En 2022-2023, Benoît Peeters est titulaire de la chaire création artistique duCollège de France, qui accueille, pendant une année académique, une personnalité illustrant la création artistique contemporaine sous toutes ses formes. Il y donne une série de cours sur la « Poétique de la bande dessinée ».
En 1977, il découvre la gastronomie lors d'un repas au restaurant des frèresTroisgros, àRoanne. Alors qu'il est encore étudiant et est retourné vivre à Bruxelles, il s'essaie pendant un an comme cuisinier à domicile[1]. Il raconte cette expérience bien plus tard, dans la BDComme un chef, dessinée parAurélia Aurita.
Depuis le début de sa carrière, Benoît Peeters diversifie ses activités : romancier, biographe, scénariste, critique et théoricien de la bande dessinée, scénographe et éditeur. En 2009 paraît son ouvrageÉcrire l'image, un essai autobiographique. C'est à l'origine dans le cadre d'une habilitation à diriger les recherches (soutenue à la Sorbonne en 2007) qu'il a écrit ce travail de synthèse[6],[7].
Benoît Peeters rencontre pour la première foisHergé en 1977, à Bruxelles, dans le cadre d'un entretien qu'il réalise avec Patrice Hamel pour la revueMinuit. Outre son mémoire consacré auxBijoux de la Castafiore (qui paraît, remanié, sous forme de livre en 1984), il publie plusieurs petites études surTintin. LorsqueCarlsen etCasterman envisagent de réaliser une monographie sur Hergé, c'est le créateur de Tintin lui-même qui suggère aux éditeurs de confier la rédaction de l'ouvrage à Peeters[8]. Pour les besoins de ce livre (Le Monde d'Hergé), il s'entretient longuement avec le dessinateur, trois mois avant la mort de celui-ci.
Par la suite, Benoît Peeters travaille sur divers projets liés à Hergé, parfois en collaboration avecPierre Sterckx : la collectionL'Œuvre intégrale d'Hergé pour les éditionsRombaldi (1984-1989), l'édition en album de la dernière aventure inachevée de Tintin,Tintin et l'Alph-Art (1986), le film documentaireMonsieur Hergé (1988), les expositionsHergé dessinateur (1988-1989) etAu Tibet avec Tintin (1994), ou encore la soirée thématiqueTintin reporter pour la chaîne franco-allemandeArte (1995)[9].
En 2002, il fait paraître la biographieHergé, fils de Tintin, fruit de ses recherches et rencontres avec des témoins. L'ouvrage est considéré comme une référence[10].
Depuis 2015, il est l'un des trois auteurs des postfaces de la collectionHergé, le feuilleton intégral, éditée conjointement parMoulinsart et Casterman[11].
De son style comme scénariste de bande dessinée, les critiques signalent le goût de l'expérimentation et la capacité à renouveler son art d’un album à l’autre[12],[13]. C’est précisément ce qui fait le succès de la sérieLes Cités obscures, qu'il a créée en 1982 avec son ami le dessinateurFrançois Schuiten[14]. Elle n'obéit à aucune des règles classiques d'une série : les héros ne sont pas nécessairement les mêmes d'un récit à l'autre ; chaque histoire se déroule dans une ville différente, à une époque différente ; certains volumes sont en noir et blanc, d'autres en couleurs, parfois les deux. (LA TOUR). etc.[15]
Au-delà de la bande dessinée, l'univers desCités obscures s'inscrit dans d'autres supports et formes de narration. Ainsi,Mary la penchée se présente sous la forme d'un ouvrage illustré pour enfants, tandis queLe Guide des Cités ressemble à un véritable guide touristique. Au total, seize albums sont parus chezCasterman. La série est traduite dans une dizaine de langues[16] et ses auteurs ont reçu plusieurs prix, notamment le Grand Prix Manga, qui leur a été remis en février 2013 auJapan Media Arts Festival. C'est la première fois qu'un tel prix honore un auteur français et un auteur belge[17].
Toujours avec François Schuiten, Benoît Peeters a prolongé l'imaginaire desCités obscures à travers plusieurs expositions, un spectacle musical (L'Affaire Desombres, 1999-2000), unfaux documentaire (Le Dossier B, 1995)[18], et la scénographie d'un édifice conçu parVictor Horta à Bruxelles, lamaison Autrique.
Benoît Peeters a également travaillé avec d’autres dessinateurs[19], notammentAurélia Aurita,Frédéric Boilet,Anne Baltus etAlain Goffin. L'un de ses albums,Dolorès (scénario en collaboration avec François Schuiten, dessins d'Anne Baltus), a été porté à l'écran par le cinéaste allemand Michael Rösel[20].
