Le genreBorrelia regroupe aujourd'hui quelques dizaines d'espèces (36 fin 2008, mais d'autres pourraient ne pas encore avoir été découvertes, y compris en Europe[1]). De nouvelles espèces sont fréquemment décrites, commeBorrelia mahuryensis, en Guyane[2].
Elles doivent leur nom àAmédée Borrel, un célèbrebactériologiste (1867 –1936). La borrélie la plus connue (pour avoir été identifiée comme première responsable de lamaladie de Lyme aux États-Unis), estB. burgdorferi, mais une vingtaine d'autres d'espèces de borrélies avaient déjà été recensées (sous d'autres noms) depuis le début duXXe siècle, avant la découverte deB. burgdorferi. D'autres, dont trois sont responsables d'autres formes de maladie de Lyme chez l'homme, ont été décrites depuis.
LesBorrelia sont des parasites qui utilisent desarthropodes (tiques oupoux) comme vecteurs, mais leurréservoirs biologiques naturels semblent être desmicromammifères forestiers, et de grands mammifères tels que lescervidés et lessangliers. Des oiseaux peuvent en être également porteurs, ainsi que des animaux domestiques (des moutons et chevaux[3] en particulier peuvent être infectés), développant certainssymptômes proches de ceux qui s'expriment chez l'homme (ex. :érythème migrant développé par des lapins auxquelsB. burgorferi a été expérimentalement inoculé en laboratoire).
Plusieurs espèces de borrélies (quatre au moins) infectent facilement certaines parties de l'organisme humain, car déjouant son système immunitaire, en particulier pourB. burgdorferi qui est très mobile et surtout, dans les milieux relativement visqueux qu'ils infectent, bien plus rapide et mobiles que les globules blancsmacrophages qui leur font la chasse.
Elles sont responsables de maladies appeléesborrélioses que l'on sait maintenant soigner, mais qui peuvent être graves, voire mortelles si elles ne sont pas traitées tôt, ce qui est rendu difficile par des symptômes peu spécifiques (la maladie est souvent confondue avec unegrippe, une crise depaludisme ou unrhumatisme). Certaines sont desmaladies émergentes ou sont d'intérêt épidémiologique, car posant des problèmes croissants desanté publique.
Il a été récemment proposé de rebaptiserBorreliella (au sein du genreBorrelia) celles de ces bactéries qui sont clairement responsables des différents variants de la maladie de Lyme mais ce choix est encore très controversée[4],[5].
Un des morphes possibles d'une borrelia, avec une structure en « palette » à une extrémité.
Ce sont des bactéries spiralées etGram-négatives qui prennent mieux les colorations que d'autres spirochètes.
Mesurant de20 à 30μm et d'environ0,4μm de diamètre, elles sont par rapport à d'autres spirochètes, plutôt grandes (visibles aumicroscope optique, à fort grossissement), et elles ont assez peu de spirales. Cependant, dans la tique comme dans le corps humain, leur taille et le nombre de ces spirales varie fortement selon la bactérie et selon son âge, et semble-t-il selon ses conditions de développement ou pour des raisons mal comprises.
Des flagelles internes (7 à 11) lui permettent de se déplacer très rapidement dans les milieux ayant la consistance d'ungel, alors qu'elle se meuvent mal dans un liquide fluide (comme l'eau ou lalymphe). Elles font partie des bactéries les plus mobiles et rapides quand elles sont dans un milieu ayant la consistance d'un gel.
On les trouve seules ou en groupe, parfois très nettement identifiables et parfois prenant d'autres formes (spiralée, mais recourbées en U, les deux branches du U pouvant s'entremêler en double hélice, ou en forme de très petit ver. Deux borrélies peuvent intimement s'accoler en s'enroulant l'une autour de l'autre, puis rapidement se séparer (à la manière de la double spirale d'ADN). Ceci pourrait faciliter des échanges génétiques, mais ce n'est pas démontré.
