Boris Klement Robert Maria Pie Louis Stanislav Ksavie Sakskoburggotski (enfrançais Boris Clément Robert Marie Pie Louis Stanislas Xavier de Saxe-Cobourg-Gotha)
BorisIII, né le àSofia (Bulgarie) et mort le dans la même ville, de son nom bulgare completБорис Клемент Роберт Мария Пий Луи Станислав Ксавие Сакскобургготски[1] (Boris Klement Robert Maria Pie Louis Stanislav Ksavie Sakskoburggotski, enfrançais Boris Clément Robert Marie Pie Louis Stanislas Xavier de Saxe-Cobourg-Gotha), a étéroi desBulgares du au.
Fils aîné du roiFerdinandIer, il accède prématurément au trône après l’abdication de son père qui venait d’entraîner laBulgarie dans le camp des vaincus de laPremière Guerre mondiale. Assumant ces erreurs, il reprend à l’âge de vingt-quatre ans un État ruiné au bord du chaos, meurtri par les rivalités entre extrémistes de gauche et de droite. Malgré ses efforts pour stabiliser la vie politique de son pays, Boris est impuissant face à l'autoritarisme de ses présidents du Conseil,Aleksandăr Stamboliski puisAleksandăr Cankov.
Philanthrope, Boris effectue de nombreux voyages au sein de son pays pour venir en aide à ses sujets les plus démunis. Il se rend également de nombreuses fois à l’étranger pour tenter de rétablir la considération que son pays avait perdue. C’est au cours d’un de ces voyages qu’il rencontre la princesseJeanne d'Italie, qu’il épouse en1930.
En1934, la dépression économique et les luttes politiques entraînent uncoup d’État militaire organisé par les officiers duZveno qui instaurent un régime dictatorial et prévoient l’instauration d’une république. Boris, qui jusque-là est resté à l’écart du pouvoir, parvient, à l’aide de manœuvre politique, à chasser en1935 les conspirateurs. Cependant, pour éviter une nouvelle crise politique il instaure, pour une période indéterminée, une dictature personnelle.
Hostile aux méthodes brutales des régimestotalitaires, Boris essaie vainement de se rapprocher des démocraties occidentales qui, indifférentes, le poussent à poursuivre ses relations commerciales avec l'Allemagne nazie et rendent son pays dépendant de cette dernière. Toutefois, en tant que pacifiste convaincu, Boris tente de garder tout au long des événements de laSeconde Guerre mondiale une position neutre ; mais en1941 l’armée allemande, stationnée à la frontière bulgare, contraint Boris à adhérer auPacte tripartite. Malgré cette alliance officielle, il refuse toujours de participer militairement au conflit et, partageant le sentiment populaire, refuse de déporter les juifs bulgares. Deux semaines après une entrevue avecAdolf Hitler, il meurt de façon inopinée et mystérieuse en 1943. Son filsSiméonII lui succède.
Le, à cinq heures et dix-huit minutes du matin, le prince régnant de BulgarieFerdinand Ier et son épouseMarie-Louise de Bourbon-Parme annoncent par cent-un coups de canon la naissance de leur premier fils, Boris, prince de Tarnovo[2].
Cette naissance arrive au milieu du contexte politique complexe que traverse, à l'époque, la Bulgarie : celle-ci est alors une jeuneprincipautéorthodoxe, vassale de l'Empire ottomanmusulman, ayant pour souverains, Ferdinand et Marie-Louise, deux ferventscatholiques. La religion tient donc une importance primordiale dans la région[réf. nécessaire].
La Bulgarie fait également office de poudrière car ses relations avec laRussie orthodoxe sont très mauvaises ; les tsars russes n'aiment pas Ferdinand, fils d'unprince allemand allié à l'Angleterre et d'une mère française (Clémentine d'Orléans), officier autrichien de surcroît, qui fut élu prince par une assemblée bulgare anti-russe[3].
Aussi, bien que son fils Boris ait déjà reçu le baptême catholique, Ferdinand songe sérieusement à le convertir à l'orthodoxie. Un baptême dans cette religion lui permettrait de se rapprocher davantage de son peuple[4].
