C'est l'une des plus anciennes danses traditionnelles indiennes, liée aux pratiques religieuses dès son origine. Elle est l'une des huit formes de danse reconnues par laSangeet Natak Akademi(en) (Académie indienne des la musique, la danse et le théâtre). Elle exprime les thèmes religieux et les idées spirituelles de l'Inde du Sud, en particulier leshivaïsme, levishnouisme et leshaktisme.
Il existe différents styles de bharata natyam. Le bharata natyam est souvent une danse de soliste dont l'apprentissage est très difficile et très long. Souvent enseignée aujourd'hui aux jeunes filles, elle est restée ouverte aux garçons.
Il y a 3 positions du corps (sthana ousthanaka) en bharatanatyam, debout, semi-assise, et totalement assise.
Samam ousamapadam. Les pieds sont joints, la danseuse se tient debout, droite.
Araimandi,aramandi,ardhamandi ouardhamandala. C'est la position la plus caractéristique du bharatanatyam. Les pieds sont ouverts, talons joints, dans un angle proche de 180°. Les genoux sont pliés, les jambes formant un losange, et le dos est droit. La danseuse soit dans une position semi-assise.
Muzhumandi. Les jambes sont totalement pliées et ouvertes, formant un angle proche de 180°. La danseuse est quasiment assise.
Une quatrième posture,alidha, est parfois considérée, lorsque la jambe gauche est pliée comme en positionaraimandi, et la jambe droite est tendue, le talon contre le sol et le reste du pied et les orteils levés. (La position inverse, avec jambe droite pliée et jambe gauche tendue, estpratyalidha)[1].
Les mains effectuent différentsmudras. Leur orientation est également codifiées en quatre positions :uttana, paume vers le haut,adhomukha, paume vers le sol,unmukha, paume vers soi,paranmukha, paume à l'opposé de soi[2].
Les adavus sont les pas de base du bharatanatyam. Ils seraient inspirés des karanas, les 108 positions de base de la danse décrits dans le traitéNatyashastra.
Un adavu est caractérisé parsthanaka, la position du corps lors de sa réalisation,chari, le mouvement de la jambe et du pied, ethasta, le geste de la main. Chaque adavu a différentes variations, parfois caractérisée par le sollukatu, c'est-à-dire les syllabes rythmiques, sur lequel la variation est effectuée.
Une combinaison d'adavu s'appellekorvai, et son exécution (généralement très rapide) s'appellejati. Unjati se conclue par unteermanam, un adavu particulier ou la danseuse va faire passer son bras derrière elle, la tête tournée vers lui, puis le ramener par-dessus sa tête devant elle, vers le bas.
La danseuse est en positionaraimandi, jambes pliées formant un losange. Elle fait remonter son pied vers sa cuisse, sans lever le genou, et frappe ensuite ce pied sur le sol. Toute la plante du pied doit frapper le sol. Il y a six[3] ou huit[4] variations detattadavu. Les mains sont généralement placées dans le dos, au bas des reins, les coudes formant un losange de part et d'autre.
Variation
Sollukatu
Description
1
taiya tai taiya tai taiya tai taiya tai
Les jambes alternent frappent à droite et gauche
2
taiya tai taiya tai taiya tai taiya tai
Les jambes alternent deux frappes à droite, deux à gauche.
3
taiya taiya tai taiya taiya tai
Trois frappes à droite, un temps, trois frappes à gauche.
4
taiya taiya tai taiya taiya tai
Quatre frappes à droite, quatre frappes à gauche.
5
taiya taiya tai taiya taiya tai
Cinq frappes à droite (2 séparée d'un temps, 3 séparée d'un demi-temps), 1 demi-temps, puis idem à gauche.
6
taiya tai taiya tai taiya tai taiya tai
Six frappes à droite (3 frappes séparée d'un demi-temps, 1 demi temps, à nouveau 3 frappes séparées d'un demi-temps, 1 demi temps), idem à gauche.
Le nattadavu est caractérisé par l'utilisation de la position de la jambeancita, la jambe est tendue, le talon contre le sol et le reste du pied et les orteils levés.
Comme pour les autres adavus, différents variations existent[5]. Ci-dessous la description des deux variations les plus simples[6].
Variation
Sollukatu
Description
1
tai yum tat tha tai yum ta ha
Cette variation commence en position araimandi, les bras tendus de part et d'autre, les mains en mudratripataka, paumes vers le bas. La jambe droite va se placer en ancita, frappant le sol du talon. Simultanément, le visage se tourne vers la droite et la paume droite se tourne vers le haut.