Elles semblent aussi capables de complètement changer de forme et de se couper en petits morceaux (encore vivants), et de former des « granules » (ou « coccoïdes ») qui seraient l'une de leurs phases de latence. Sous cette forme il est possible qu'elles échappent au système immunitaire et à la détection classique par observation microscopique. Exposéesin vitro à des antibiotiques, elles peuvent former des granules (en quelques heures) et s'y protéger, ce qui pourrait expliquer l'échec de nombreux traitements, qu'il est nécessaire de répéter, et peut-être certains symptômes chroniques.
Les borrélies peuvent usurper et exploiter une protéine (Salp15) naturellement présente dans lasalive de leur tique vectrice pour faciliter l'invasion de leur hôte vertébré. Le taux de cette protéine chez la tique est augmenté quand la tique est infectée, et les borrélies se montrent capables (in vitro etin vivo) de s'enduire le corps de cette protéine qui les protègent de nos globules blancs[9].
Elle varie selon l'espèce ; toutes lesBorellia semblent se développer en condition anaérobie mais certaines espèces (en particulierBorrelia burgdorferi sensu stricto) présentent une « aérotolérance » qui est absente ou plus rare chez les souches testées deB. garinii et B. afzelii (une étude (2006) a comparé la croissance de 29 souches d'origine « humaine » provenant de 3 espèces (Borrelia burgdorferi sensu lato) pathogènes pour l'homme. Les 29 souches ont pu être cultivées en condition anaérobie, mais seules 33 % desB. garinii et B. afzelii se sont reproduites en aérobiose (avec 3 % de CO2), contre 75 % des souches deB. burgdorferi sensu stricto[10].
Fait exceptionnel chez lesprocaryotes, legénome de toutes lesBorrelia est composé d'unchromosome linéaire, dont la taille est comprise entre900 000 et 920 000paires de bases, et de plusieursplasmides circulaires et linéaires (certaines espèces contiennent jusqu'à 20 plasmides différents).
L'ADN linéaire est terminé par des structures fermées de façon covalente, appeléestélomères. Uneprotéine, la résolvase de télomère (ResT) intervient dans la formation de ces structures[11].
Les borrélies (et autres spirochètes) ont dû développer diverses stratégies adaptatives, dont au niveau génétique, pour pouvoir infecter des hôtes aussi différents que desinvertébrés (dont desacariens), des mammifères à sang chaud et des vertébrés à sang froid tels que les reptiles.
Ainsi certains gènes deB. burgdorferi sont-ils exprimés préférentiellement selon que la borrélie se développe dans une tique ou dans un hôte vertébré. Des chercheurs néerlandais ont noté queB. burgdorferi modifiait aussi l'expression de gènes spécifiques de la tiqueIxodes scapularis (gènes TROSPA et salp15) en favorisant ainsi sa survie dans la tique et pendant la transmission à un autre hôte.Une meilleure connaissance des protéines pilotées par ces gènes permettra peut-être de produire unvaccin prévenant la transmission de B. burgdorferi ou d'autres microbes véhiculés par les tiques[14]. Une deslipoprotéines (OSPA) a été cristallisée et structurellement caractérisée[15],[16] et a fait l'objet d'essais pour un vaccin contre la maladie de Lyme, avant même qu'on en connaisse la fonction[17].
Les borrélies comptent parmi les bactéries les plus rapides quand elles sont dans un milieu de type « gel ». Représentation schématique du système de flagelles internes d'un spirochète : 1) Enveloppe de la bactérie, 2) cytoplasme, 3) Flagelle interne 4) point d'attache d'un flagelle)
Les borrélies disposent de divers moyens, encore mal compris, d'échapper ausystème immunitaire de leur hôte. Elles peuvent aussi dans certaines conditions résister aux traitements antibiotiques (chez l'homme comme chez l'animal (ex. : souris[18], chien[19], poney[20]) etin vivo, commein vitro[21]) et se développer après une phase d'apparente guérison[22]
Certains (et tout particulièrement les borrélies responsables de la maladie de Lyme) sont — dans un milieu qui leur convient, c'est-à-dire ayant plutôt la consistance d'un gel que d'un liquide fluide — beaucoup plus rapides que les globules blancs.
