractéristiques | Large chapeau, nocturne. |
Habitat | Bois et chemins |
Proches | Lycanthrope,géant,lutin |
Origines | Mythologie bretonne |
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Région | Bretagne |
LeBugul-noz (prononcé :/by.dʒyl.ˈnoːs/ enbreton vannetais) oubugel-noz (« enfant de la nuit » ou « berger de la nuit ») est une créature nocturne du légendairebreton, proche dulutin et duloup-garou, qui se présente sous la forme d'un bergermétamorphe portant un large chapeau. Surtout attaché auVannetais, qui forme l'actuelMorbihan, il est mentionné depuis leXVIIe siècle, et peut-être issu des créatures du type « appeleur ». Les principaux collectages à son sujet datent du début duXXe siècle.
La tradition populaire parle de la crainte qu'il inspire et des moyens de s'en protéger. Il aurait pour fonction, selonWalter Evans-Wentz etPierre Dubois, de prévenir les bergers attardés de l'arrivée des hordes nocturnes, et de les pousser à regagner leur foyer. Les mères bretonnes effrayaient jadis leurs enfants en évoquant leur risque d'enlèvement par cette créature.
Joseph Loth en a étudié l'étymologie dans sonDictionnaire breton-français du dialecte de Vannes, en 1894[1]. Le nom a changé de sens enbreton vannetais, puisquebugel, qui désigne l'enfant, y est le même mot quebugul, le berger, dont le sens est différent dans les autres dialectes[2],[3],[Note 1].
On trouve la forme « bugel-noz » en 1633, et celle de bugul-noz en breton vannetais à partir de 1732[4]. L'orthographe est assez variable, le nom étant surtout présent sous la forme « bugul-noz »[Note 2], mais on trouve aussi les formes « Bugul Noz »[Note 3] et « Bugul-nôz »[Note 4].
PourYves Le Gallo, le bugul-noz tient un rôle d'« épouvantail »[5],Marie-Charlotte Delmas le qualifiant plutôt decroquemitaine[6]. Les parents désireux de ne pas voir leurs enfants courir le soir les menaçaient en disant que si le bugul-noz les aperçevait en dehors de la maison, il les emporterait dans son immense chapeau rond[7].
D'aprèsWalter Evans-Wentz[8] etAlbert Moxhet[9], il est peut-être issu deYannig an Aod (ouYann-An-Ôd), « Jean du rivage », un « appeleur » qui pousse les pêcheurs à rentrer au port dès la nuit tombée.
Un bulletin de laSociété archéologique du Morbihan, paru en 1858, affirme qu'il est issu desdusino latins[10].Paul Sébillot note une confusion entre le bugul-noz et leloup-garou à son époque, un même nom désignant lelycanthrope qui rejoint les siens durant la nuit et lepâtre nocturne d'apparence humaine[11]. En 1914, lechanoine J. Buléon mène une enquête sur le Bugul-Noz et le Garo (loup-garou), qui paraît dans laRevue Morbihannaise de février ; il suppose qu'il y a eu confusion entre plusieurs types de récits, qui se sont fondus les uns dans les autres[12]. Comme le souligneGaël Milin, Buléon regrette que les conteurs aient amalgamé des créatures jadis distinctes[13]. Le prêtre et folkloriste bretonFrançois Cadic note en 1922 que le bugul-noz, les kannerezed-noz et les hopper-noz ont été assimilés à des revenants, suppôts duDiable[14].
Les descriptions du Bugul-noz sont confuses, mais elles suggèrent une assez grande taille, voire une taille degéant qui lui permet d'attraper des enfants dans son chapeau[6]. Son comportement est plutôt espiègle, un collectage deBubry parlant de son habitude de surprendre les passants en soulevant une perche entre leurs jambes[6]. D'après les récits collectés par laSociété archéologique du Morbihan en 1858, le bugul-noz est un « lutin malfaisant » qui effraie les humains par ses apparitions, et revêt parfois une peau de loup pour courir nuitamment[10]. Il peut aussimonter à cheval, et emporter des personnes qu'il jette ensuite dans l'eau[6].
« Quand les ombres sont descendues, et que l'oiseau de nuit quitte sa retraite, éloignez-vous : vous y entendriez, comme des voix plaintives, les gémissements des pâtres enlevés par le Bugul-Noz, ceCroque-mitaine breton ! »
— Guide du voyageur : Carnac et ses alentours[15]
Les Bretons qui rentrent tard du labour sont susceptibles de le rencontrer, et redoutent ce moment[8]. Esprit de la nuit, le bugul-noz voit l'apogée de son pouvoir àminuit[9]. Il fréquente les bois et les chemins, caché par un chapeau[9]« plus large qu'une roue de charrette »[16] et un ample manteau blanc traînant à terre d'après Vérusmor[17]. Comme dans lecauchemar, il grandit au fur et à mesure que l'on s'approche de lui[9]. Il possède le don de métamorphose[18] afin de surprendre ses victimes[16], et peut se changer, par exemple, encheval[19]. Il est parfois accompagné dekorrigans poussant leur chant de marche[20]. Comme beaucoup d'autres esprits de la nuit, il déteste les sifflements[6] :Anatole Le Braz cite une tradition deRiantec, qui veut que lorsqu'on l'entend siffler derrière soi, il faille bien se garder de siffler aussi[21]. Il n'est pas toujours malfaisant, car il aurait protégé des gens contre les démons, en les cachant sous son manteau[17].