Néanmoins, une telle décision n'est pas sans risque car l'Europe catholique est sous le choc en apprenant la nouvelle. Le papeLéon XIII menace le prince des Bulgares d'excommunication, l'empereurFrançois-Joseph d'Autriche de guerre et la très pieuse Marie-Louise s'y oppose catégoriquement[5]. Ferdinand hésite donc encore un peu, mais la raison d'État l'emporte. Le, Boris est converti au rite orthodoxe et le tsarNicolas II (qui a succédé àAlexandreIII et a épousé une petite-fille de la reineVictoria du Royaume-Uni) devient son parrain[5]. Ferdinand est alors excommunié, et son épouse, outrée et honteuse, décide de partir quelque temps avec leur second fils, le princeCyrille, baptisé catholique[5].
Le, au lendemain de la naissance de sa seconde sœur, la princesseNadejda, Boris perd sa mère[6]. Son éducation est alors confiée à sa grand-mère paternelle, la princesseClémentine d'Orléans, fille du roi des FrançaisLouis-Philippe Ier, âgée de quatre-vingt-deux ans. Cependant, celle-ci meurt à son tour le. Son père décide alors de prendre en main son éducation[7].
Il désigne comme précepteur un pédagoguesuisse romand, choisit personnellement tous ses professeurs[8] et exige une instruction des plus strictes. Le jeune Boris étudie avec ferveur toutes les disciplines enseignées dans les écoles bulgares et apprend en complément le français et l'allemand qu’il maîtrise avec une grande aisance ; il apprend par la suite, l'italien, l'anglais et même l'albanais[9]. De nombreux officiers viennent aussi au palais pour parfaire son éducation militaire[réf. nécessaire].
Son père l'initie surtout aux sciences de la nature. Pris de passion, Boris ne cesse de les étudier tout au long de sa vie, devenant un véritable expert. Ferdinand lui transmet également sa passion pour la mécanique et, tout particulièrement, celle deslocomotives[10]. En, alors qu'il n'a que quinze ans, Boris passe les examens pour être mécanicien des chemins de fer[11].
Toutefois, la vie au palais n'est pas facile pour le jeune Boris. Son père, ou plutôt le « monarque »[12] comme les enfants l'appellent entre eux, est un homme autoritaire, compliqué et violent[12]. D'une attitude hautaine et méprisante, il lui arrive souvent, par le biais de remarques sarcastiques, de pousser au bord des larmes les membres de sa famille. Hors des cérémonies et réceptions officielles, Boris n'est en contact ni avec le monde, ni avec le peuple bulgare. La vie au palais, que le jeune prince surnomme la « prison »[13], n'est donc ni simple, ni facile, ni gaie[12].
Le, profitant d'une crise politique de l'Empire ottoman, Ferdinand prend le titre detsar et déclare l'entière indépendance de la Bulgarie[14].
À partir de 1911, Boris parvient à s'émanciper de l'autorité paternelle grâce à des voyages à l'étranger où il fait enfin connaissance avec le monde et les hommes[15]. Ces voyages marquent également le début de son entrée sur la scène internationale. Ainsi, la même année, il se rend au couronnement de son cousinGeorge V àLondres et aux funérailles de la reineMaria-Pia de Portugal àTurin, où il prend contact avec le monde des têtes couronnées et chefs d'État[16]. Le, en visite chez son parrain le tsarNicolas II, Boris est témoin du meurtre duPremier ministre russePiotr Stolypine, assassiné sous ses yeux à l'opéra deKiev[17].
En, Boris fête ses dix-huit ans et devient majeur. Jusque-là, il pratiquait les deux religions, catholique et orthodoxe ; mais désormais il n'est plus qu'orthodoxe. Ce même mois, il devient également capitaine et chef de compagnie du6e régiment[18]. Neuf mois plus tard débute lapremière guerre des Balkans oùSerbes,Grecs,Monténégrins etBulgares s'unissent contre l'Empire ottoman pour libérer laMacédoine. Attaché à l'état-major, Boris n'hésite pas à rejoindre les soldats en premières lignes[19].
Sortis victorieux de la guerre, la Bulgarie et ses alliés n'arrivent pas à s'entendre sur le partage. La Bulgarie, exaspérée, décide alors d'attaquer ses anciens alliés en 1913, provoquant ainsi ladeuxième guerre balkanique, qui se conclut par un véritable désastre, les armées bulgares se faisant décimer par lecholéra. Boris, témoin des horreurs de cette débâcle, devient par la suite un pacifiste convaincu[20].