Beaucoup de spirochètes peuvent, en condition de stress non létal, se protéger durablement en s'agrégeant dans des granules coccoïdoforme (structures rondes dites « cyste », ou « Cyst » par les anglophones), entourés d'une membrane. Dans ces granules, de petits groupes deborrelia par exemple peuvent à la fois se protéger des antibiotiques conventionnels et du système immunitaire de l'hôte[23] (néanmoins en présence d'un antibiotique de typetétracycline, la formation de kystes parB burgdorferi cesse, ce qui laisse penser qu'il ne s'agit pas d'une phase dégénérative de la vie bactérienne[24], ni d'un enkystement par l'hôte, mais bien d'une stratégie derésilience nécessitant une synthèse protéique de la part de la bactérie). Des kystes placés dans de l'eau distillée montrent une quasi-absence d'activitémétabolique, mais placés dans de meilleures conditions, une partie des kystes s'ouvrent en libérant des borrélies viables, ce qui suggère qu'il s'agit bien d'une phase de dormance[25]. De petites structures discoïdes sont observées dans certains kystes, qui pourraient être une réserve nutritive pour les bactéries[26].
Ces kystes semblent être entourés d'une membrane qui n'est pas reconnue comme étrangère par le système immunitaire, et qui n'est donc pas attaquée par les globules blancs. On observe des formes cystiques de borrélies dans l'hippocampe (dans lecerveau humain), ce qui pourrait expliquer la réapparition de symptômes après une période d'apparente guérison[27].
Les borrélies responsables de lamaladie de Lyme semblent ainsi pouvoir se protéger durant des années voire des dizaines d'années. Alban et Nelson notaient en 1999 qu'il fallait une « énorme quantité de tétracycline (antibiotique auquel les borrélies étaient réputées être très sensibles) ; très supérieure aux doses habituellement utilisées et utilisables en antibiothérapie humaine » pour inhiber ces micronodules. Brorson estime[25] que cette propriété, combinée avec la capacité des spirochètes à se réactiver après un certain temps passé dans ces nodules[28],[29].
Ces facteurs pourraient — au moins en partie — expliquer des réinfections fréquemment récurrentes avec les spirochètes, et le caractère souvent récurrent des symptômes entrecoupés de phase de dormance apparente du microbe et l'inefficacité de certaines thérapies dans le cas de borréliose[30].
LesBorrelia sont véhiculés par des arthropodes piqueurs (tiques et/oupoux). Sur les 36 espèces de borrélies connues, 12 sont pathogènes pour l'homme ; causant la maladie de Lyme ou d'autres types de borrélioses.
Un même vecteur (tique en général) peut inoculer plusieurs espèces différentes de borrélies à un même patient. Leurdiversité génétique est en outre importante, et il existe de probables susceptibilités génétiques chez les humains infectés.
Ces trois facteurs contribuent sans doute à expliquer la grande variété et variabilité des symptômes chez les patients victimes de borrélioses. Une grande partie des borrélioses sontasymptomatiques ou guérissent spontanément. Une part encore mal évaluée est responsable de maladies graves et invalidantes, souvent difficiles à détecter dans leur premier stade (alors qu'elle est à ce moment facile à soigner par un simple traitement antibiotique), d'autant qu'une partie des tests disponibles ne détectent pas toutes les borrélies ou sont d'interprétation difficile (en cas deco-infection notamment). De plus, certains symptômes peuvent n'apparaître que des années après la piqûre d'une tique.