Puis on revient en position de base (pied, main et visage), en frappant cette fois le sol avec toute la plante de pied.Le mouvement similaire est effectué à gauche.
2
tai yum tat tha tai yum ta ha
Pareil que le 1, sauf que deux mouvements sont effectués à droite puis deux mouvements à gauche.
Un spectacle typique comprend plusieurs phases, le tout étant appelémargam, chemin[7]. Les phases sont différenciées selon leurs longueurs, leurs thèmes, et surtout selon qu'elles soient des morceaux de danse pure (nritta) ou avec une transmission des sentiments par l'expression du visage (abhinaya).
Une prière traditionnelle d'ouverture au dieuGanesha, qui écarte les obstacles. Elle comprend une courte partie d'abhinaya (expressions du visage). C'est une prière avec des fleurs (pushpa, पुष्पं, signifie fleurs en sanskrit). La prière dure environ 8 minutes, les deux premières consistant en des frappes de pieds en tenant les fleurs, puis les fleurs sont offertes à la divinitéNataraja (shiva dansant).
Une présentation dutala (rythme), suite desyllabes chantées par la danseuse.
Le reste de la prière comprend une séquence de danse pure (Nritta). Cette danse est entièrement dédiée au dieu Nataraja. Entièrement technique, elle représentel'ouverture : les postures et les mouvements de plus en plus complexes symbolisentl'épanouissement d'une fleur et de l'art.
C'est une danse technique, rapide et rythmée. Le rythme est scandé par le tambour. La danseuse montre ici sa dextérité dans le travail des pieds et la grâce des mouvements de son corps. Les pas (ou Jatis), composés d'adavus (enchaînements de mouvements) sont chorégraphiés en harmonie avec les notes (ousvara) sur une mélodie (appeléeraga). Le jathiswaram est composé de 5 ou 6 séquences rythmiques, séparées par un interlude de quelques pas plus lents et d'une pause.
Dans cette séquence d'une dizaine de minutes, la danse est accompagnée par un poème ou une chanson sur un thème dévotionnel ou amoureux. Ici le récit est chanté par la danseuse et pas par lenattuvanar (contrairement auvarnam). Cette danse parle souvent des dieux, racontant une histoire ou un récit épique.Dans le déroulement d'un récital, c'est la première danse narrative, développant l'abhinaya qui signifie l'expression du visage ou du corps.
Aussi appeléePada Varnam (à ne pas confondre avecTana Varnam). La pièce centrale du spectacle. C'est aussi la partie la plus longue qui montre les mouvements les plus complexes et les plus difficiles. Les positions des mains et du corps racontent une histoire, habituellement d'amour et de désir. La danseuse incarne un personnage denayika, héroïne romantique. Levarnam est généralement soit un dialogue entre lanayika et son amant, lenayaka, soit un dialogue entre lanayika et son amie, lasakhi (les personnages denayaka etsakhi étant imaginaires). Elle varie entre sa partie technique et sa partie d'abhinaya et dure de 20 à 30 minutes.
Les thèmes et le style de cette partie sont similaires à ceux du varnam, mais le padam est bien plus court (quelques minutes). C'est la partie la plus lyrique et la plus orientée vers l'expression des sentiments. La danseuse exprime certaines formes d'amour : dévotion à l'être suprême, amour maternel, amour des amants séparés puis réunis. Tout comme le shapdam ou lejavali, c'est une danse d'abhinaya.
Danse d'abhinaya pure ; parfois, elle se substitue au Padam, parfois seul le Padam est dansé, parfois les deux séquences sont dansées dans la composition totale.
Cette dernière partie d'une dizaine de minutes est une danse abstraite (ou danse pure,nritta, c'est-à-dire basée uniquement sur les mouvements et sansabhinaya), où la virtuosité de la musique trouve son parallèle dans le travail des pieds et les poses captivantes de la danseuse. C'est la danse la plus technique qui clôt le spectacle.
En sanscritthillana signifie « explosion de joie ».
La musique est dans le stylecarnatique du sud de l'Inde[8], considérée par certains comme une forme plus pure que celle de la musique du nord de l'Inde.
Les instruments utilisés dans l'ensemblecinna mêlyam (« petit ensemble ») accompagnant le bharata natyam sont lemridang (tambour), lenâgasvaram (un hautbois), la flûtevenu, leviolon et lavînâ (un instrument à cordes, luth indien)[9].