À la suite de ce fiasco militaire, l'abdication de Ferdinand paraît inévitable. On pousse Boris à quitter le palais, à se réfugier au sein de l'armée pour se désolidariser et se préparer à monter sur le trône. Cependant, ce dernier refuse et réplique :« Je ne tiens pas à régner, si le monarque s'en va, je partirai avec lui »[21]. Ferdinand n'abdique pas et Boris est envoyé à l'École supérieure de guerre, où il est traité au même titre que les autres élèves officiers[22].
En 1915, Ferdinand, dans un esprit de revanche, décide d'engager la Bulgarie dans laPremière Guerre mondiale auprès desempires centraux. Boris émet une protestation contre cette décision. Impitoyable, le roi fait mettre le jeune prince aux arrêts pendant quelques jours[23] ; puis le prince héritier est nommé officier en mission spéciale auprès du quartier général de l'armée bulgare. Sa mission consiste, en grande partie, à veiller à la bonne exécution des opérations et à la bonne coordination des différents fronts. À ce poste, il se rend régulièrement dans les tranchées où il se lie d'amitié avec de nombreux officiers, pratiquant la plus franche et la plus aimable camaraderie[24].
la Seconde Guerre balkanique, qui aboutit autraité de Bucarest, où la Bulgarie doit céder de nombreux territoires à ses voisins et leur payer d'importantes réparations[25] ;
la Première Guerre mondiale, qui se solde de la même façon lors dutraité de Neuilly, avec la perte de divers territoires — notamment l'accès à lamer Égée — et de fortes indemnités à verser aux pays vainqueurs[26].
La population gronde et les vainqueurs exigent l'abdication de Ferdinand. Le monarque s'exécute en faveur de son fils et s'exile avec ses autres enfants àCobourg, sa ville natale[27]. C'est ainsi que Boris accède le au trône en prenant le nom deBorisIII[28].
Le règne du nouveau tsar commence sous de sombres auspices. Isolé de sa famille, il ne revoit ses deux sœurs qu'à la fin de 1921[29], et son frèreCyrille en 1926[30]. Les mauvaises récoltes de 1917 et de 1918, les rationnements et l'occupation étrangère[31] provoquent la poussée des partis d'extrême gauche : l'Union agrarienne et leParti communiste[réf. nécessaire]. Pourtant, de tous les États vaincus en 1918, seule la Bulgarie demeure une royauté[32].
Timbre bulgare émis en 1919 pour le premier anniversaire du couronnement du roiBorisIII.
Le, un an après l'avènement deBorisIII, les élections législatives amènent au pouvoir l'Union agrarienne, forçant le tsar à nommer son dirigeant,Aleksandăr Stamboliski, au poste de président du Conseil. Très populaire dans la paysannerie, encore largement dominante à l'époque, le Premier ministre affiche clairement son hostilité à la monarchie[33]. Rapidement, le président du Conseil installe unedictature paysanne[34],[35] et s'attire l'hostilité des classes moyennes et des militaires[36].
À force de côtoyer Stamboliski, le tsar noue avec lui un véritable« sentiment de respect »[33]. Il tente de le raisonner en le prévenant que ses exubérances ne font qu'excéder la population aisée, mais ce dernier lui rappelle que le roi règne mais ne gouverne pas[33]. Il confie alors à ses proches :« Je me trouve dans la situation du propriétaire d'un magasin de verrerie, où l'on a introduit un éléphant. Je dois sans répit déblayer les débris et supporter les dégâts »[37].
Finalement, le, un putsch militaire est perpétré et parvient à renverser le gouvernement agrarien. Un des protagonistes ducoup d'État bulgare de 1923,Aleksandăr Cankov, met alors en place un nouveau gouvernement autoritaire[38].
Avec ce gouvernement, débute une période de très grande instabilité dans le pays. Le, uneinsurrection d'obédience communiste échoue ; commence alors une « terreur blanche » où terrorisme et contre-terrorisme font environ vingt mille victimes[39]. On décompte en 1924, deux cents assassinats politiques[40]. Selon la légende, en 1925, l'intellectuel anarchiste Georges Chéïtanov est exécuté et sa tête exposée sur un plateau[41].