Fréquentes co-infections : elles semblent pouvoir être expliquées, au moins en partie par la pathogénicité de certaines borrélies. Elles sont sous-estimées et souvent non détectées car non recherchées. Elles impliquent par exemple plusieurs souches de borrélies, ou une ou plusieurs souches de borrélies co-infectant l'organisme avec desBartonella ou desEhrlichia ou d'autres bactéries qui pourraient profiter de la déplétion immunitaire induite par la piqûre de tique puis la maladie de Lyme. Lors d'une étude épidémiologique nord-américaine,Bartonella henselae il a ainsi été trouvé une co-infection avec une borrélie chez 22 patients sur les 327 testés au sujet des principales maladies à tiques. Un plus grand nombre de patients étaient d'ailleurs plus positifs pourBartonella henseine (92 sur 327) que pourB burgdorferi (64 sur 327). Ces chiffres sont corrélés avec les taux d'infection détectés chez les tiques analysées sur cette zone en 2001. Dans ce cas, seuls 83 % des patients présentant unePCR positive auxBartonella présentaient aussi des anticorps. Un patient co-infecté par deux pathogènes (Bartonella etBorrelia) a développé une complicationsarcoïdienne[31].
Réaction immunitaire : La réponse des mammifères à l'infection par les Borrélies est encore mal comprise. Elle a été testée en laboratoire avec des souris et des primates non humains auxquels on a inoculé la soucheB. burgdorferi sensu stricto N40 ou la souche de OZ1Borrelia turicatae (qui sont respectivement les agents de la maladie de Lyme et de fièvres récurrentes en Amérique du Nord)[32]. Les primates non humains se montrent beaucoup moins sensibles que lessouris de laboratoire à la maladie de Lyme. Inversement, la majorité des souris inoculées avec B. turicatae semblent éliminer l'infection, à l'exception notable d'une infection résiduelle du cerveau ou du sang 25 % des cas au plus[32].
Dans les deux cas, on observe pas ou peu de lésion tissulaire chez les animauximmunocompétents[32]. En revanche, dans les deux cas, un échec de la production d'anticorps conduit à des lésions tissulaires graves, notamment dans lecœur. Contrairement à ce qu'on observe pour le cœur, le cerveau de souris déficientes en lymphocytes B et infectées parB. turicatae montre une activationmicrogliale, mais pas de lésions tissulaires décelables. Les tissus de primates non humains immunodéprimés infectés parB. burgdorferi N40 produisent de grandes quantités de lymphocytes B, d'immunoglobulines et dechimiokine CXCL13, qui tous deux sont significativement corrélés à la charge en spirochètes[32]. Sans production d'anticorps spécifiques, l'infection est persistante et peut conduire à des lésions tissulaires, notamment dans le cœur[32].
Borrelia recurrentis est unspirochète transmis par le pouPediculus humanus (aucun réservoir n'est connu autre que le pou et l'homme). C'est l'un des agents desfièvres récurrentes. Les poux sont infectés par des bactéries qu'ils acquièrent en piquant des humains infectés pour se gorger de sang. Ces bactéries se multiplient ensuite dans l'intestin du pou, et réinfectent des humains via la salive du pou. Écraser un pou sur la peau alors qu'il se nourrit ou là où on s'est fortement gratté semble pouvoir faciliter la pénétration des borrélies dans l'organisme humain.
Borrelia duttoni est transmise par des tiques, uniquement dans les zones géographiques correspondant aubiotope des tiques vectrices (réputées toujours être des tiques molles du genreOrnithodoros), mais certains patients peuvent avoir été infectés lors de voyages loin de chez-eux et des épidémies sporadiques sont constatées en Europe[33]. Après2 à 18jours d'incubation, les symptômes apparaissent (fièvre, frissons et douleurs diffuses). La fièvre chute après quelques jours, et augmente de nouveau pendant2 à 3jours, après des périodes d'accalmies de7 à 9jours (d'où le nom de « fièvre récurrente ». On parle aussi de « récurrences fébriles »).
Quatre de la trentaine d'espèces du complexeBorrelia burgdorferi sensu lato causent chez l'homme lamaladie de Lyme, transmise en Europe par des piqûres de tiques du genreIxodes qui se sont préalablement contaminées sur des animaux malades. À partir du point de pénétration cutané, ces borrélies vont migrer dans la peau autour de la plaie, et ensuite diffuser dans l'organisme, pour se localiser dans différents organes. Dans tous les cas, le stade primaire de la maladie est généralement signalé par une tache rouge de taille croissante (érythème migrant) apparaissant autour de la piqûre, puis par un état grippal (frissons, fièvre, maux de tête) passager.