Initialement connue sous le nom desadhiraattam (tamoul : சதிராட்டம்), la danse classique indienne de bharatanatyam doit son nom actuel à E Krishna Iyer etRukmini Devi Arundale, qui ont contribué à renouveler cette danse, en l'épurant et en lui redonnant sa dimension spirituelle initiale. Le mot bharatha (bha-ra-tha) est composé de trois syllabes qui pourraient faire référence respectivement à trois mots :bhavam(l'expression du visage),ragam(la musique et le rythme) ettalam(rythme imprimé par la main ou par lekaruvi)[10],[11],[12].
Le motnatyamest un motTamoul pour la combinaison de mouvement, musique et théâtre, une façon de définir l'art de la danse[13].
Des références historiques au bharata natyam sont présentes également dans les épopées tamoules, telle que leSilappatikaram[10]. Le texte duSilappatikaram inclut l'histoire d'une danseuse nommée Madhavi et décrit la formation à cette danse. Les sculptures du temple Shiva de Kanchipuram, datées duVIe et Xe siècles de notre ère, suggèrent que le Bharatanatyam était un art de la performance bien développé vers le milieu du premier millénaire[14],[10],[17].
En 1910, laPrésidence de Madras, représentant lamonarchie britannique en Inde, interdit la danse dans les temples, portant un coup à la pratique traditionnelle du bharata natyam, toute professionnalisation du métier de danseuse devenant également peu recommandable pour la «bonne société» indienne[24].
Renouveau de la danse avant et après l'indépendance
Rukmini Devi Arundale (1904-1986) lance en 1936 laFondation Kalakshetra près deChennai, pour la sauvegarde de cet art millénaire. La pratique du bharata natyam se renouvelle d'autant plus facilement après l'indépendance de l'Inde en 1947, notamment grâce à l'intérêt des gouvernements indiens pour cet élément du patrimoine culturel du pays, grâce à l'action de la Fondation Kalakshetra, mais aussi par des artistes telle queBalasaraswati, issue d'une lignée de danseuse. Ce style de danse classique indienne devient le plus populaire en Inde. Il jouit également d'un grand soutien dans les communautés indiennes expatriées. Dans la seconde moitié duXXe siècle, le bharata natyam devient à la tradition de la danse indienne, ce qu'a été le ballet en occident[26]. Des danseuses et chorégraphes commeMrinalini Sarabhai jouent dans ce retour au premier plan un rôle majeur[27],[28].
Parmi les professeurs de bharata-natyam, on peut citer :Minakshisundaram Pillai,Chokkalingam Pillai,Ram Gopal.Raghunath Manet, « fils spirituel » de Ram Gopal, est apprécié pour avoir innové et introduit une certaine notion de chorégraphie dans le bharata-nâtyam. La danseuse et chorégraphe indienneChandralekha, admirée par la chorégraphe allemandePina Bausch, a insuflé également un certain renouvellement de ce type de danse[29],[30],[31]. D’autres artistes, commeMalavika Sarukkai ont été des interprètes de cette danse sur les scènes internationales[32],[33],[34],[35],[36].
Avant le revival, le bharatanatyam chez les hommes était également critiqué par les colonisateurs britanniques car correspondant à une pratique considérée féminine (la vision de l'homme oriental comme efféminée, et cette féminisation comme symbole de la prétendue infériorité des sociétés orientales étant une stigmatisation fréquente chez les colonisateurs occidentaux)[37]. Au moment durevival, les hommes eurent tendance à adopter une attitude masculine dans la danse[25].
↑abc etdBarbaraČurda,Enjeux identitaires, relationnels et esthétiques de la transmission de la danse Odissi en Inde : Le cas d'une école émergente à Bhubaneswar. (Thèse de doctorat en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives), Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand 2,, 362 p.(lire en ligne),p. 59 - 67
↑« Danse. Malavika Sarukkai et Mdhavi Mudgal au Rond-Point / Théâtre Renaud-Barrault. Deux Indiennes entre la terre et l'espace »,Le Monde,(lire en ligne).
↑BarbaraČurda,Enjeux identitaires, relationnels et esthétiques de la transmission de la danse Odissi en Inde : Le cas d'une école émergente à Bhubaneswar. (Thèse de doctorat en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives), Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand 2,, 362 p.(lire en ligne),p. 42