Le,BorisIII et quatre de ses compagnons rentrent d'une excursion de chasse au col d'Arabakonak, près de la petite ville d'Orhanié. Alors qu'ils sont sur le chemin du retour, de nombreux coups de fusils se font entendre, son garde-chasse et le préparateur du Musée d'histoire naturelle sont abattus, une balle brise le pare-brise et blesse le chauffeur. Boris tente alors de reprendre le contrôle du véhicule, mais celui-ci s'écrase contre un poteau électrique. Par chance, un autocar passe ; le roi et ses deux amis encore en vie arrivent à s'enfuir[43]. Le même jour, l'ancien général et députéKonstantin Georgiev est assassiné[43].
Trois jours plus tard, ont lieu dans lacathédrale Sainte-Nédélia deSofia les funérailles du général assassiné, auxquelles de nombreux dirigeants bulgares doivent assister. Les communistes et les anarchistes en profitent alors pour poser des bombes dans la cathédrale[44]. Cette fois-ci, l'attentat viseBorisIII et le gouvernement. L'explosion a lieu au milieu de la cérémonie et fait cent vingt huit victimes[45] dont le maire de Sofia, onze généraux, vingt-cinq officiers supérieurs, le chef de la police et une classe de jeunes filles.BorisIII qui devait y assister, arrive en retard, du fait qu'il se trouvait déjà à l'enterrement de son ami chasseur. L'attentat, en plus d'avoir raté sa cible, est suivi d'une importante vague de répressions de la part des autorités qui arrêtent trois mille cent quatre-vingt quatorze personnes, dont deux cent soixante huit sont condamnées à mort[46].
Ces complots et ces attentats font partie du risque du « métier », comme l'affirmeBorisIII. Constamment sur ses gardes, il confie en 1927 à ses proches, être persuadé que six individus payés parMoscou,Prague etBelgrade, sont chargés de le tuer avant le[47].
Depuis son intronisation, Boris a toujours été écarté des affaires de l'État. Il consacre donc la plupart de son temps à ses loisirs tels que compléter sa collection de fleurs sauvages et de papillons ou la mécanique (particulièrement celle deslocomotives)[40]. Il se met aussi à voyager dans le pays. Il visite villes, villages, usines, exploitations, dort et mange dans les foyers des paysans. Boris noue alors un lien très fort avec la population bulgare[34].
D'ailleurs, Boris s'illustre à plusieurs reprises dans des faits divers. Lors de l'été 1931, alors que lamer Noire se déchaîne, le roi aux commandes de son canot à moteur, secourt et sauve six personnes de la noyade[48]. Pendant l'automne 1934, alors qu'il part se reposer aux bords de la mer Noire, le train de Boris s'arrête. Inquiet, il accourt vers la machine et trouve le cheminot gravement brûlé par le graisseur automatique des roues qui a pris feu. Homme de sang-froid, il parvient à calmer les passagers paniqués et prend les commandes du train qu'il conduit jusqu'au pont le plus proche. Là, il éteint le feu avec du sable humide, soigne le cheminot et conduit lui-même le train jusqu'au terminus, la ville deVarna[49].
En 1926, Boris se rend à l'étranger pour la première fois de son règne et choisit comme premières destinations laSuisse et l'Italie. Jusqu'en 1930, il sillonne l'Europe avec sa sœur la princesseEudoxie mais, ayant la crainte d'être victime d'un attentat, il voyage sous le pseudonyme de « comte Stanislas Rilski de Varsovie »[50], ne redevenantBorisIII que lors des rencontres officielles. Ainsi, il visite laSociété des Nations en Suisse, rend visite au président françaisGaston Doumergue, au président allemandPaul von Hindenburg, au roi des BelgesAlbert Ier, au roi d'ItalieVictor-Emmanuel III et chasse avec le roi du Royaume-UniGeorge V. Il rencontre égalementAlbert Einstein et le philosopheHenri Bergson[51].
Lors de sa première rencontre à Rome avec leDuceBenito Mussolini, Boris lui tient les propos suivants :« Je vous admire d'avoir réussi à revigorer, réorganiser l'Italie, mais une dictature, un régime totalitaire ne peuvent être que transitoires. Souvenez-vous du mot de Bismarck : on peut tout faire avec des baïonnettes, sauf s'asseoir dessus. Je vous admirerai bien davantage si vous réussissez à en sortir, quand il le faudra, à rentrer dans la légalité »[52].