Sans traitement, le stade suivant est associé à des complications neurologiques, des douleurs musculaires et parfois à une inflammation cardiaque. Au stade tertiaire (6 mois à deux ans après l'infection), la maladie évolue vers une arthrite chronique, unedémyélinisation desneurones accompagnée de symptômes évoquant lamaladie d’Alzheimer et/ou lasclérose en plaques. Le troisième stade est une aggravation du précédent, pouvant conduire à la mort.B. garinii cible plutôt le système nerveux (symptômes neurologiques), les arthrites sont plutôt dues àB. burgdorferi s. str. ; alors que l’ACA évoqueB. afzelii. Ces quatre espèces pathogènes sont présents en Europe. SeuleB. burgdorferi s. str. semble présente aux États-Unis[34].
Le traitement recommandé est à base d'antibiotiques de typetétracycline. Hélas, quand la maladie est installée, dans un certain nombre de cas, un certain nombre de bactéries résistent au traitement, et les symptômes peuvent réapparaître après une apparente guérison. Par exemple, sur 165 patients traités pour une borréliose de Lyme enphase 2 ou 3, et malgré 3 mois ou plus de traitements antibiotiques (dont au minimum deux semaines au ceftriaxone), 32 ont fait une rechute ou abritaient encore des borrélies dans leur organisme[35].
Nouvelles et principales espèces (ordre alphabétique)
Il est très probable qu'un nombre significatif d'espèces et souches de borrélies n'aient pas encore été découvertes ou identifiées. Des espèces nouvelles sont encore découvertes :
En 2001 enChine le long de la vallée duFleuve Yangtsé, on a trouvé, à partir de 28 isolats faits en et 1998 dans les tiquesIxodes granulatus,Ixodes ovatus,Apodemus agrarius etNiviventer confucianus(en) des souches deBorrelia valaisiana(en), mais aussi des souches distinctes desBorrelia connues pour être responsables de la maladie de Lyme. Elles apparaissent — au microscope électronique — morphologiquement identiques aux Borrélies connues, mais ne contenaient que quatre flagelles périplasmiques insérés à chaque extrémité du spirochète. Cette nouvelle espèce a été nomméeBorrelia sinica nov (la souche CMN3T en est la souche type)[36].
En 2009[37] dans le sud-est des États-Unis (Caroline du Sud etCalifornie), une espèce nouvelle a été trouvée, apparentée à des souches connues en Californie connue sous le nomgenomospecies 1. Son patrimoine génétique la distingue clairement des espèces deBorrelia connues[37]. Les deux sous-groupes de cette espèce nouvelle sont nommésBorrelia americana(en) nov.[37]. Toutes les souches de cette nouvelle espèce semblent transportées parIxodes pacificus ouIxodes minor(en) et leurs hôtes connus sont des rongeurs et oiseaux[38],[37].
En 2016, une nouvelle espèce (candidatusBorrelia mayonii(en)) a été découverte dans la partie nord duMidwest, à partir de diagnostic de routine faits (par PCR) sur des patients nord américains ciblant le gène oppA1 deB. burgdorferi sensu lato, dont le résultat était atypique (à la PCR, mais aussi par séquençage, microscopie, ou mise en culture)[39]. Des tiquesI. scapularis ont été récoltées dans les régions où ces patients sont présumés avoir été piqué, et testées par PCR/oppA1 ; certaines étaient effectivement infectées par ce spirochète jusqu'alors inconnu[39].