Dans d'autres histoires, il est unloup-garou qui emporte les enfants en les cachant dans son chapeau[22].Paul Sébillot livre une version selon laquelle un cultivateur s'aperçoit que son frère est « bugul-noz » et sort tous les soirs sous forme de loup. Sur les conseils d'un prêtre, il va le rejoindre une nuit et le pique avec unefourche à deux pointes[23]. Selon les auteurs plus récents François Le Divenah etThierry Jigourel, le bugul-noz est parfois lié à la mer, où il officierait « armé jusqu'aux dents »[24]. Selon les collectes de Milin, il craint l'aubépine, dont le pouvoir met fin aux enchantements[25]. Ce serait un homme maudit, qui accomplit une pénitence[16]. Selon les collectes de Sébillot, le bugul-noz serait unpaïen archaïque, allergique au signe de laRédemption[17]. D'après Buffet, un moyen de s'en protéger consiste à« se retrancher rapidement derrière une porte de chrétien, dont les barres horizontales et verticales forment comme une croix », ou alors à rester dans un champ labouré, précédemment semé avec des grains bénis[26].
L'anthropologue américainWalter Evans-Wentz qualifie le Bugul-noz d'« homme-fée » et suggère, tout commePierre Dubois, qu'il emmenait paître son troupeau d'ombres à la nuit tombée pour signifier au berger qu'il est temps de rentrer, et ne serait pas maléfique, mais presserait les hommes à quitter les territoires qu'il hante avec les esprits de la nuit[27],[28].
Dans les notes d'un chiffonnier itinérant retrouvées à Lamballe en 2017 et parues aux éditions Kleinzach sous le titre,LaLégende du Buguel, on lit cette description : "J’aperçus un long visage aux yeux caves et à la bouche interminable se pencher sur moi. Entre les deux mâchoires, des centaines de petites dents blanches et pointues se dressaient en désordre. Sur sa tête, je distinguais les rubans usés d’un vieux chapeau fouetté par le vent. Je compris alors que ce n’était pas des branches qui me serraient jusqu’à l’étouffement, mais bien les mains de cette créature foisonnante faite de proliférations et d’excroissances. Un corps de terre, de bois, de mousse, composé de tout ce qui grouille et vit dans l’ombre de cette forêt me tenait prisonnier." Ici encore la créature n'est pas décrite comme maléfique, elle serait le fantôme d'un jeune pâtre abandonné dans les bois : "C’est ainsi qu’ils auraient continué de croître sans but, par prolifération, agglomérant à leur personne tout ce que la nature sauvage leur offrait. Poussant à la manière d’arbres tortueux qui croissent entre deux pierres stériles et sans tuteur, ils auraient adopté des silhouettes informes aux proportions démesurées et grotesques. Chez eux, l’écorce se mêle à l’os, l’os aux haillons et les haillons à la chair putride. Leurs visages informes ne sont que grimaces. Une bouche immense y forme une cicatrice qui accueille des milliers de dents de lait[29]."
Le bugul-noz est surtout connu dans leVannetais[26]. Joseph Frison a collecté un témoignage disant que la créature aurait habité avec sa conjointe du côté d'Hennebont, mais aurait depuis disparu[30].
Les principaux collectages au sujet de cette créature sont effectués par Joseph Frison au début duXXe siècle[6]. Il en rassemble plusieurs pour laRevue des traditions populaires :Le petit boudeur en avril 1908,Le berger de nuit en juillet 1910,Le Bugul-nôz en novembre de la même année, etLa délivrance du Bugul-nôz en février 1911[30]. Il apprend d'un domestique d'une vingtaine d'années qu'une de ces créatures était jadis réputée pour hanter l'église deCléguer[30]. La croyance populaire est cependant déjà en voie de disparition : un paysan deLorient affirme avoir entendu parler du bugul-noz mais ne plus s'en souvenir, ajoutant qu'il s'agit peut-être d'un oiseau chanteur, mais que ce nom n'est plus guère utilisé[30].
Yves Le Diberder recueille de nouvelles anecdotes dans leKemenet-Héboé, lePorhoët, et dans lapresqu'île de Rhuys en 1912[31]. Pour éclaircir une croyance selon laquelle lesexcommuniés deviennent des loup-garous, l'abbé Cadoux enquête en 1914 sur le Garou et le Bugul-Noz àBubry[32].Walter Evans-Wentz (1878 - 1965) s'est intéressé au Bugul-noz, mais il n'est pas parvenu à trouver de description du troupeau qui l'accompagne, ni ce que présage sa rencontre, même s'il a noté que les Bretons préfèrent l'éviter[28].
Le Bugul-noz a donné son nom à untrail, couru entreSarzeau et le stade deQuistinic[33],[34]. Une version de sa légende est affichée sur lechemin de randonnée de Pont Augan, àQuistinic.
Cette créature est incluse dans l'ouvrage deFaery Wicca d'Edain Mc Coy, qui le décrit comme le dernier de son espèce, ajoutant qu'il est incroyablement laid, ce qui lui cause beaucoup de peine, incite les animaux de la forêt à l'éviter, et explique qu'il pousse lui-même des cris pour avertir les gens de son approche et ne pas les effrayer. Elle ajoute qu'il n'est pas malveillant, mais demeure toujours seul à cause de son effroyable apparence[35].
Un monstre du jeu vidéoFinal Fantasy XI porte également ce nom[36], tout comme une créature de la seconde édition du jeu de rôlePathfinder.
Bugul Noz est également le nom d'un groupe belge depunk celtique. La piste d'intro de leur premier album éponyme[37] est un conte mettant en scène la créature.
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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