Dans un autre genre, il a publié avec son ancienne compagne, la photographeMarie-Françoise Plissart, une série de récits photographiques d’un genre nouveau[21], publiés notamment auxÉditions de Minuit.
Benoît Peeters s'intéresse à tous les arts (visuels et littéraires en particulier) sans hiérarchie des genres, ce qui était encore mal perçu dans la société à l'époque de son adolescence[22]. Théoricien et critique, il est l’auteur de plusieursessais sur la bande dessinée. Outre celle d'Hergé, il a étudié les œuvres deTöpffer,Winsor McCay,Jirô Taniguchi etChris Ware.
En 2010, Benoît Peeters publie la première biographie du philosopheJacques Derrida[23], l'accompagnant d'un journal de bord doublé d'une réflexion sur le genre biographique,Trois ans avec Derrida, les carnets d'un biographe. Saluée par la critique[24],[25], cette biographie a notamment été traduite en anglais, allemand, espagnol, portugais, chinois et japonais. Il a également publié les biographies dePaul Valéry,Sándor Ferenczi etAlain Robbe-Grillet.
Son goût pour les biographies remonte à son adolescence, période pendant laquelle il fut un grand lecteur d'ouvrages évoquant la vie des peintres commeGauguin,Van Gogh ouCézanne[2].
Benoît Peeters a fait plusieurs incursions dans l'audiovisuel. Il a réalisé des documentaires sur la bande dessinée (entre autres certains épisodes de la sérieComix, en 2004, pour Arte[26]), le filmJacques Derrida, le courage de la pensée (en collaboration avecVirginie Linhart)[27], ou encore des entretiens filmés avecAlain Robbe-Grillet.
Pour le cinéma, il collabore en 1987 avec le cinéasteRaoul Ruiz sur le scénario du filmLa Chouette aveugle[28]. Il réalise lui-même quelques courts métrages, ainsi qu'un long-métrage,Le Dernier Plan, en 1999, dans lequel apparaissent notammentPierre Arditi,Erik Orsenna etBernard Pivot.
Directeur de la collection « Bibliothèque de Moulinsart » (consacrée à Hergé) pour Casterman de 1988 à 1996, il est conseiller éditorial chez le même éditeur depuis 2001[29]. Il anime aussi une maison d'édition indépendante,Les Impressions Nouvelles, qu'il a cofondée en 1985.
Soucieux de la situation des auteurs, il lance en 2015 les États généraux de la Bande dessinée, avecValérie Mangin etDenis Bajram[30].
Professeur associé auConservatoire national des arts et métiers de 2016 à 2019, Benoît Peeters y témoigne en 2018 de sa passion pour la cuisine, à travers un cycle de conférences[31]. Après avoir étéVisiting Professor à l'Université de Lancaster (Grande-Bretagne)[32], il a été élu à la chaire de création artistique du Collège de France pour l'année 2022-2023 ; il y enseigne laPoétique de la bande dessinée.
Le Monde d’Hergé,Casterman, 1983. Editions revues, 1991 et 2004.
Les Bijoux ravis. Une lecture moderne de Tintin,Magic Strip, 1984. Réédition sous le titreLireTintin. Les Bijoux ravis, Les Impressions nouvelles, 2007.
Case, planche, récit. Comment lire une bande dessinée, Casterman, 1991. Edition révisée, 1998. Réédition en poche sous le titreLire la bande dessinée,Flammarion, coll. « Champs », 2003.
Hitchcock, le travail du film, Les Impressions nouvelles, 1993.
Droit de regards, en collaboration avec Marie-Françoise Plissart (suivi d’une lecture deJacques Derrida), Minuit, 1985. Réédition, Les Impressions nouvelles, 2010.
Prague, en collaboration avec Marie-Françoise Plissart, Autrement, 1985.
Le Mauvais Œil, en collaboration avec Marie-Françoise Plissart, Minuit, 1986.
↑a etbCamille Labro, « Benoît Peeters, de la cuisine à la BD »,M, le magazine du Monde,(lire en ligne, consulté le)
↑a etbRaymond Larpin, « Les mondes de Peeters »,Tonnerre de bulles !,,p. 5
↑a etbJérôme Dupuis, « La bande cuisinée de Benoît Peeters »,L'Express,(lire en ligne)
↑Jean-Christophe Cambier, « Lectures pour tous »,Critique, n° 361-362, juin-juillet 1977,p. 620-629(ISSN0011-1600)
↑Jan Baetens,“La bibliothèque de Villers : un livre-tremplin”, in Benoit Peeters, La Bibliothèque de Villers, Bruxelles, Labor, 2004., Bruxelles, Labor,, 128 p.(ISBN978-2-8040-1897-9),p. 103-119