En 2020, une nouvelle espèce (candidatus Borrelia mahuryensis) a été découverte chez les tiquesAmblyomma longirostre dans la périphérie de Cayenne en Guyane[2]. Localement, près de 20% des tiques collectées sur passereaux sont infectées. Le risque infectieux pour l'humain est inconnu à ce jour[2]. Plus de 100 000 analyses de routine par PCR (100 545 exactement) ont été demandées par des médecins en 10 ans environ (du au) ils ont été rétrospectivement ré-étudié ; parmi ces échantillons, six (cinq prises de sang, un échantillon de liquide synovial) avaient donné un résultat oppA1/PCR atypique, mais aucun résultat atypique n’avait été signalé avant 2012[39]. Cinq des six patients concernés avaient présenté de la fièvre, quatre avaient une éruption cutanée diffuse ou focale (rash), trois présentaient des symptômes neurologique, et deux ont été hospitalisés. Le sixième présentait un genou enflé et douloureux[39]. Des spirochètes mobiles ont été trouvés dans le sang d'un de ces patients et dans une mise en culture à partir d'échantillons de sang pour 2 autres patients. Fait inhabituel : dans les cinq échantillons sanguins, le nombre médian de copieoppA1 était 180 fois plus élevé que dans 13 échantillons testés positifs pourB. burgdorferi sensu stricto au cours de la même période[39]. Ce spirochète peut donc être détecté par une oppA1 PCR (au résultat anormal) et il présente la particularité (unique à ce jour) d’être bien plus densément présent dans le sang que les autres borrélies (on parle de « spirochaetaemie » élevée)[39],[40],[41],[42],[43].
Borrelia burgdorferi senso lato désigne un « complexe » de plus de 20 espèces de borrélies (dont quatre au moins sont des pathogènes avérés pour l'humain) :
Borrelia afzelii (Canicaet al. 1994) :pathogène pour l'homme, responsable ou coresponsable de la maladie de Lyme en Europe et Asie.
Borrelia burgdorferi (Johnsonet al. 1984) :pathogène pour l'homme, cette bactérie est la première à avoir été isolée (en 1982 seulement) comme agent de lamaladie de Lyme. Elle est surtout présente en Amérique du Nord, mais aussi, avec d'autres, responsable de la maladie de Lyme en Europe. Elle est transmise enEurope principalement parIxodes ricinus et auxÉtats-Unis parIxodes dammini.
Borrelia duttoni (Novy et Knapp 1906, Bergeyet al. 1925) :pathogène pour l'homme chez lequel elle cause des fièvres récurrentes dites « à tiques ». Elle est supposée toujours ou presque transmise par des tiquesOrnithodorus.
Borrelia garinii (Barantonet al. 1992),pathogène pour l'homme et responsable ou coresponsable de la maladie de Lyme en Europe et Asie.
Borrelia hermsii(en) :pathogène pour l'homme (fièvre récurrente, avec des symptômes proches de ceux des fièvres induites parB. recurrentis, mais avec plus de rechutes et mortalité supérieure). Ce spirochète esta priori souvent transmis par des tiquesOrnithodorus qui s'infectent en faisant leur repas sur des espèces-réservoir (des rongeurs).
Borrelia parkeri : le réservoir sont des rongeurs, la bactérie (pathogène) peut être transmise à l'homme par l'intermédiaire de tiques.
Borrelia recurrentis (Lebert 1874) (Laveran 1903) Bergeyet al. 1925 :pathogène pour l'homme. C'est l'agent defièvres récurrentes transmises non par des tiques mais par le pouPediculus humanus (responsable ou coresponsable de fièvres récurrentes moins violentes et plus rarement mortelles que celles induites parB. hermsii).
Borrelia valaisiana(en) (Sakharoff 1893),pathogène pour l'homme, responsable ou coresponsable de la maladie de Lyme[44] (qui peut aussi infecter les oiseaux, trouvée en Europe[46]).
La spécificité des liens entre chaque espèce deBorrelia et une ou plusieurs espèces ou sous-espèces de tiques a été confirmée par des études faites autour de Moscou, régionsympatrique pour deux espèces de tiquesIxodes persulcatus etI. ricinus[47], ce qui laisse penser qu'il y a eucoévolution entre tiques et borrélies.