En 1927, âgé de plus de trente ans, Boris n'est toujours pas marié. EnEurope et enAmérique de nombreuses rumeurs circulent au sujet du choix de la future reine. Finalement, au bout de trois ans de recherche dans les nombreuses cours d'Europe, Boris rencontre l'amour[53] en la personne de la princesseJeanne d'Italie, troisième fille du roiVictor-Emmanuel III et d'Hélène de Monténégro. En janvier 1930, après le mariage du prince héritierHumbert d'Italie, Boris demande la main de Jeanne au roi[52].
La religion du baptême du futur prince héritier pose cependant problème. En effet, selon la Constitution bulgare, l'héritier du trône doit obligatoirement appartenir à l'Église orthodoxe. Mais pour le papePie XI, il est hors de question de bénir ce mariage si toute la progéniture n'est pas baptisée catholique ; pire encore, Jeanne risque l'excommunication. Mais grâce aunonce apostolique enBulgarie(en), Angelo Roncalli (le futur papeJean XXIII), Boris arrive à un accord avec le pape[54].
Le, le mariage catholique est célébré àAssise, suivi de celui orthodoxe, le, àSofia. Le couple a par la suite deux enfants :
en 1957 avec le prince Karl zu Leiningen, dont deux enfants ;
en 1969 avec Bronislaw Chrobok, dont deux enfants.
Siméon II de Bulgarie, né le à Sofia, roi des Bulgares (1943-1946), expulsé du pays le, en exil pendant plus de quarante ans à Madrid, rentré en Bulgarie en 2001, peu avant la victoire de son parti aux élections et sa nomination au poste de ministre-président sous le nom de Simeon Sakskoburggotski[réf. souhaitée].
Le couple royal décide d'un commun accord et contre toute attente de baptiser ses deux enfants selon le rite orthodoxe. LeVatican proteste et déclare :« Sa Majesté a signé une promesse pour baptiser ses enfants dans le Catholicisme. S'il n'accomplit pas cet engagement, il devra en répondre devant sa propre conscience »[55]. Cependant, Jeanne n'est pas excommuniée[réf. nécessaire].
La Bulgarie vit une période difficile. Si la situation intérieure s'est améliorée (avec l'arrêt des attentats), elle doit désormais faire face aux problèmes économiques liés à laGrande Dépression. La production baisse de 40 % et en deux ans le nombre de chômeurs passe à deux cent mille sur une population de sept millions[56]. Le gouvernement élu en 1931, le bloc populaire, déçoit énormément par son inefficacité à redresser la situation[57]. De plus, les élections municipales de 1932 donnent aux communistes la capitale,Sofia. Néanmoins le conseil municipal est rapidement dissout par le gouvernement[58].
La situation empire de jour en jour. Un groupe d'intellectuels et de militaires, le « Zveno », décide d'effectuer un coup d’État. Le, les colonelsDamian Veltchev etKimon Georgiev passent à l'action et Boris est contraint d'accepter le nouveau gouvernement. Ces derniers instaurent unedictature corporatiste qui redresse rapidement le pays, mais se montrent fortement hostiles à la monarchie et prévoient l'instauration d'une république[59].
Boris décide alors de prendre les choses en main. Le, huit mois après la prise du pouvoir parKimon Georgiev, le tsar charge le généralPentcho Zlatev de« chasser les républicains »[60] et de former un nouveau gouvernement. Boris, qui est jusqu'alors resté effacé de la vie politique du pays, prend lui-même les rênes du pouvoir[61].
Boris garde, dans un premier temps, les bases instaurées par le gouvernement deGeorgiev. Le nouveau gouvernement est désormais composé de trois généraux, de trois membres des principaux partis interdits (agrariens, démocrates et sgovor, « entente ») et de trois civils[61].
Le tsar écarte progressivement les militaires du pouvoir, renforce son pouvoir personnel et instaure une monarchie absolue. Ce nouveau régime, le tsar le définit comme transitoire avec la dictature duZveno et le retour aurégime parlementaire classique[62].
À l'automne 1936, laliberté de la presse et ledroit de réunion politique sont rétablis, mais les partis restent interdits[63]. Aux élections municipales de 1937, il donne le droit de vote aux femmes mariées avec enfants[64]. En 1938, l'Assemblée nationale est enfin réhabilitée et des élections législatives ont lieu[65]. Même si l’Assemblée n'a pas de pouvoirs réels, Boris tient compte des tendances. Ainsi en novembre 1938, les députés refusent la confiance au gouvernement du Premier ministreGeorgi Kiosseivanov, et ce dernier est obligé de remanier son cabinet[65].
