Benjamin McLane Spock, né le àNew Haven dans leConnecticut et mort le àLa Jolla enCalifornie, est unathlète et unpédiatreaméricain qui publia en 1946 le livreThe Common Sense Book of Baby and Child Care (traduit en 1952 sous le titreComment soigner et éduquer son enfant), qui devint unbest-seller mondial (en 1998 plus de 50 millions d'exemplaires traduits en 39 langues).
Il termina ses études à l'Université Columbia à New York, et sortit premier de sa promotion en1929. Il fit son internat depédiatrie au collège médical Weill Cornell à Manhattan, et son internat depsychiatrie à la clinique Payne Whitney de l'Université Cornell.
Pendant laSeconde Guerre mondiale, il fut affecté commepsychiatre dans le corps médical de réserve de l'US Navy, et termina avec le grade de lieutenant colonel.
Son message révolutionnaire pour les mères était« vous en savez bien plus que vous ne croyez ». Il a été le premier pédiatre à étudier lapsychanalyse pour essayer de comprendre les besoins des enfants et la dynamique familiale. Ses conseils d'éducation ont conduit plusieurs générations de parents à être plus souples et plus affectueux avec leurs enfants, en les considérant comme des personnes, à une époque où l'on pensait que l'éducation des enfants devait surtout porter sur l'apprentissage de la discipline, comme ne pas prendre dans ses bras un enfant qui pleure, pour éviter de le gâter.
Spock défendait des idées qui n'étaient pas courantes : avec le temps, ses livres contribuèrent à changer voire à retourner les opinions de ceux qui étaient les spécialistes de l'époque. Auparavant les experts avaient enseigné aux parents que les bébés avaient besoin d'apprendre à dormir avec des horaires réguliers, et que les prendre dans les bras à chaque fois qu'ils pleuraient ne ferait que leur apprendre à pleurer encore plus et à ne pas dormir de la nuit (conceptionbéhavioriste). On avait enseigné qu'il fallait nourrir les enfants à horaires réguliers, ne pas les prendre dans les bras, ni les embrasser ou les bercer, parce que cela ne les préparerait pas à devenir plus tard des individus forts et indépendants dans un monde difficile.
Plus tard, il écrivitDr Spock on Vietnam et une autobiographieSpock on Spock, dans laquelle il développe son attitude vis-à-vis de la vieillesse :Delay and deny (retarder et nier).
On l'accusa d'être le chef de file de l'éducation permissive, et d'être responsable de ses prétendues conséquences négatives. Norman Vincent Peale écrivit que« dans les années 1960, les États-Unis ont payé le prix de deux générations de parents qui ont suivi les conseils éducatifs du docteur Spock, en satisfaisant immédiatement les besoins des enfants ». Le vice-présidentSpiro Agnew le désignait comme le« père de la permissivité » et rendait ses principes responsables du développement du manque de respect de la loi chez les jeunes des années 1960.
Les partisans de Spock pensent que ces critiques révèlent une méconnaissance de ce qu'il a vraiment écrit. Lui-même, dans son autobiographie, signale qu'il n'a jamais été l'avocat de la permissivité, et il remarque que ces accusations ne sont apparues qu'à partir du moment où il s'est publiquement opposé à laguerre du Viêt Nam. Il considérait ces accusations comme des attaques personnelles, dont la nature et la motivation politique ne faisaient aucun doute.
Spock défendait la thèse que les bébés devaient dormir sur le ventre, dans son édition de 1958 :« ainsi s'il vomit, il ne pourra pas être étouffé par ses vomissures ». Cet avis a assez unanimement influencé ceux qui étaient chargés de donner des conseils d'éducation dans les années 1990. Plus tard, des études empiriques ont démontré que cette position augmentait au contraire les risques du syndrome demort subite du nourrisson. Les défenseurs de lamédecine fondée sur les faits ont pris cet exemple pour démontrer l'importance d'appuyer les conseils de santé sur des résultats statistiques. Un chercheur a même estimé que près de 50 000 morts subites de nourrissons en Europe, Australie et États-Unis auraient pu être évitées si on avait modifié ces conseils dans les années 1970, alors que de telles statistiques étaient disponibles.
En1957, il fut l'un des fondateurs du SANE (comité pour une saine politique nucléaire). Il fut un opposant actif à laguerre du Viêt Nam.
En1967, il allait être désigné comme candidat à la vice-présidence deMartin Luther King Jr lors de la conférence nationale pour une nouvelle politique à Chicago le jour duLabor Day. Mais, comme l'a écrit William F. Pepper dans son livreOrders to Kill (Meurtres sur commandes), la conférence fut sabotée par des provocateurs à l'ordre du gouvernement.
En1968, poursuivi avec quatre autres personnes,William Sloane Coffin,Marcus Raskin,Michael Ferber etMitchell Goodman, pour conspiration en vue d'aider à lutter contre laconscription, il est condamné à deux ans de prison et 5 000 dollars d'amende au cours du procès dit des« Boston Five ». Le jugement est annulé deux ans plus tard en appel.
En1972, il fut le candidat duPeople's party auxélections présidentielles avec dans son programme : la gratuité des soins médicaux, l'abrogation des lois sur les crimes sans victimes, la légalisation de l'avortement, de l'homosexualité, de la marijuana, un revenu familial minimum garanti et le retrait immédiat de toutes les troupes américaines de pays étrangers. Il obtint 0,1 % des votes populaires, Mac Govern 37,5 % et Nixon 60,7 %. Dans les années 1970 et 1980, il manifesta et fit des conférences contre l'armement nucléaire.
Il rejoignit la cause duféminisme très tôt : dans les éditions de son livre à partir de 1970, il emploie aussi bien « il » ou « elle » une fois sur deux lorsqu'il parle des bébés et des enfants. C'était peu courant à l'époque où beaucoup d'auteurs établis pensaient que le pronom « il » était correct pour parler aussi bien d'un homme que d'une femme.
En1972, Spock, son vice-président Julius Hobson, Linda Jenness (candidate présidente duSocialist Workers Party) et Andrew Pulley (candidat vice-président duSocialist Workers Party) écrivirent au major général Bert A. David, officier commandant de Fort Dix, lui demandant l'autorisation de tenir un meeting électoral et de distribuer du matériel de propagande. Appliquant les règlements de son administration, le général refusa, Spock et ses amis portèrent plainte devant la Cour suprême mais furent déboutés.
Contrairement à une rumeur publique, ce n'est pas son fils Michael (directeur à la retraite dumusée des enfants de Boston) qui s'est suicidé, mais son petit-fils Peter âgé de 22 ans le, en se jetant du toit de ce même musée de Boston. Il souffrait depuis longtemps de troubles mentaux.
Le docteur Spock est parfois confondu avecMr. Spock, le personnage de la série téléviséeStar Trek ;Gene Roddenberry, son créateur, assure qu'il s'agit là d'une simple coïncidence. On retrouve des allusions au docteur Spock dans des bandes dessinées, films ou séries TV américaines.
Dans le filmCaptain Fantastic (2016), deMatt Ross avecViggo Mortensen etGeorge MacKay, le personnage interprété par ce dernier, celui du fils aîné, évoque avec fougue un ouvrage de Spock, tandis qu'il ignore complètement l'existence du personnage de la série télévisée, n'ayant seulement jamais entendu parler deStar Trek.