Les espèces dominantes varient selon les régions, et des co-infections par plusieurs espèces, ou réinfections sont possibles.À titre d'exemple, les borrélies les plus courantes dans le sud de l'Amérique du Nord sont desBorrelia burgdorferi sensu stricto,Borrelia bissettii(en),carolinensis Borrelia(en) etsp Borrelia, détectées à partir d'isolats collectés chez des tiques, oiseaux et rongeurs[37].
Les liens entre espèces de Borrélies causant la maladie de Lyme et leurs tiques vectrices commencent aussi à être étudiés en Asie[47]. En Asie du Nord,Ixodes persulcatus est vectrice d'un type eurasien deBorrelia garinii (type 20047), deBorrelia afzelii, et d'un type asiatique deB. garinii (variant NT29), maisBorrelia burgdorferi sensu stricto semble absent en Asie (et inversement, le type asiatiqueB. garinii semble absent chez les tiquesI ricinus en Europe[47].
Dans le sud-est asiatique, y compris au Japon dans l'île d'Okinawa (la plus méridionale), le groupe des spirochètes génomiquement classé dans lesBorrelia valaisiana(en) est véhiculé parIxodes granulatus[47]. Au Japon, une souche similaires deBorrelia (Am501) est transmise parIxodes columnae.Ixodes ovatus transmet quant à elleBorrelia japonica(en), mais pas d'autres espèces. En revanche, dans le centre de la Chine et au Népal, les tiques portentBorrelia sinica(en)[47]. Des enquêtes épidémiologiques basées sur des études moléculaires devraient fournir des informations utiles pour les diagnostics et la prévention de la borréliose de Lyme dans ces pays. L'augmentation des échanges et la circulation des tiques et des microbes, ainsi que les effets du réchauffement climatique et de lafragmentation des écosystèmes pourraient aussi compliquer l'éco-épidémiologie des maladies à spirochètes.
Selon les études disponibles, il semble que chaque espèce de borrélie infecte préférentiellement une (ou parfois deux ?) tique(s) vectrice(s), et que les espèces de borrélies soient plus ou moins associées à certaines zonesbiogéographiques. On savait déjà queB. burgdorferi était essentiellement associée aux tiques nord-américaines. En Europe de l'Est, on a, en 1997, étudié[48] 365 isolats deBorrelia burgdorferi sensu lato. La plupart ont été isolées dans la salive ou l'organisme de tiques (Ixodes persulcatus etIxodes ricinus essentiellement, et quelquesIxodes trianguliceps). 327 souches provenaient de tiques prélevées dans 12 territoires administratifs majeurs de Russie, les autres venant de République tchèque, Estonie, Lituanie, Biélorussie, Moldavie, Ukraine et Kirghizie. Quelques souches provenant de petits rongeurs, de malades humains ont été également étudiées. La distribution géographique des différentes espèces deBorreliaa été étudiée, et l'étude révèle aussi que :
9,3 % des 365 isolats étaient en fait des mélanges de différentes espèces de Borrélies, les co-infections sont donc assez fréquentes ;
deux variants deB. garinii utilisaientB. afzelii comme vecteur dans les territoires étudiés ;
le variant « B. garinii-NT29 » (le plus commun) était associé au vecteur I. persulcatus ;
B. burgdorferi sensu stricto,B. valaisiana etB. lusitaniae n'ont été isolées qu'à partir deI. ricinus et toujours dans la partie occidentale du territoire étudié, et jamais dans aucune des 327 souches isolées en Russie oùI. persulcatus est le vecteur le plus largement distribué.
Les borrélies augmentent les chances de survie des tiquesIxodes ricinus infectées en augmentant leur masse graisseuse[49].
Les borrélies devraient être attaquées par les globules blancs, mais elles leur échappent parfois facilement. Elles peuvent aussi être tuées par desvirus bactériophages, dits « phages », qui sont encore mal connus mais qui ont pu être observés et photographiés[50].
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