Par letraité de Neuilly, l'armée bulgare est réduite et, à de nombreuses reprises, le gouvernement demande la fin des limitations dans le domaine militaire. En 1935, une occasion favorable se présente enfin lorsque laTurquie, pour protéger ses détroits, renforce militairement laThrace occidentale. L'équilibre des forces de la région étant rompu, la Bulgarie prétexte vouloir se défendre d'une éventuelle attaque et les Grandes puissances acceptent[66]. La Bulgarie se tourne alors vers laFrance, leRoyaume-Uni et l'Allemagne pour renouveler son armement, mais seule cette dernière répond favorablement en proposant des offres intéressantes. Tout en acceptant, Boris, méfiant, se garde bien de signer un quelconque engagement militaire avec l'Allemagne[67].
Commercialement, la Bulgarie est devenue quasi-dépendante de l'Allemagne nazie. Cette dernière, cherchant un pays pouvant l'approvisionner en ressources alimentaires, voit en la Bulgarie une sorte de garde-manger. Dès lors, d'importants échanges commerciaux s'effectuent entre les deux pays : en 1939, 70 % des exportations bulgares sont à destination de l'Allemagne, contre seulement 3 % vers le Royaume-Uni et 1 % vers la France[68]. Malgré la prospérité croissante de la population, Boris craint de voir la Bulgarie passer sous l'hégémonie complète de l'Allemagne[65]. Il se tourne alors vers les démocraties occidentales[57].
Depuis 1935, Boris etGeorgi Kiosseivanov s'efforcent de nouer de bonnes relations avec les démocraties occidentales. Le tsar se rend ainsi de nombreuses fois enFrance et enAngleterre pour tenter de décrocher, en vain, des contrats commerciaux[69]. Lors d'un de ces voyages en Angleterre en août 1938, il propose son aide àNeville Chamberlain au sujet de lacrise des Sudètes ; Boris sait qu'Adolf Hitler éprouve de la sympathie pour lui et pourrait jouer un rôle intermédiaire dans l'affaire. Le tsar se rend alors enAllemagne où il a une entrevue secrète avec le Führer. Après cet entretien, il écrit à Chamberlain en le conseillant de prendre un contact direct avec Hitler et de lui céder lesSudètes[70],[71].
Boris n'est pas, pour autant, un homme facilement manipulable. En 1935, lorsque l'Italie subit des sanctions économiques de la part de laSDN, à la suite de l'invasion de l'Éthiopie, Boris n'hésite pas à soutenir cette décision.Mussolini lui rappelle alors que des liens de famille l'unissent à ladynastie italienne. Boris lui répond alors :« Je ne veux pas qu'on fasse de la politique en se servant de mes sentiments envers mes beaux-parents »[72].
Quant à ses relations diplomatiques avec les pays balkaniques, elles sont plutôt tendues. LaBulgarie a toujours refusé d'entrer dans l'« Entente balkanique » ; ce pacte regroupant laRoumanie, laYougoslavie, laTurquie et laGrèce, semble être créé dans le but d'étouffer l’irrédentisme bulgare. En adhérant à cette entente, la Bulgarie serait contrainte d'accepter unstatu quo lui faisant renoncerde facto à ses revendications territoriales sur ses voisins. Son refus alimente la méfiance de ces pays à son égard[66]. Paradoxalement, un pacte d'amitié entre la Bulgarie et la Yougoslavie est signé le[réf. nécessaire].
Aux premières heures de laSeconde Guerre mondiale, l'opinion publique bulgare balance entre le soutien à l'Allemagne qui promet de restituer les territoires perdus lors des précédentes guerres, et une sympathie pour le camp opposé aux puissances de l'Axe[74].BorisIII déclare en 1940 :« Mes généraux sont germanophiles, mes diplomates anglophiles ; la reine est italophile et mon peuple russophile. Je suis seul neutre en Bulgarie »[75].
En, les succès d'Adolf Hitler obligent Boris à remplacer son Premier ministre pro-occidental parBogdan Filov, un germanophile notoire[76]. Ce dernier, après une visite le auprès d'Hitler, annonce à Boris que laRoumanie est encline à leur rendre laDobroudja[77]. Ainsi, après des négociations, la Dobroudja du Sud est restituée à la Bulgarie le par lesaccords de Craiova. Boris envoie alors des remerciements àAdolf Hitler etMussolini, mais également à l'Union soviétique et l'Angleterre[77].
En, Mussolini inviteBorisIII à participer avec lui à l'invasion de la Grèce, permettant ainsi à la Bulgarie d'avoir accès à lamer Égée. Cependant, Boris refuse amicalement l'invitation[78]. De même, malgré sa pression sur le tsar, Hitler ne parvient pas, le, à faire adhérer la Bulgarie auPacte tripartite. Boris souhaite par tous les moyens rester neutre et, à l'invitation du Führer, il répond« pas maintenant »[78]. Cette attitude lui vaut le surnom de« renard rusé » de la part d'Hitler[77].
Inquiet de cette visite chez Hitler, l'Union soviétique propose le 19 novembre à Boris, un pacte bilatéral que le tsar refuse. Alarmé par cette nouvelle, les nazis lui réitèrent le Pacte tripartite le 21 novembre, suivi le 25 novembre par l'URSS, mais Boris souhaite gagner du temps et refuse amicalement toute proposition[79].
BorisIII (à gauche) en compagnie d'Adolf Hitler en 1943.
En,Adolf Hitler vient aiderMussolini après la débâcle de son armée en Grèce. Les troupes allemandes doivent passer par laRoumanie puis, de gré ou de force, par laBulgarie[79]. Boris est alors obligé de rejoindre lePacte tripartite.Bogdan Filov signe l'adhésion le et, le même jour, l'armée allemande pénètre sur le territoire bulgare[79].
Si Boris refuse de participer aux opérations militaires, les Allemands invitent, les 19 et 20 avril, les troupes bulgares à occuper à leur tour les territoires déjà conquis de laThrace et de laMacédoine. L'Allemagne, tout en réglant le problème de l'irrédentisme, octroie à la Bulgarie le rôle d'administrateur d'une grande partie desBalkans. Les Bulgares surnomment alors Boris « Le Réunificateur » (Цар Обединител)[80]. Cependant, il n'est pas disposé à envoyer des troupes pour combattre l'Union soviétique, bien que dans cette guerre, les destins de la Bulgarie et de l'Europe doivent être décidés. Non seulement il n'envoie pas de troupes régulières pour leFront de l'Est, mais refuse de permettre à une légion de bénévoles de le faire, bien que la légation allemande à Sofia ait reçu 1 500 demandes de jeunes bulgares voulant lutter contre lebolchevisme[81].
Le, la Bulgarie déclare, symboliquement, la guerre à l'Angleterre et auxÉtats-Unis, avec lesquels les risques d'affrontements militaires, compte tenu de la géographie, sont improbables[82].
Le, le gouvernement crée lesBrannik, une organisation de jeunesse inspirée desHitlerjugend[83]. Quatre jours auparavant, l'Assemblée nationale votait la « Loi sur la Sauvegarde de la nation », première mesure antisémite, touchant près de 50 000 juifs. Cette loi fait rapidement réagir la population qui s'y oppose ; jusque dans les années 1940, l'antisémitisme n'existe pas en Bulgarie[84]. La loi est cependant appliquée le[84].
En, Hitler demande au gouvernement bulgare de régler la « question juive ». Celui-ci crée, le, un commissariat aux affaires juives chargé, dans un premier temps, d'appliquer les restrictions : couvre-feu obligatoire, assignation à résidence, rations alimentaires réduites, port de l'étoile jaune ; puis dans un deuxième temps, d'organiser la déportation vers les camps. Pour cela, le gouvernement nazi envoie un expert, leSSTheodor Dannecker[85].
Ce dernier se lance dans la déportation des 11 363 juifs habitant les territoires occupés par les Bulgares en Thrace et Macédoine. Puis, une fois la tâche terminée, il se lance contre ceux de Bulgarie. La population, indignée, proteste vigoureusement. De nombreuses personnalités se mobilisent telles que le vice-président du ParlementDimităr Pešev et le métropoliteStéphane de Sofia qui symbolisent le mouvement. Boris cède une première fois[85].
En, le gouvernement projette une deuxième tentative de déportation. La population s’y oppose une fois de plus et une grande manifestation est organisée, rassemblant près de dix mille personnes devant le palais du tsar[85]. Boris, en phase avec le sentiment populaire, assume la non-déportation des juifs, prétextant auFührer furieux« le grand besoin de « ses » juifs pour l'entretien des rues »[86]. Les juifs de Bulgarie échappent ainsi auxcamps de concentration[réf. nécessaire].
La tombe du roiBorisIII, àRila.Sculpture sur bois faite par des habitants du village de Osoi, région de Debar, portant l'inscription :Pour son roiBorisIII Libérateur, la Macédoine reconnaissante. Elle est placée du côté gauche de la tombe, à Rila.
En 1943, la guerre aborde un tournant décisif avec labataille de Stalingrad, le vent commence à tourner pour l'Allemagne. Boris s'en rend compte et, souhaitant éviter la même erreur que son père vingt-cinq ans plus tôt, contacte en secret des diplomates américains[87],[28].
Adolf Hitler, au courant de ces rumeurs, le convoque le dans son quartier général sur le front de l'Est, situé près de Rastenbourg enPrusse-Orientale[87]. La rencontre est des plus houleuses : lechancelier lui rappelle tout ce qu'il doit à l'Allemagne, sans qu'en retour rien n'ait encore eu lieu. Il est vrai que, depuis le début de la guerre, la Bulgarie n'a pas beaucoup participé au conflit. Son unique aide fut l'envoi en d'un convoi sanitaire sur le front de l'Est[83].
Il ordonne donc à Boris d'engager ses troupes dans un nouveau front au sud-ouest, dans l'espoir d'une dispersion des efforts soviétiques. Le roi refuse et sort du bureau, trois quarts d'heure plus tard, totalement abattu[87]. Il regagne, le lendemain,Sofia grâce à un avion allemand. Neuf jours après cette entrevue, le 23 août, alors qu'il ne présentait jusque-là aucun symptôme de maladie, Boris est subitement pris de violents vomissements et succombe le, à l'âge de quarante-neuf ans[88].
Ce décès « opportun » reste aujourd'hui encore très controversé. Certains n'hésitent pas à accuser les services secrets allemands d'avoir fait empoisonner le souverain récalcitrant, dans l'avion qui le ramenait en Bulgarie[89].
Même son frère, le prince Cyrille, déclare lors de son pseudo-procès en 1945 (accusé par les communistes de collaboration et de trahison) que Boris aurait été empoisonné lors de son retour en avion le 14 août ; le pilote aurait alors effectué un vol à très haute altitude, forçant le souverain à inhaler un poison toxique contenu dans le masque à gaz[90].
Cependant, l'autopsie de l'époque indique queBorisIII, atteint d'unethrombose de l'artère coronaire gauche[88], est mort des suites d'uneattaque cardiaque due au stress qu'il endurait ces derniers temps[91].
Une sculpture sur bois est placée sur le côté gauche de sa tombe dans lemonastère de Rila, effectué le par les habitants du village de Osoi, région de Debar. La sculpture sur bois porte l'inscription suivante :
« Pour son roiBorisIII Libérateur, la Macédoine reconnaissante[réf. nécessaire]. »
Deux jours auparavant,une insurrection a amené au pouvoir leFront de la Patrie, une coalition dominée par lescommunistes et leZveno. Ce nouveau gouvernement, dirigé par l'ancien Premier ministre républicainKimon Georgiev, organise une épuration sauvage où près de 16 000 personnes[39] sont exécutées sans procès. Puis, en, débute une série de procès au terme desquels sont prononcées 2 730 condamnations à mort. Parmi ces exécutions figurent de nombreux notables tels que les trois régents, 22 anciens ministres, 67 députés, 8 conseillers du roi et 47 officiers supérieurs. Ces épurations effectuées, le gouvernement peut enfin s'attaquer à la famille royale[46].
Ainsi, le, les autorités provoquent volontairement la famille royale en exhumant le corps deBorisIII dumonastère de Rila en le transportant dans un endroit secret[93]. Puis, le, elles s'en prennent directement à la monarchie, en organisant unréférendum truqué qui l'abolit et force toute la famille royale à s’exiler, d'abord enÉgypte puis enEspagne[92].
Cependant, malgré tous les efforts employés par les communistes pour dénigrer le tsar[N 1], la population bulgare a toujours gardé une image positive deBorisIII[réf. nécessaire]. Après la chute du communisme, la tombe deBorisIII a été retrouvée dans les jardins dupalais de Vrana[93] et, en, à l'occasion du cinquantenaire de son décès, son cœur a été ramené aumonastère de Rila où il est de nouveau conservé[94].
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